Procédure devant la cour :
Par une requête enregistrée le 19 mars 2017, la société d'architecture Chomette-Lupi et associés, représentée par Me E..., demande à la cour :
1°) de réformer le jugement attaqué ;
2°) de condamner la région Auvergne-Rhône-Alpes à verser au groupement de maîtrise d'oeuvre la somme de 47 737,50 euros, à assortir de la TVA, de la révision contractuelle des prix, des intérêts et de la capitalisation, au titre des prestations supplémentaires impayées ;
3°) de mettre à la charge de la région Auvergne-Rhône-Alpes la somme de 5 000 euros au titre des frais du litige.
Elle soutient que l'équipe de maîtrise d'oeuvre a pallié l'absence d'un OPC de juillet 2011 à avril 2012 ; elle est fondée à demander à ce titre la somme de 22 500 euros pour la période d'assistance de juillet 2011 au 10 novembre 2011 et la somme de 25 237,50 euros pour la mission OPC préalable du 10 novembre 2011 au 10 avril 2012.
Par un mémoire en défense enregistré le 17 juin 2019, la région Auvergne-Rhône-Alpes, représentée par Me F..., conclut au rejet de la requête, à l'annulation du jugement, au rejet de la demande présentée par la société d'architecture Chomette-Lupi et associés et à ce que la somme de 6 000 euros soit mise à sa charge au titre des frais du litige.
Elle fait valoir que :
- c'est à tort que le tribunal a écarté la fin de non-recevoir tirée la forclusion de la demande de la société d'architecture Chomette-Lupi et associés ;
- les demandes de rémunérations supplémentaires ne sont pas fondées.
Un mémoire enregistré le 7 novembre 2019 présenté pour la société Icade Promotion n'a pas été communiqué.
Des mémoires enregistrés les 12 et 19 novembre 2019 présentés pour la société d'architecture Chomette-Lupi et associés n'ont pas été communiqués.
Un mémoire enregistré le 15 novembre 2019 présenté pour la région Auvergne-Rhône-Alpes n'a pas été communiqué.
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu :
- le code des marchés publics ;
- la loi n° 85-704 du 12 juillet 1985 ;
- le décret n° 78-1306 du 26 décembre 1978 ;
- le décret n° 93-1268 du 29 novembre 1993 ;
- le code de justice administrative ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique :
- le rapport de Mme A... ;
- les conclusions de Mme D...,
- et les observations de Me C..., représentant la société Chomette-Lupi et associés, celles de Me F..., représentant la région Auvergne-Rhône-Alpes, et celles de Me B..., représentant la société Icade Promotion ;
Une note en délibéré présentée par la société d'architecture Chomette-Lupi et associés a été enregistrée le 27 novembre 2019.
Considérant ce qui suit :
1. Par un acte d'engagement signé le 23 mars 2005, la région Auvergne a confié la maîtrise d'oeuvre des travaux de rénovation du lycée agricole d'Yssingeaux " George Sand " à une équipe constituée en groupement dont la société d'architecture Chomette-Lupi et associés était le mandataire. Le marché conclu a été modifié par deux avenants des 25 juin 2008 et 15 juin 2012, le second ayant pour objet de confier au groupement de maîtrise d'oeuvre la reprise de la mission d'ordonnancement, de pilotage et de coordination (OPC) à compter du 10 avril 2012. La société d'architecture Chomette-Lupi et associés a adressé un mémoire en réclamation réceptionné par la région Auvergne le 19 août 2014. La décision implicite de rejet née du silence gardé par le maître d'ouvrage pendant plus de deux mois a été expressément confirmée le 7 octobre 2014. La société d'architecture Chomette-Lupi et associés, agissant en son nom personnel et en qualité de mandataire du groupement de maîtrise d'oeuvre, a saisi le tribunal administratif de Clermont-Ferrand aux fins de condamnation de la région Auvergne à lui verser la somme globale de 152 737,50 euros HT au titre de préjudices subis et de prestations supplémentaires réalisées dans le cadre de l'exécution du marché. Par un jugement