Procédure devant la cour :
Par une requête enregistrée le 3 juillet 2018, M. C..., représenté par Me E..., demande à la cour :
1°) d'annuler le jugement du 12 juin 2018 du tribunal administratif de Lyon ;
2°) d'annuler pour excès de pouvoir les décisions du 9 janvier 2018 du préfet du Rhône ;
3°) d'enjoindre au préfet du Rhône de lui délivrer un certificat de résidence portant la mention " vie privée et familiale " ou de réexaminer sa situation dans un délai d'un mois à compter de la notification de l'arrêt sous astreinte de 100 euros par jour de retard ;
4°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 200 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 75-1 de la loi du 10 juillet 1991.
Il soutient que :
- le préfet s'est abstenu de saisir la commission du titre de séjour alors qu'il établit résider en France depuis plus de dix ans ;
Sur l'illégalité du refus de délivrance d'un titre de séjour :
- la décision méconnait le 1 de l'article 6 de l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 modifié dès lors qu'il est entré en France le 26 avril 2011 et qu'il apporte la preuve qu'il réside depuis cette date en France ; la période circonscrite par le tribunal administratif en 2016 n'est pas identique à celle qui doit désormais être prise en compte dès lors qu'il a déposé sa demande de titre le 3 octobre 2017 et la durée de son séjour sur le territoire doit être examinée à compter de l'année 2007 ;
- la décision méconnaît le 5 de l'article 6 de l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 modifié et les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales dès lors qu'à tout le moins, il est présent en France depuis 2009, il a tissé des liens en France et est bien intégré ; il bénéficie de promesses d'embauche; il n'est plus en contact avec les membres de sa famille résidant en Algérie ;
Sur la légalité de l'obligation de quitter le territoire français :
- la décision est illégale du fait de l'illégalité de la décision refusant la délivrance d'un titre de séjour ;
- la décision est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation et méconnaît l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales compte tenu de sa présence en France depuis près de 16 ans et des liens qu'il y a noués ;
Sur la légalité de l'interdiction de retour sur le territoire français :
- la décision est illégale du fait de l'illégalité de la décision refusant la délivrance d'un titre de séjour et de l'obligation de quitter le territoire français ;
- la décision est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation et méconnaît l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales dès lors que le préfet n'a pas pris en compte la durée de son séjour en France depuis 2001 et à tout le moins depuis 2009 et qu'il a ses attaches privés et familiales en France ;
Sur la légalité de la décision fixant le pays de destination :
- la décision est illégale en raison de l'illégalité affectant l'obligation de quitter le territoire français.
M. C... n'a pas été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle par une décision du 11 juillet 2018.
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu :
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 modifié relatif à la circulation, à l'emploi et au séjour des ressortissants algériens et de leurs familles ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- la loi n° 91-647du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique ;
- le code de justice administrative.
Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
A été entendu au cours de l'audience publique le rapport de Mme B....
Considérant ce qui suit :
1. M. C..., ressortissant algérien né le 8 mars 1950, est entré en France en avril 2001 sous couvert d'un visa de court séjour. Par des décisions du 24 février 2009, 3 février 2011 et 28 mars 2013, le préfet de la Haute-Savoie a refusé de délivrer à M. C... un certificat de résidence portant la mention " vie privée et familiale " ou " salarié " et a assorti ces refus de l'obligation de quitter le territoire français. La cour administrative d'appel de Lyon a confirmé la légalité des décisions des 3 février 2011 et 28 mars 2013. Par décisions du 11 juin 2015, le préfet du Rhône a également refusé de délivrer à l'intéressé un titre de séjour portant la mention " vie privée et familiale ", l'a obligé à quitter le territoire français et a pris à son encontre une interdiction de retour sur le territoire français d'une durée de deux ans. Par un arrêt n° 16LY01882 du 15 décembre 2016, la cour administrative d'appel de Lyon a confirmé la légalité de ces décisions du 11 juin 2015. Le 6 octobre 2017, M. C... a sollicité la délivrance d'un titre de séjour en application du 1 et du 5 de l'article 6 de l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 modifié. Par décisions du 9 janvier 2018, le préfet du Rhône a rejeté sa demande, l'a obligé à quitter le territoire français dans un délai de trente jours, a fixé le pays de renvoi et a prononcé à son encontre une interdiction de retour sur le territoire français pour une durée de deux ans. M. C... relève appel du jugement du 12 juin 2018 par lequel le tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demande.
Sur la légalité du refus de délivrance d'un titre de séjour :
2. Aux termes du 1) de l'article 6 de l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 modifié : " Le certificat de résidence d'un an portant la mention " vie privée et familiale " est délivré de plein droit : 1) au ressortissant algérien, qui justifie par tout moyen résider en France depuis plus de dix ans ou plus de quinze ans si, au cours de cette période, il a séjourné en qualité d'étudiant (...) ".
