Procédure devant la Cour :
Par une requête enregistrée le 10 avril 2020, M. B..., représenté par Me A..., demande à la Cour :
1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Marseille du 20 février 2020 ;
2°) d'annuler l'arrêté du préfet des Bouches-du-Rhône du 9 octobre 2019 ;
3°) d'enjoindre au préfet des Bouches-du-Rhône de lui délivrer un titre de séjour portant droit au travail, dans le délai d'un mois à compter de la notification de la décision à intervenir ;
4°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 2 400 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
M. B... soutient que :
En ce qui concerne le refus de séjour :
- la décision est entachée d'erreur de droit dès lors que le préfet s'est estimé saisi d'une demande d'admission exceptionnelle au séjour par le travail alors que la demande aurait dû être traitée dans le cadre de l'article 3 de l'accord franco-marocain ;
- le signataire de la décision attaquée n'était pas compétent pour rejeter une demande d'autorisation de travail dès lors qu'il était rattaché au ministère de l'intérieur et non au ministère en charge de l'emploi ;
- la direction régionale des entreprises de la concurrence de la consommation du travail et de l'emploi (Dirrecte) s'est bornée à émettre un avis sur une demande d'admission exceptionnelle au séjour prévue à l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, alors qu'elle aura dû mener l'instruction du dossier et alors que ces dispositions étaient inapplicables ;
- le refus d'admission exceptionnelle au séjour qui lui est opposé est entaché d'erreur de droit, d'erreur manifeste d'appréciation, méconnaît le 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et méconnaît son droit au respect de sa vie privée et familiale protégé par l'article 8 de convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
En ce qui concerne l'interdiction de retour :
- il réside en France depuis onze ans ;
- l'interdiction litigieuse est prise en violation du 4ème alinéa du III de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile dès lors qu'il réside en France depuis plus de dix ans ;
- elle porte une atteinte disproportionnée à son droit au respect de sa vie privée et familiale et ainsi méconnaît les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- elle est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation des conséquences qu'elle comporte sur sa situation personnelle ;
- la durée de deux ans est disproportionnée.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- l'accord franco-marocain en matière de séjour et d'emploi du 9 octobre 1987 ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- le code du travail ;
- le code de justice administrative.
Considérant ce qui suit :
1. Par arrêté du 9 octobre 2019, le préfet des Bouches-du-Rhône a rejeté la demande d'admission exceptionnelle au séjour présentée par M. B..., ressortissant marocain, lui a fait obligation de quitter le territoire et a prononcé à son encontre une interdiction de retour pour une durée de deux ans. M. B... fait appel du jugement du 20 février 2020 par lequel le tribunal administratif de Marseille a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cet arrêté.
2. Aux termes du dernier alinéa de l'article R. 222-1 du code de justice administrative : " (...) les présidents des formations de jugement des cours peuvent (...), par ordonnance, rejeter (...), après l'expiration du délai de recours (...) les requêtes d'appel manifestement dépourvues de fondement. (...) ".
Sur le refus de séjour :
3. En premier lieu, l'article 3 de l'accord entre le Gouvernement de la République française et le Gouvernement du royaume du Maroc en matière de séjour et d'emploi du 9 octobre 1987 stipule que : " Les ressortissants marocains désireux d'exercer une activité professionnelle salariée en France, pour une durée d'un an au minimum, et qui ne relèvent pas des dispositions de l'article 1er du présent accord, reçoivent après contrôle médical et sur présentation d'un contrat de travail visé par les autorités compétentes, un titre de séjour valable un an renouvelable et portant la mention " salarié " ... ". Son article 9 prévoit que " " Les dispositions du présent accord ne font pas obstacle à l'application de la législation des deux Etats sur le séjour des étrangers sur tous les points non traités par l'accord... ". Aux termes de l'article L. 313-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Sous réserve des engagements internationaux de la France et des exceptions prévues par les dispositions législatives du présent code, la première délivrance de la carte de séjour temporaire et celle de la carte de séjour pluriannuelle mentionnée aux articles L. 313-20, L. 313-21, L. 313-23 et L. 313-24 sont subordonnées à la production par l'étranger du visa de long séjour mentionné aux 1° ou 2° de l'article L. 311-1. ".
4. Il résulte de la combinaison des textes précités que, si la situation des ressortissants marocains souhaitant bénéficier d'un titre de séjour portant la mention salarié est régie par les stipulations de l'accord franco-marocain, la délivrance d'un titre de séjour en qualité de salarié reste subordonnée, en vertu de l'article 9 de cet accord, à la condition prévue à l'article L. 313-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile de la production par ces ressortissants d'un visa pour un séjour d'une durée supérieure à trois mois. Toutefois, les stipulations des articles 3 et 9 de l'accord franco-marocain n'interdisent pas au préfet, dans l'exercice du pouvoir discrétionnaire dont il dispose sur ce point, d'apprécier, en fonction de l'ensemble des éléments de la situation personnelle de l'intéressé, l'opportunité d'une mesure de régularisation de la situation d'un ressortissant marocain qui ne remplirait pas les conditions auxquelles est subordonnée la délivrance de plein droit d'un titre de séjour en qualité de salarié.
