Procédure devant la cour :
Par une requête enregistrée le 13 mars 2020, M. D..., représenté par Me E..., demande à la cour :
1°) d'annuler le jugement du 14 février 2020 du tribunal administratif de Grenoble ;
2°) d'annuler pour excès de pouvoir la décision du 15 octobre 2019 par laquelle le préfet de l'Isère a rejeté sa demande de titre de séjour ;
3°) d'enjoindre au préfet de l'Isère de lui délivrer un titre de séjour en application de l'article 7 bis de l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 modifié dans le mois suivant la notification de l'arrêt sous astreinte de 150 euros par jour de retard en application des dispositions de l'article L. 911-3 du code de justice administrative ; et, à défaut, de réexaminer sa situation dans le délai d'un mois à compter de l'arrêt à intervenir et de le mettre en possession d'une autorisation provisoire de séjour dans l'attente de ce réexamen sous astreinte de 150 euros par jour de retard en application de l'article L. 911-2 du code de justice administrative ;
4°) de lui accorder l'aide juridictionnelle provisoire ;
5°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 200 euros en application des dispositions de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 et de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Il soutient que :
- l'arrêté méconnaît le a) de l'article 7 bis de l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 modifié et est entaché d'une erreur manifeste d'appréciation dès lors qu'il n'a pas quitté le domicile conjugal au mois de juillet 2018, son épouse et lui-même résident toujours ensemble à Marseille ; leur communauté de vie est ancienne puisqu'ils se sont mariés en 2016 ;
- sa situation satisfait aux conditions fixées par l'article 6-2 de l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 modifié puisqu'il est marié avec une ressortissante française, son entrée sur le territoire français a été régulière, leur mariage a été retranscrit sur les registres de l'état civil français ;
- la décision méconnaît l'article L. 313-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile compte tenu de ce que seule la fraude peut conduire l'administration à refuser le renouvellement de son titre ;
M. D... a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 22 juillet 2020.
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu :
- l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 modifié ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile :
- la loi n° 91-76 du 10 juillet 1991 ;
- le code de justice administrative.
Le président de la formation de jugement ayant dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
A été entendu au cours de l'audience publique le rapport de Mme B...,
Considérant ce qui suit :
1. M. C... D..., ressortissant algérien né le 23 juillet 1992, est entré en France le 24 novembre 2017 sous couvert d'un visa de court séjour portant la mention " Famille de français " pour rejoindre son épouse, Mme A..., qu'il avait épousée le 14 septembre 2016 en Algérie. Il a obtenu la délivrance d'un certificat de résidence en qualité de conjoint de français valable jusqu'au 15 mai 2019. Le 24 avril 2019, il a sollicité le renouvellement de son titre de séjour sur le fondement du a) de l'article 7 bis de l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 modifié. Par un arrêté du 15 octobre 2019, le préfet de l'Isère a rejeté sa demande, l'a obligé à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de renvoi. M. D... relève appel du jugement du 14 février 2020 en tant que le tribunal administratif de Grenoble a rejeté sa demande tendant à l'annulation du refus de renouvellement de son titre de séjour.
Sur la légalité du refus de renouvellement du titre de séjour :
2. Aux termes des stipulations de l'article 7 bis de l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 modifié : " Le certificat de résidence valable dix ans est délivré de plein droit sous réserve de la régularité du séjour pour ce qui concerne les catégories visées au a), au b), au c) et au g) : a) Au ressortissant algérien, marié depuis au moins un an avec un ressortissant de nationalité française, dans les mêmes conditions que celles prévues à l'article 6 nouveau 2) et au dernier alinéa de ce même article ". Aux termes de l'article 6 de ce même accord : " Les dispositions du présent article ainsi que celles des deux articles suivants, fixent les conditions de délivrance et de renouvellement du certificat de résidence aux ressortissants algériens établis en France ainsi qu'à ceux qui s'y établissent, sous réserve que leur situation matrimoniale soit conforme à la législation française. / Le certificat de résidence d'un an portant la mention " vie privée et familiale " est délivré de plein droit : (...)/ 2) au ressortissant algérien, marié avec un ressortissant de nationalité française, à condition que son entrée sur le territoire français ait été régulière, que le conjoint ait conservé la nationalité française et, lorsque le mariage a été célébré à l'étranger, qu'il ait été transcrit préalablement sur les registres de l'état civil français ; (...)/ Le premier renouvellement du certificat de résidence délivré au titre du 2) ci-dessus est subordonné à une communauté de vie effective entre les époux. ".
