Procédure devant la cour
Par requête enregistrée le 6 mars 2020, M. A..., représenté par Me B..., demande à la cour :
1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Lyon et l'arrêté du 28 mai 2019 ;
2°) d'enjoindre au préfet du Rhône, dans le délai de quinze jours et sous astreinte de 100 euros par jour de retard, de lui délivrer un titre de séjour portant la mention vie privée et familiale, subsidiairement, de réexaminer sa situation ;
3°) de mettre à la charge de l'État le versement de la somme de 2 000 euros sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Il soutient que :
- le refus de séjour repose sur un avis de l'Office français de l'immigration et de l'intégration (OFII) incomplet au regard des dispositions des articles R. 313-22 et R. 313-23 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- il méconnaît les dispositions de l'article 3 de l'arrêté du 5 janvier 2017 ; il démontre l'inadaptation du système médical guinéen à son état de santé ;
- il est entaché d'un défaut d'examen de sa situation personnelle ;
- il méconnaît les dispositions du 11° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- l'obligation de quitter le territoire français est illégale en raison de l'illégalité du refus de séjour et elle méconnaît les dispositions du 10° de l'article L. 511-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- la fixation du pays de destination est illégale en raison de l'illégalité de l'obligation de quitter le territoire français.
La requête a été communiquée au préfet du Rhône qui n'a pas produit d'observations.
La demande d'aide juridictionnelle de M. A... a été rejetée décision du 29 janvier 2020.
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu :
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- le code de justice administrative ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Le président de la formation de jugement ayant dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique :
- le rapport de Mme Burnichon, premier conseiller ;
- et les observations de Me B..., pour M. A... ;
Considérant ce qui suit :
Sur les conclusions à fin d'annulation :
1. Aux termes de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " (...) la carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " est délivrée de plein droit : (...) 11° À l'étranger résidant habituellement en France, si son état de santé nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait avoir pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité et si, eu égard à l'offre de soins et aux caractéristiques du système de santé dans le pays dont il est originaire, il ne pourrait pas y bénéficier effectivement d'un traitement approprié (...) ". Aux termes de l'article R. 313-22 du même code " (...) L'avis est émis (...) au vu (...) des informations disponibles sur les possibilités de bénéficier effectivement d'un traitement approprié dans le pays d'origine de l'intéressé (...) ".
2. Il ressort des différentes pièces médicales produites au dossier, que M. A..., ressortissant guinéen né le 15 novembre 1996 et entré régulièrement sur le territoire français le 27 septembre 2015, présente des douleurs neuropathiques, un syndrome de l'intestin irritable sévère aggravé par épisode dépressif majeur nécessitant des traitements médicamenteux, un suivi psychiatrique et des consultations régulières chez un gastroentérologue. Par ailleurs, M. A... a produit, en première instance et en appel, différentes attestations et certificats de professionnels de la pharmacopée et de la psychiatrie exerçant en Guinée, de juin 2019 et janvier 2020, qui affirment, sans être contestés, que le traitement psychiatrique de M. A... n'a pas pu être assuré en Guinée en raison d'une pénurie affectant tant les médecins psychiatres que les produits pharmaceutiques (ou leurs équivalents) administrés à l'intéressé en France. Au regard de ces pièces médicales précises et actualisées, M. A... établit qu'il n'aura pas en Guinée d'accès effectif aux soins qui lui sont nécessaires. Il est donc fondé à soutenir que le préfet du Rhône ne pouvait refuser de lui délivrer un titre de séjour sans méconnaître les dispositions précitées du 11° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Par suite, le refus de titre de séjour en litige et, par voie de conséquence, l'obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et fixant le pays de renvoi sont entachés d'illégalité et doivent être annulés.
3. Il résulte de ce qui précède que M. A... est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demande. Sans qu'il soit nécessaire de se prononcer sur les autres moyens de la requête, ledit jugement doit être annulé ainsi que de l'arrêté du 28 mai 2019.
Sur les conclusions à fin d'injonction et d'astreinte :
4. Eu égard au motif qui fonde l'annulation des décisions en litige et dès lors qu'il ne résulte pas de l'instruction qu'un changement dans la situation de droit ou de fait du requérant y ferait obstacle, le présent arrêt implique nécessairement, au sens de l'article L. 911-1 du code de justice administrative, que le préfet du Rhône délivre à M. A... une carte de séjour temporaire. En conséquence, il y a lieu de lui adresser une injonction en ce sens et de lui impartir un délai de deux mois à compter de la notification du présent arrêt. Dans les circonstances de l'espèce, il n'y a pas lieu de prononcer d'astreinte.
Sur les frais liés au litige :
5. En application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, il y a lieu de mettre à la charge de l'État le versement à M. A... d'une somme de 1 500 euros.
DÉCIDE :
Article 1er : Le jugement n° 1906013 lu le 9 décembre 2019 du tribunal administratif de Lyon et l'arrêté du 28 mai 2019 par lequel le préfet du Rhône a refusé un titre de séjour à M. A..., l'a obligé à quitter le territoire français sous trente jours et a fixé le pays de destination, sont annulés.
Article 2 : Il est enjoint au préfet du Rhône de délivrer à M. A... une carte de séjour temporaire dans le délai de deux mois à compter de la notification du présent arrêt.
Article 3 : L'État versera à M. A... la somme de 1 500 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 4 : Le surplus des conclusions de la requête de M. A... est rejeté.
Article 5 : Le présent arrêt sera notifié à M. C... A... et au ministre de l'intérieur.
Copie en sera adressée au préfet du Rhône et au procureur près du tribunal judiciaire de Lyon en application de l'article R. 751-11 du code de justice administrative.
Délibéré après l'audience du 8 avril 2021 à laquelle siégeaient :
M. Arbarétaz, président de chambre ;
Mme Djebiri, premier conseiller ;
Mme Burnichon, premier conseiller.
Rendu public par mise à disposition au greffe le 27 avril 2021.
N° 20LY00965 2
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