Procédure devant la Cour :
Par une requête enregistrée le 26 novembre 2015, M. C..., représenté par Me B..., demande à la Cour :
1°) d'annuler ce jugement du 23 avril 2015 du tribunal administratif de Marseille ;
2°) d'annuler l'arrêté du 20 novembre 2014 du préfet des Bouches-du-Rhône ;
3°) d'enjoindre au préfet des Bouches-du-Rhône de lui délivrer un titre de séjour à compter de la notification de l'arrêt à intervenir, sous astreinte de 100 euros par jour de retard ;
4°) de mettre à la charge de l'État la somme de 1 200 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Il soutient que :
- il est entré régulièrement en France muni d'un visa Schenghen le 27 mai 2011 et n'a plus quitté le territoire français ;
- les dispositions du 6° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ont été méconnues ;
- le refus de séjour porte une atteinte disproportionnée à son droit à sa vie privée et familiale ;
- il méconnaît également l'intérêt supérieur de son enfant français.
M. C... a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 24 septembre 2015.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la convention internationale relative aux droits de l'enfant, signée à New York le 26 janvier 1990 ;
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- l'accord franco-tunisien du 17 mars 1988 modifié, en matière de séjour et de travail ;
- la convention d'application de l'accord de Schengen signée le 19 juin 1990 ;
- le code civil ;
- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- le code de justice administrative.
Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
A été entendu au cours de l'audience publique le rapport de Mme Paix.
1. Considérant que M. C..., de nationalité tunisienne, demande à la Cour d'annuler le jugement du 23 avril 2015 par lequel le tribunal administratif de Marseille a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 20 novembre 2014 du préfet des Bouches-du-Rhône portant refus de séjour, obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et fixant le pays à destination duquel il serait, le cas échéant, reconduit ;
2. Considérant, en premier lieu, qu'aux termes de l'article 19 de la convention d'application de l'accord de Schengen, signée le 19 juin 1990 : " 1. Les étrangers titulaires d'un visa uniforme qui sont entrés régulièrement sur le territoire de l'une des parties contractantes peuvent circuler librement sur le territoire de l'ensemble des parties contractantes pendant la durée de validité du visa, pour autant qu'ils remplissent les conditions d'entrée visées à l'article 5, paragraphe 1, points a, c, d et e (...) 4. Les dispositions du présent article s'appliquent sans préjudice des dispositions de l'article 22 " ; qu'aux termes de l'article 22 de cette même convention : " I- Les étrangers entrés régulièrement sur le territoire d'une des parties contractantes sont tenus de se déclarer, dans des conditions fixées par chaque partie contractante, aux autorités de la partie contractante sur le territoire de laquelle ils pénètrent. / Cette déclaration peut être souscrite au choix de chaque partie contractante, soit à l'entrée, soit, dans un délai de trois jours ouvrables à partir de l'entrée, à l'intérieur du territoire de la partie contractante sur lequel ils pénètrent (...) " et qu'aux termes des dispositions de l'article R. 212-6 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " L'étranger non ressortissant d'un État membre de la Communauté européenne n'est pas astreint à la déclaration d'entrée sur le territoire français : 1° S'il n'est pas assujetti à l'obligation du visa pour entrer en France en vue d'un séjour d'une durée inférieure ou égale à trois mois (...) " ; qu'il est constant, par ailleurs, que les ressortissants tunisiens sont assujettis à l'obligation de présentation d'un visa pour une durée inférieure ou égale à trois mois ;
3. Considérant que M. C..., entré en Italie au cours de l'année 2011 puis en France à une date indéterminée, n'a pas procédé à la déclaration prévue par les dispositions précitées de l'article 22 de la convention d'application de l'accord de Schenghen ; qu'il n'est, par suite, pas fondé à soutenir que son entrée en France serait régulière au sens de ces dispositions ;
4. Considérant, en deuxième lieu, qu'aux termes de l'article 7 quater de l'accord franco-tunisien du 17 mars 1988 : " Sans préjudice des dispositions du b et du d de l'article 7 ter, les ressortissants tunisiens bénéficient, dans les conditions prévues par la législation française, de la carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " " ; que l'article 10 du même accord stipule : " 1. Un titre de séjour d'une durée de dix ans, ouvrant droit à l'exercice d'une activité professionnelle, est délivré de plein droit, sous réserve de la régularité du séjour sur le territoire français : (...) / c) Au ressortissant tunisien qui est père ou mère d'un enfant français résidant en France, à la condition qu'il exerce, même partiellement, l'autorité parentale à l'égard de cet enfant ou qu'il subvienne effectivement à ses besoins (...). / 2. Sont notamment considérés comme remplissant la condition de séjour régulier, les bénéficiaires d'un titre de séjour d'un an délivré en