Procédure devant la cour :
Par une requête enregistrée le 9 mai 2015, M. A...aliasE..., représenté par Me C..., demande à la cour :
1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Clermont-Ferrand du 9 avril 2015 ;
2°) d'annuler l'arrêté du préfet du Puy-de-Dôme en date du 9 octobre 2014 ;
3°) de mettre à la charge de l'Etat sur le fondement des dispositions combinées de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991, une somme de 1 000 euros, sous réserve de la renonciation à percevoir la part contributive de l'Etat à la mission d'aide juridictionnelle.
Il soutient que :
- c'est à tort que le préfet, qui a commis une erreur manifeste d'appréciation, et les premiers juges ont estimé qu'il était majeur, dès lors que l'acte de naissance certifié dont il se prévaut est authentique en application de l'article 47 du code civil, qu'il a été relaxé des poursuites pour faux et usage de faux qui avaient été engagées à son encontre et que le tribunal correctionnel s'est déclaré incompétent pour connaître d'infractions à la législation sur les stupéfiants qui lui étaient reprochées au motif qu'il était mineur ;
- l'obligation de quitter le territoire méconnaît les dispositions de l'article L. 511-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile dès lors qu'il est mineur.
Par un mémoire enregistré le 24 juillet 2015, le préfet du Puy-de-Dôme conclut au rejet de la requête.
Il soutient que :
- c'est à juste titre que le requérant a été regardé comme majeur, dès lors que l'acte dont il se prévaut est contrefait, que ce document est prétendument certifié conforme à Conakry le 27 avril 2013 alors que l'intéressé était entré en France le 2 avril, que les éléments relatifs à sa demande de visa dans le cadre du système Visabio ne peuvent qu'être regardés comme avérés, que la circonstance qu'il ait été relaxé de poursuites pénales pour usage de faux n'est pas de nature à établir sa minorité ;
- les dispositions du 1° de l'article L. 511-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ne sont pas méconnues.
Le bénéfice de l'aide juridictionnelle totale a été accordé à M. A...par décision du 17 juin 2015.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- le code civil,
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile,
- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991,
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.
Après avoir entendu au cours de l'audience publique le rapport de Mme Samson-Dye.
1. Considérant que M. D...A..., ressortissant guinéen, également connu sous le nom de B...E..., de même nationalité, relève appel du jugement du 9 avril 2015 par lequel le tribunal administratif de Clermont-Ferrand a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 9 octobre 2014 par lequel le préfet du Puy-de-Dôme lui a fait obligation de quitter le territoire français dans le délai de trente jours et a désigné le pays à destination duquel il sera renvoyé ;
2. Considérant, en premier lieu, que l'article 47 du code civil dispose : " Tout acte de l'état civil des Français et des étrangers fait en pays étranger et rédigé dans les formes usitées dans ce pays fait foi, sauf si d'autres actes ou pièces détenus, des données extérieures ou des éléments tirés de l'acte lui-même établissent, le cas échéant après toutes vérifications utiles, que cet acte est irrégulier, falsifié ou que les faits qui y sont déclarés ne correspondent pas à la réalité. " ;
3. Considérant que selon les dispositions de l'article R. 611-8 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Est autorisée la création (...) d'un traitement automatisé de données à caractère personnel dénommé VISABIO (...). Ce traitement a pour finalité de mieux garantir le droit au séjour des personnes en situation régulière et de lutter contre l'entrée et le séjour irréguliers des étrangers en France, en prévenant les fraudes documentaires et les usurpations d'identité (...)" ; qu'aux termes de l'article R. 611-9 de ce code : " Les données à caractère personnel enregistrées dans le traitement automatisé prévu à l'article R. 611-8 sont : / 1° Les images numérisées de la photographie et des empreintes digitales des dix doigts des demandeurs de visas, collectées par les chancelleries consulaires