Procédure devant la cour :
I. Par une requête et des mémoires enregistrés sous le n° 20MA04492, le 4 décembre 2020, le 3 mai 2021 et le 4 novembre 2021, la SCI Natal, représentée par Me Peltier-Feat, demande à la Cour :
1°) d'annuler ce jugement du 5 octobre 2020 du tribunal administratif de Toulon ;
2°) à titre principal, de prononcer la décharge des impositions mises en recouvrement ;
3°) à titre subsidiaire, d'ordonner une expertise judiciaire aux fins de vérifier que les valeurs vénales déclarées ont été correctement établies entre les parties ;
4°) de mettre à la charge de l'Etat le versement de la somme de 5 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que :
- pour déterminer la date d'acquisition, auprès de la société Sud Finance Patrimoine, de la parcelle cadastrée E 1730, sur le territoire de la commune de Sainte-Maxime, il convenait de retenir la date de signature de l'acte de vente, soit le 11 septembre 2013, et non la date de constatation de réalisation de la condition qualifiée à tort de suspensive au lieu de résolutoire, soit le 28 octobre 2013 ;
- le prix d'achat de cette parcelle n'a pas été sous-évalué.
Par des mémoires en défense enregistrés les 12 mai et 9 novembre 2021, le ministre des finances et de la relance conclut au rejet de la requête.
Il soutient que les moyens soulevés par la SCI Natal ne sont pas fondés.
Par ordonnance du 15 novembre 2021, la clôture de l'instruction a été fixée au 13 décembre 2021.
II. Par une requête, enregistrée sous le n° 21MA00997, le 15 mars 2021, la SCI Natal, représentée par Me Peltier-Feat, demande à la Cour d'ordonner le sursis à exécution du jugement n° 1801642 du 5 octobre 2020 du tribunal administratif de Toulon dont elle demande l'annulation au fond par sa requête n° 20MA04492 visée ci-dessus.
Elle soutient :
- les mêmes moyens que dans sa requête au fond n° 20MA04492 ;
- que l'exécution de ce jugement aura des conséquences difficilement réparables.
Par un mémoire en défense enregistré le 27 mai 2021, le ministre des finances et de la relance conclut au rejet de la requête.
Il soutient que les moyens ne sont pas fondés.
Par ordonnance du 22 octobre 2021, la clôture de l'instruction a été fixée au 10 novembre 2021.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de Mme Massé-Degois,
- et les conclusions de M. Gautron, rapporteur public.
Considérant ce qui suit :
1. La SCI Natal a fait l'objet d'un contrôle sur pièces. Par une proposition de rectification en date du 9 août 2016, elle a été assujettie à une cotisation supplémentaire d'impôt sur les sociétés et de contribution sociale sur l'impôt sur les sociétés, pour un montant total de 1 261 049 euros. Elle relève appel du jugement du 5 octobre 2020 par lequel le tribunal administratif de Toulon, après avoir prononcé, en son article 1, un non-lieu à statuer sur les conclusions de sa requête tendant à la décharge de la cotisation supplémentaire de contribution sociale sur l'impôt sur les sociétés à hauteur de la somme de 4 558 euros au titre de l'année 2013, a, en son article 2, rejeté le surplus des conclusions de sa demande. La SARL Natal doit être regardée, par les moyens qu'elle invoque, comme demandant, par ses requêtes enregistrées sous les numéros 20MA04492 et 21MA00997, l'annulation et le sursis à exécution du seul article 2 du jugement dont elle relève appel.
Sur la jonction :
2. Les deux requêtes visées ci-dessus par lesquelles la SCI Natal demande à la cour, d'une part, d'annuler l'article 2 du jugement du 5 octobre 2020 par lequel le tribunal administratif de Toulon a rejeté le surplus de sa demande tendant à la décharge de cotisation supplémentaire d'impôt sur les sociétés et, d'autre part, le sursis à exécution de ce même article de ce jugement, sont dirigées contre une même décision et présentent à juger les mêmes questions. Il y a donc lieu de joindre ces deux requêtes pour y statuer par une même décision.
Sur la requête n° 20MA04492 :
3. Il résulte de l'instruction que, par actes notariés des 11 septembre et 28 octobre 2013, la SARL Sud Finance Patrimoine a vendu à la SCI Natal un terrain de 8 951 m² situé sur le territoire de la commune de Sainte-Maxime portant la référence cadastrale E 1730, à prendre de la parcelle cadastrée section E 1572, pour un montant de 500 000 euros, soit 55,86 euros le m².
