Par un jugement n° 1301054 du 27 mars 2014, le tribunal administratif de Clermont-Ferrand a rejeté cette demande.
Procédure devant la Cour :
Par une requête et des mémoires, enregistrés les 6 juin 2014, 16 février 2015 et 25 mai 2016, dont le dernier n'a pas été communiqué, M.D..., représenté par Me C..., demande à la Cour :
1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Clermont-Ferrand du 27 mars 204 ;
2°) d'annuler l'arrêté du maire de la commune de Laveissière du 10 janvier 2013 ;
3°) d'enjoindre au maire de la commune de Laveissière de prononcer sa titularisation au grade de secrétaire de mairie ;
4°) de condamner la commune de Laveissière à lui verser une indemnité totale de 100 000 euros en réparation des préjudices qu'il a subis ;
5°) de mettre à la charge de la commune de Laveissière une somme de 2 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Il soutient que :
- sa requête d'appel n'est pas tardive ;
- le refus de le titulariser ne procède pas d'une insuffisance professionnelle, mais de la volonté de préserver un autre agent plus ancien ; il lui a été demandé d'être rapidement opérationnel dès le début de son stage alors qu'il subissait une dégradation de ses conditions de travail ; les négligences relevées ne concernent que le début de son stage ; enfin, le maire de la commune lui a indiqué qu'il ne souhaitait pas qu'il continue à occuper ses fonctions par crainte d'une nouvelle agression d'une collègue et sans remettre en cause ses compétences professionnelles ;
- cette décision est entachée de détournement de pouvoir ;
- il a été victime d'agression verbale de la part d'une collègue de travail qui a eu une incidence sur sa santé mentale ; l'inaction du maire a eu pour effet d'amplifier la dégradation de ses conditions de travail ; il a été victime de faits de harcèlement en méconnaissance des dispositions de l'article 6 quinquies de la loi du 13 juillet 1983 ; en outre, les dispositions de l'article 11 de la loi du 13 juillet 1983 et les stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme on été méconnues.
Par des mémoires en défense, enregistrés les 22 juillet 2014 et 5 juin 2015, la commune de Laveissière, représentée par MeB..., conclut au rejet de la requête et demande qu'une somme de 3 000 euros soit mise à la charge de M. D...au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle fait valoir que :
- la requête d'appel est tardive ;
- lors de son stage, M. D...a été parfaitement encadré et a bénéficié d'une formation ; son insuffisance professionnelle, qui ne se limite pas aux premiers mois de son stage, est établie et justifie le refus de le titulariser ;
- les deux disputes qu'il a eues avec sa collègue de travail ne sauraient caractériser une situation de harcèlement moral ; l'altération de son état de santé mentale n'est pas établie ; de même, la dégradation de ses conditions de travail n'est pas davantage établie ;
- les demandes indemnitaires de l'intéressé ne sont pas justifiées.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 modifiée, portant droits et obligations des fonctionnaires ;
- la loi n° 84-53 du 26 janvier 1984 modifiée, portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique territoriale ;
- le décret n° 87-1099 du 30 décembre 1987 modifié, portant statut particulier du cadre d'emplois des attachés territoriaux ;
- le décret n° 92-1194 du 4 novembre 1992 modifié, fixant les dispositions communes applicables aux fonctionnaires stagiaires de la fonction publique territoriale ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de Mme Dèche, premier conseiller ;
- les conclusions de M. Clément, rapporteur public ;
- et les observations de Me B...pour la commune de Laveissière.