application des articles 7 ter et 7 quater (...) " ; qu'aux termes de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " est délivrée de plein droit : (...) / 6° À l'étranger ne vivant pas en état de polygamie, qui est père ou mère d'un enfant français mineur résidant en France, à la condition qu'il établisse contribuer effectivement à l'entretien et à l'éducation de l'enfant dans les conditions prévues par l'article 371-2 du code civil depuis la naissance de celui-ci ou depuis au moins deux ans, sans que la condition prévue à l'article L. 313-2 soit exigée (...) " ; qu'enfin, l'article L. 371-2 du code civil prévoit que : " Chacun des parents contribue à l'éducation des enfants à proportion de ses ressources, de celles de l'autre parent, ainsi que des besoins de l'enfant. Cette obligation ne cesse pas de plein droit lorsque l'enfant est majeur " ;
5. Considérant qu'il résulte de ces dispositions qu'un ressortissant tunisien parent d'un enfant français résidant en France peut solliciter la délivrance d'un titre de séjour d'une durée de dix ans sur le fondement des stipulations du c) du 1 de l'article 10 de l'accord franco-tunisien du 17 mars 1988, ou une carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " d'une durée d'un an sur la base de l'article 7 quater du même accord et du 6° de l'article L. 311-7 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
6. Considérant, d'une part, que M. C..., entré irrégulièrement comme il a été dit au point 3 et en situation irrégulière, ne remplit pas les conditions prévues par l'article 10 de l'accord franco-tunisien ; qu'il ne peut se voir délivrer, sur ce fondement, un titre de séjour en qualité de parent d'enfant français ;
7. Considérant, d'autre part, que si M. C... a reconnu par anticipation le 2 avril 2013, un enfant né le 4 août suivant, dont la mère est française, cette dernière a déclaré le 12 avril 2013 ne plus vivre avec lui ; que, par ailleurs, l'intéressé, qui ne produit que quelques factures et des attestations, ne justifie pas qu'à la date de la décision attaquée, il contribuait à l'entretien et à l'éducation de son enfant, au sens des dispositions de l'article 371-2 du code civil, depuis sa naissance ; qu'il ne peut donc se prévaloir des dispositions du 6° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile pour obtenir un titre de séjour temporaire d'un an ;
8. Considérant, en troisième lieu, qu'aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui " ;
9. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que M. C..., qui indique être entré en France en 2011, a fait l'objet de deux procédures de réadmission vers l'Italie en novembre 2011 et avril 2013 ; qu'ainsi qu'il a été dit au point 7, il ne justifie pas vivre avec son enfant français et avec la mère de celui-ci, le certificat médical établi le 12 avril 2016 étant insuffisant à cet effet ; qu'il avait trente ans à la date de la décision attaquée et a passé la majeure partie de son existence dans son pays d'origine ; qu'enfin, il résulte de ses déclarations, retracées dans un procès-verbal du 22 novembre 2011, que ses parents vivent encore dans son pays d'origine ; que, dans ces conditions, et compte tenu de la brièveté du séjour en France de l'intéressé, le refus de séjour qui lui a été opposé ne porte pas une atteinte disproportionnée à son droit à sa vie privée et familiale et n'a pas méconnu les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
10. Considérant, en quatrième lieu, qu'aux termes de l'article 3-1 de la convention internationale des droits de l'enfant du 26 janvier 1990 : " Dans toutes les décisions qui concernent les enfants, qu'elles soient le fait d'institutions publiques ou privées de protection sociale, des tribunaux, des autorités administratives ou des organes législatifs, l'intérêt supérieur de l'enfant doit être une considération primordiale " ; qu'il résulte de ces stipulations que, dans l'exercice de son pouvoir d'appréciation, l'autorité administrative doit accorder une attention primordiale à l'intérêt supérieur des enfants dans toutes les décisions les concernant ;
11. Considérant que, pour les mêmes raisons que celles exposées au point 7 et tenant à l'absence de preuve des liens existant entre M. C... et son enfant, le préfet n'a pas méconnu les stipulations de l'article 3 de la convention internationale des droits de l'enfant ;
12. Considérant qu'il résulte de l'ensemble de ce qui précède que M. C... n'est pas fondé à se plaindre de ce que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Marseille a rejeté sa demande ; que doivent être rejetées, par voie de conséquence, ses conclusions aux fins d'injonction et d'astreinte et celles tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;
D É C I D E :
Article 1er : La requête de M. C... est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. A... C..., à Me B... et au ministre de l'intérieur.
Copie en sera adressée au préfet des Bouches-du-Rhône.
Délibéré à l'issue de l'audience du 15 décembre 2016, où siégeaient :
- M. Bédier, président,
- Mme Paix, président assesseur,
- M. Ouillon, premier conseiller.
Lu en audience publique, le 29 décembre 2016.
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N° 15MA04521