Procédure devant la Cour :
Par une requête, enregistrée le 20 octobre 2017, M. B..., représenté par Me C..., demande à la Cour :
1°) d'annuler le jugement du 4 septembre 2017 du tribunal administratif de Nice ;
2°) d'annuler l'arrêté du 30 août 2017 du préfet des Alpes-Maritimes ;
3°) d'enjoindre au préfet des Alpes-Maritimes de lui délivrer un titre de séjour sous astreinte de 100 euros par jour de retard à compter de la notification de l'arrêt à intervenir ;
4°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 2 000 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique, à charge pour son conseil de renoncer au bénéficie de la contribution au titre de l'aide juridictionnelle.
Il soutient que :
- le jugement est insuffisamment motivé, tant en ce qui concerne l'obligation de quitter le territoire français, que l'absence de délai pour quitter le territoire français et l'interdiction de retour ;
- le jugement attaqué a omis de se prononcer sur la demande d'annulation de l'interdiction de retour ;
- la décision portant obligation de quitter le territoire français méconnaît l'article 6.1. de l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 car il justifie d'une résidence habituelle en France depuis 2000 ;
- l'arrêté attaqué méconnaît l'article 6.5. de l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 et l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- l'arrêté attaqué méconnaît l'article 7b de l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 car il justifie avoir travaillé en France en 2007, 2008 et 2014 et il bénéficie d'une promesse d'embauche ;
- s'agissant de l'absence de délai pour quitter le territoire français, le jugement est insuffisamment motivé et le risque de fuite n'est pas établi ;
- l'interdiction de retour est insuffisamment motivée ;
- en application de l'article L. 511-1 III alinéa 2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, des considérations humanitaires justifiaient que le préfet des Alpes-Maritimes ne prenne pas d'interdiction de retour au regard de l'insertion professionnelle et sociale de M. B..., présent en France depuis 17 ans.
La procédure a été communiquée au préfet des Alpes-Maritimes, qui n'a pas produit de mémoire en défense.
Par courrier du 4 décembre 2018, les parties ont été informées, en application des dispositions de l'article R. 611-7 du code de justice administrative, de ce que la décision de la Cour est susceptible d'être fondée sur un moyen d'ordre public relevé d'office, tiré de ce que les conclusions tendant à l'annulation des décisions portant refus d'accorder un délai pour quitter le territoire français et interdiction de retour sur le territoire français sont nouvelles en appel, et dès lors irrecevables.
Par un mémoire en date du 7 décembre 2018, M. B... soutient qu'il avait formé devant le tribunal des conclusions tendant à l'annulation des décisions portant refus d'accorder un délai pour quitter le territoire français et interdiction de retour sur le territoire français.
M. B... a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 20 novembre 2017.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 ;
- la loi n° 91-467 du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- le code de justice administrative.
Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Le rapport de M. Portail a été entendu au cours de l'audience publique.
Considérant ce qui suit :
1. Par arrêté en date du 30 août 2017, le préfet des Alpes-Maritimes a fait obligation de quitter le territoire français sans délai à M. A... B...à destination de son pays d'origine, l'Algérie, et a prononcé à son encontre une interdiction de retour sur le territoire français pour une durée de deux ans. M. B... a demandé au tribunal administratif de Nice d'annuler cet arrêté en tant qu'il porte obligation de quitter le territoire français et fixation du pays de destination de la mesure d'éloignement. Par un jugement du 4 septembre 2017, dont M. B... relève appel, le tribunal administratif de Nice a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cet arrêté.
Sur la régularité du jugement :
2. En premier lieu, la demande de première instance tendait uniquement à l'annulation des décisions portant obligation de quitter le territoire français et fixant le pays de destination de la mesure d'éloignement. Elle n'était pas dirigée contre les décisions de ne pas accorder de délai à M. B... pour quitter le territoire français et portant interdiction de retour pendant une durée de deux ans. Dès lors, les moyens tirés de l'insuffisante motivation du jugement en ce qui concerne la réponse aux moyens relatifs à la décision de ne pas accorder au requérant de délai pour quitter le territoire français et à la décision d'interdiction de retour ne peuvent qu'être sans influence sur la régularité du jugement. Est également sans influence le moyen tiré de l'omission à statuer sur les conclusions tendant à l'annulation de la décision portant interdiction de retour.
