Procédure devant la cour
Par une requête enregistrée le 8 mars 2016, MmeE..., représenté par Me D..., demande à la cour :
1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Lyon du 15 décembre 2015 ;
2°) d'annuler l'arrêté du préfet de la Loire du 27 février 2015 ;
3°) d'enjoindre au préfet de la Loire de lui délivrer un titre de séjour temporaire dans le délai de 15 jours à compter de la notification du jugement à intervenir sous astreinte de 75 euros par jour de retard, à défaut, d'enjoindre au préfet de réexaminer sa situation dans le délai de 15 jours à compter de la notification du jugement à intervenir et de lui délivrer dans l'attente, un récépissé de demande de titre de séjour, sous astreinte de 75 euros par jour de retard ;
4°) de mettre à la charge de l'Etat le versement d'une somme de 1 000 euros, au profit de son conseil, en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991.
Elle soutient que :
- l'arrêté litigieux est insuffisamment motivé ;
- le refus de titre de séjour et l'obligation de quitter le territoire français sont entachés d'erreur de droit au regard des dispositions du 11° de l'article L. 313-11 et du 10° de l'article L. 511-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, méconnaissent les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et sont entachés d'erreur manifeste d'appréciation quant à leurs conséquences sur la situation de son fils ;
- la décision fixant le pays de renvoi est illégale en raison de l'illégalité du refus de séjour et de la mesure d'éloignement et méconnaît les stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.
Par un mémoire enregistré le 11 avril 2016, le préfet de la Loire s'en remet à ses écritures de première instance.
Mme E...a été admise au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 27 janvier 2016.
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu :
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- la loi n° 79-587 du 11 juillet 1979 ;
- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;
- le code de justice administrative ;
Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Le rapport de Mme Samson-Dye a été entendu au cours de l'audience publique.
1. Considérant que MmeE..., ressortissante serbe, relève appel du jugement par lequel le tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 27 février 2015 par lequel le préfet de la Loire a refusé de lui délivrer un titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans le délai de trente jours et a fixé le pays à destination duquel elle pourra, le cas échéant, être reconduite d'office ;
Sur la légalité de l'arrêté préfectoral :
En ce qui concerne la légalité externe :
2. Considérant que le refus de titre de séjour précise les dispositions du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile sur lesquelles il se fonde et mentionne les éléments de fait qui le justifient ; que, s'agissant plus particulièrement de la vie privée et familiale de la requérante, il rappelle ses conditions d'entrée en France et mentionne que son époux et son fils aîné font également l'objet de mesures d'éloignement ; que cette décision est, dès lors, suffisamment motivée, alors même qu'elle n'évoque pas les enfants mineurs F...E... ; qu'en application de l'article L. 511-1-I du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, l'obligation de quitter le territoire français n'a pas à faire l'objet d'une motivation distincte de celle de la décision relative au séjour ; que la décision fixant le pays de renvoi comporte les considérations de fait et de droit qui en constituent le fondement ; qu'ainsi, le moyen tiré de l'insuffisante motivation de l'arrêté litigieux doit être écarté ;
En ce qui concerne la légalité interne :
S'agissant du refus de titre de séjour :
3. Considérant, en premier lieu, qu'aux termes de l'article L. 311-12 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, une autorisation provisoire de séjour peut être délivrée à l'un des parents étranger de l'étranger mineur qui remplit les conditions mentionnées au 11° de l'article L. 313-11, sous réserve qu'il justifie résider habituellement en France avec lui et subvenir à son entretien et à son éducation, sans que la condition prévue à l'article L. 311-7 soit exigée. L'autorisation provisoire de séjour mentionnée au premier alinéa, qui ne peut être d'une durée supérieure à six mois, est délivrée par l'autorité administrative, après avis du médecin de l'agence régionale de santé de la région de résidence de l'intéressé, désigné par le directeur général de l'agence, ou, à Paris, du médecin, chef du service médical de la préfecture de police, dans les conditions prévues au 11° de l'article L. 313-11. (...) " ; que l'article L. 313-11 du même code dispose : " Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention "vie privée et familiale" est délivrée de plein droit : (...) 11° A l'étranger résidant habituellement en France dont l'état de santé nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait entraîner pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité, sous réserve de l'absence d'un traitement approprié dans le pays dont il est originaire, sauf circonstance humanitaire exceptionnelle appréciée par l'autorité administrative après avis du directeur général de l'agence régionale de santé, sans que la condition prévue à l'article L. 311-7 soit exigée. La décision de délivrer la carte de séjour est prise par l'autorité administrative, après avis du médecin de l'agence régionale de santé de la région de résidence de l'intéressé, désigné par le directeur général de l'agence, ou, à Paris, du médecin, chef du service médical de la préfecture de police. (...) " ;
