Par une requête et quatre mémoires, enregistrés le 16 janvier 2019, 4 octobre 2019, 9 décembre 2019, 29 juin 2020 et 25 août 2020 (non communiqué), M. C..., représenté par Me D..., demande à la cour :
1°) d'annuler ce jugement du 20 novembre 2018 et de prononcer la réduction des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et de contributions sociales mises à sa charge pour 2010 et 2011 à hauteur de respectivement 244 487 euros et 136 681 euros, ainsi que la décharge des pénalités d'un montant respectif de 325 262 euros et 196 572 euros ;
2°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 1 500 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Il soutient que :
- les premiers juges ont retenu à tort l'irrecevabilité d'une partie des conclusions en décharge visant les pénalités ;
- la proposition de rectification du 23 décembre 2013 ne lui ayant pas été régulièrement notifiée avant le 31 décembre 2013, le droit de reprise était expiré lorsqu'il a reçu la proposition de rectification postérieurement au 1er janvier 2014 ;
- il s'inscrit en faux contre le procès-verbal de signification daté du 31 décembre 2013 et sollicite la mise en oeuvre de l'article R. 633-1 du code de justice administrative ;
- par voie de conséquence, les rappels en matière de revenus fonciers mis à sa charge pour l'année 2011 doivent être déchargés dès lors qu'ils procèdent de la remise en cause du déficit foncier constaté en 2010 lequel doit être regardé comme définitivement acquis au regard de l'expiration de délai de reprise pour ladite année ;
- la somme de 327 398,95 euros créditée sur son compte ouvert auprès de la société CIC Lyonnaise de banque en octobre 2011 provient du compte ouvert auprès du Crédit Suisse déclaré à l'administration fiscale en 2010 et constitue un virement de compte à compte non imposable en vertu des dispositions de l'article 1649 A du code général des impôts ;
- s'agissant des pénalités, celles visées dans la proposition de rectification du 23 décembre 2013 sont prescrites et la majoration de 40% de l'article 1758 du code général des impôts appliquée à l'imposition de la somme de 327 398 euros provenant du compte détenu en Suisse n'est pas justifiée dès lors que le compte suisse a fait l'objet d'une régularisation en 2010.
Par deux mémoires, enregistrés les 2 août et 28 novembre 2019, le ministre de l'action et des comptes publics conclut au rejet de la requête.
Il fait valoir que les moyens soulevés ne sont pas fondés.
Une ordonnance du 1er juillet 2020 a fixé la clôture de l'instruction au 28 août 2020.
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu :
- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;
- le code de justice administrative ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique :
- le rapport de Mme E..., première conseillère,
- et les conclusions de M. Vallechia, rapporteur public ;
Vu la note en délibéré, enregistrée le 23 octobre 2020, présentée pour M. C... ;
Considérant ce qui suit :
1. M. et Mme C... ont fait l'objet d'un examen fiscal de leur situation personnelle portant sur les années 2010 à 2012 à l'issue duquel ils se sont vu adresser deux propositions de rectifications, l'une du 23 décembre 2013 pour l'année 2010 et l'autre du 24 octobre 2014 pour l'année 2011, en matière d'impôt sur le revenu et de contributions sociales dans la catégorie des revenus fonciers ainsi qu'en raison de la taxation d'un virement en provenance de Suisse au titre de l'année 2011. M. C... relève appel du jugement par lequel le tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demande tendant à la réduction des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et de contributions sociales résultant de ces rectifications et mises à sa charge au titre des années 2010 et 2011, à hauteur respectivement de 244 487 euros et 136 681 euros, ainsi que des pénalités d'un montant respectif de 325 262 euros et 196 572 euros.
Sur la recevabilité de la demande de première instance :
2. Le montant des pénalités pouvant être contesté à la suite de la procédure administrative menée devant l'administration fiscale et résultant des avis d'imposition complémentaires émis en septembre 2016 et adressés à M. C... s'élevait, ainsi que l'a indiqué le tribunal, à une somme totale de 224 937 euros pour l'année 2010 et 152 477 euros pour l'année 2011. Contrairement à ce que soutient M. C..., ces sommes résultaient des pénalités appliquées aux différentes rectifications catégorielles opérées par l'administration portant notamment sur les bénéfices industriels et commerciaux. Par suite, les premiers juges ne se sont pas mépris sur la portée des conclusions présentées devant eux et ont à bon droit retenu l'irrecevabilité des conclusions en réduction portant sur le surplus des pénalités visées dans la demande, lequel n'était plus en litige avant l'introduction de la requête introductive d'instance des époux C....
