Procédure devant la cour
I. Par une requête enregistrée le 8 décembre 2020 sous le n° 20LY03599, le préfet de l'Ain demande à la cour d'ordonner, sur le fondement de l'article R. 811-15 du code de justice administrative, qu'il soit sursis à l'exécution de ce jugement.
Il soutient que les moyens qu'il soulève dans la requête au fond sont sérieux et de nature à justifier, outre l'annulation du jugement attaqué, le rejet des conclusions à fin d'annulation et d'injonction accueillies par ce jugement.
Par un mémoire en défense enregistré le 10 mars 2021, M. G..., représenté par Me B..., conclut au rejet de la requête et à ce que la somme de 1 200 euros soit mise à la charge de l'Etat à verser à son conseil en application des dispositions combinées des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991.
Il fait valoir que :
- les moyens soulevés par le préfet dans la requête au fond ne sont pas fondés ;
- les moyens qu'il a soulevés devant le tribunal sont fondés.
Par une décision du 17 mars 2021, M. G... a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale.
II. Par une requête enregistrée le 8 décembre 2020 sous le n° 2003600, le préfet de l'Ain demande à la cour d'annuler le jugement n° 2004435 du tribunal administratif de Lyon du 20 novembre 2020 et de rejeter la demande présentée par M. G... devant le tribunal administratif de Lyon.
Il soutient que :
- faute d'avoir précisé la nature exacte du titre de séjour qu'il sollicitait, M. G... n'était pas fondé à soutenir qu'il lui appartenait d'examiner sa demande au regard de l'article L. 313-7 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; c'est donc à tort que le tribunal a retenu le moyen tiré de l'erreur de droit ;
- les moyen tirés de la méconnaissance de ces dispositions et de l'article L. 313-14 sont inopérants.
Par un mémoire en défense enregistré le 10 mars 2021, M. G..., représenté par Me B..., conclut au rejet de la requête et à ce que la somme de 1 200 euros soit mise à la charge de l'Etat à verser à son conseil en application des dispositions combinées des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991.
Il soutient que :
- les moyens soulevés par le préfet ne sont pas fondés ;
- les moyens qu'il a soulevés devant le tribunal sont fondés.
Par une décision du 17 mars 2021, M. G... a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale.
Vu les autres pièces des dossiers ;
Vu :
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;
- le code de justice administrative et le décret n° 2020-1406 du 18 novembre 2020 ;
Le président de la formation de jugement ayant dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique :
- le rapport de Mme E...,
- et les observations de Me D..., pour M. G....
Considérant ce qui suit :
1. Il y a lieu de joindre, pour qu'il y soit statué par un même arrêt, les requêtes visées ci-dessus qui sont dirigées contre le même jugement.
2. M. G..., ressortissant kosovar né en 2001, est entré en France le 15 septembre 2015 en compagnie de ses parents et de ses deux soeurs cadettes. Devenu majeur, il a sollicité le 26 décembre 2019 la délivrance d'un titre de séjour auprès de la préfecture de l'Ain. Par un arrêté du 19 juin 2020, le préfet de ce département a rejeté sa demande et l'a obligé à quitter le territoire français dans un délai de trente jours à compter de la cessation de l'état d'urgence sanitaire à destination du Kosovo. Par un jugement du 20 novembre 2020, le tribunal administratif de Lyon a annulé cet arrêté. Le préfet de l'Ain demande l'annulation de ce jugement par sa requête n° 20LY03600 et qu'il soit sursis à son exécution par sa requête n° 20LY03599.
Sur la requête n° 20LY03600 :
En ce qui concerne le motif d'annulation retenu par les premiers juges :
3. Aux termes de l'article L. 313-7 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " I. - La carte de séjour temporaire accordée à l'étranger qui établit qu'il suit en France un enseignement ou qu'il y fait des études et qui justifie qu'il dispose de moyens d'existence suffisants porte la mention " étudiant ". En cas de nécessité liée au déroulement des études ou lorsque l'étranger a suivi sans interruption une scolarité en France depuis l'âge de seize ans et y poursuit des études supérieures, l'autorité administrative peut accorder cette carte de séjour sans que la condition prévue à l'article L. 313-2 soit exigée et sous réserve d'une entrée régulière en France (...) ".
