Par une requête enregistrée le 4 mai 2020, M. E..., représenté par Me B..., avocat, demande à la cour :
1°) d'annuler ce jugement n° 1904903 du 17 mars 2020 du tribunal administratif de Lyon ;
2°) d'annuler pour excès de pouvoir les décisions susmentionnées ;
3°) d'enjoindre au préfet de lui délivrer un titre de séjour dans le délai de quinze jours à compter de la notification de l'arrêt, sous astreinte de 100 euros par jour de retard ;
4°) en cas d'annulation de l'obligation de quitter le territoire français et du refus de séjour pour illégalité externe, d'enjoindre au préfet de lui délivrer une autorisation provisoire de séjour comportant un droit de travail dans un délai de huit jours à compter de la notification de l'arrêt jusqu'à ce qu'il ait été statué à nouveau sur sa demande, et d'examiner à nouveau sa situation dans un délai de deux mois à compter de la notification de l'arrêt, le tout sous astreinte de 100 euros par jour de retard ;
5°) en cas d'annulation de la décision fixant le pays de renvoi, d'enjoindre au préfet de lui délivrer une assignation à résidence ;
6°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 800 euros, à son profit, en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Il soutient que :
- l'appel est recevable ;
- sa demande de titre de séjour en qualité d'étudiant n'ayant pas été examinée, le refus de titre de séjour est entaché d'un défaut de motivation, d'un défaut d'examen particulier de sa demande ainsi que d'une erreur de droit ;
- il réside en France avec ses parents et sa soeur et a accompli sa scolarité en France ; le refus de titre de séjour méconnaît le 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et de séjour des étrangers et du droit d'asile et l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ; cette décision est également entachée d'erreur manifeste d'appréciation ;
- il n'a pas sollicité d'admission exceptionnelle au séjour sur le fondement de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et de séjour des étrangers et du droit d'asile en qualité de salarié, mais seulement au titre de la vie privée et familiale ; ainsi le préfet en lui opposant seulement une absence de contrat visé par la direction des entreprises, de la concurrence, de la consommation, du travail et de l'emploi et le défaut de visa de long séjour, a entaché sa décision d'erreur de droit ;
- il justifie de considérations humanitaires et de motifs exceptionnels au sens de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et de séjour des étrangers et du droit d'asile et le refus du préfet est entaché d'erreur manifeste d'appréciation ;
- il aurait dû se voir délivrer un titre de séjour " étudiant " ainsi qu'une autorisation de travail conformément aux dispositions de l'alinéa 2 de l'article L. 5221-5 du code du travail ;
- l'obligation de quitter le territoire français est illégale, du fait de l'illégalité du refus de titre de séjour ;
- elle méconnait l'article L. 511-4 du code de l'entrée et de séjour des étrangers et du droit d'asile, l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et est entachée d'erreur manifeste d'appréciation ;
- la décision fixant le délai de départ volontaire est illégale du fait de l'illégalité des autres décisions ;
- elle est entachée d'erreur manifeste d'appréciation et méconnait l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- elle méconnait le II de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et de séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- la décision fixant le pays de renvoi est illégale du fait de l'illégalité des autres décisions.
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu :
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;
- le code de justice administrative ;
Le président de la formation de jugement ayant dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique :
- le rapport de Mme A..., présidente assesseure ;
- les observations de Me B..., représentant M. E... ;
Considérant ce qui suit :
1. M. E..., ressortissant bosnien, né le 4 octobre 1998, a déclaré être entré en France le 6 novembre 2012. Le 26 juin 2017, il a présenté une demande de titre de séjour. Par décisions du 21 mai 2019, le préfet du Rhône a refusé de lui délivrer un titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de renvoi. M. E... relève appel du jugement par lequel le tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demande tendant à l'annulation de ces décisions.
