Procédure devant la Cour :
Par une requête sommaire et des mémoires, enregistrés le 3 septembre 2018, le 5 octobre 2018, et le 8 octobre 2018, la SCEA " L'Or de nos collines ", représentée par Me A..., demande à la Cour :
1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Toulon du 10 juillet 2018 ;
2°) d'annuler l'arrêté précité ;
3°) à titre principal, d'enjoindre à la commune du Beausset de lui délivrer un permis d'aménager et, à titre subsidiaire, de lui enjoindre de réexaminer sa situation ;
4°) en tout état de cause, de mettre à la charge de la commune du Beausset la somme de 2 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que :
- c'est à tort que le tribunal a estimé qu'il y avait lieu de statuer sur l'arrêté attaqué, qui a été rapporté par l'arrêté de refus du 5 février 2016 ;
- c'est également à tort que le tribunal a estimé que le projet méconnaissait l'article N1 du règlement du plan local d'urbanisme (PLU) approuvé en 2012 alors qu'en application de l'article L. 600-2 du code de l'urbanisme, sa demande aurait dû être examinée au regard du plan d'occupation des sols (POS) du 15 février 1985, applicable à la date du refus qui lui a été opposé le 21 décembre 2009 mais qui a été annulé par la cour administrative d'appel de Marseille par un arrêt 12MA01039 du 29 janvier 2015 ;
- l'arrêté du 3 avril 2015 méconnait l'autorité de la chose jugée de l'arrêt de la Cour administrative d'appel de Marseille du 29 janvier 2015.
Par un mémoire en défense, enregistré le 30 août 2019, la commune du Beausset, conclut au rejet de la requête et demande à la Cour de mettre à la charge de la société requérante la somme de 2 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle fait valoir qu'aucun des moyens de la requête n'est fondé.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- le code de l'urbanisme ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de Mme B...,
- les conclusions de Mme Giocanti, rapporteur public,
- et les observations de Me C..., représentant la commune du Beausset.
Considérant ce qui suit :
1. Par un arrêt n° 12MA01039 du 29 janvier 2015 la Cour administrative d'appel de Marseille a annulé l'arrêté du maire du Beausset du 21 décembre 2009 refusant d'autoriser la SCEA " L'Or de nos collines " à réaliser des travaux d'affouillement et d'exhaussement sur un terrain de 67 000 m² situé lieudit Jas de Giraud afin d'y planter 10 000 oliviers. Dans le cadre de l'injonction de réexamen de la demande alors prononcée par la Cour, par arrêté du 3 avril 2015, le maire du Beausset a de nouveau refusé d'accorder à la SCEA " L'Or de nos collines " ledit permis d'aménager. Celle-ci relève appel du jugement du 10 juillet 2018 par lequel le tribunal administratif de Toulon a rejeté sa demande tendant à l'annulation de ce refus de permis d'aménager du 3 avril 2015.
Sur la régularité du jugement :
2. La société requérante soutient que c'est à tort que le tribunal n'aurait pas prononcé un non-lieu à statuer sur sa demande de première instance dès lors que la seconde décision de refus de permis d'aménager qui lui a été opposée le 5 février 2016, suite à la confirmation de sa demande le 15 décembre 2015, se serait substituée à la décision de refus du 3 avril 2015, édictée spontanément par le maire. Toutefois, la décision du 5 février 2016, qui au demeurant a été prise pour des motifs différents de celle du 3 avril 2015, et sur le fondement des nouvelles dispositions applicables, ne saurait être regardée comme la retirant implicitement. C'est donc à bon droit que les premiers juges ont estimé qu'il y avait bien lieu de statuer sur la demande d'annulation du refus de permis d'aménager du 3 avril 2015 qui demeurait dans l'ordre juridique.