du 19 janvier 2017, le tribunal, après avoir à juste titre écarté la fin de non-recevoir opposée par la région Auvergne-Rhône-Alpes tirée de l'absence d'indication des fondements de la demande, a très partiellement fait droit à celle-ci en condamnant la région à verser, d'une part, au groupement de maîtrise d'oeuvre une indemnité correspondant aux intérêts contractuels dus sur la somme de 8 816,62 euros pour la période du 10 juillet 2014 inclus au 4 septembre 2014 inclus et, d'autre part, à la société d'architecture Chomette-Lupi et associés la somme de 5 000 euros en réparation du préjudice résultant de l'atteinte à la propriété intellectuelle et artistique. La société d'architecture Chomette-Lupi et associés relève appel de ce jugement en tant qu'il a rejeté les conclusions de sa demande tendant à la condamnation de la région à verser au groupement de maîtrise d'oeuvre la somme de 47 737,50 euros, à augmenter de la TVA, de la révision contractuelle des prix, des intérêts et de la capitalisation, au titre des prestations supplémentaires.
2. Si la région Auvergne-Rhône-Alpes fait valoir que c'est à tort que, dans le jugement n° 1401363 du 19 janvier 2017, qui fait l'objet de la requête enregistrée sous le n° 17LY01211, le tribunal administratif de Clermont-Ferrand a écarté la fin de non-recevoir tirée de la forclusion de la demande de la société d'architecture Chomette-Lupi et associés, ce moyen, sans lien avec le présent litige, ne peut qu'être écarté.
3. Aux termes de l'article 9 de la loi du 12 juillet 1985 relative à la maîtrise d'ouvrage publique et à ses rapports avec la maîtrise d'oeuvre : " La mission de maîtrise d'oeuvre donne lieu à une rémunération forfaitaire fixée contractuellement. Le montant de cette rémunération tient compte de l'étendue de la mission, de son degré de complexité et du coût prévisionnel des travaux. ". Aux termes de l'article 30 du décret du 29 décembre 1993 relatif aux missions de maîtrise d'oeuvre confiées par des maîtres d'ouvrage publics à des prestataires de droit privé : " Le contrat de maîtrise d'oeuvre précise, d'une part, les modalités selon lesquelles est arrêté le coût prévisionnel assorti d'un seuil de tolérance, sur lesquels s'engage le maître d'oeuvre, et, d'autre part, les conséquences, pour celui-ci, des engagements souscrits. (...) III. En cas de modification de programme ou de prestations décidées par le maître de l'ouvrage, le contrat de maîtrise d'oeuvre fait l'objet d'un avenant qui arrête le programme modifié et le coût prévisionnel des travaux concernés par cette modification, et adapte en conséquence la rémunération du maître d'oeuvre et les modalités de son engagement sur le coût prévisionnel. (...) ".
4. Il résulte de ces dispositions que le titulaire d'un contrat de maîtrise d'oeuvre est rémunéré par un prix forfaitaire couvrant l'ensemble de ses charges ainsi que le bénéfice qu'il en escompte, et que seules une modification de programme ou une modification de prestations décidées par le maître de l'ouvrage peuvent donner lieu, le cas échéant, à une augmentation de sa rémunération. Ainsi la prolongation de sa mission n'est de nature à justifier une rémunération supplémentaire du maître d'oeuvre que si elle a donné lieu à des modifications de programme ou de prestations décidées par le maître d'ouvrage. En outre, le maître d'oeuvre qui effectue des missions ou prestations non prévues au marché de maîtrise d'oeuvre et qui n'ont pas été décidées par le maître d'ouvrage n'a droit à être rémunéré de ces missions ou prestations que lorsque, soit elles ont été indispensables à la réalisation de l'ouvrage selon les règles de l'art, soit le maître d'oeuvre a été confronté dans l'exécution du marché à des sujétions imprévues présentant un caractère exceptionnel et imprévisible, dont la cause est extérieure aux parties et qui ont pour effet de bouleverser l'économie du contrat.
