- annulé la décision implicite par laquelle le préfet de la zone de défense et de sécurité sud-est a rejeté la demande de M. B... datée du 31 mai 2012 tendant à la révision de sa situation administrative ;
- condamné l'État à payer à M.B..., en réparation du préjudice découlant de sa perte de rémunération, pour la période du 1er juillet 2011 au 18 septembre 2014, une somme égale à la différence entre l'intégralité des traitements, primes et indemnités statutaires qu'il a effectivement perçus entre le 1er juillet 2011 et le 18 septembre 2014 et ceux qu'il aurait dû percevoir, au titre de cette période, en cas de déroulement de carrière identique aux brigadiers-chefs classés au cinquième échelon dudit grade, promus dans le grade de major à compter du 1er janvier 2010 et classés au premier échelon de ce dernier grade avec 24 mois d'ancienneté conservée ;
- et enjoint au ministre de l'intérieur de réexaminer la situation administrative de M. B... dans le délai de deux mois à compter de la notification du jugement.
Procédure devant la cour :
Par un recours enregistré le 20 novembre 2014, le ministre de l'intérieur demande à la cour d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Clermont-Ferrand du 18 septembre 2014 et de rejeter la requête de M. B....
Le ministre soutient que c'est à tort que le tribunal administratif de Clermont-Ferrand a jugé que M. B... avait été victime d'une rupture d'égalité de traitement fondée sur le fait que d'autres agents du même corps auraient bénéficié d'un avancement plus rapide alors que ces agents étaient placés dans des situations différentes et qu'il n'y a aucun droit au maintien d'une situation réglementaire.
Par un mémoire en défense enregistré le 6 février 2015, M. B... demande à la cour de rejeter le recours du ministre de l'intérieur et de confirmer le jugement en toutes ses dispositions.
M. B... fait valoir que la différence de reclassement opérée entre les majors nommés avant ou après le 1er janvier 2010 révèle une discrimination portant atteinte au principe d'égalité entre agents d'un même corps, dès lors que, par l'effet de l'article 6 du décret n° 2011-294, les seconds se sont vu attribuer un échelon supérieur ou égal à celui détenu par les premiers qui avaient pourtant été nommés antérieurement.
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu :
- la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 ;
- la loi n° 84-16 du 11 janvier 1984 ;
- le décret n° 2004-1439 du 23 décembre 2004 portant statut particulier du corps d'encadrement et d'application de la police nationale ;
- le décret n° 2009-1632 du 23 décembre 2009 modifiant le décret n° 2009-35 du 12 janvier 2009 fixant l'échelonnement indiciaire des corps et des emplois des personnels des services actifs de la police nationale ;
- le décret n° 2011-294 du 21 mars 2011 portant statut particulier du corps d'encadrement et d'application de la police nationale ;
- le code de justice administrative ;
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de Mme Gondouin,
- les conclusions de M. Dursapt, rapporteur public.
1. Considérant que M. B..., brigadier de police depuis le 1er mai 1996, puis promu au grade de brigadier-chef le 2 octobre 2004, a été promu à celui de major le 1er juillet 2008 ; que, par un arrêté du préfet de la zone de défense et de sécurité sud-est du 6 juin 2011, il a été reclassé, à compter du 1er juillet 2011, au 3ème échelon du grade de major de police avec une ancienneté conservée de 6 mois ; que M. B..., après avoir présenté un recours gracieux au préfet de la zone de défense et de sécurité sud-est le 31 mai 2012, a saisi le tribunal administratif de Clermont-Ferrand ; que, par un jugement du 18 septembre 2014, le tribunal administratif a fait droit à sa demande d'annulation de la décision rejetant implicitement sa demande de révision de sa situation administrative ; qu'il a également condamné l'État à lui verser les sommes correspondant à la différence entre les traitements, primes et indemnités perçus entre le 1er juillet 2011 et le 18 septembre 2014 et les sommes qu'il aurait dû percevoir au cours de la même période si sa carrière s'était déroulée de la même façon que celle des brigadiers-chefs classés au cinquième échelon de ce grade, promus dans celui de major à compter du 1er janvier 2010 et classés au premier échelon de ce dernier grade avec 24 mois d'ancienneté conservée ; que le ministre de l'intérieur, auquel le tribunal administratif a également enjoint de réexaminer la situation administrative de M. B..., relève appel de ce jugement ;
