Par une requête enregistrée le 10 février 2017, le préfet de Saône-et-Loire demande à la cour :
1°) d'annuler ce jugement du magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Dijon du 13 janvier 2017 ;
2°) de rejeter la demande de Mme A... devant le tribunal administratif.
Il soutient que le motif d'annulation retenu est infondé.
La requête a été communiquée à Mme B... A... qui n'a pas produit d'observation.
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu :
- le règlement (UE) n° 604/2013 du Parlement européen et du Conseil du 26 juin 2013 ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;
- le code de justice administrative ;
Le président de la formation de jugement ayant dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique le rapport de M. Clot, président ;
Considérant ce qui suit :
1. Mme A..., ressortissante géorgienne, née le 5 février 1985, déclare être entrée irrégulièrement en France le 15 août 2016. Le 30 août 2016, elle a sollicité la reconnaissance du statut de réfugiée. L'intéressée s'étant vu délivrer un visa par les autorités des Pays-Bas, le préfet de Saône-et-Loire a saisi les autorités de ce pays d'une demande de prise en charge. Ces autorités ayant donné leur accord le 14 octobre 2016, le préfet a, par arrêté du 16 décembre 2016, décidé le transfert de Mme A... aux autorités néerlandaises. Ledit préfet relève appel du jugement par lequel le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Dijon a annulé cette décision.
2. Aux termes de l'article 5 du règlement (UE) n° 604/2013 du 26 juin 2013 : " 1. Afin de faciliter le processus de détermination de l'État membre responsable, l'État membre procédant à cette détermination mène un entretien individuel avec le demandeur. Cet entretien permet également de veiller à ce que le demandeur comprenne correctement les informations qui lui sont fournies conformément à l'article 4. 2. L'entretien individuel peut ne pas avoir lieu lorsque: a) le demandeur a pris la fuite; ou b) après avoir reçu les informations visées à l'article 4, le demandeur a déjà fourni par d'autres moyens les informations pertinentes pour déterminer l'État membre responsable. L'État membre qui se dispense de mener cet entretien donne au demandeur la possibilité de fournir toutes les autres informations pertinentes pour déterminer correctement l'État membre responsable avant qu'une décision de transfert du demandeur vers l'État membre responsable soit prise conformément à l'article 26, paragraphe 1. 3. L'entretien individuel a lieu en temps utile et, en tout cas, avant qu'une décision de transfert du demandeur vers l'État membre responsable soit prise conformément à l'article 26, paragraphe 1. 4. L'entretien individuel est mené dans une langue que le demandeur comprend ou dont on peut raisonnablement supposer qu'il la comprend et dans laquelle il est capable de communiquer. Si nécessaire, les États membres ont recours à un interprète capable d'assurer une bonne communication entre le demandeur et la personne qui mène l'entretien individuel. 5. L'entretien individuel a lieu dans des conditions garantissant dûment la confidentialité. Il est mené par une personne qualifiée en vertu du droit national. 6. L'État membre qui mène l'entretien individuel rédige un résumé qui contient au moins les principales informations fournies par le demandeur lors de l'entretien. Ce résumé peut prendre la forme d'un rapport ou d'un formulaire type. L'État membre veille à ce que le demandeur et/ou le conseil juridique ou un autre conseiller qui représente le demandeur ait accès en temps utile au résumé. ".
3. Mme A... a bénéficié, avec le concours d'un interprète, d'un entretien individuel avec un agent de la préfecture, le 30 août 2016. La seule circonstance que le compte-rendu de cet entretien ne comporte pas l'indication de l'identité de l'agent qui l'a conduit ne suffit pas à établir qu'il n'a pas été régulièrement effectué par une personne qualifiée. Dès lors, c'est à tort que le magistrat désigné par le président du tribunal administratif s'est fondé sur ce motif pour annuler la décision en litige.
4. Il appartient toutefois à la cour, saisie de l'ensemble du litige par l'effet dévolutif de l'appel, d'examiner les autres moyens invoqués par Mme A....
5. L'article 7 du règlement (UE) n° 604/2013 du Conseil du 26 juin 2013 prévoit que : " 1. Les critères de détermination de l'État membre responsable s'appliquent dans l'ordre dans lequel ils sont présentés dans le présent chapitre. /2 La détermination de l'État membre responsable en application des critères énoncés dans le présent chapitre se fait sur la base de la situation qui existait au moment où le demandeur a introduit sa demande de protection internationale pour la première fois auprès d'un État membre. (...) ".
6. Aux termes de l'article 10 du règlement (UE) n° 604/2013 du 26 juin 2013 : " Si le demandeur a, dans un État membre, un membre de sa famille dont la demande de protection internationale présentée dans cet État membre n'a pas encore fait l'objet d'une première décision sur le fond, cet État membre est responsable de l'examen de la demande de protection internationale, à condition que les intéressés en aient exprimé le souhait par écrit ". L'article 2 du même règlement précise que les membres de la famille s'entendent, " dans la mesure où la famille existait déjà dans le pays d'origine ", comme le conjoint du demandeur et ses enfants mineurs.
7. Selon la décision en litige, le mari de Mme A... fait, comme elle, l'objet d'une décision de transfert à destination des Pays-Bas. Toutefois, l'intéressée qui soutient d'ailleurs avoir divorcé, conteste avoir exprimé par écrit le souhait d'un transfert à destination de ce pays et une telle circonstance ne ressort pas des pièces du dossier. Par suite, la décision de transfert en litige est illégale.
8. Il résulte de ce qui précède que le préfet de Saône-et-Loire n'est pas fondé à se plaindre de ce que, par le jugement attaqué, le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Dijon a annulé la décision en litige.
DÉCIDE :
Article 1er : La requête du préfet de Saône-et-Loire est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié au ministre d'État, ministre de l'intérieur et à Mme B... A....
Copie en sera adressée au préfet de Saône-et-Loire.
Délibéré après l'audience du 4 mai 2018 à laquelle siégeaient :
M. Clot, président de chambre,
M. Seillet, président assesseur,
M. Savouré, premier conseiller.
Lu en audience publique, le 31 mai 2018.
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N° 17LY00595