Par un jugement n° 1902422,1902423 du 26 juin 2019, le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Montpellier a rejeté leurs demandes.
Procédures devant la cour :
I. Par une requête, enregistrée le 13 décembre 2019 sous le n° 19MA05524, M. C... D..., représenté par Me A..., demande à la cour :
1°) d'annuler le jugement du magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Montpellier du 26 juin 2019 ;
2°) d'annuler l'arrêté du préfet de l'Aude du 30 avril 2019 ;
3°) d'enjoindre au préfet de l'Aude de lui délivrer une autorisation provisoire de séjour, dès la notification de l'arrêt à intervenir et sous astreinte de 100 euros par jour de retard ;
4°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 1 500 euros à verser à Me A... sur le fondement de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991.
Il soutient que :
En ce qui concerne l'obligation de quitter le territoire français :
- le préfet ne lui a pas laissé la possibilité de présenter des observations après l'avoir informé de la mesure d'exécution qu'il serait susceptible de prendre à son encontre ;
- le préfet n'a pas procédé à un examen particulier de sa situation personnelle ;
- le préfet n'a pas recherché s'il pouvait bénéficier d'un droit au séjour sur un autre fondement que l'asile, conformément à l'article L. 743-3 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- le préfet ne lui a pas notifié l'information prévue à l'article L. 311-6 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- l'arrêté contesté méconnait l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- cet arrêté méconnait l'article 8 de la convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et est entaché d'erreur manifeste d'appréciation ;
En ce qui concerne la décision fixant la durée du délai de départ volontaire :
- elle ne lui laisse pas la possibilité de se présenter aux épreuves orales du baccalauréat ;
En ce qui concerne la décision fixant le pays de destination :
- elle est illégale à raison de l'illégalité qui entache l'obligation de quitter le territoire français ;
- la décision fixant le Kazakhstan comme pays de destination est entachée d'un défaut d'examen ;
- cette décision est également entachée d'une erreur manifeste d'appréciation et méconnaît les dispositions de l'article L. 513-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ainsi que les stipulations de l'article 3 de la convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.
Par ordonnance du 24 septembre 2020, la clôture de l'instruction a été fixée au 9 octobre 2020.
Un mémoire produit par le préfet de l'Aude a été enregistré le 9 décembre 2020, postérieurement à cette date, et n'a pas été communiqué.
II. Par une requête, enregistrée le 13 décembre 2019 sous le n° 19MA05525, M. E... D..., représenté par Me A..., demande à la cour :
1°) d'annuler l'arrêté du préfet de l'Aude du 30 avril 2019 ;
2°) d'enjoindre au préfet de l'Aude de lui délivrer une autorisation provisoire de séjour, dès la notification de l'arrêt à intervenir et sous astreinte de 100 euros par jour de retard ;
3°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 1 500 euros à verser à Me A... sur le fondement de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991.
Il soutient que :
En ce qui concerne l'obligation de quitter le territoire français :
- le préfet ne lui a pas laissé la possibilité de présenter des observations après l'avoir informé de la mesure d'exécution qu'il serait susceptible de prendre à son encontre ;
- le préfet n'a pas procédé à un examen particulier de sa situation personnelle ;
- le préfet n'a pas recherché s'il pouvait bénéficier d'un droit au séjour sur un autre fondement que l'asile, conformément à l'article L. 743-3 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- le préfet ne lui a pas notifié l'information prévue à l'article L. 311-6 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- l'arrêté contesté méconnait l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- cet arrêté méconnait l'article 8 de la convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et est entaché d'erreur manifeste d'appréciation ;
En ce qui concerne la décision fixant la durée du délai de départ volontaire :
- elle ne laisse pas à son fils C... la possibilité de se présenter aux épreuves orales du baccalauréat ;
En ce qui concerne la décision fixant le pays de destination :
- elle est illégale à raison de l'illégalité qui entache l'obligation de quitter le territoire français ;
- la décision fixant le Kazakhstan comme pays de destination est entachée d'un défaut d'examen ;
- cette décision est également entachée d'une erreur manifeste d'appréciation et méconnaît les dispositions de l'article L. 513-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ainsi que les stipulations de l'article 3 de la convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.
Par ordonnance du 24 septembre 2020, la clôture de l'instruction a été fixée au 9 octobre 2020.
Un mémoire produit par le préfet de l'Aude a été enregistré le 9 décembre 2020, postérieurement à cette date, et n'a pas été communiqué.
MM. D... ont été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par des décisions du 25 octobre 2019.
Vu les autres pièces des dossiers ;
Vu :
- la convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;
- le code de justice administrative.
Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Le rapport de M. B... a été entendu au cours de l'audience publique.
Considérant ce qui suit :
1. M. E... D... et son fils, M. C... D..., ressortissants kazakhes nés, respectivement, le 27 septembre 1978 et le 15 février 1999, relèvent appel du jugement du 26 juin 2019 par lequel le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Montpellier, après avoir les avoir jointes, a rejeté leurs demandes tendant à l'annulation des arrêtés du 30 avril 2019 du préfet de l'Aude les obligeant à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et fixant le pays à destination duquel ils seraient reconduits d'office à l'expiration de ce délai.
2. Les requêtes susvisées, qui concernent le même jugement et des décisions administratives relatives aux membres d'une même famille, présentent à juger des questions semblables et ont fait l'objet d'une instruction commune. Il y a lieu de les joindre pour y statuer par un même arrêt.