et les consulats français équipés du dispositif requis. (...) / 2° Les données énumérées à l'annexe 6-3 communiquées automatiquement par le traitement automatisé de données à caractère personnel dénommé Réseau mondial visas (...) lors de la demande et de la délivrance d'un visa. (...) " ; qu'aux termes de l'article R. 611-10 du même code : " Les données à caractère personnel mentionnées au 1° de l'article R. 611-9 peuvent également être collectées (...) : 1° Par les chancelleries consulaires et les consulats des autres Etats membres de l'Union européenne (...) " ; que, parmi les données énumérées à l'annexe 6-3 au code dont il s'agit figurent celles relatives à l'état civil, notamment le nom, la date et le lieu de naissance et aux documents de voyage du demandeur de visa ainsi que ses identifiants biométriques ;
4. Considérant que l'article 47 du code civil précité pose une présomption de validité des actes d'état civil établis par une autorité étrangère dans les formes usitées dans ce pays ; que, cependant, cette circonstance n'interdit pas aux autorités françaises de s'assurer de l'identité de la personne qui se prévaut de cet acte ; que, par ailleurs, il incombe à l'administration de renverser cette présomption en apportant la preuve du caractère irrégulier, falsifié ou non conforme à la réalité des actes en question ; que cette preuve peut être apportée par tous moyens et notamment par les données à caractère personnel enregistrées dans le traitement automatisé dénommé Visabio ;
5. Considérant que le requérant soutient que l'acte de naissance mentionnant la naissance d'un enfant dénommé Abdoulaye A...le 4 mai 1997 à Conakry est authentique ; que, cependant, il ressort des pièces produites par le préfet que la consultation du logiciel Visabio a révélé que l'intéressé était connu sous l'identité de B...E...et qu'il s'était vu délivrer un visa par les autorités consulaires françaises sur la base d'un passeport mentionnant une naissance le 10 février 1995 ; que le requérant ne développe aucune contestation argumentée sur le bien-fondé de ces éléments ; que, dans ces conditions, à supposer même que l'acte de naissance relatif à M. A...fut authentique, le requérant n'est pas fondé à s'en prévaloir puisqu'il ne s'agit pas de son propre acte de naissance ; que les circonstances que le requérant ait été relaxé de poursuites pénales pour faux et usage de faux, qu'il ait été confié aux services de l'aide sociale à l'enfance, que ce placement ait été confirmé par le juge des enfants et que le tribunal correctionnel se soit estimé incompétent pour connaître des infractions qui lui étaient reprochées au profit du tribunal des enfants, ne suffisent pas, par elles-mêmes, à remettre en cause le bien-fondé des éléments d'identité figurant dans le logiciel Visabio, compte tenu de la rédaction de ces décisions de justice, qui ne prend pas position avec certitude sur l'âge de l'intéressé ; que, dans ces conditions, c'est à juste titre que le préfet a regardé le requérant comme étant majeur à la date de l'arrêté litigieux ;
6. Considérant, en second lieu, que, pour le même motif tenant à son âge, le requérant n'est pas fondé à soutenir que la mesure d'éloignement méconnaît les dispositions du 1° de l'article L. 511-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, aux termes desquelles " Ne peuvent faire l'objet d'une obligation de quitter le territoire français : / 1° L'étranger mineur de dix-huit ans ; (...) " ;
7. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que le requérant n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal a rejeté sa demande ; que ses conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 ne peuvent, par suite, qu'être rejetées ;
DÉCIDE :
Article 1er : La requête de M. D...A...alias B...E...est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. D...A...alias B...E...et au ministre de l'intérieur. Copie en sera adressée au préfet du Puy-de-Dôme.
Délibéré après l'audience du 7 janvier 2016, où siégeaient :
- Mme Verley-Cheynel, président
- Mme Gondouin, premier conseiller,
- Mme Samson-Dye, premier conseiller.
Lu en audience publique, le 28 janvier 2016.
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N° 14LY00768
N° 15LY01566 3