Procédure devant la cour
Par requête enregistrée le 21 février 2020, le préfet de l'Isère demande à la cour :
1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Grenoble ;
2°) de rejeter les demandes de M. A... devant le tribunal administratif.
Il soutient que la situation de M. A... ne justifiait pas l'annulation de son arrêté dès lors qu'il a procédé à un examen particulier de sa situation et compte tenu de l'absence de caractère réel et sérieux de la formation suivie par M. A..., lequel n'est pas isolé dans son pays d'origine et son arrêté n'est pas entaché d'erreur manifeste d'appréciation.
M. A..., à qui la requête a été communiquée, n'a pas présenté d'observations en défense.
M. A... a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par décision du 1er juillet 2020.
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu :
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales du 4 novembre 1950 ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;
- le code de justice administrative ;
Le président de la formation de jugement ayant dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Le rapport de Mme Burnichon, premier conseiller, ayant été entendu au cours de l'audience publique ;
Considérant ce qui suit :
1. Aux termes de l'article L. 313-15 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " À titre exceptionnel (...), la carte de séjour temporaire prévue aux 1° et 2° de l'article L. 313-10 portant la mention " salarié " ou la mention " travailleur temporaire " peut être délivrée, dans l'année qui suit son dix-huitième anniversaire, à l'étranger qui a été confié à l'aide sociale à l'enfance entre l'âge de seize ans et l'âge de dix-huit ans et qui justifie suivre depuis au moins six mois une formation destinée à lui apporter une qualification professionnelle, sous réserve du caractère réel et sérieux du suivi de cette formation, de la nature de ses liens avec sa famille restée dans le pays d'origine et de l'avis de la structure d'accueil sur l'insertion de cet étranger dans la société française (...) ".
2. Lorsqu'il examine une demande de titre de séjour présentée sur le fondement de ces dispositions dans le cadre de l'admission exceptionnelle au séjour, le préfet vérifie tout d'abord que l'étranger est dans l'année suivant son dix-huitième anniversaire, que sa présence en France ne constitue pas une menace pour l'ordre public, qu'il a été confié à l'aide sociale à l'enfance entre l'âge de seize ans et dix-huit ans et qu'il justifie suivre depuis au moins six mois une formation destinée à lui apporter une qualification professionnelle. Disposant d'un large pouvoir d'appréciation, il doit ensuite prendre en compte la situation de l'intéressé appréciée de façon globale au regard notamment du caractère réel et sérieux du suivi de cette formation, de la nature de ses liens avec sa famille restée dans le pays d'origine et de l'avis de la structure d'accueil sur l'insertion de cet étranger dans la société française. Il appartient seulement au juge administratif, saisi d'un moyen en ce sens, de vérifier que le préfet n'a pas commis d'erreur manifeste dans l'appréciation qu'il a portée.
3. Il ressort des pièces du dossier que M. A..., ressortissant guinéen né le 1er août 2001 à Conakry (Guinée), et entré en France le 17 novembre 2017 puis a été pris en charge par le dispositif d'accueil des mineurs isolés. Si l'intéressé justifie d'un avis favorable de la structure qui l'a pris en charge et a suivi depuis au moins six mois une formation destinée à lui apporter une qualification professionnelle, soit en l'espèce un certificat d'aptitude professionnelle " maintenance des véhicules ", le préfet de l'Isère est toutefois fondé à relever que les bulletins scolaires de l'intéressé lors de l'année 2018-2019 laissaient apparaître un niveau non évaluable dans plusieurs matières compte tenu des lacunes de l'intéressé en langue française ainsi de que nombreuses absences injustifiées au cours de deux semestres. Si l'appréciation des dispositions de l'article L. 313-15 précitées n'impose pas un succès scolaire, elle nécessite néanmoins une formation sérieuse par l'étranger permettant de justifier de son implication dans sa formation. Par ailleurs, si M. A... a fait preuve d'un " comportement irréprochable " au cours de sa prise en charge en tant que mineur isolé et de sa formation, il dispose encore d'attaches familiales en Guinée où vivent son père et ses deux demi-frères dont il n'a été séparé par aucune circonstance extérieure et qu'il est libre de rejoindre.
4. Il résulte de ce qui précède que le préfet de l'Isère est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Grenoble a, pour ce motif, annulé la décision par laquelle il a refusé de délivrer un titre de séjour à M. A..., ainsi que les décisions subséquentes. Toutefois il appartient à la cour, saisie de l'ensemble du litige par l'effet dévolutif de l'appel, d'examiner les autres moyens soulevés par M. A... contre les décisions contestées.
5. En premier lieu, Mme Chloé Lombard, secrétaire générale adjointe de la préfecture de l'Isère était compétente pour signer l'arrêté en litige compte tenu de la délégation de signature qui lui a été consentie par arrêté du 1er septembre 2018 du préfet de l'Isère publié au recueil des actes administratifs spécial du même jour.
6. En deuxième lieu, M. A..., célibataire et sans charge de famille, ne peut se prévaloir d'aucune attache en France où lui-même est en situation de vulnérabilité compte tenu de son isolement tandis qu'il a vécu la majeure partie de son existence en Guinée où il a conservé ses attaches familiales. Dans ces conditions, il n'est pas fondé à soutenir que l'arrêté en litige porterait une atteinte excessive à son droit de mener une vie privée et familiale normale protégé par l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.
7. En dernier lieu, en l'absence d'autres éléments et compte tenu de ce qui vient d'être dit, M. A... n'est pas davantage fondé à soutenir que l'arrêté en litige serait entaché d'une erreur manifeste d'appréciation.
8. Il résulte de ce qui précède que le préfet de l'Isère est fondé à soutenir que c'est à tort que par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Grenoble a annulé son arrêté du 20 septembre 2019. Par suite, le jugement attaqué doit être annulé et la demande d'annulation présentée par M. A... contre l'arrêté du 20 septembre 2019 portant refus de titre de séjour, obligation de quitter le territoire français sous trente jours et désignation du pays de destination doit être rejetée ainsi que, par voie de conséquence, les demandes d'injonction et de frais liés au litige, l'État n'étant pas partie perdante.
DÉCIDE :
Article 1er : Le jugement n° 1906992 lu le 31 janvier 2020 du tribunal administratif de Grenoble est annulé.
Article 2 : Les demandes présentées par M. A... devant le tribunal sont rejetées.
Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à M. B... A... et au ministre de l'intérieur.
Copie en sera adressée au préfet de l'Isère.
Délibéré après l'audience du 11 mars 2021 à laquelle siégeaient :
M. Arbarétaz, président de chambre ;
M. Seillet, président assesseur ;
Mme Burnichon, premier conseiller.
Rendu public par mise à disposition au greffe le 1er avril 2021.
N° 20LY00743 2