2. Il ressort des pièces du dossier que dans sa demande du 26 juin 2017, M. E... avait présenté une demande de titre de séjour au titre de sa vie privée et familiale sur le fondement du 7° de l'article L. 31311 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ainsi que sur celui de l'article L. 313-14 du même code, ainsi que le rappellent les décisions en litige. Toutefois, il ressort également des pièces du dossier et notamment de la demande précitée du 26 juin 2017, que M. E... avait également demandé un titre de séjour en qualité d'étudiant. Si le préfet relève dans les motifs de son refus de titre de séjour que l'intéressé a obtenu un CAP (certificat d'aptitude professionnelle) de coiffure en juin 2017 puis un CAP d'opérateur logistique en juin 2018 et " qu'il ne justifie d'aucune inscription pour l'année 2018-2019 ", il ne saurait être regardé du fait de ces seules indications comme ayant procédé à l'examen de la demande présentée par l'intéressé en vue de la délivrance d'un titre de séjour en qualité d'étudiant pour l'année 20172018. Dans ces conditions, le préfet ne peut être regardé comme ayant procédé à un examen complet des circonstances de l'affaire. Par suite, le refus de titre de séjour litigieux est, à cet égard, entaché d'une erreur de droit et doit être annulé ainsi que, par voie de conséquence, l'obligation de quitter le territoire français dont il est assorti et la décision fixant le pays de renvoi.
3. Il résulte de ce qui précède que, sans qu'il soit besoin de se prononcer sur les autres moyens de la requête, M. E... est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demande et à demander l'annulation de ce jugement et celle des décisions préfectorales qu'il conteste.
Sur les conclusions à fin d'injonction :
4. Aux termes de l'article L. 911-1 du code de justice administrative : " Lorsque sa décision implique nécessairement qu'une personne morale de droit public ou un organisme de droit privé chargé de la gestion d'un service public prenne une mesure d'exécution dans un sens déterminé, la juridiction, saisie de conclusions en ce sens, prescrit, par la même décision, cette mesure assortie, le cas échéant, d'un délai d'exécution. (...) ". Aux termes de l'article L. 911-2 du même code : " Lorsque sa décision implique nécessairement qu'une personne morale de droit public ou un organisme de droit privé chargé de la gestion d'un service public prenne à nouveau une décision après une nouvelle instruction, la juridiction, saisie de conclusions en ce sens, prescrit, par la même décision juridictionnelle, que cette nouvelle décision doit intervenir dans un délai déterminé. (...) ".
5. Aux termes de l'article L. 512-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Si l'obligation de quitter le territoire français est annulée, il est immédiatement mis fin aux mesures de surveillance prévues aux articles L. 513-4, L. 551-1, L. 552-4, L. 561-1 et L. 5612 et l'étranger est muni d'une autorisation provisoire de séjour jusqu'à ce que l'autorité administrative ait à nouveau statué sur son cas. / Si la décision de ne pas accorder de délai de départ volontaire ou la décision d'assignation à résidence est annulée, il est immédiatement mis fin aux mesures de surveillance prévues aux articles L. 551-1, L. 552-4, L. 561-1 et L. 561-2 (...) ".
6. Il résulte de ce qui précède qu'il y a lieu de prescrire au préfet du Rhône de délivrer, dans le délai de quinze jours, à M. E... une autorisation provisoire de séjour et de se prononcer sur sa situation dans le délai de deux mois suivant la notification du présent arrêt. Il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, d'assortir cette injonction d'une astreinte.
Sur les frais liés au litige :
7. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de l'État au profit du requérant la somme de 1 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
DECIDE :
Article 1er : Le jugement n° 1904903 du 17 mars 2020 du tribunal administratif de Lyon et les décisions du préfet du Rhône du 21 mai 2019 sont annulés.
Article 2 : Il est enjoint au préfet du Rhône de délivrer, dans le délai de quinze jours, à M. E... une autorisation provisoire de séjour et de se prononcer sur sa situation dans le délai de deux mois suivant la notification du présent arrêt.
Article 3 : L'Etat versera à M. E... la somme de 1 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 4 : Le surplus des conclusions de la requête est rejeté.
Article 5 : Le présent arrêt sera notifié à M. E..., au préfet du Rhône et au ministre de l'intérieur.
Copie en sera adressée au procureur de la République près le tribunal judiciaire de Lyon.
Délibéré après l'audience du 7 janvier 2021 à laquelle siégeaient :
M. Bourrachot, président de chambre,
Mme A..., présidente assesseure,
Mme F..., première conseillère.
Rendu public par mise à disposition au greffe le 28 janvier 2021.
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N° 20LY01396