Sur les conclusions à fin de réduction :
3. En premier lieu, aux termes de l'article L. 169 du livre des procédures fiscales, dans sa rédaction applicable au présent litige : " Pour l'impôt sur le revenu (...), le droit de reprise de l'administration des impôts s'exerce jusqu'à la fin de la troisième année qui suit celle au titre de laquelle l'imposition est due (...) ". Aux termes de l'article 189 du même livre : " La prescription est interrompue par la notification d'une proposition de rectification, par la déclaration ou la notification d'un procès-verbal, de même que par tout acte comportant reconnaissance de la part des contribuables et par tous les autres actes interruptifs de droit commun. (...)".
4. Eu égard à l'objet de ces dispositions, relatives à la détermination du délai dont dispose l'administration pour exercer son droit de reprise, la date d'interruption de la prescription est celle à laquelle le pli contenant la proposition de rectification a été présenté à l'adresse du contribuable. Il incombe à l'administration d'établir que le pli contenant la proposition de rectification est parvenu en temps utile au contribuable. Cette preuve peut résulter soit des mentions précises, claires et concordantes portées sur l'enveloppe, soit, à défaut, d'une attestation de l'administration postale ou d'autres éléments de preuve.
5. Il résulte de l'instruction que le pli contenant la proposition de rectification du 23 décembre 2013 concernant l'année 2010 a été notifié à M. C... le 26 décembre 2013 ainsi qu'il ressort des mentions figurant sur l'accusé de réception, produit par l'administration en défense, faisant apparaître la date du " 26/12/13 " apposée deux fois sur le document signé par l'intéressé. Si M. C... allègue que le pli ne contenait pas la proposition de rectification en question, il résulte des observations qu'il a présentées à l'administration fiscale le 26 février 2014 qu'il a, dès le 8 janvier 2014, sollicité une prorogation de délai pour présenter ses observations et il ne précise pas d'ailleurs à quelle date ultérieure au 26 décembre 2013 il aurait reçu ladite proposition indiquant de manière évasive qu'il en aurait eu notification après le 1er janvier 2014. Il résulte de ces éléments concordants que M. C... a eu notification de la proposition en question le 26 décembre 2013. Au surplus, cette proposition de rectification lui a également été signifiée par voie d'huissier à son domicile le 31 décembre 2013, sans qu'il ne résulte de l'instruction que cette signification ait été entachée d'irrégularités faisant obstacle à ce que sa date soit établie. Par suite, en application des dispositions précitées et sans qu'il soit besoin de mettre en oeuvre la procédure visée à l'article R. 633-1 du code de justice administrative, la proposition de rectification du 23 décembre 2013 a valablement interrompu la prescription du délai de reprise de l'administration afférent à l'année 2010.
6. En deuxième lieu, il résulte de ce qui vient d'être dit que le moyen soulevé par M. C... tiré de ce que l'administration ne pouvait remettre en cause le montant des déficits fonciers reportés en 2011 issus de l'année 2010, année atteinte par la prescription, doit être écarté. Au demeurant, dans le cadre du contrôle opéré, l'administration était en droit de remettre en cause les déficits fonciers d'années antérieures même prescrites, reportés par les contribuables sur leurs revenus des années vérifiées.