5. En l'espèce, il n'est pas allégué que M. B... serait titulaire d'un visa de long séjour. Dès lors, le préfet n'a commis aucune erreur de droit en s'estimant saisi d'une demande d'admission exceptionnelle au séjour.
6. En deuxième lieu, l'article L. 5221-5 du code du travail dispose qu'" un étranger autorisé à séjourner en France ne peut exercer une activité professionnelle salariée en France sans avoir obtenu au préalable l'autorisation de travail mentionnées au 2° de l'article L. 5221-2 " c'est-à-dire " un contrat de travail visé par l'autorité administrative ou une autorisation de travail. ". Cependant, une demande d'admission exceptionnelle au séjour n'a pas à être instruite dans les règles fixées par le code du travail relativement à la délivrance de l'autorisation de travail mentionnée à son article L. 5221-2, quand bien même elle serait assortie d'une telle demande.
7. En l'espèce, ainsi qu'il a été dit, l'arrêté litigieux du 9 octobre 2019 présente le caractère d'un refus d'admission exceptionnelle au séjour. Le moyen tiré de l'incompétence du signataire pour refuser une autorisation de travail est donc inopérant.
8. En troisième lieu, il était loisible au préfet, saisi d'une demande d'admission exceptionnelle au séjour en vue de la délivrance d'une carte de séjour temporaire pour l'exercice d'une activité salariée, de saisir pour avis la direction régionale des entreprises de la concurrence de consommation du travail et de l'emploi (Dirrecte). Dans ces conditions, M. B... n'est pas fondé à soutenir que les services de cette direction ne pouvaient être saisis pour donner un avis, lequel n'a, en tout état de cause, pas été formulé dans le cadre d'une demande d'admission exceptionnelle au séjour instruite sur le fondement des dispositions de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile.
9. En dernier lieu, pour établir que l'arrêté attaqué serait entaché d'erreur manifeste d'appréciation et méconnaîtrait les dispositions du 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ou l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales en portant une atteinte disproportionnée à son droit au respect de sa vie privée et familiale, M. B... se borne à produire les mêmes pièces qu'en première instance. Ces éléments largement constitués de pièces médicales telles qu'ordonnances pour la délivrance de médicaments, certificats médicaux, relevés de soins ou cartes d'admission à l'aide médicale d'Etat, notamment en début de période, ne révèlent pas une insertion particulière dans la société française ainsi que l'ont estimé à bon droit les premiers juges qui ont en outre relevé que l'intéressé était célibataire et sans enfant et n'alléguait pas être dépourvu d'attaches au Maroc où il a vécu jusqu'à quarante-deux ans. Si M. B... se prévaut en appel des perspectives d'embauche que lui procuraient la demande d'autorisation de travail produite à l'appui de sa demande d'admission exceptionnelle au séjour, il ne justifie ni d'une insertion professionnelle antérieure, ni d'aucune expérience en qualité d'aide agricole. M. B... n'est donc pas fondé à soutenir que c'est à tort que les premiers juges ont écarté les moyens tirés d'une erreur manifeste d'appréciation, d'une méconnaissance du 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ou de la violation des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.
Sur l'interdiction de retour :
10. Il y a lieu d'écarter les moyens soulevés par M. B..., tirés d'une violation du III de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, et d'une erreur manifeste d'appréciation, y compris en ce qui concerne la durée de l'interdiction, par adoption des motifs retenus par le tribunal administratif aux points 8 et 9 de son jugement. Il y a lieu, en outre, de relever que M. B... ne précise pas en appel en quoi le tribunal aurait porté une appréciation erronée sur la continuité de sa présence sur le territoire français en la jugeant " au moins épisodique " et ne verse pas au dossier d'élément nouveau de nature à remettre en cause cette appréciation.
11. Il résulte de tout ce qui précède que la requête d'appel de M. B..., qui est manifestement dépourvue de fondement, au sens des dispositions du dernier alinéa de l'article R. 222-1 du code de justice administrative, doit être rejetée, en application de ces dispositions, y compris ses conclusions aux fins d'injonction et celles présentées au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
O R D O N N E :
Article 1er : La requête de M. B... est rejetée.
Article 2 : La présente ordonnance sera notifiée à M. C... B....
Copie en sera adressée au préfet des Bouches-du-Rhône.
Fait à Marseille, le 2 septembre 2020.
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N°20MA01623