Par un jugement n° 1603603 du 25 août 2016, le magistrat délégué du tribunal administratif de Nice a rejeté sa demande.
Procédure devant la Cour :
Par une requête, enregistrée le 9 janvier 2017, M. B..., représenté par Me A..., demande à la Cour :
1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Nice du 25 août 2016 ;
2°) d'annuler l'arrêté du préfet des Alpes-Maritimes du 22 août 2016 ;
3°) d'enjoindre au préfet des Alpes-Maritimes, à titre principal, de lui délivrer un titre de séjour en qualité de père d'un enfant français, ou, à titre subsidiaire, un titre de séjour " mention vie privée et familiale " ou " mention salarié " ou pour " motifs exceptionnels ou humanitaires ", dans le délai de dix jours à compter de la notification de l'arrêt à intervenir sous astreinte de 150 euros par jour de retard ;
4°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 1 500 euros à verser à son conseil sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991.
Il soutient que :
- la décision portant obligation de quitter le territoire français est insuffisamment motivée ;
- il ne pouvait être fait application du 2° de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- le préfet a commis une erreur de droit au regard de l'article L. 211-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et n'a pas examiné son droit au séjour au regard des dispositions du 6° de l'article L. 313-11 du même code ;
- elle méconnaît l'article L. 511-4 6° du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- elle viole les dispositions du 7° de l'article L. 311-13 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- elle est entachée d'erreur manifeste d'appréciation sur sa situation personnelle ;
- la décision refusant l'octroi d'un délai de départ volontaire est entachée d'une erreur de fait quant aux conditions de son entrée en France ;
- cette décision est entachée d'erreur manifeste d'appréciation ;
- il dispose d'un passeport en cours de validité, d'une adresse et il n'a jamais fait l'objet auparavant d'une mesure d'éloignement ;
- la décision fixant le pays de renvoi est illégale pour les mêmes motifs que la décision portant obligation de quitter le territoire français ;
- elle méconnaît les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- elle méconnaît l'article 3-1 de la convention internationale des droits de l'enfant ;
- la décision de placement en rétention est entachée d'erreur manifeste d'appréciation.
M. B... a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 12 décembre 2016.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- la convention de New York relative aux droits de l'enfant ;
- l'accord du 17 mars 1988 entre le Gouvernement de la République française et le Gouvernement de la République de Tunisie en matière de séjour et de travail ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- le code des relations entre le public et l'administration ;
- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;
- le code de justice administrative.
Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Le rapport de Mme Chevalier-Aubert a été entendu au cours de l'audience publique.
1. Considérant que M. B..., né en 1987, de nationalité tunisienne, relève appel du jugement en date du 25 août 2016 par lequel le magistrat délégué du tribunal administratif de Nice a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 22 août 2016, par lequel le préfet des Alpes-Maritimes lui a fait obligation de quitter sans délai le territoire français à destination de son pays d'origine et l'a placé en centre de rétention administrative pour une durée de cinq jours ;
2. Considérant qu'aux termes de l'article L. 211-2 du code des relations entre le public et l'administration : " Les personnes physiques ou morales ont le droit d'être informées sans délai des motifs des décisions administratives individuelles défavorables qui les concernent. / A cet effet, doivent être motivées les décisions qui : / - restreignent l'exercice des libertés publiques ou, de manière générale, constituent une mesure de police ; (...). " ; qu'aux termes de l'article L. 211-5 du même code : " La motivation (...) doit être écrite et comporter l'énoncé des considérations de droit et de fait qui constituent le fondement de la décision. " ;
3. Considérant que si la décision portant obligation de quitter le territoire sans délai vise les éléments de droit sur lesquels le préfet s'est fondé il n'est mentionné aucun élément de fait relatif à la situation personnelle et familiale de M. B... ; que, dans ces conditions, et sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens de la requête, M. B... est fondé à soutenir qu'une telle motivation qui ne fait état d'aucun élément de fait propre à sa situation ne satisfait pas aux exigences des dispositions citées du code des relations entre le public et l'administration ; que par suite, et sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens de la requête dirigés contre la décision portant obligation de quitter le territoire français, la décision du préfet des Alpes-Maritimes du 22 août 2016 doit être annulée pour insuffisance de motivation ainsi que par voie de conséquence les décisions refusant l'octroi d'un délai de départ volontaire et celles fixant le pays de destination et plaçant M. B... en rétention administrative en vue de l'exécution de la mesure d'éloignement ;
4. Considérant qu'il résulte de ce qui précède, sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens de la requête, que M. B... est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Nice a rejeté sa demande d'annulation de l'arrêté du 22 août 2016 ;
Sur les conclusions aux fins d'injonction et d'astreinte :
5. Considérant qu'aux termes de l'article L. 911-1 du code de justice administrative : " Lorsque sa décision implique nécessairement qu'une personne morale de droit public ou un organisme de droit privé chargé de la gestion d'un service public prenne une mesure d'exécution dans un sens déterminé, la juridiction, saisie de conclusions en ce sens, prescrit, par la même décision, cette mesure assortie, le cas échéant d'un délai d'exécution " ;
6. Considérant que, eu égard au motif d'annulation retenu au point 3, l'exécution du présent arrêt n'implique pas la délivrance d'un titre de séjour à M. B... ;
Sur les frais de l'instance :
7. Considérant que M. B... a obtenu le bénéfice de l'aide juridictionnelle ; que, par suite, son avocat peut se prévaloir des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et du deuxième alinéa de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 ; qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de l'Etat le versement à Me A... de la somme de 1 500 euros sous réserve que ce dernier renonce à percevoir la somme correspondant à la part contributive de l'Etat ;
D É C I D E :
Article 1er : Le jugement du 25 août 2016 du magistrat délégué du tribunal administratif de Nice et l'arrêté du préfet des Alpes-Maritimes du 22 août 2016 sont annulés.
Article 2 : L'Etat versera la somme de 1 500 euros à Me A... sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991, sous réserve qu'il renonce à percevoir la somme correspondant à la part contributive de l'Etat.
Article 3 : Le surplus des conclusions de la requête est rejeté.
Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à M. C... B..., à Me A...et au ministre d'Etat, ministre de l'intérieur.
Copie en sera adressée au préfet des Alpes-Maritimes.
Délibéré après l'audience du 20 mars 2018, où siégeaient :
- M. Antonetti, président,
- Mme Chevalier-Aubert, président assesseur,
- Mme Boyer, premier conseiller.
Lu en audience publique, le 3 avril 2018.
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N° 17MA00192
mtr