7. En troisième lieu, aux termes de l'article 1649 A du code général des impôts dans sa version applicable : " (...) Les administrations publiques, les établissements ou organismes soumis au contrôle de l'autorité administrative et toutes personnes qui reçoivent habituellement en dépôt des valeurs mobilières, titres ou espèces doivent déclarer à l'administration des impôts l'ouverture et la clôture des comptes de toute nature (1). / Les personnes physiques, les associations, les sociétés n'ayant pas la forme commerciale, domiciliées ou établies en France, sont tenues de déclarer, en même temps que leur déclaration de revenus ou de résultats, les références des comptes ouverts, utilisés ou clos à l'étranger. Les modalités d'application du présent alinéa sont fixées par décret (2). " Pour faire échec à la présomption ainsi prévue, il appartient au contribuable d'apporter la preuve que les sommes transférées n'entrent pas dans le champ d'application de l'impôt ou sont exonérées ou qu'elles constituent des revenus qui ont déjà été soumis à l'impôt.
8. Il résulte de la proposition de rectification du 24 octobre 2014 adressé à M. C... qu'une somme de 327 398,95 euros a été créditée le 20 octobre 2011 sur un compte bancaire ouvert auprès de la CIC Lyonnaise de banque appartenant à M. et Mme C.... En réponse à la demande d'éclaircissements adressée aux contribuables par l'administration, M. C... a précisé que cette somme provenait d'un compte ouvert en Suisse et régularisé auprès de l'administration fiscale en 2010. Toutefois, il ne résulte pas de l'instruction que le compte en question aurait fait l'objet d'une régularisation auprès de l'administration fiscale alors qu'il ressort de la réponse aux observations du contribuable du 21 mai 2015 que la régularisation des avoirs détenus à l'étranger par M. C... a porté sur un compte ouvert en 2008 auprès du crédit suisse portant un numéro différent de celui dont provient le transfert litigieux. En outre, il ne résulte pas davantage de l'instruction que M. C... aurait procédé à la déclaration de ce second compte en utilisant l'imprimé n° 3916 joint à la déclaration annuelle des revenus souscrite au titre de l'année 2011. Par suite, en application des dispositions précitées de l'article 1649 A du code général des impôts, il appartient à M. C..., contrairement à ce qu'il soutient, d'apporter la preuve que les sommes transférées en 2011 depuis son compte suisse n'entrent pas dans le champ d'application de l'impôt ou sont exonérées ou qu'elles constituent des revenus qui ont déjà été soumis à l'impôt.
9. Il n'est pas contesté que les avoirs régularisés portaient sur les déclarations d'impôt sur le revenu pour l'année 2007 et d'impôt de solidarité sur la fortune au titre des années 2008 et 2009 souscrites par M. C.... Ce dernier, qui se borne à produire le relevé d'opération afférent au virement litigieux, ne démontre pas que la somme en question résulterait des avoirs régularisés déjà soumis à l'impôt. Dans ces conditions, l'appelant ne fait pas échec à la présomption qui résulte de l'article 1649 A du code général des impôts et c'est à bon droit que l'administration a regardé la somme en cause comme un revenu imposable.
Sur les pénalités :
10. D'une part, compte tenu de ce qui a été dit au point 5, M. C... ne saurait utilement soutenir que les pénalités mises à sa charge pour 2010 seraient prescrites.
11. D'autre part, aux termes de l'article 1758 du même code : " En cas d'application des dispositions prévues au troisième alinéa de l'article 1649 A, (...), le montant des droits est assorti d'une majoration de 40 % (...) ".
12. L'administration ayant régulièrement imposé M. C... au titre des revenus pour l'année 2011 sur le fondement de l'article 1649 A du code général des impôts, comme il a été dit au point 9, il n'est pas fondé à demander la décharge des pénalités appliquées sur le fondement de l'article 1758 du code général des impôts.
13. Il résulte de ce qui précède que M. C... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demande tendant à la réduction des suppléments d'impôt sur le revenu et de contributions sociales mises à sa charge pour 2010 et 2011 ainsi que des pénalités afférentes. Les conclusions qu'il présente aux mêmes fins en appel doivent être rejetées, ainsi que, par voie de conséquence, celles présentées sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
DECIDE :
Article 1er : La requête de M. C... est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. B... C... et au ministre de l'économie, des finances et de la relance.
Délibéré après l'audience du 22 octobre 2020 à laquelle siégeaient :
M. Bourrachot, président de chambre,
Mme A..., présidente assesseure,
Mme E..., première conseillère.
Lu en audience publique, le 12 novembre 2020.
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N°19LY00221
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