4. En premier lieu, la cession de la parcelle portant la référence cadastrale E 1730 doit être regardée comme intervenue à la date du 11 septembre 2013 dès lors que si l'acte notarié du 11 septembre 2013 mentionne que " le contrat est conclu sous la condition suspensive de l'obtention du document d'arpentage constatant la division de la parcelle cadastrée E numéro 1572 au plus tard le 31 octobre 2013 " et que suite à l'arpentage réalisé le 10 octobre 2013, l'acte établi le 28 octobre 2013 constate que " les parties déclarent que par suite de la délivrance de ce document d'arpentage, la condition suspensive prévue dans l'acte du 11 septembre 2013 est réalisée et que celui-ci peut donc recevoir pleine et entière exécution ", il mentionne cependant par ailleurs et de manière non équivoque que l'acquéreur a payé le prix de 500 000 euros comptant par compensation ainsi qu'il résulte de l'attestation annexée audit acte, que l'acquéreur sera le propriétaire du bien vendu à compter du jour de la signature dudit acte, soit le 11 septembre 2013 et que l'entrée en jouissance aura lieu ce même jour par la prise de possession réelle. Dès lors, c'est à tort que l'administration fiscale, tiers par rapport aux parties contractantes, a constaté que, du point de vue fiscal, la cession en litige devait être considérée comme réalisée le 28 octobre 2013, date à laquelle a été constatée la réalisation de la condition suspensive prévue par l'acte notarié du 11 septembre 2013.
5. En second lieu, considérant que cette transaction pour un montant de 500 000 euros avait été consentie à un prix minoré, l'administration fiscale ayant évalué la valeur vénale de la parcelle à 2 917 713 euros, a soumis la vente du terrain à la taxe sur la valeur ajoutée sur une base taxable de 2 439 559 euros représentant un montant de la taxe de la valeur ajoutée due de 478 154 euros sur la base d'un taux de 19,60% et rehaussé le résultat imposable à l'impôt sur les sociétés relatif à l'exercice clos en 2013 de la SARL Sud Finance Patrimoine d'un montant de 2 021 499 euros. Ainsi, et dès lors que les rehaussements des résultats imposables ne sont pas restés investis dans l'entreprise, l'administration a constaté la distribution de revenus au profit des sociétés liées et évalué à 2 499 652 euros le montant des revenus distribués à la SCI Natal au titre de la vente de ce terrain à Sainte-Maxime et, en conséquence des constatations tirées du contrôle de la SARL Sud Finance Patrimoine, a rehaussé à hauteur de cette somme le résultat de la société vérifiée. Cependant, à la date de la cession, soit au 11 septembre 2013, il est constant que ladite parcelle était, selon la proposition de rectification du 9 août 2016, incluse dans " la zone IINA du Moulin ... dans laquelle l'absence ou l'insuffisance d'équipements ne permet pas un aménagement immédiat " et où " Toute occupation ou utilisation du sol y est ... exclue, à l'exception de bâtiments et équipements d'infrastructures publics nécessités par le fonctionnement ultérieur de la zone ". Dans ces circonstances, la parcelle étant inconstructible à la date de la cession intervenue le 11 septembre 2013, l'administration, qui a déterminé la valeur vénale de la parcelle cédée par comparaison avec les prix de vente de biens correspondant à des terrains à bâtir en zone commerciale, ne démontre pas que le prix de la parcelle E 1730 indiqué dans l'acte notarié, 500 000 euros, a été délibérément fixé à un montant autre que la valeur vénale du bien considéré afin de dissimuler l'octroi d'une libéralité par la SARL Sud Finance Patrimoine à la SCI Natal.
6. Il s'ensuit que, contrairement à ce qu'ont estimé les premiers juges, la société requérante est fondée à demander la décharge de la cotisation supplémentaire d'impôt sur les sociétés à laquelle elle est restée assujettie au titre de l'année 2013, en droits et pénalités correspondant au rehaussement en base de son résultant imposable de l'exercice clos en 2013 opéré par l'administration pour un montant de 2 499 652 euros, après le dégrèvement accordé par l'administration en première instance à hauteur de la somme de 4 558 euros, soit la somme de 1 256 492 euros [1 261 050 - 4 558], ce dont il résulte que l'article 2 du jugement attaqué du tribunal administratif de Toulon doit être annulé.
Sur la requête n° 21MA00997 :
7. Le présent arrêt ayant réglé l'affaire au fond, il n'y a plus lieu de statuer sur la requête n° 21MA0997 tendant au sursis à exécution du jugement attaqué du tribunal administratif de Toulon.
Sur les frais des instances :
8. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de l'Etat une somme globale de 2 000 euros à verser à la SCI Natal au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
D E C I D E :
Article 1er : Il n'y a pas lieu de statuer sur les conclusions de la requête n° 21MA00997 de la SCI Natal.
Article 2 : L'article 2 du jugement du tribunal administratif de Toulon du 5 octobre 2020 est annulé.
Article 3 : La SCI Natal est déchargée des cotisations supplémentaires à l'impôt sur les sociétés restant à sa charge au titre de l'année 2013 en droits et pénalités correspondant au rehaussement de son résultat imposable relatif à l'exercice clos en 2013 opéré par l'administration pour un montant de 2 499 652 euros après dégrèvement accordé en première instance à hauteur de la somme de 4 558 euros, soit la somme de 1 256 492 euros.
Article 4 : L'Etat versera à la SCI Natal une somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 5 : Le présent arrêt sera notifié à la SCI Natal et au ministre de l'économie, des finances et de la relance.
Copie en sera adressée à la direction de contrôle fiscal Sud-Est.
Délibéré après l'audience du 24 février 2022, où siégeaient :
- M. Alfonsi, président de chambre,
- Mme Massé-Degois, présidente assesseure,
- M. Sanson, premier conseiller.
Rendu public par mise à disposition au greffe, le 17 mars 2022.
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N° 20MA04492, N°21MA00997
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