3. Il ressort des termes de la décision attaquée que le préfet de l'Isère a rejeté la demande de renouvellement de titre de séjour de M. D... en raison de ce que l'intéressé n'apportait aucun élément établissant formellement l'existence d'une communauté de vie réelle et stable avec son épouse et que l'intéressé avait quitté le domicile conjugal en juillet 2018.
4. Si, pour établir l'existence d'une communauté de vie avec son épouse, M. D... produit un justificatif d'abonnement à un fournisseur d'énergie au nom des deux époux, une attestation sur l'honneur de son épouse du 19 novembre 2019 indiquant dans des termes très généraux " avoir toujours vécu et résidé en France " avec son mari, une déclaration de communauté de vie de son épouse auprès des services de la préfecture du 26 avril 2019, un contrat de location d'un appartement à Marseille établi au nom des deux époux mais signé uniquement par l'un des deux locataires, une déclaration des revenus 2018 au nom des deux époux mais qui ne fait mention que des revenus de Mme D..., ces pièces sont insuffisamment probantes pour établir la réalité de la vie commune entre les époux et ce alors que Mme D... a indiqué aux services de la préfecture de l'Isère par une attestation sur l'honneur du 11 octobre 2018 que son époux " a quitté le domicile conjugal le 10 juillet 2018 et qu'il n'est pas rentré depuis " et a précisé que M. D... " l'avait épousée pour les papiers ". S'il ressort d'une enquête de la brigade de la gendarmerie nationale effectuée le 24 juin 2019 à la demande du préfet de l'Isère que Mme D... a indiqué que son époux était revenu au domicile conjugal, les gendarmes ont constaté sur place l'absence d'affaires appartenant à M. D..., sans que son épouse n'apporte d'élément probant à l'appui de ses allégations selon lesquelles son mari travaillait depuis mai 2019 à Montpellier dans une entreprise d'intérim et ne revenait que le week-end. Dans ces conditions et s'agissant du premier renouvellement du titre de séjour attribué en qualité de conjoint de français, le préfet de l'Isère a pu, sans méconnaître les stipulations du 2 de l'article 6 et du a) de l'article 7 bis et de l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 modifié ni entacher sa décision d'une erreur manifeste d'appréciation, refuser de délivrer à l'intéressé le titre de séjour sollicité.
5. M. D... fait valoir également que l'arrêté méconnaît les dispositions, non pas comme indiqué à tort du 4° de l'article L. 313, mais du 4° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Toutefois, les conditions dans lesquelles les ressortissants algériens peuvent être admis à séjourner en France sont régies d'une manière complète par les stipulations de l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 modifié. Par suite, l'intéressé ne peut utilement invoquer les dispositions de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile à l'appui de sa demande de renouvellement de son titre de séjour.
6. Il résulte de tout ce qui précède, et sans qu'il y ait lieu d'accorder l'aide juridictionnelle provisoire dès lors que l'intéressé a été admis à l'aide juridictionnelle totale par décision du bureau d'aide juridictionnelle en date du 22 juillet 2020, que M. D... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Grenoble a rejeté sa demande. Ses conclusions aux fins d'injonction et d'astreinte et celles tendant à ce qu'il soit mis à la charge de l'Etat une somme au titre des frais exposés par lui et non compris dans les dépens doivent être rejetées par voie de conséquence.
DECIDE :
Article 1er : La requête de M. D... est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. C... D... et au ministre de l'intérieur.
Copie en sera adressée au préfet de l'Isère.
Délibéré après l'audience du 10 septembre 2020, à laquelle siégeaient :
M. Pommier, président de chambre,
M. Gayrard, président assesseur,
Mme B..., premier conseiller.
Lu en audience publique le 24 septembre 2020.
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N° 20LY01086