Sur le bien-fondé du jugement :
3. En premier lieu, aux termes de l'article L. 600-2 du code de l'urbanisme : " Lorsqu'un refus opposé à une demande d'autorisation d'occuper ou d'utiliser le sol [...] a fait l'objet d'une annulation juridictionnelle, la demande d'autorisation [...] confirmée par l'intéressé ne peut faire l'objet d'un nouveau refus ou être assortie de prescriptions spéciales sur le fondement de dispositions d'urbanisme intervenues postérieurement à la date d'intervention de la décision annulée sous réserve que l'annulation soit devenue définitive et que la confirmation de la demande ou de la déclaration soit effectuée dans les six mois suivant la notification de l'annulation au pétitionnaire. ". Il résulte de cette disposition que lorsqu'une juridiction, à la suite de l'annulation d'un refus opposé à une demande d'autorisation d'occuper ou d'utiliser le sol, fait droit à des conclusions tendant à ce qu'il soit enjoint à l'administration de réexaminer cette demande, ces conclusions aux fins d'injonction du requérant doivent être regardées comme confirmant sa demande initiale. Par suite, la condition posée par l'article L. 600-2 du code de l'urbanisme imposant que la demande soit confirmée dans les six mois suivant la notification de l'annulation au pétitionnaire doit être regardée comme remplie lorsque la juridiction enjoint à l'autorité administrative de réexaminer la demande présentée par le requérant. Dans un tel cas, l'autorité administrative compétente doit, sous réserve que l'annulation soit devenue définitive et que le pétitionnaire ne dépose pas une demande d'autorisation portant sur un nouveau projet, réexaminer la demande initiale sur le fondement des dispositions d'urbanisme applicables à la date de la décision annulée, en application de l'article L. 600-2 du code de l'urbanisme.
4. En l'espèce, ainsi que l'a à bon droit jugé le tribunal, la cour administrative d'appel ayant enjoint dans son arrêt du 29 janvier 2015 au maire de la commune du Beausset de procéder au réexamen de la demande de permis d'aménager de la SCEA " L'Or de nos collines " dans un délai de trois mois à compter de la notification de cet arrêt, la condition imposant que la demande soit confirmée dans les six mois suivant la notification de l'annulation au pétitionnaire pouvait donc être considérée comme remplie. Toutefois cet arrêt précité de la cour administrative appel de Marseille du 29 janvier 2015 n'a acquis un caractère définitif que le 27 juillet 2015, date de la lecture de l'arrêt du Conseil d'Etat qui a refusé l'admission du pourvoi en cassation de la SCEA " L'Or de nos collines ". Il n'était donc pas définitif au moment de la décision attaquée, le 3 avril 2015. La société requérante n'est par suite pas fondée à demander à bénéficier des dispositions de l'article L. 600-2 du code de l'urbanisme, dont une des trois conditions n'était pas remplie. Le maire de la commune du Beausset a donc pu à bon droit se fonder sur les dispositions du document d'urbanisme approuvé le 21 août 2012, en vigueur à la date de la décision attaquée.
5. En second lieu, l'autorité de chose jugée s'attachant au dispositif d'un arrêt annulant un refus d'autorisation, ainsi qu'aux motifs qui en sont le support nécessaire fait obstacle à ce que, en l'absence de modification de la situation de droit ou de fait, l'autorisation sollicitée soit à nouveau refusée par l'autorité administrative ou annulée par le juge administratif, pour un motif identique à celui qui avait été censuré par la cour.
6. En l'espèce, ainsi qu'il a été dit au point 2, la décision contestée a été édictée sur le fondement des dispositions du nouveau plan local d'urbanisme tandis que le permis d'aménager du 21 décembre 2009 se fondait sur les dispositions du plan d'occupation des sols alors applicables. Compte tenu de cette évolution de la situation de droit, la société requérante n'est par suite pas fondée à soutenir que le refus de permis d'aménager attaqué méconnait l'autorité de la chose jugée par la Cour qui a annulé le refus de permis d'aménager du 21 décembre 2009.
7. Il résulte de tout ce qui précède que la SCEA " L'Or de nos collines " n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Toulon a rejeté sa demande.
Sur les conclusions en injonction :
8. Le présent arrêt rejette les conclusions en annulation de la SCEA " L'Or de nos collines ". Par suite, ses conclusions en injonction ne peuvent qu'être rejetées.
Sur les conclusions au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :
9. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce qu'il soit fait droit aux conclusions de la SCEA " L'Or de nos collines " dirigées contre la commune du Beausset qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante. Il y a lieu en revanche, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de la SCEA " L'Or de nos collines " la somme de 1 500 euros, à verser à la commune du Beausset en application de ces dispositions.
D É C I D E :
Article 1er : La requête de la SCEA " L'Or de nos collines " est rejetée.
Article 2 : La SCEA " L'Or de nos collines " versera à la commune du Beausset une somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à la SCEA " L'Or de nos collines " et à la commune du Beausset.
Délibéré après l'audience du 1er octobre 2020, où siégeaient :
- M. Poujade, président de chambre,
- M. Portail, président assesseur,
- Mme B..., premier conseiller.
Lu en audience publique, le 15 octobre 2020.
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N° 18MA04117
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