Procédure devant la cour :
Par une requête enregistrée le 19 novembre 2020, M. B..., représenté par Me C..., demande à la cour :
1°) d'annuler le jugement n° 2000218 du 21 juillet 2020 du tribunal administratif de Lyon ;
2°) d'annuler pour excès de pouvoir les décisions susmentionnées du préfet du Rhône du 5 septembre 2019 ;
3°) d'enjoindre au préfet du Rhône, à titre principal, de lui délivrer un certificat de résidence portant la mention " vie privée et familiale, dans un délai d'un mois à compter de la notification de l'arrêt à intervenir, sous astreinte de 50 euros par jour de retard, à titre subsidiaire, de réexaminer sa situation et lui délivrer une autorisation provisoire de séjour l'autorisant à travailler, sous astreinte ;
4°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 500 euros à verser à son conseil au titre des dispositions combinées de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991.
Il soutient que :
Sur la décision portant refus de titre de séjour :
- les stipulations du 1) de l'article 6 de l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 ont été méconnues ;
- les stipulations du 7) de l'article 6 de l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 ont été méconnues ;
- elle est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation de ses conséquences sur sa situation ;
- les stipulations du 5) de l'article 6 de l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 ainsi que celles de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ont été méconnues ;
Sur l'obligation de quitter le territoire français et la décision fixant le pays de renvoi :
- elle sont illégales en raison de l'illégalité de la décision portant refus de titre de séjour ;
- les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ont été méconnues ;
- les stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ont été méconnues ;
Sur l'interdiction de retour sur le territoire français :
- elle est illégale en raison de l'illégalité de la décision portant refus de titre de séjour ;
- elle a été prise en méconnaissance des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.
La requête a été communiquée au préfet du Rhône qui n'a pas produit de mémoire.
Par décision du 23 octobre 2020, la demande d'aide juridictionnelle présentée par M. B... a été rejetée au motif que l'action projetée apparaissait manifestement dépourvue de toute chance de succès.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- l'accord du 27 décembre 1968 relatif à la circulation, à l'emploi et au séjour en France des ressortissants algériens et de leurs familles ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;
- le code de justice administrative.
Le président de la formation de jugement a dispensé la rapporteure publique, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.
Le rapport de M. Pin, premier conseiller, a été entendu au cours de l'audience publique.
Considérant ce qui suit :
1. M. B..., ressortissant algérien né le 5 février 1971, qui déclare être entré en France en 1995, a sollicité, en dernier lieu le 11 juin 2018, son admission au séjour sur le fondement du 1), du 5) et du 7) de l'article 6 de l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968. Par un arrêté du 5 septembre 2019, le préfet du Rhône a refusé de faire droit à cette demande, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours, a fixé le pays de renvoi et a prononcé à son encontre une interdiction de retour sur le territoire français d'une durée de douze mois. M. B... relève appel du jugement du 21 juillet 2020 par lequel le tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cet arrêté.
Sur la légalité du refus de titre de séjour :
2. En premier lieu, aux termes de l'article 6 de l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 : " (...) Le certificat de résidence d'un an portant la mention " vie privée et familiale " est délivré de plein droit : 1) au ressortissant algérien, qui justifie par tout moyen résider en France depuis plus de dix ans (...) ".
3. M. B... soutient qu'à la date de l'arrêté attaqué, le 5 septembre 2019, il résidait habituellement en France depuis plus de dix ans, dès lors qu'il est entré sur le territoire national en 1995 et qu'il s'y est maintenu depuis lors. Toutefois, il se borne à produire, en particulier pour justifier de sa présence en France au cours de l'année 2011, une facture émise le 13 novembre 2011, une ordonnance médicale du 17 novembre 2011 ainsi qu'un avis d'imposition au titre des revenus de l'année 2011 indiquant un montant nul. Ces seules pièces, eu égard notamment à leur nature et leur faible nombre, sont insuffisantes pour justifier de sa résidence habituelle sur le territoire français durant l'année 2011. Dès lors, et sans qu'il soit besoin d'examiner les autres années, le préfet du Rhône n'a pas méconnu le 1) de l'article 6 de l'accord franco-algérien en estimant que M. B... ne remplissait pas la condition de présence habituelle sur le territoire français depuis plus de dix ans à la date de l'arrêté contesté.
4. En deuxième lieu, aux termes de l'article 6 de l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 : " (...) Le certificat de résidence d'un an portant la mention " vie privée et familiale " est délivré de plein droit : (...) 7) au ressortissant algérien, résidant habituellement en France, dont l'état de santé nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait entraîner pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité, sous réserve qu'il ne puisse pas effectivement bénéficier d'un traitement approprié dans son pays (...) ".