1. Considérant que M.D..., adjoint administratif de 1ère classe, a été recruté par le maire de commune de Laveissière, en qualité d'attaché territorial stagiaire pour une durée d'un an, à compter du 23 janvier 2012, par un arrêté en date du même jour ; que, par un arrêté en date du 10 janvier 2013, le maire de la commune de Laveissière a refusé de titulariser M. D... à la fin de son stage et l'a radié des effectifs de la commune à compter du 23 janvier 2013 ; que M. D... relève appel du jugement du 27 mars 2014 par lequel le tribunal administratif de Clermont-Ferrand a rejeté sa demande tendant, d'une part, à l'annulation de cet arrêté du 10 janvier 2013 et, d'autre part, à la condamnation de la commune de Laveissière à l'indemniser de divers préjudices ;
Sur la légalité de l'arrêté du maire du 23 janvier 2013 :
2. Considérant, en premier lieu, qu'il ressort des pièces du dossier, et notamment d'un courrier du maire de la commune en date du 21 juin 2012, que M. D...faisait preuve de peu d'initiative lors des réunions auxquelles il participait et manquait d'efficacité dans son travail, ce qui a entraîné une accumulation de retards dans le traitement de dossiers ; qu'en particulier, l'intéressé n'a fait preuve d'aucun investissement dans la préparation du budget de la commune, s'abstenant notamment de prendre des notes sur les nombreux conseils qui lui étaient apportés ; qu'il a été à l'origine de plusieurs oublis et erreurs affectant les documents budgétaires qui n'ont pu être valablement présentés au conseil municipal ; que son absence d'investissement a également pu être constatée lors de l'organisation du scrutin pour l'élection présidentielle ; qu'il a été à l'origine de plusieurs erreurs et oublis dans la rédaction d'arrêtés municipaux et de plusieurs documents concernant notamment les marchés publics ; qu'en dépit d'un courrier qui lui a été adressé par le maire le 12 juillet 2012, des insuffisances et négligences de même nature ont été à nouveau relatées dans un courrier du 1er octobre 2012 ; que, dans ces conditions, le requérant, qui ne peut utilement se prévaloir d'un courrier exprimant la satisfaction de son ancien employeur, n'est pas fondé à soutenir que la décision de ne pas le titulariser à l'issue de son stage serait entachée d'une erreur manifeste d'appréciation ;
3. Considérant, en deuxième lieu, qu'aux termes de l'article 6 quinquies de la loi du 13 juillet 1983 susvisée : " Aucun fonctionnaire ne doit subir les agissements répétés de harcèlement moral qui ont pour objet ou pour effet une dégradation des conditions de travail susceptible de porter atteinte à ses droits et à sa dignité, d'altérer sa santé physique ou mentale ou de compromettre son avenir professionnel. / Aucune mesure concernant notamment le recrutement, la titularisation, la formation, la notation, la discipline, la promotion, l'affectation et la mutation ne peut être prise à l'égard d'un fonctionnaire en prenant en considération : / 1° Le fait qu'il ait subi ou refusé de subir les agissements de harcèlement moral visés au premier alinéa ; / 2° Le fait qu'il ait exercé un recours auprès d'un supérieur hiérarchique ou engagé une action en justice visant à faire cesser ces agissements ; / 3° Ou bien le fait qu'il ait témoigné de tels agissements ou qu'il les ait relatés. / Est passible d'une sanction disciplinaire tout agent ayant procédé ou ayant enjoint de procéder aux agissements définis ci-dessus. (... ) " ;
4. Considérant que M. D...soutient qu'il a été victime de faits de harcèlement moral qui ne lui ont pas permis d'accomplir son stage dans des conditions lui permettant de faire la preuve de ses capacités professionnelles ; qu'il fait valoir à cet égard qu'il a fait l'objet pendant toute la durée de son stage d'un dénigrement continu, qui a débuté par des agressions verbales et un comportement particulièrement hostile de la part d'une collègue et qui s'est poursuivi par la prise de position du maire de la commune, lequel se serait non seulement abstenu de lui accorder la protection fonctionnelle mais serait encore intervenu en sa défaveur, en mettant en cause son travail et ses capacités professionnelles ;
5. Considérant qu'il appartient à un agent public qui soutient avoir été victime d'agissements constitutifs de harcèlement moral, de soumettre au juge des éléments de fait susceptibles de faire présumer l'existence d'un tel harcèlement ; qu'il incombe à l'administration de produire, en sens contraire, une argumentation de nature à démontrer que les agissements en cause sont justifiés par des considérations étrangères à tout harcèlement ; que pour apprécier si une situation de harcèlement est établie, il y a lieu, au vu de ces échanges contradictoires, complétés, le cas échéant, par toute mesure d'instruction utile, de tenir compte des comportements respectifs de l'agent auquel il est reproché d'avoir exercé de tels agissements et de celui qui estime en avoir été victime ;