3. M. C... indique être entré en France en avril 2001 sous couvert d'un visa de court séjour et n'avoir pas quitté le territoire français depuis cette date. Toutefois, en ce qui concerne l'année 2006, il se borne à produire une fiche d'actes de soins dentaires réalisés les 21 mai, 17 et 19 juin, 15 juillet et 4 septembre, deux lettres du 31 mai et du 7 juillet de son conseil au bureau des étrangers de la préfecture de la Haute-Savoie et des promesses d'embauche ; pour l'année 2007, une facture du 21 janvier, une attestation d'une société indiquant qu'il s'est présenté en février en vue d'une embauche, une promesse d'embauche du 13 mars, du 19 avril et du 16 mai, un certificat d'inscription de M. C... auprès de deux agences d'intérim pour l'année 2007 ; pour l'année 2008, une promesse d'embauche du 11 février, des honoraires d'avocat ne comportant aucune adresse en date du 25 avril, une lettre de son conseil du 25 avril, 11 juin et 4 novembre 2008 ne comportant aucune adresse d'envoi, une lettre de son conseil à la préfecture du 25 avril et 11 juin ; pour l'année 2009, une demande d'aide médicale d'état, un courrier de son conseil du 22 juin et 6 juillet adressé à l'Escale - Accueil de jour, qui assure la domiciliation des personnes sans domicile, une attestation du 9 juillet d'une société indiquant que M. C... s'est présenté en vue d'une embauche, une attestation d'une société de travail temporaire précisant que M. C... est inscrit dans les fichiers de la société depuis 2007, une note d'honoraires de son conseil du 3 juillet adressé à M. C... résidant chez Mme D..., un envoi chronospost par Mme D... au conseil de M. C..., un mandat cash de juillet à son conseil ; pour l'année 2010, deux lettres de son conseil du 1er avril et du 28 juin adressée à M. C... résidant chez Mme A... D... et des lettres des 30 juillet, 14 octobre, 18 octobre adressées à M. C... domicilié à l'Escale, une attestation de ce que M. Hamimid a contacté une entreprise de carrelages sans autre précision, des lettres de son conseil du 16 septembre et 7 décembre adressées à la préfecture de la Haute-Savoie ; pour l'année 2011, une lettre de son conseil à la préfecture de la Haute-Savoie du 1er février, des lettres de son conseil du 1er, 9, 14 février et du 7 avril et 22 et 29 août adressées à M. C... domicilié .... Ces pièces sont insuffisamment probantes pour justifier de la présence habituelle de M. C... sur le territoire français au cours de ces années. Par suite, le requérant, qui ne justifie pas remplir la condition de dix ans de résidence en France en établissant y résider habituellement pour l'ensemble de ces années, n'est pas fondé à soutenir que le préfet du Rhône a méconnu les stipulations du 1) de l'article 6 de l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 modifié en refusant de lui délivrer un certificat de résidence.
4. Aux termes du 5) de l'article 6 de l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 modifié : " Le certificat de résidence d'un an portant la mention 'vie privée et familiale' est délivré de plein droit : (...) / 5) au ressortissant algérien, qui n'entre pas dans les catégories précédentes ou dans celles qui ouvrent droit au regroupement familial, dont les liens personnels et familiaux en France sont tels que le refus d'autoriser son séjour porterait à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des motifs du refus ; (...) ". Aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance " et " il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l 'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui ".
5. M. C... fait valoir que depuis son arrivée en France en 2001, à l'âge de 51 ans, il a tissé des liens et disposent d'attaches sur le territoire français et qu'il fait preuve d'une réelle volonté d'intégration professionnelle. Toutefois, comme il a été dit au point 3, M. C... n'établit pas résider habituellement en France depuis dix ans à la date de la décision critiquée. Le requérant n'a pas exécuté les différentes obligations de quitter le territoire français dont il a fait l'objet depuis 2009. Il ne se prévaut d'aucune insertion sociale particulière en France et la circonstance qu'il bénéficie de promesses d'embauche ne saurait suffire à démontrer une insertion professionnelle. Par ailleurs, il n'établit pas qu'il a fixé le centre de ses intérêts personnels et familiaux en France et ce alors qu'il ne conteste pas que son épouse et ses huit enfants, ainsi que ses frères et soeurs résident en Algérie où il a vécu l'essentiel de son existence. Par suite, il n'est pas fondé à soutenir que le préfet a porté une atteinte disproportionnée au droit au respect de sa vie privée et familiale et a méconnu les stipulations précitées du 5) de l'article 6 de l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 modifié et de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.
6. Aux termes de l'article L. 312-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, également applicable aux ressortissants algériens : " La commission est saisie par l'autorité administrative lorsque celle-ci envisage de refuser de délivrer ou de renouveler une carte de séjour temporaire à un étranger mentionné à l'article L. 313-11 ou de délivrer une carte de résident à un étranger mentionné aux articles L. 314-11 et L. 314-12, ainsi que dans le cas prévu à l'article L. 431-3 (...) ". Il résulte de ces dispositions que le préfet est tenu de saisir la commission du titre de séjour du cas des seuls étrangers qui remplissent effectivement les conditions prévues aux dispositions précitées, auxquels il envisage de refuser le titre de séjour sollicité et non de celui de tous les étrangers qui se prévalent de ces dispositions.
