Procédure devant la Cour :
Par une requête, enregistrée le 7 juillet 2016, Mme D..., représentée par Me C..., demande à la Cour :
1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Montpellier du 1er avril 2016 ;
2°) d'annuler l'arrêté du préfet de l'Hérault du 17 novembre 2015 ;
3°) d'enjoindre au préfet de l'Hérault de lui délivrer un certificat de résidence portant la mention " étudiant " ou " vie privée et familiale ", sous astreinte de 100 euros par jour de retard à compter de l'arrêt à intervenir ou, subsidiairement, de procéder au réexamen de sa demande dans un délai de deux mois, sous astreinte de 100 euros par jour de retard ;
4°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 2 000 euros à verser à Me C... en application des articles 37 et 75 de la loi du 10 juillet 1991.
Elle soutient que :
- la décision de refus de séjour a été prise par une autorité incompétente ;
- le préfet n'a pas procédé à un examen complet de sa situation avant de prendre, à son encontre, cette décision ;
- la décision de refus de séjour méconnaît les stipulations du 5) de l'article 6 de l'accord franco-algérien et celles de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- elle est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation ;
- la décision portant obligation de quitter le territoire français est illégale du fait de l'illégalité de la décision de refus de séjour ;
- la décision a été prise par une autorité incompétente ;
- le préfet n'a pas procédé à un examen complet de sa situation avant de prendre, à son encontre, cette décision ;
- la décision méconnaît les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- le préfet a commis une erreur manifeste d'appréciation en ne lui accordant qu'un délai de départ volontaire de trente jours.
Par un mémoire en défense, enregistré le 4 novembre 2016, le préfet de l'Hérault conclut au rejet de la requête.
Il soutient que les moyens soulevés par Mme D... ne sont pas fondés.
Mme D... a été admise au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 23 mai 2016.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;
- le code de justice administrative.
Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de M. Ouillon,
- et les observations de MaîtreA..., substituant MaîtreC..., représentant Mme D....
1. Considérant que Mme D..., ressortissante algérienne née en 1997, relève appel du jugement du 1er avril 2016 par lequel le tribunal administratif de Montpellier a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 17 novembre 2015 par lequel le préfet de l'Hérault a refusé de lui délivrer un certificat de résidence et l'a obligée à quitter le territoire français dans un délai de trente jours ;
Sur la légalité de la décision de délivrance d'un certificat de résidence :
2. Considérant, en premier lieu, que la décision contestée a été signée par M. Olivier Jacob, secrétaire général de la préfecture de l'Hérault, lequel avait reçu, par arrêté n° 2014-1341 du 31 juillet 2014, régulièrement publié au recueil spécial des actes administratifs du département n° 74 du mois d'août 2014, accessible tant au juge qu'aux parties, délégation du préfet de l'Hérault à l'effet de signer " tous actes, arrêtés, décisions et circulaires relevant des attributions de l'Etat dans le département de l'Hérault (...) ", à l'exception, d'une part, des réquisitions prises en application de la loi du 11 juillet 1938 relative à l'organisation générale de la nation pour temps de guerre et, d'autre part, de la réquisition des comptables publics régie par le décret n° 62-1587 du 29 décembre 1962 portant règlement général sur la comptabilité publique ; que les décisions relatives aux attributions de l'Etat dans le département comprennent, sauf s'il en est disposé autrement par l'arrêté portant délégation de signature, les décisions préfectorales en matière de police des étrangers ; que, par ailleurs, la circonstance que les dispositions du décret du 29 décembre 1962 relatives à la réquisition des comptables publics ont été abrogées par le décret n° 2012-1246 du 7 novembre 2012 relatif à la gestion budgétaire et comptable publique demeure sans incidence sur la régularité de la délégation accordée dès lors que la matière concernée, si elle est désormais régie par ce dernier décret, reste exclue de la délégation en litige ; que cette délégation n'était pas trop générale ; qu'ainsi, c'est à bon droit que le tribunal, qui n'était pas tenu de répondre à tous les arguments de la requérante, a écarté le moyen tiré de l'incompétence de l'auteur de la décision contestée ;
3. Considérant, en deuxième lieu, qu'il ne ressort ni des termes de la décision contestée, ni des autres pièces du dossier, que le préfet de l'Hérault n'aurait pas procédé à un examen particulier de la demande de Mme D... ; qu'il n'est pas davantage établi que le préfet se serait refusé à apprécier si, dans le cas particulier, un certificat de résidence pouvait être délivré à Mme D... dans le cadre de la mise en oeuvre de son pouvoir de régularisation ;