6. Considérant que s'il n'est pas véritablement contesté que l'intéressé a subi à deux reprises, au début de son stage, des propos violents de la part d'une collègue de travail relatifs à sa manière de travailler, il n'est pas établi que le maire de la commune, informé de ces faits se serait abstenu de toute intervention ; qu'à l'inverse, il ressort des pièces du dossier que M. D... qui a bénéficié dès le début de son stage, à la demande de la commune, des conseils de l'ancien secrétaire de mairie, lequel avait rédigé à son attention un échéancier ainsi qu'une note d'aide, a également bénéficié d'une formation sur l'élaboration du budget ainsi que de l'aide constante et des conseils de ses collègues, d'élus et d'un percepteur ; qu'il ressort également des pièces du dossier que le refus d'accorder à M. D...une indemnité forfaitaire complémentaire pour l'organisation des scrutins législatif et présidentiel, est justifié par son absence d'implication lors de ces élections ; que l'intéressé ne peut faire valoir qu'il aurait été systématiquement exclu des réunions d'adjoints les lundis soirs, qui ne concernaient aucun agent administratif de la commune, alors par ailleurs que le maire faisait avec lui, tous les matins, le point sur les dossiers à traiter et les tâches administratives à réaliser ; que M. D... ne peut utilement faire valoir que le maire n'aurait pas procédé à son évaluation, dès lors qu'il ne faisait plus partie des effectifs de la commune lorsque les entretiens avec les agents de la commune ont été réalisés ; qu'il ressort de même des pièces du dossier que certaines des tâches qui lui étaient confiées ont dû être prises en charge par les élus en raison des insuffisances professionnelles dont il a fait preuve et que, contrairement à ce qu'il soutient, il a été convié à la fête du personnel communal, le 12 décembre 2012, mais qu'il n'a pas souhaité y participer ; que, dans ces conditions, il n'est pas établi que M. D... aurait été victime d'agissements pouvant être qualifiés de harcèlement moral au sens des dispositions précitées de la loi du 13 juillet 1983 ; que, par suite, le requérant n'est pas fondé à soutenir que, du fait d'un tel harcèlement, son stage se serait déroulé dans des conditions ne lui permettant pas de faire la preuve de sa capacité à exercer les fonctions pour lesquelles il avait été recruté ;
7. Considérant, en troisième et dernier lieu, qu'il ne ressort pas des pièces du dossier que la décision refusant de titulariser M. D...en fin de stage, qui, ainsi qu'il vient d'être dit, est fondée sur l'appréciation de ses compétences professionnelles et de son aptitude à exercer les fonctions auxquelles il était destiné, aurait été motivée par la poursuite d'un but étranger à l'intérêt du service ; que le détournement de pouvoir allégué n'est dès lors pas établi ;
Sur les conclusions indemnitaires :
8. Considérant que, pour les motifs exposés au point 6, il ne résulte pas de l'instruction que M. D... aurait été victime de faits de harcèlement moral, ni qu'il aurait subi des traitements inhumains ou dégradants au sens de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ; qu'il ne résulte pas davantage de l'instruction que le maire de la commune de Laveissière aurait refusé de lui accorder à tort le bénéfice de la protection fonctionnelle ; que, par suite, les conclusions du requérant tendant à la réparation de préjudices qu'il impute à de tels faits doivent être rejetées ;
9. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède, et sans qu'il soit besoin de statuer sur la fin de non recevoir opposée en défense, que M. D...n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Clermont-Ferrand a rejeté sa demande ;
Sur les conclusions à fin d'injonction :
10. Considérant que le présent arrêt qui confirme le rejet des conclusions de M. D... dirigées contre l'arrêté du maire de la commune de Laveissière du 10 janvier 2013 mettant fin à son détachement en qualité d'attaché territorial stagiaire, n'appelle aucune mesure d'exécution ; que, par suite, les conclusions du requérant tendant à ce qu'il soit enjoint au maire de le titulariser doivent être rejetées ;
Sur les frais non compris dans les dépens :
11. Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que la somme que M. D...demande sur leur fondement au titre de ses frais non compris dans les dépens soit mise à la charge de la commune de Laveissière qui n'est pas, dans la présente instance, partie perdante ; qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, sur le fondement de ces mêmes dispositions, de mettre à la charge de M. D...une somme de 1 500 euros au titre des frais exposés par la commune de Laveissière et non compris dans les dépens ;
DECIDE :
Article 1er : La requête de M. D...est rejetée.
Article 2 : M. D...versera à la commune de Laveissière une somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à M. A...D...et à la commune de Laveissière.
Délibéré après l'audience du 31 mai 2016 à laquelle siégeaient :
- M. Boucher, président de chambre ;
- Mme Dèche, premier conseiller ;
- Mme Peuvrel, premier conseiller.
Lu en audience publique, le 23 juin 2016.
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N° 14LY01802