3. En deuxième lieu, le tribunal a suffisamment motivé son jugement s'agissant des moyens tirés de ce que l'ancienneté de la présence en France de M. B... et son insertion dans la société française feraient obstacle à ce qu'il fasse l'objet d'une mesure d'éloignement.
Sur la légalité de la décision portant obligation de quitter le territoire français :
4. En premier lieu, aux termes de l'article 6 de l'accord franco-algérien : " Le certificat de résidence d'un an portant la mention " vie privée et familiale " est délivré de plein droit : 1°) Au ressortissant algérien qui justifie par tout moyen résider en France depuis plus de dix ans ou plus de quinze ans si, au cours de cette période, il a séjourné en qualité d'étudiant (...) 5°) au ressortissant algérien, qui n'entre pas dans les catégories précédentes ou dans celles qui ouvrent droit au regroupement familial, dont les liens personnels et familiaux en France sont tels que le refus d'autoriser son séjour porterait à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des motifs du refus (...) ". Aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui ".
5. D'une part, M. B... se borne à produire des pièces qui ne traduisent qu'une présence ponctuelle sur le territoire français. Ainsi, en ce qui concerne l'année 2012, il produit un avis d'imposition au titre de cette année-là ne comportant aucun revenu, établi le 12 décembre 2014, et une lettre du 9 octobre 2012 par laquelle le préfet des Alpes-Maritimes répond à son courrier du 13 septembre 2012. M. B... ne justifie donc pas résider habituellement sur le territoire français depuis plus de dix ans à la date de la décision attaquée. D'autre part, M. B... est célibataire sans enfants. Il ne justifie avoir exercé une activité professionnelle en France que de manière épisodique. En lui faisant obligation de quitter le territoire français, le préfet des Alpes-Maritimes n'a pas porté une atteinte disproportionnée à son droit au respect de sa vie privée et familiale au regard des buts en vue desquels cette décision a été prise. Le préfet des Alpes-Maritimes n'a dès lors, méconnu ni les articles 6.1°) et 6 5°) de l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 ni les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.
6. En deuxième lieu, aux termes de l'article 7 b) de l'accord franco algérien : " Les ressortissants algériens désireux d'exercer une activité professionnelle salariée reçoivent, après le contrôle médical d'usage et sur présentation d'un contrat de travail visé par les services du " ministre chargé de l'emploi ", un certificat de résidence valable un an pour toutes les professions et toutes les régions, renouvelable et portant la mention " salarié " ; cette mention constitue l'autorisation de travail exigée par la législation française ". Aux termes de l'article 9 du même accord : " (...) Pour être admis à entrer et séjourner plus de trois mois sur le territoire français au titre des articles (...) 7, 7 bis, alinéa 4 " (lettres c et d) ", et du titre III du protocole, les ressortissants algériens doivent présenter un passeport en cours de validité muni d'un visa de long séjour délivré par les autorités françaises ".
7. Si M. B... se prévaut d'une promesse d'embauche, il ressort des pièces du dossier que, ainsi que l'a relevé le sous-préfet dans l'arrêté litigieux, l'intéressé n'a pas produit à l'appui de sa demande de titre de séjour le visa de long séjour exigé par les stipulations de l'accord franco-algérien pour la délivrance d'un certificat de résidence en qualité de salarié. Dès lors, le requérant ne pouvait bénéficier d'un titre de séjour sur le fondement des stipulations de l'article 7 b) de ce même accord.
Sur la légalité des décisions portant refus d'accorder un délai pour quitter le territoire français et interdiction de retour sur le territoire français :
8. Les conclusions tendant à l'annulation des décisions portant refus d'accorder un délai pour quitter le territoire français et interdiction de retour sur le territoire français sont nouvelles en appel, et dès lors irrecevables.
9. Il résulte de ce qui précède que M. B... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le magistrat délégué du tribunal administratif de Nice a rejeté sa demande. Doivent être rejetées, par voie de conséquence, ses conclusions à fin d'injonction et celles tendant à l'application des dispositions des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991.
D É C I D E :
Article 1er : La requête M. B... est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. A... B..., à Me C... et au ministre de l'intérieur.
Copie en sera adressée au préfet des Alpes-Maritimes.
Délibéré après l'audience du 17 janvier 2019, où siégeaient :
- M. Poujade, président,
- M. Portail, président-assesseur,
- Mme Gougot, premier conseiller.
Lu en audience publique, le 31 janvier 2019.
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N° 17MA04142