5. Par un avis émis le 28 décembre 2018, le collège de médecins de l'Office français de l'immigration et de l'intégration a estimé que si l'état de santé de M. B... nécessitait une prise en charge médicale et que son défaut pouvait entraîner des conséquences d'une exceptionnelle gravité, il pourrait, eu égard à l'offre de soins et aux caractéristiques du système de santé de son pays d'origine, y bénéficier effectivement d'un traitement approprié et que son état de santé lui permet de voyager sans risque vers ce pays. Le bien-fondé de cet avis, que le préfet s'est approprié et qui fait présumer que M. B... ne remplit pas les conditions mentionnées au 7) de l'article 6 de l'accord cité au point précédent, n'est pas remis en cause par les certificats médicaux produits par le requérant, dont aucun ne se prononce sur la possibilité de traitement en Algérie.
6. En troisième lieu, aux termes de l'article 6 de l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 : " (...) Le certificat de résidence d'un an portant la mention "vie privée et familiale" est délivré de plein droit : (...) 5) au ressortissant algérien, qui n'entre pas dans les catégories précédentes ou dans celles qui ouvrent droit au regroupement familial, dont les liens personnels et familiaux en France sont tels que le refus d'autoriser son séjour porterait à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des motifs du refus (...) ". Aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. 2. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui ".
7. Si M. B... soutient qu'il a fixé sur le territoire français le centre de ses intérêts personnels, il ne justifie pas y avoir tissé des liens personnels particuliers alors qu'il a vécu pour l'essentiel en Algérie, où vivent notamment sa mère ainsi que ses cinq frères et soeurs et où il peut bénéficier de soins appropriés à son état de santé. En outre, ainsi qu'il a été dit précédemment, le requérant, célibataire et sans enfant, n'établit pas, par les pièces qu'il produit, résider habituellement en France depuis 2009. Si M. B... fait valoir que la décision contestée a pour effet de le priver du bénéfice de l'allocation pour adultes handicapés, cette circonstance n'est pas de nature à lui conférer un droit au séjour. La circonstance qu'il s'est engagé dans une démarche de formation ne suffit pas à démontrer une intégration particulière. En outre, il a fait l'objet de mesures d'éloignement en 1995, 2000, 2013, 2014 et 2016. Par suite, dans les circonstances de l'espèce, eu égard notamment aux conditions de séjour de M. B... en France, le préfet, en adoptant la décision attaquée, n'a pas porté au droit au respect de la vie privée et familiale de l'intéressé une atteinte disproportionnée aux buts en vue desquels cette décision a été prise. Dès lors, les moyens tirés de la méconnaissance des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ainsi que de celles du 5) de l'article 6 de l'accord franco-algérien ne peuvent être accueillis.
8. En dernier lieu, il résulte des circonstances de fait énoncées précédemment qu'en refusant de délivrer un titre de séjour à M. B..., le préfet du Rhône n'a pas commis d'erreur manifeste d'appréciation quant aux conséquences de sa décision sur la situation personnelle de l'intéressé, et en particulier sur son état de santé.
Sur la légalité des décisions portant obligation de quitter le territoire français et fixant le pays de destination de cette mesure d'éloignement :
9. En premier lieu, il résulte de l'examen de la légalité du refus de titre de séjour qui lui a été opposé que M. B... n'est pas fondé à exciper de l'illégalité de ce refus à l'encontre de la décision lui faisant obligation de quitter le territoire français, ni, en tout état de cause, de la décision fixant le pays de renvoi.
10. En deuxième lieu, en l'absence de toute argumentation supplémentaire, pour les mêmes motifs que ceux qui ont été énoncés au point 7, le moyen tiré de la méconnaissance, par l'obligation de quitter le territoire français et la décision fixant le pays de renvoi, des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, doit être écarté.
11. En troisième lieu, M. B..., qui ne fait état d'aucun risque personnel qu'il courrait en cas de retour dans son pays d'origine, n'est ainsi pas fondé à soutenir que la décision fixant le pays de renvoi méconnaitrait les stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.
Sur la légalité de la décision portant interdiction de retour sur le territoire français pour une durée de douze mois :
12. En premier lieu, les moyens tendant à l'annulation de la décision du préfet du Rhône refusant de lui délivrer un titre de séjour étant écartés, M. B... n'est, en tout état de cause, pas fondé à exciper de l'illégalité de ce refus au soutien de ses conclusions tendant à l'annulation de la décision l'interdisant de retour sur le territoire français pour une durée de douze mois.
13. En second lieu, en l'absence de toute argumentation supplémentaire, pour les mêmes motifs que ceux qui ont été énoncés au point 7, le moyen tiré de la méconnaissance, par la décision portant interdiction de retour sur le territoire français contestée, des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, doit être écarté.
14. Il résulte de ce qui précède que M. B... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demande. Par voie de conséquence, ses conclusions aux fins d'injonction et d'astreinte ainsi que celles tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 doivent également être rejetées.
DECIDE :
Article 1er : La requête de M. B... est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. B... et au ministre de l'intérieur. Copie en sera adressée au préfet du Rhône.
Délibéré après l'audience du 29 avril 2021, à laquelle siégeaient :
M. Pourny, président de chambre,
M. Gayrard, président assesseur,
M. Pin, premier conseiller.
Rendu public par mise à disposition au greffe le 1er juin 2021.
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N° 20LY03378