4. Il appartient à l'étranger lorsqu'il sollicite l'admission au séjour d'apporter à l'administration toutes les précisions qu'il juge utiles lors du dépôt de sa demande. Si le préfet de l'Ain n'établit pas que M. G... n'aurait pas précisé le fondement légal de sa demande de titre de séjour par la seule production du formulaire qu'il a rempli en préfecture, il ressort des pièces qu'il a jointes à sa demande qu'il était scolarisé dans un lycée professionnel en seconde année de formation en vue de l'obtention d'un certificat d'aptitude professionnelle et qu'il ne justifiait d'aucun moyen d'existence propre. Il ne pouvait dès lors se voir délivrer un titre de séjour sur le fondement de l'article L. 313-7 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Dans ces conditions, le préfet de l'Ain, qui ne s'est pas mépris en s'estimant saisi par M. G... d'une demande de titre de séjour sur le seul fondement du 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et n'était pas tenu d'examiner d'office si l'intéressé pouvait prétendre à un titre de séjour sur un autre fondement, est fondé à soutenir que c'est à tort que les premiers juges ont fait droit au moyen tiré de l'erreur de droit en considérant que le préfet aurait dû également examiner la possibilité d'admettre M. G... au séjour en qualité d'étudiant.
5. Il appartient toutefois à la cour, saisie de l'ensemble du litige par l'effet dévolutif de l'appel, d'examiner les autres moyens soulevés par M. G....
En ce qui concerne les autres moyens de M. G... :
6. En premier lieu, l'arrêté du 19 juin 2020 a été signé par M. F... A..., directeur de la citoyenneté et de l'intégration de la préfecture de l'Ain, qui disposait d'une délégation de signature du préfet du Rhône, par un arrêté du 5 novembre 2019 publié au recueil des actes administratifs spécial de la préfecture le lendemain. Par suite, le moyen tiré de l'incompétence du signataire de l'arrêté doit être écarté comme manquant en fait.
7. En deuxième lieu, compte tenu du motif d'annulation du jugement énoncé au point 4, le moyen tiré de la méconnaissance de l'article L. 313-7 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ne peut qu'être écarté.
8. En troisième lieu, eu égard à la durée du séjour en France de M. G... et à l'absence d'obstacle à ce que sa vie familiale se poursuive dans son pays d'origine, étant donné l'irrégularité de la situation de ses parents, ainsi que sa formation professionnelle, le préfet n'a pas porté à son droit au respect de sa vie privée et familiale garanti par l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales une atteinte disproportionnée aux buts en vue desquels il a refusé de lui délivrer un titre de séjour et l'a obligé à quitter le territoire français. Il n'a pas davantage commis d'erreur manifeste dans l'appréciation des conséquences de ces décisions sur sa situation personnelle ni, en tout état de cause, en estimant que sa situation ne répondait pas à des motifs exceptionnels justifiant son admission au séjour au titre de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile.
9. En dernier lieu, il découle de qui vient d'être dit que les décisions portant obligation de quitter le territoire français et fixation du délai de départ et du pays de renvoi ne sont pas illégales en conséquence des illégalités successives alléguées.
10. Il résulte de ce qui précède que le préfet de l'Ain est fondé à demander, outre l'annulation du jugement qu'il attaque, le rejet de la demande de M. G... devant le tribunal administratif de Lyon.
Sur la requête n° 20LY03599 :
11. Le présent arrêt statuant sur l'appel présenté contre le jugement n° 2004435 du tribunal administratif de Lyon, les conclusions de la requête n° 20LY03599 tendant à ce qu'il soit sursis à son exécution sont ainsi privées d'objet. Il n'y a pas lieu, par suite, d'y statuer.
Sur les frais du litige :
12. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce qu'une somme soit mise à la charge de l'Etat qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante.
DECIDE :
Article 1er : Il n'y a pas lieu de statuer sur la requête n° 20LY03599.
Article 2 : Le jugement n° 2004435 du tribunal administratif de Lyon du 20 novembre 2020 est annulé.
Article 3 : La demande présentée par M. G... devant le tribunal administratif de Lyon et ses conclusions présentées au titre des frais du litige sont rejetées.
Article 4 : Le présent arrêt sera notifié au ministre de l'intérieur, à M. C... G... et à Me B....
Copie en sera adressée au préfet de l'Ain.
Délibéré après l'audience du 1er avril 2021, à laquelle siégeaient :
Mme E..., président,
Mme Duguit-Larcher, premier conseiller,
M. Rivière, premier conseiller.
Rendu public par mise à disposition au greffe le 29 avril 2021.
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N° 20LY03599 - N° 20LY03600