Procédure devant la Cour :
Par une requête, enregistrée le 8 octobre 2015, Mme A...C..., représentée par MeB..., demande à la Cour :
1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Clermont-Ferrand du 1er octobre 2015 ;
2°) d'annuler les décisions du préfet du Puy-de-Dôme du 10 juin 2015 ;
3°) d'enjoindre au préfet du Puy-de-Dôme, à titre principal, de lui délivrer un titre de séjour portant la mention "vie privée et familiale" ou, à titre subsidiaire, de réexaminer sa situation dans le délai de trente jours à compter de la notification de l'arrêt à intervenir, sous astreinte de 50 euros par jour de retard ;
4°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 1 000 euros à verser à son avocat au titre de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique.
Elle soutient que :
S'agissant du refus de titre de séjour :
- le préfet et les premiers juges ont renversé la charge de la preuve en estimant que les soins nécessaires au traitement du diabète et des troubles psychologiques existent en Arménie ;
- dès lors qu'elle est âgée de cinquante-neuf ans, un courrier, retenu par les premiers juges, émanant de l'Institut pour la santé de l'enfant et de l'adolescent ne saurait s'appliquer à sa situation ;
S'agissant de l'obligation de quitter le territoire français :
- cette décision est illégale en conséquence de l'illégalité du refus de titre de séjour ;
- elle méconnaît les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
S'agissant de la décision fixant le pays de destination :
- elle est illégale en conséquence de l'illégalité du refus de séjour et de l'obligation de quitter le territoire français ;
- cette décision méconnaît les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.
Par un mémoire en défense, enregistré le 30 mars 2016, le préfet du Puy-de-Dôme conclut au rejet de la requête.
Il fait valoir qu'aucun des moyens soulevés n'est fondé.
Un nouveau mémoire, enregistré le 9 mai 2016 et présenté pour MmeC..., n'a pas été communiqué en application du dernier alinéa de l'article R. 611-1 du code de justice administrative.
Mme C...a été admise au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par décision du bureau d'aide juridictionnelle du 17 décembre 2015.
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu :
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales du 4 novembre 1950 ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique ;
- l'arrêté ministériel du 9 novembre 2011 relatif aux conditions d'établissement et de transmission des avis rendus par les agences régionales de santé en application de l'article R. 313-22 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile en vue de la délivrance d'un titre de séjour pour raison de santé ;
- le code de justice administrative.
Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Le rapport de Mme Dèche, premier conseiller, a été entendu au cours de l'audience publique.
1. Considérant que MmeC..., ressortissante arménienne, a vu sa demande d'asile rejetée par l'Office français de protection des réfugiés et apatrides le 29 novembre 2013, puis par la Cour nationale du droit d'asile le 30 mai 2014 ; qu'elle a sollicité la délivrance d'un titre de séjour sur le fondement du 11° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; que, par arrêté du 10 juin 2015, le préfet du Puy-de-Dôme lui a opposé un refus, assorti d'une obligation de quitter le territoire dans le délai de trente jours et de la désignation du pays de renvoi en cas d'éloignement forcé ; que Mme C...relève appel du jugement du 1er octobre 2015 par lequel le tribunal administratif de Clermont-Ferrand a rejeté sa demande d'annulation de ces décisions ;
Sur la légalité de la décision portant refus d'admission au séjour :
2. Considérant qu'aux termes de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " est délivrée de plein droit : (...) / 11° A l'étranger résidant habituellement en France dont l'état de santé nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait entraîner pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité, sous réserve de l'absence d'un traitement approprié dans le pays dont il est originaire, sauf circonstance humanitaire exceptionnelle appréciée par l'autorité administrative après avis du directeur général de l'agence régionale de santé, sans que la condition prévue à l'article L. 311-7 soit exigée. La décision de délivrer la carte de séjour est prise par l'autorité administrative, après avis du médecin de l'agence régionale de santé de la région de résidence de l'intéressé, désigné par le directeur général de l'agence (...). " ; qu'aux termes de l'article R. 313-22 du même code : " Pour l'application du 11° de l'article L. 313-11, le préfet délivre la carte de séjour temporaire au vu d'un avis émis par le médecin de l'agence régionale de santé compétente au regard du lieu de résidence de l'intéressé, désigné par le directeur général. (...) / L'avis est émis dans les conditions fixées par arrêté du ministre chargé de l'immigration et du ministre chargé de la santé au vu, d'une part, d'un rapport médical établi par un médecin agréé ou un médecin