4. Considérant, en troisième lieu, qu'aux termes de l'article 6 de l'accord franco-algérien : " Le certificat de résidence d'un an portant la mention " vie privée et familiale " est délivré de plein droit : (...) 5) au ressortissant algérien, qui n'entre pas dans les catégories précédentes ou dans celles qui ouvrent droit au regroupement familial, dont les liens personnels et familiaux en France sont tels que le refus d'autoriser son séjour porterait à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des motifs du refus " et qu'aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1° Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance ; 2° Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale ou à la protection des droits et libertés d'autrui " ;
5. Considérant que Mme D... soutient qu'elle est entrée en France en septembre 2014, à l'âge de seize ans pour y rejoindre ses parents, que plusieurs de ses frères et soeurs résident régulièrement sur le territoire national, qu'elle poursuit une scolarité et s'occupe de sa mère qui connaît de graves problèmes de santé ; que, toutefois, l'intéressée est célibataire et sans charges de famille en France ; qu'il ressort des pièces du dossier que son père est titulaire d'un certificat de résidence portant la mention " retraité ", délivré en application des stipulations de l'article 7 ter de l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968, ce qui implique l'établissement de sa résidence habituelle hors de France ; qu'il n'est pas établi que la mère de la requérante résiderait régulièrement sur le territoire national à la date de la décision contestée ; que l'intéressée n'est pas dépourvue d'attaches familiales dans son pays d'origine où résident trois de ses soeurs et l'un de ses frères et où elle a vécu l'essentiel de son existence ; qu'ainsi, et compte tenu de la durée de son séjour en France, la décision de refus de délivrance d'un certificat de résidence n'a pas porté au droit de Mme D... au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des motifs qui lui ont été opposés et ne méconnaît ni les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ni celles du 5) de l'article 6 de l'accord franco-algérien ; que, pour les mêmes motifs, le préfet n'a pas entaché sa décision de refus de séjour d'une erreur manifeste d'appréciation sur la situation personnelle de la requérante ;
Sur la légalité de la décision portant obligation de quitter le territoire français :
6. Considérant, en premier lieu, que pour les mêmes motifs que ceux retenus précédemment au point 2, le moyen tiré de l'incompétence de l'auteur de l'acte doit être écarté ;
7. Considérant, en deuxième lieu, qu'il ressort des pièces du dossier que le préfet de l'Hérault a procédé à un examen particulier de la situation personnelle de la requérante avant de prendre, à son encontre, une mesure d'éloignement ; que le moyen tiré du défaut d'examen particulier de la situation personnelle de Mme D... doit, dès lors, être écarté ;
8. Considérant, en troisième lieu, qu'il ressort des pièces du dossier que, dans les circonstances de l'espèce rappelées au point 5, la décision par laquelle le préfet de l'Hérault a fait obligation à Mme D... de quitter le territoire français n'a pas porté à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée par rapport aux buts en vue desquels elle a été prise ; qu'ainsi, le préfet de l'Hérault n'a pas méconnu les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
Sur la légalité de la décision fixant le délai de départ volontaire :
9. Considérant qu'aux termes de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " II. - Pour satisfaire à l'obligation qui lui a été faite de quitter le territoire français, l'étranger dispose d'un délai de trente jours à compter de sa notification et peut solliciter, à cet effet, un dispositif d'aide au retour dans son pays d'origine. Eu égard à la situation personnelle de l'étranger, l'autorité administrative peut accorder, à titre exceptionnel, un délai de départ volontaire supérieur à trente jours. Toutefois, l'autorité administrative peut, par une décision motivée, décider que l'étranger est obligé de quitter sans délai le territoire français (...). " ;
10. Considérant que la seule circonstance que l'exécution de la mesure d'éloignement aurait pour objet d'interrompre sa scolarité n'est pas de nature à démontrer que le préfet aurait, en fixant à trente jours le délai de départ volontaire qui lui a été accordé, commis une erreur manifeste d'appréciation, d'autant qu'il n'est pas établi que la requérante aurait présenté une demande tendant au bénéfice d'un délai d'une durée supérieure ;
11. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que Mme D... n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Montpellier a rejeté sa demande ; que doivent être rejetées, par voie de conséquence, ses conclusions aux fins d'injonction et d'astreinte et celles tendant à l'application des dispositions des articles 37 et 75 de la loi du 10 juillet 1991 ;
D É C I D E :
Article 1er : La requête de Mme D... est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à Mme B... D..., à Me C... et au ministre de l'intérieur.
Copie en sera adressée au préfet de l'Hérault.
Délibéré après l'audience du 30 mars 2017, où siégeaient :
- M. Bédier, président,
- Mme Paix, président assesseur,
- M. Ouillon, premier conseiller.
Lu en audience publique, le 13 avril 2017.
N° 16MA02744 5