2. Considérant qu'aux termes du paragraphe I de l'article 19 du décret du 23 décembre 2004 visé ci-dessus dans sa rédaction alors applicable : " Les fonctionnaires promus au grade de major de police sont classés à un échelon comportant un traitement égal ou, à défaut, immédiatement supérieur à celui qu'ils percevaient en dernier lieu dans leur précédent grade. / Ils conservent le cas échéant leur ancienneté d'échelon dans les conditions et les limites fixées aux troisième et quatrième alinéas de l'article 8 " ; qu'aux termes des troisième et quatrième alinéas de l'article 8 du même décret dans sa rédaction alors applicable : " Les gardiens de la paix titularisés alors qu'ils avaient atteint l'échelon le plus élevé de leur précédent grade conservent leur ancienneté dans l'échelon dans les mêmes conditions et dans les mêmes limites lorsque l'augmentation de traitement consécutive à leur nomination est inférieure à celle que leur avait procurée leur nomination audit échelon. / Dans la limite de l'ancienneté exigée à l'article 10 ci-après pour une promotion à l'échelon supérieur, ils conservent l'ancienneté d'échelon qu'ils avaient acquise dans leur précédent grade lorsque l'augmentation de traitement consécutive à leur nomination est inférieure à celle que leur aurait procurée un avancement d'échelon dans leur précédent grade " ; que l'article 10 de ce texte, dans sa rédaction alors applicable, fixait à deux ans la durée du temps passé dans chaque échelon des grades de gardien de la paix, de brigadier de police, de brigadier-chef de police et de major de police pour accéder à l'échelon supérieur ;
3. Considérant que, le 1er juillet 2008, M. B... a été nommé au premier échelon du grade de major de police, sans ancienneté conservée, en application des dispositions précitées des articles 8 et 19 du décret du 23 décembre 2004 ; que ces mêmes dispositions, du fait de la modification des grilles indiciaires applicables aux grades de brigadier-chef et de major par le décret visé ci-dessus du 23 décembre 2009, ont permis aux brigadiers-chefs nommés au premier échelon du grade de major après le 1er janvier 2010 de conserver leur ancienneté acquise dans la limite de deux ans ; que l'article 6 du décret du 21 mars 2011 visé ci-dessus a, en outre, inséré dans le décret du 23 décembre 2004, dans sa rédaction alors applicable, un article 23-1 qui prévoit un reclassement des majors de police par modulation de leur ancienneté acquise ; que, selon la situation dans l'échelon à la date du reclassement, cette ancienneté acquise a pu être conservée sans modification, ou minorée de six mois, ou encore majorée de dix-huit mois à deux ans ; qu'en conséquence, les fonctionnaires nommés dans le grade de major après le 1er janvier 2010 ont pu être reclassés au 1er juillet 2011 à un échelon supérieur ou égal à ceux nommés dans ce grade antérieurement au 1er janvier 2010 ;
4. Considérant que le principe d'égalité ne s'oppose pas à ce que l'autorité investie du pouvoir réglementaire règle de façon différente des situations différentes ni à ce qu'elle déroge à l'égalité pour des raisons d'intérêt général pourvu que, dans l'un comme l'autre cas, la différence de traitement qui en résulte soit en rapport direct avec l'objet de la norme qui l'établit et ne soit pas manifestement disproportionnée au regard des motifs susceptibles de la justifier ;
5. Considérant que la combinaison des dispositions réglementaires précitées a eu pour effet d'inverser l'ordre d'ancienneté entre fonctionnaires déjà en fonctions et appartenant à un même corps ; que le ministre de l'intérieur ne fait état d'aucune circonstance exceptionnelle ou particulière justifiant, dans l'intérêt du service, des dispositions qui peuvent avoir pour effet de modifier l'avancement de ces fonctionnaires ; que, dès lors, comme l'ont relevé à bon droit les premiers juges, cette différence de traitement entre fonctionnaires appartenant à un même corps, selon la date à laquelle ils ont été promus dans le grade de major de police mais sans considération de leur ancienneté, est sans rapport avec l'objet des dispositions réglementaires dont elles sont issues ; que l'illégalité résultant de l'application combinée de ces dispositions à la situation de M. B... a entaché d'illégalité la décision implicite par laquelle le préfet de la zone de défense et de sécurité sud-est a rejeté la demande de l'intéressé tendant à la révision de sa situation administrative ;
6. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que le ministre de l'intérieur n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Clermont-Ferrand a annulé la décision implicite rejetant la demande de révision de la situation administrative de M. B... et condamné l'État à lui verser une indemnité en réparation du préjudice découlant de sa perte de rémunération ;
DÉCIDE :
Article 1er : Le recours du ministre de l'intérieur est rejeté.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié au ministre de l'intérieur et à M. A...B....
Copie en sera adressée au préfet de la zone de défense et de sécurité sud-est.
Délibéré après l'audience du 3 novembre 2016 où siégeaient :
M. d'Hervé, président,
Mme Michel, président-assesseur,
Mme Gondouin, premier conseiller.
Lu en audience publique, le 24 novembre 2016.
4
N° 14LY03525