5. Il résulte de l'instruction que la mission d'ordonnancement, de pilotage et de coordination de l'opération de rénovation du lycée agricole d'Yssingeaux avait été confiée à la société cabinet Francis Klein, dont le marché a été résilié le 16 novembre 2011. Le maître d'ouvrage a demandé en février 2012 à l'équipe de maîtrise d'oeuvre une première proposition d'honoraires pour la reprise de cette mission. Il ressort du compte rendu de réunion de chantier du 2 mars 2012 que la région Auvergne n'a pas retenu la proposition des architectes et a lancé une consultation pour finalement accepter la nouvelle offre de l'équipe de maîtrise d'oeuvre à laquelle elle a confié à compter du 10 avril 2012 la mission d'ordonnancement, de pilotage et de coordination qui fait l'objet de l'avenant n° 2 signé le 15 juin 2012. Il résulte cependant de l'instruction que, pendant la période courant de juillet 2011 à avril 2012, le groupement de maîtrise d'oeuvre a dû organiser des visites complémentaires avec les entreprises pour pallier le manque d'organisation du cabinet Francis Klein qui retardait l'opération. Il sera fait une juste appréciation de la rémunération que la société d'architecture Chomette-Lupi et associés est fondée à demander au titre de cette prestation supplémentaire indispensable à l'exécution des travaux, en la fixant à la somme de 10 000 euros.
6. La société d'architecture Chomette-Lupi et associés, qui ne conteste pas que la clause de révision des prix prévue par le marché de maîtrise d'oeuvre ne peut être appliquée aux indemnités à payer comme indiqué dans le jugement attaqué, a droit en revanche à ce que la somme de 10 000 euros soit majorée de la taxe sur la valeur ajoutée au taux de 20 %, ainsi qu'aux intérêts au taux légal correspondant à cette indemnité à compter du 19 août 2014, date de réception de son mémoire en réclamation, assortis de leur capitalisation à compter du 19 août 2015.
7. Il résulte de ce qui précède que la société d'architecture Chomette -Lupi et associés est seulement fondée à demander la condamnation de la région Auvergne-Rhône-Alpes à verser au groupement de maîtrise d'oeuvre la somme de 10 000 euros, assortie de la TVA au taux de 20 % et des intérêts légaux à compter du 19 août 2014 et de la capitalisation à compter du 19 août 2015 et à ce que le jugement soit réformé dans cette mesure.
8. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de laisser à la charge des parties les frais qu'elles ont exposés au titre du litige.
DÉCIDE :
Article 1er : La région Auvergne-Rhône-Alpes est condamnée à verser au groupement de maîtrise d'oeuvre une somme de 12 000 euros TTC au titre de ses prestations supplémentaires.
Article 2 : Cette somme portera intérêts au taux légal à compter du 19 août 2014. Les intérêts échus au 19 mai 2015, puis à chaque échéance annuelle à compter de cette date, seront capitalisés pour produire eux-mêmes intérêts.
Article 3 : Le jugement du tribunal administratif de Clermont-Ferrand n° 1402163 du 19 janvier 2017 est réformé dans la mesure de l'article 1er.
Article 4 : Le surplus des conclusions des parties est rejeté.
Article 5 : Le présent arrêt sera notifié à la société d'architecture Chomette-Lupi et associés et à la région Auvergne-Rhône-Alpes. Copie en sera adressée à la société Icade Promotion.
Délibéré après l'audience du 21 novembre 2019, à laquelle siégeaient :
M. d'Hervé, président,
Mme A..., président assesseur,
Mme Vaccaro-Planchet, premier conseiller.
Lu en audience publique le 12 décembre 2019.
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N° 17LY01314