7. M. C... ne justifiant pas remplir les conditions pour obtenir de plein droit un titre de séjour sur le fondement des stipulations de l'accord franco-algérien susvisé, le préfet du Rhône n'était pas tenu de soumettre son cas à la commission du titre de séjour avant de rejeter sa demande.
Sur la légalité de la décision portant obligation de quitter le territoire français :
8. Il résulte de l'examen de la légalité de la décision de refus de délivrance d'un titre de séjour que le requérant n'est pas fondé à exciper de l'illégalité de cette décision à l'appui de ses conclusions dirigées contre l'obligation de quitter le territoire français prise à son encontre.
9. En l'absence de tout élément particulier invoqué spécifiquement à l'encontre de la décision portant obligation de quitter le territoire français, les moyens tirés de la méconnaissance des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et de l'erreur manifeste d'appréciation doivent être écartés pour les mêmes motifs que ceux précisés au point 5.
Sur la légalité de l'interdiction de retour sur le territoire français :
10. Il ressort des termes des dispositions du III de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile que l'autorité compétente doit, pour décider de prononcer à l'encontre de l'étranger soumis à l'obligation de quitter le territoire français une interdiction de retour et en fixer la durée, tenir compte, dans le respect des principes constitutionnels, des principes généraux du droit et des règles résultant des engagements internationaux de la France, des quatre critères qu'elles énumèrent, sans pouvoir se limiter à ne prendre en compte que l'un ou plusieurs d'entre eux. La décision d'interdiction de retour doit comporter l'énoncé des considérations de droit et de fait qui en constituent le fondement, de sorte que son destinataire puisse à sa seule lecture en connaître les motifs. Si cette motivation doit attester de la prise en compte par l'autorité compétente, au vu de la situation de l'intéressé, de l'ensemble des critères prévus par la loi, aucune règle n'impose que le principe et la durée de l'interdiction de retour fassent l'objet de motivations distinctes, ni que soit indiquée l'importance accordée à chaque critère.
11. Il incombe ainsi à l'autorité compétente qui prend une décision d'interdiction de retour d'indiquer dans quel cas susceptible de justifier une telle mesure se trouve l'étranger. Elle doit par ailleurs faire état des éléments de la situation de l'intéressé au vu desquels elle a arrêté, dans son principe et dans sa durée, sa décision, eu égard notamment à la durée de la présence de l'étranger sur le territoire français, à la nature et à l'ancienneté de ses liens avec la France et, le cas échéant, aux précédentes mesures d'éloignement dont il a fait l'objet. Elle doit aussi, si elle estime que figure au nombre des motifs qui justifient sa décision une menace pour l'ordre public, indiquer les raisons pour lesquelles la présence de l'intéressé sur le territoire français doit, selon elle, être regardée comme une telle menace. En revanche, si, après prise en compte de ce critère, elle ne retient pas cette circonstance au nombre des motifs de sa décision, elle n'est pas tenue, à peine d'irrégularité, de le préciser expressément.
12. La décision d'interdiction de retour sur le territoire français durant deux années rappelle notamment que M. C... ne justifie pas de la durée de sa présence en France, qu'il a fait l'objet de quatre mesures d'éloignement dont une avec une interdiction de retour de deux ans, non exécutées volontairement, que la totalité de sa famille réside en Algérie et qu'il n'a aucune attache familiale en France. Par suite, le préfet du Rhône a pu, sans méconnaître les dispositions du III de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ni les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, et sans commettre d'erreur d'appréciation, prononcer à l'encontre de M. C... cette mesure d'interdiction de retour sur le territoire français et en fixer la durée à deux ans, alors même que sa présence ne constituait pas une menace à l'ordre public.
13. Les moyens dirigés contre les décisions portant refus de délivrance d'un titre de séjour et obligation de quitter le territoire français ayant été écartés, M. C... n'est pas fondé à exciper de leur illégalité à l'encontre de la décision portant interdiction de retour.
Sur la légalité de la décision fixant le pays de renvoi :
14. Les moyens dirigés contre la décision portant obligation de quitter le territoire français ayant été écartés, M. C... n'est pas fondé à exciper de son illégalité à l'encontre de la décision fixant le pays de renvoi.
15. Il résulte de tout ce qui précède que M. C... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demande. Ses conclusions aux fins d'injonction sous astreinte et celles tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative doivent être rejetées par voie de conséquence.
DECIDE:
Article 1er : La requête de M. C... est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. G... C... et au ministre de l'intérieur. Copie en sera adressée au préfet du Rhône.
Délibéré après l'audience du 10 octobre 2019, à laquelle siégeaient :
M. Pommier, président de chambre,
M. Drouet, président-assesseur,
Mme B..., premier conseiller.
Lu en audience publique le 8 novembre 2019.
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N° 18LY02518