3. En premier lieu, il résulte des dispositions de l'article L. 5111 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile que le droit d'être entendu implique que l'autorité préfectorale, avant de prendre à l'encontre d'un étranger une décision portant obligation de quitter le territoire français, mette l'intéressé à même de présenter ses observations écrites et lui permette, sur sa demande, de faire valoir des observations orales, de telle sorte qu'il puisse faire connaître, de manière utile et effective, son point de vue sur la mesure envisagée avant qu'elle n'intervienne.
4. Dès lors qu'ils n'établissent pas, ni même n'allèguent avoir demandé à faire valoir des observations orales avant que soient prises les mesures d'éloignement contestées, les requérants ne sont pas fondés à soutenir que le préfet de l'Aude aurait méconnu leur droit d'être entendus avant que soit prise la décision contestée.
5. En deuxième lieu, les dispositions invoquées par les requérants de l'article L. 743-3 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ne font pas obligation à l'autorité administrative de rechercher, de sa propre initiative, si l'étranger auquel la reconnaissance de la qualité de réfugié ou le bénéfice de la protection subsidiaire a été définitivement refusé est susceptible d'être admis au séjour sur un autre fondement.
6. En troisième lieu, il ressort des énonciations des arrêtés contestés que le préfet a procédé à un examen particulier des situations personnelles des requérants.
7. En quatrième lieu, les requérants ne peuvent utilement invoquer, à l'appui de leurs conclusions tendant à l'annulation des arrêtés contestés, les dispositions de l'article L. 311-6 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile dans sa rédaction issue de la loi du 10 septembre 2018, selon lesquelles l'autorité administrative doit inviter l'étranger qui a présenté une demande d'asile à indiquer s'il estime pouvoir prétendre à une admission au séjour à un autre titre et à déposer sa demande dans un délai fixé par décret, dès lors qu'en vertu du IV de l'article 71 de cette même loi, ces dispositions ne s'appliquent qu'aux demandes d'asile présentées postérieurement au 1er mars 2019, alors qu'ils ont présenté les leurs au cours des années 2016 et 2017.
8. En cinquième lieu, les requérants ne peuvent utilement se prévaloir, à l'encontre des obligations de quitter le territoire français litigieuses, des dispositions de l'article L. 313-14, qui ne sont relatives qu'à l'admission exceptionnelle au séjour des étrangers.
9. En sixième lieu, il ressort des pièces du dossier que les requérants sont dépourvus de tout lien personnel en France, où ils ne résident que depuis l'année 2016, en dehors de la cellule familiale qu'ils forment et qui a vocation à se reconstituer dans leur pays d'origine, où ils ont passé la majeure partie de leur existence. En outre, la seule circonstance que M. C... D... soit scolarisé en classe de première ne saurait conférer aux requérants un droit au séjour sur le fondement de l'article 8 de la convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.
10. En septième lieu, pour les mêmes motifs que ceux qui sont exposés au point précédent, les décisions fixant le pays de destination ne sont pas entachées d'une erreur manifeste dans l'appréciation de leurs conséquences sur la situation personnelle des requérants.
11. En huitième lieu, si les requérants soutiennent que le délai de trente jours qui leur a été accordé pour quitter volontairement le territoire français ne laisse pas à M. C... D... la possibilité de se présenter aux épreuves orales anticipées du baccalauréat, l'intéressé n'a pas vocation, eu égard à ce qui précède, à poursuivre sa scolarité en France. Dès lors, le préfet a pu, sans entacher sa décision d'erreur manifeste d'appréciation, refuser de leur accorder un délai de départ volontaire plus important.
12. En neuvième lieu, eu égard à ce qui précède, il y a lieu d'écarter le moyen tiré, par la voie de l'exception, de l'illégalité des obligations de quitter le territoire français à l'encontre des décisions fixant le pays de destination.
13. En dixième lieu, il ressort des énonciations des arrêtés contestés que le préfet de l'Aude a procédé à un examen particulier de la situation des intéressés et ne s'est pas cru à tort lié par les décisions de l'Office français de protection des réfugiés et apatrides et de la Cour nationale du droit d'asile.
14. En onzième lieu, les requérants, dont les demandes d'asile ont été rejetées tant par l'Office français de protection des réfugiés et apatrides que par la Cour nationale du droit d'asile, n'apportent aucun élément probant de nature à établir la réalité des risques qu'ils encourent en cas de retour dans leur pays d'origine. Par suite, en désignant le Kazakhstan ou tout autre pays pour lequel ils établissent être légalement admissibles comme pays de destination des mesures d'éloignement, le préfet de l'Aude n'a pas méconnu les stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et les dispositions de l'article L. 513-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile.
15. En dernier lieu, pour les mêmes motifs que ceux qui sont exposés au point précédent, les décisions fixant le pays de destination ne sont pas entachées d'une erreur manifeste dans l'appréciation de leurs conséquences sur la situation personnelle des requérants.
16. Il résulte de tout ce qui précède que MM. D... ne sont pas fondés à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Montpellier a rejeté leurs demandes. Par suite, leurs requêtes doivent être rejetées, y compris leurs conclusions aux fins d'injonction et d'astreinte et celles présentées sur le fondement de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique.
D É C I D E :
Article 1er : Les requêtes de MM. D... sont rejetées.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. E... D..., à M. C... D..., à Me A... et au ministre de l'intérieur.
Copie en sera adressée au préfet de l'Aude.
Délibéré après l'audience du 16 décembre 2020, où siégeaient :
- M. Alfonsi, président,
- Mme F..., présidente assesseure,
- M. B..., conseiller.
Rendu public par mise à disposition au greffe, le 31 décembre 2020.
Minute signée par le président de la formation de jugement en application des dispositions de l'article 5 du décret n° 2020-1406 du 18 novembre 2020 portant adaptation des règles applicables devant les juridictions de l'ordre administratif.
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N° 19MA5524, 19MA05525
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