praticien hospitalier et, d'autre part, des informations disponibles sur l'existence d'un traitement dans le pays d'origine de l'intéressé. (...) / Le préfet peut, après avis du directeur général de l'agence régionale de santé, prendre en considération une circonstance humanitaire exceptionnelle pour délivrer la carte de séjour temporaire même s'il existe un traitement approprié dans le pays d'origine de l'intéressé. (...). " ; que selon l'article 4 de l'arrêté du 9 novembre 2011 susvisé : " (...) Cet avis est transmis au préfet sous couvert du directeur général de l'agence régionale de santé. Celui-ci, s'il estime, sur la base des informations dont il dispose, qu'il y a lieu de prendre en compte des circonstances humanitaires exceptionnelles susceptibles de fonder une décision d'admission au séjour, transmet au préfet un avis complémentaire motivé. (...) " ;
3. Considérant que dans son avis rendu le 16 janvier 2015, le médecin de l'agence régionale de santé a estimé que l'état de santé de Mme C...nécessitait une prise en charge médicale dont le défaut peut entraîner des conséquences d'une exceptionnelle gravité, qu'il n'existe pas de traitement approprié dans son pays d'origine et que les soins nécessaires doivent être poursuivis pendant douze mois ; que la requérante produit des pièces médicales indiquant qu'elle souffre de diabète et de troubles psychiatriques ; que toutefois, le préfet du Puy-de-Dôme produit un document provenant de l'ambassade de France en Arménie démontrant l'existence de centres médicaux propres à prendre en charge les pathologies dont la requérante est affectée, ainsi qu'un rapport de l'Organisation internationale pour les migrations qui indique que les soins de santé sont accessibles en Arménie et que la quasi-totalité des catégories de médicaments y sont disponibles ; que le courrier du 12 avril 2013, bien qu'émanant de l'Institut de la santé de l'enfant et de l'adolescent, se prononce également, en ce qui concerne les adultes, sur l'existence de soins psychologiques, laquelle se trouve confirmée par les renseignements transmis par le médecin-conseil de l'ambassade de France à Erevan ; que, dans ces conditions, le préfet n'a pas fait une inexacte application des dispositions du 11° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile en refusant à Mme C...le titre de séjour qu'elle avait sollicité sur ce fondement ;
Sur la légalité de la décision portant obligation de quitter le territoire :
4. Considérant, en premier lieu, qu'il résulte de ce qui a été dit ci-dessus au point 3, que le moyen selon lequel l'obligation de quitter le territoire serait illégale par voie de conséquence de l'illégalité du refus de titre de séjour, doit être écarté ;
5. Considérant, en second lieu, que, si MmeC..., née en 1956, se prévaut de son état de santé il n'est pas établi, compte-tenu de ce qui a été dit au point 3, qu'elle ne pourrait pas recevoir les soins nécessaires dans son pays d'origine ; que, célibataire et sans charge de famille, elle est entrée irrégulièrement en France le 8 juin 2013, n'établit pas la présence d'attaches particulières en France alors qu'elle ne peut être regardée comme dépourvue de tout lien avec l'Arménie où elle a vécu jusqu'à l'âge de cinquante-six ans ; que, dans ces circonstances, en l'obligeant à quitter le territoire français, le préfet du Puy-de-Dôme n'a pas porté une atteinte disproportionnée à son droit au respect de sa vie privée et familiale au regard des motifs de sa décision et n'a, ainsi, pas méconnu les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales garantissant à toute personne un tel droit ;
Sur la légalité de la décision fixant le pays de renvoi :
6. Considérant, en premier lieu, qu'il résulte de ce qui a été dit ci-dessus aux points 3 à 5, que le moyen selon lequel la décision fixant le pays de renvoi serait illégale par voie de conséquence de l'illégalité du refus de titre de séjour et de l'obligation de quitter le territoire, doit être écarté ;
7. Considérant, en second lieu, que, pour les motifs déjà exposés au point 5, Mme C... ne justifie pas avoir constitué en France le centre de ses intérêts personnels et familiaux ; que le moyen tiré de la méconnaissance de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales doit dès lors être écarté ;
8. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que Mme C...n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Clermont-Ferrand a rejeté sa demande ; que ses conclusions à fin d'injonction sous astreinte et celles qu'elle présente au bénéfice de son avocat au titre des frais non compris dans les dépens, doivent être rejetées par voie de conséquence ;
DECIDE :
Article 1er : La requête de Mme C...est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à Mme A...C...et au ministre de l'intérieur.
Copie en sera adressée au préfet du Puy-de-Dôme.
Délibéré après l'audience du 31 mai 2016 à laquelle siégeaient :
- M. Boucher, président de chambre ;
- M. Drouet, président-assesseur ;
- Mme Dèche, premier conseiller.
Lu en audience publique, le 23 juin 2016.
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N° 15LY03223