Par un jugement n° 1504472 du 14 octobre 2015, le tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demande.
Procédure devant la cour :
Par une requête, enregistrée le 13 novembre 2015, présentée pour M. B...A..., domicilié..., il est demandé à la cour :
1°) d'annuler ce jugement n° 1504472 du tribunal administratif de Lyon du 14 octobre 2015 ;
2°) d'annuler pour excès de pouvoir les décisions susmentionnées ;
3°) d'enjoindre au préfet du Rhône de lui délivrer un certificat de résidence temporaire, portant la mention "vie privée et familiale", ou de réexaminer sa demande, dans un délai d'un mois à compter de la notification de l'arrêt à intervenir, sous astreinte de cent euros par jour de retard ;
4°) de mettre à la charge de l'Etat le paiement à son conseil, sous réserve qu'il renonce à l'aide juridictionnelle, d'une somme de 1 200 euros au titre des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991.
Il soutient que :
- la décision de refus de titre est insuffisamment motivée et cette motivation insuffisante révèle une absence d'examen préalable et sérieux de sa situation ;
- le préfet aurait dû saisir à nouveau le médecin de l'agence régionale de santé pour que celui-ci complète son avis en indiquant s'il pouvait voyager sans risque vers son pays d'origine dès lors que le préfet entendait ne pas le suivre ;
- la décision méconnaît les stipulations du 7) de l'article 6 de l'accord franco-algérien en raison de l'absence de traitement disponible en Algérie et alors que le préfet n'apporte pas la preuve de cette disponibilité ;
- elle méconnaît les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et celles du 5) de l'article 6 de l'accord franco-algérien ;
- il est fondé à exciper de d'illégalité de la décision de refus de titre de séjour au soutien de ses conclusions dirigées contre la décision portant obligation de quitter le territoire ;
- la décision portant obligation de quitter le territoire français méconnaît les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation de ses conséquences sur sa situation personnelle ; elle méconnaît les dispositions du 10° de l'article L. 511-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- il est fondé à exciper de d'illégalité de la décision portant obligation de quitter le territoire français au soutien de ses conclusions dirigées contre la décision fixant le pays de destination.
Par un mémoire, enregistré le 21 juin 2016, le préfet du Rhône conclut au rejet de la requête, en s'en rapportant à ses écritures de première instance.
Par une décision du 7 janvier 2016 le bureau d'aide juridictionnelle près le tribunal de grande instance de Lyon (section administrative d'appel) a constaté la caducité de la demande de M. A... tendant à être admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle.
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu :
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 modifié ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- la loi n° 79-587 du 11 juillet 1979 ;
- le code de justice administrative.
Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique du 28 juin 2016 :
- le rapport de M. Seillet, président ;
- et les observations de Me Windey, avocat de M.A....
1. Considérant que M.A..., né le 2 septembre 1985 à Sidi Ali (Algérie), de nationalité algérienne, entré en France le 13 mai 2008 sous couvert d'un passeport revêtu d'un visa de court séjour, a fait l'objet d'un premier refus de titre de séjour, assorti d'une obligation de quitter le territoire, par décisions du préfet du Rhône du 25 février 2010, annulées par un jugement du tribunal administratif de Lyon du 13 juillet 2010, enjoignant au préfet du Rhône de lui délivrer un titre de séjour, à la suite duquel M. A...a bénéficié d'un certificat de résidence sur le fondement du 7) de l'article 6 de l'accord franco-algérien, valable du 13 juillet 2010 au 12 juillet 2011 ; que la cour a annulé ce jugement par un arrêt du 29 mars 2011 ; que le préfet du Rhône, par des décisions du 5 septembre 2011, a rejeté la demande de l'intéressé tendant à la délivrance d'un titre de séjour l'autorisant à exercer une activité commerciale et a assorti ce rejet d'une obligation de quitter le territoire ; que, par une nouvelle demande du 14 février 2014, M. A... a de nouveau sollicité un titre de séjour en se prévalant de son état de santé ; que sa demande a été rejetée par une décision du 24 avril 2014 du préfet du Rhône, assortie d'une obligation de quitter le territoire dans un délai de trente