3°) de faire application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Par un jugement n° 1401809 du 5 avril 2016, le tribunal administratif de Grenoble a annulé cet arrêté du 7 février 2014, a enjoint au maire d'Heyrieux de réexaminer la situation de M. C... dans le délai d'un mois à compter de la notification du jugement et a rejeté le surplus des conclusions des parties.
Procédure devant la cour
Par une requête, enregistrée le 3 juin 2016, et des mémoires, enregistrés le 7 décembre 2016 et le 11 janvier 2017, la commune d'Heyrieux, représentée par Me Verne (SELARL Itinéraires Droit Public), avocat, demande à la cour :
1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Grenoble du 5 avril 2016 en ce qu'il a annulé son arrêté du 7 février 2014 et lui a enjoint de réexaminer la situation de M. C... ;
2°) de rejeter la demande de M. C... ;
3°) de mettre à la charge de M. C... une somme de 1 500 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que c'est à tort que le tribunal administratif a considéré qu'un simple lien entre le service et la maladie était suffisant pour caractériser l'imputabilité ; cette dernière n'est pas établie, dès lors qu'aucun fait précis et anormal de service n'est susceptible d'être identifié comme étant la cause objective de l'affection dont a été victime l'agent ; M. C... est seul à l'origine des difficultés relationnelles qu'il a rencontrées et de la pathologie qu'il a développée.
Par un mémoire en défense, enregistré le 21 juillet 2016, et un mémoire, enregistré le 6 février 2017, M. C..., représenté par Me A... (F...et Associés), avocat, conclut au rejet de la requête et à ce qu'une somme de 3 000 euros soit mise à la charge de la commune d'Heyrieux en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Il fait valoir que :
- les éléments relatifs à sa manière de servir ne sont pas établis ; en tout état de cause, ils ne sont pas pertinents pour apprécier l'imputabilité au service de sa pathologie ;
- c'est à bon droit que les premiers juges ont estimé que le lien entre son affection et le service était établi.
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu :
- le code des pensions civiles et militaires de retraite ;
- la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 portant droits et obligations des fonctionnaires ;
- la loi n° 84-53 du 26 janvier 1984 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique territoriale ;
- le code de justice administrative ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique :
- le rapport de Mme Nathalie Peuvrel, première conseillère,
- les conclusions de M. Samuel Deliancourt, rapporteur public,
- et les observations de Me E... pour la commune d'Heyrieux, et celles de Me A... pour M. C....
Vu la note en délibéré, enregistrée le 4 avril 2018, présentée pour la commune d'Heyrieux par Me B... ;
1. Considérant que M. C..., titulaire du grade de technicien principal de 1ère classe, occupait depuis octobre 1998 le poste de directeur des services techniques de la commune d'Heyrieux ; que M. C..., placé en congé de maladie ordinaire à compter du 27 mai 2013, a demandé la reconnaissance de l'imputabilité au service de sa maladie ; que, après que l'expert désigné par la commission de réforme eut conclu à l'existence de " un lien de causalité direct et certain entre la pathologie notée sur le certificat médical initial et l'exécution du service ", cette commission a, le 9 janvier 2014, émis l'avis que la pathologie présentée par l'intéressé était imputable au service ; que, toutefois, par arrêté du 7 février 2014, le maire d'Heyrieux a refusé de reconnaître l'imputabilité au service de cette maladie ; que la commune d'Heyrieux relève appel du jugement du 5 avril 2016 par lequel le tribunal administratif de Grenoble a, sur la demande de M. C..., annulé cet arrêté et lui a enjoint de réexaminer la situation de M. C... ;
Sur la légalité de l'arrêté du 7 février 2014 :
2. Considérant qu'aux termes de l'article 57 de la loi du 26 janvier 1984 susvisée, dans sa rédaction applicable à la date de la décision en litige : " Le fonctionnaire en activité a droit : (...) 2° A des congés de maladie dont la durée totale peut atteindre un an pendant une période de douze mois consécutifs en cas de maladie dûment constatée mettant l'intéressé dans l'impossibilité d'exercer ses fonctions. Celui-ci conserve alors l'intégralité de son traitement pendant une durée de trois mois ; ce traitement est réduit de moitié pendant les neuf mois suivants. Le fonctionnaire conserve, en outre, ses droits à la totalité du supplément familial de traitement et de l'indemnité de résidence. / Toutefois, si la maladie provient de l'une des causes exceptionnelles prévues à l'article L. 27 du code des pensions civiles et militaires de retraite ou d'un accident survenu dans l'exercice ou à l'occasion de l'exercice de ses fonctions, le fonctionnaire conserve l'intégralité de son traitement jusqu'à ce qu'il soit en état de reprendre son service ou jusqu'à la mise à la retraite. Il a droit, en outre, au remboursement des honoraires médicaux et des frais directement entraînés par la maladie ou l'accident, même après la date de radiation des cadres pour mise à la retraite. / Dans le cas visé à l'alinéa précédent, l'imputation au service de l'accident ou de la maladie est appréciée par la commission de réforme instituée par le régime des pensions des agents des collectivités locales. (...). " ;
3. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier, et en particulier d'une attestation du précédent maire de la commune, que M. C... a donné toute satisfaction dans l'exercice de ses fonctions durant les treize années de son mandat ; que ce témoignage est corroboré par des attestations de la plupart des agents placés sous son autorité ;
4. Considérant qu'il ressort par ailleurs des pièces du dossier qu'à compter de 2008, l'intéressé a rencontré des difficultés croissantes dans le cadre de son travail, liées à des relations conflictuelles avec les directeurs généraux des services successifs et avec certains élus, pour lesquelles il a fait l'objet, avec l'accord du maire, d'un accompagnement par une psychologue en 2011 ; qu'après une amélioration, ses conditions de travail se sont de nouveau dégradées à compter de l'année 2012 ; qu'il a fait l'objet de deux rapports défavorables de la directrice générale des services au maire et de ce dernier au centre de gestion de la fonction publique territoriale de l'Isère en 2013, année au cours de laquelle il a également vu sa notation abaissée pour la seconde année consécutive et a fait l'objet d'un blâme pour avoir mis en cause l'intégrité du maire et fait preuve d'une attitude irrespectueuse lors de son entretien annuel d'évaluation ; qu'il a été placé en congé de maladie ordinaire à partir du 23 mai 2013 pour syndrome anxio-dépressif réactionnel à des conflits professionnels ; qu'il ressort également des pièces du dossier que le maire, la directrice générale des services en fonction au mois de janvier 2013 et l'une des élues ont porté des appréciations péjoratives sur sa personne et son comportement ou se sont adressés à lui en des termes dévalorisants ;
5. Considérant, enfin, que le Dr D..., psychiatre désigné par la commission de réforme, s'il relève, dans son rapport établi le 27 novembre 2013 la mise en place, par l'intéressé, " de défenses caractérielles et psychorigides ", constate l'existence " de nombreux symptômes de vécu de souffrance au travail que ce soit dépressif, anxieux ou de type post-traumatiques ", l'absence d'antécédent psychiatrique et de facteur déclenchant autre que le travail et conclut à l'imputabilité de sa pathologie au service ; que le médecin de prévention, dans un rapport du 23 août 2013, estime de même que la souffrance psychique de M. C... présente un lien direct et certain avec son vécu de la situation professionnelle ;
6. Considérant qu'eu égard aux circonstances mentionnées ci-dessus, la pathologie dépressive de M. C..., si elle a pu être favorisée par sa personnalité, doit être regardée, en l'absence d'antécédent et au vu des circonstances particulières dans ses conditions de travail, qui sont, contrairement à ce que soutient la commune, établies de manière suffisamment précise par l'agent, comme trouvant son origine dans le service ;
7. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que la commune d'Heyrieux n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Grenoble a annulé l'arrêté du 7 février 2014 du maire d'Heyrieux refusant de reconnaître l'imputabilité au service des arrêts de travail de M. C... ;
Sur les frais liés au litige :
8. Considérant qu'il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de la commune d'Heyrieux la somme que demande M. C... en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ; que ces dispositions font obstacle à ce que soit mise à la charge de M. C..., qui n'est pas partie perdante, la somme que demande la commune d'Heyrieux au titre des frais non compris dans les dépens ;
DÉCIDE :
Article 1er : La requête de la commune d'Heyrieux est rejetée.
Article 2 : Les conclusions de M. C... tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.
Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à la commune d'Heyrieux et à M. G... C....
Copie en sera adressée au préfet de l'Isère.
Délibéré après l'audience du 3 avril 2018, à laquelle siégeaient :
M. Jean-François Alfonsi, président de chambre,
M. Hervé Drouet, président assesseur,
Mme Nathalie Peuvrel, première conseillère.
Lu en audience publique, le 26 avril 2018.
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N° 16LY01887
mg