4. Considérant que, pour refuser de délivrer à Mme E...le titre de séjour qu'elle avait sollicité en se prévalant de l'état de santé de son filsC..., le préfet s'est approprié les motifs retenus par le médecin de l'agence régionale de santé dans son avis du 3 février 2015, estimant qu'un défaut de prise en charge de l'enfant ne devrait pas entraîner de conséquences d'une exceptionnelle gravité et qu'un traitement approprié existe dans son pays d'origine ;
5. Considérant que les pièces du dossier, et en particulier les documents produits par la requérante, sont insuffisamment précises quant aux conséquences exactes d'une absence de prise en charge de la pathologie de l'enfant, qui présente une infirmité motrice-cérébrale, pour mettre en cause la présomption résultant de l'avis du médecin de l'agence régionale de santé quant à l'absence de conséquences d'une exceptionnelle gravité ; que, de même, ni le rapport de l'OSAR, ni le fait que la pathologie n'avait pas été diagnostiquée en Serbie, ni l'absence de commercialisation dans ce pays de l'un des médicaments actuellement prescrits à l'enfant, ne permettent de tenir pour établi qu'aucun traitement approprié à l'état du jeune C...n'existe dans son pays d'origine, étant précisé qu'un traitement adéquat n'est pas nécessairement identique à celui dont l'intéressé bénéficie en France ; que, dans ces conditions, contrairement à ce que soutient la requérante, son enfant ne remplit pas les conditions prévues par le 11° de l'article L. 313-11 ; qu'il ne ressort par ailleurs pas des pièces du dossier que le refus de séjour serait entaché d'erreur manifeste d'appréciation au regard de la situation de cet enfant ;
6. Considérant, en second lieu, que, pour soutenir que le refus de séjour porte une atteinte disproportionnée à son droit au respect de sa vie privée et familiale, la requérante invoque notamment, la scolarisation de sa fille, le fait que son fils aîné présente des troubles autistiques et le risque de persécution de la famille en cas de retour dans son pays d'origine ;
7. Considérant qu'il ressort toutefois des pièces du dossier que Mme E...et sa famille résident en France depuis moins de deux ans à la date de l'arrêté litigieux ; que la requérante ne conteste pas que son époux et son fils aîné ne disposent pas d'un droit au séjour en France et font l'objet de mesures d'éloignement ; que l'impossibilité de mener une vie familiale hors de France n'est pas établie ; que, dès lors, le refus de titre de séjour qui a été opposé à la requérante ne méconnaît pas les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ; qu'au regard de l'ensemble des circonstances de l'espèce, cette décision n'est pas davantage entachée d'erreur manifeste d'appréciation quant à ses conséquences sur la situation de l'intéressée et de sa famille ;
8. Considérant, d'autre part, qu'il y a lieu, pour les mêmes motifs que ceux mentionnés au point 7, d'écarter les moyens tirés de la méconnaissance des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et de l'erreur manifeste d'appréciation ;
S'agissant de la décision fixant le pays de renvoi :
9. Considérant qu'en absence de démonstration de l'illégalité du refus de titre de séjour et de l'obligation de quitter le territoire français, Mme E...n'est pas fondée à exciper de l'illégalité de ces décisions ;
10. Considérant qu'aux termes de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " Nul ne peut être soumis à la torture ni à des peines ou traitements inhumains ou dégradants " ;
11. Considérant que si la requérante prétend être exposée à des risques en cas de retour dans son pays d'origine, elle ne produit aucun élément suffisamment probant permettant de démontrer la réalité et l'actualité de tels risques ;
12. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que Mme E...n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que les premiers juges ont rejeté sa demande ; que ses conclusions aux fins d'injonction, d'astreinte et celles tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 ne peuvent qu'être rejetées par voie de conséquence ;
DECIDE :
Article 1er : La requête de Mme E...est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à Mme A...E...et au ministre de l'intérieur. Copie en sera adressée au préfet de la Loire.
Délibéré après l'audience du 23 février 2017 à laquelle siégeaient :
M. d'Hervé, président,
Mme Michel, président-assesseur,
Mme Samson-Dye, premier conseiller.
Lu en audience publique, le 16 mars 2017.
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N° 16LY00884