jours ; qu'à la suite du recours contentieux formé par le requérant, le tribunal administratif de Lyon a annulé les décisions du préfet du Rhône du 24 avril 2014 et a enjoint à ce dernier de réexaminer la situation de M. A... dans un délai de deux mois à compter de la notification du jugement ; que, par des décisions du 20 avril 2015, le préfet du Rhône, après un avis du médecin de l'agence régionale de santé de Rhône-Alpes du 7 janvier 2015, a refusé de délivrer à M. A... un titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire dans un délai de trente jours et a désigné un pays de destination ; que M. A... fait appel du jugement du 14 octobre 2015 par lequel le tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demande tendant à l'annulation de ces décisions préfectorales ;
Sur la légalité de la décision portant refus de délivrance d'un titre de séjour :
2. Considérant, en premier lieu, que la décision contestée énonce les considérations de droit et les raisons de fait justifiant le rejet de la demande de certificat de résidence présentée par M. A... sur le fondement du 7° de l'article 6 de l'accord franco-algérien et est ainsi suffisamment motivée au regard des exigences de l'article 3 de la loi du 11 juillet 1979, contrairement à ce que soutient le requérant ; qu'il ne ressort pas des pièces du dossier que le préfet du Rhône n'aurait pas procédé à un examen particulier de la situation de ce dernier ;
3. Considérant, en deuxième lieu, que, dans son avis du 7 janvier 2015, le médecin de l'agence régionale de santé a indiqué que l'état de santé de M. A... nécessite une prise en charge médicale dont le défaut peut entraîner des conséquences d'une exceptionnelle gravité et que l'intéressé ne pouvait bénéficier d'un traitement approprié dans son pays d'origine ; que, d'une part, en application des termes mêmes de l'article 4 de l'arrêté du 9 novembre 2011, ledit médecin n'était pas tenu, à peine d'irrégularité de son avis, d'indiquer si l'état de santé de l'intéressé lui permettait de voyager sans risque ; que, d'autre part, il ne ressort pas des pièces du dossier que l'état de santé de M. A... suscite des interrogations sur sa capacité à supporter un voyage à destination de son pays d'origine ; que, dès lors, le préfet du Rhône, auquel aucune disposition n'imposait de solliciter à nouveau le médecin de l'agence régionale de santé afin qu'il complète son avis sur ce point, n'a pas entaché d'irrégularité la décision en litige ;
4. Considérant, en troisième lieu, qu'aux termes de l'article 6 de l' accord franco-algérien du 27 décembre 1968 : " Le certificat de résidence d'un an portant la mention " vie privée et familiale " est délivré de plein droit : (...) 7) au ressortissant algérien, résidant habituellement en France, dont l'état de santé nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait entraîner pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité, sous réserve qu'il ne puisse pas effectivement bénéficier d'un traitement approprié dans son pays " ;
5. Considérant que, si le préfet n'est pas lié par l'avis émis par le médecin de l'agence régionale de santé, il lui appartient néanmoins, lorsque ce médecin a estimé que l'état de santé de l'étranger nécessitait une prise en charge médicale dont le défaut pourrait entraîner pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité et qu'il n'existait pas de traitement approprié dans le pays dont il est originaire, de justifier des éléments, relatifs à la gravité de la pathologie présentée par l'étranger intéressé et à la nature des traitements qu'il doit suivre, qui l'ont conduit à considérer, nonobstant l'avis médical émis par ledit médecin de l'agence régionale de santé, que le demandeur ne remplissait pas les conditions posées par les stipulations précitées de l'article 6-7 de l'accord franco-algérien pour se voir délivrer un certificat de résidence en raison de son état de santé ;
6. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier, et notamment des avis médicaux qu'il a produits, que M. A...souffre du syndrome de Lutz-Lewandowsky ou " épidermodysplasie verruciforme ", affection cutanée rare d'origine génétique, ainsi que d'un syndrome psychiatrique complexe et que cette maladie évolutive est particulièrement invalidante et douloureuse et nécessite des soins quotidiens ; que M. A...fait valoir que les soins rendus nécessaires par son état de santé ne sont pas disponibles en Algérie ; que toutefois, pour estimer que M. A... peut bénéficier d'un traitement approprié à son état de santé en Algérie, le préfet s'est fondé sur des éléments transmis par le consulat général de France à Alger le 21 octobre 2013 et sur les informations contenues dans le rapport établi par l'agence de gestion des frontières du Royaume-Uni reprenant notamment une déclaration du ministère de la santé algérien, qui démontrent le sérieux et les capacités des institutions algériennes à traiter la majorité des maladies courantes et notamment psychiatriques ainsi que la possibilité pour les ressortissants algériens de trouver en Algérie un traitement adapté à leur état de santé ; que le préfet a produit plusieurs documents dont il ressort que ce pays, dont la politique de santé repose sur le principe de l'accès gratuit aux soins, dispose de structures médicales spécialisées en psychiatrie et de dermatologues, aptes à prendre en charge l'affection dont souffre le requérant, et que des médicaments contenant la même substance active que celle présente dans l'Ixprim et la Soriatane, médicament dont la cour avait au demeurant constaté, dans l'arrêt susmentionné du 29 mars 2011, qu'il avait déjà été prescrit à l'intéressé en Algérie antérieurement à son entrée en France, sont remboursés par la sécurité sociale algérienne ; que le psychiatre du requérant reconnaît en outre que les soins nécessités par l'état de santé du requérant sont " théoriquement susceptibles d'être effectués " en Algérie ; que les pièces produites par le requérant ne suffisent pas à réfuter les éléments ainsi produits par le préfet établissant, à la date de la décision litigieuse, l'existence de soins adaptés et d'infrastructures de prise en charge en Algérie pour les troubles dont il souffre, ni à démontrer qu'il ne pourrait bénéficier effectivement de ces soins en Algérie, eu égard à la nature particulière de sa pathologie ; que, par suite le préfet n'a pas méconnu les stipulations du 7° de l'article 6 de l'accord franco-algérien en estimant que l'intéressé ne remplissait pas les conditions pour bénéficier d'un certificat de résidence en qualité d'étranger malade du fait de la possibilité de bénéficier effectivement d'un traitement approprié en Algérie ;
7. Considérant, en dernier lieu que les moyens, déjà soulevés en première instance, tirés de la méconnaissance des stipulations de l'article 6-5 de l'accord franco-algérien et de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales doivent être écartés pour les motifs retenus par les premiers juges et qu'il y a lieu, pour la cour, d'adopter ;
Sur la légalité de la décision portant obligation de quitter le territoire :
8. Considérant, en premier lieu, que, comme il a été dit ci-dessus, la décision refusant de délivrer un certificat de résidence à M. A... n'est pas entachée d'illégalité ; que, par suite, le moyen tiré, par la voie de l'exception, de l'illégalité de la décision de refus de titre, doit être écarté ;
9. Considérant, en second lieu, que, compte tenu des éléments précédemment exposés, la décision portant obligation de quitter le territoire français ne méconnaît pas les dispositions du 10° de l'article L. 511-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ni les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et n'est pas entachée d'une erreur manifeste d'appréciation quant à ses conséquences sur la situation personnelle de M. A... ;
Sur la légalité de la décision fixant le pays de destination :
10. Considérant que, compte tenu de ce qui précède, les décisions refusant à M. A... un titre de séjour et portant obligation de quitter le territoire français ne sont pas entachées d'illégalité ; que, dès lors, l'intéressé n'est pas fondé à soulever, par la voie de l'exception, l'illégalité desdites décisions à l'encontre de la décision fixant le pays de destination ;
11. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que M. A... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demande ; que doivent être rejetées, par voie de conséquence, ses conclusions à fin d'injonction, ainsi que celles tendant au bénéfice des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;
DECIDE :
Article 1er : La requête de M. A... est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. B... A...et au ministre de l'intérieur. Copie en sera adressée au préfet du Rhône.
Délibéré après l'audience du 28 juin 2016 à laquelle siégeaient :
M. Seillet, président,
M. D...et MmeC..., premiers conseillers.
Lu en audience publique, le 19 juillet 2016.
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N° 15LY03600