Procédure devant la Cour :
Par une requête et un mémoire, enregistrés le 16 juin 2017 et le 17 novembre 2017, M. F..., représenté par Me C..., demande à la Cour :
1°) d'annuler ce jugement du 18 mai 2017 du tribunal administratif de Montpellier ;
2°) d'annuler l'arrêté préfectoral du 28 novembre 2016 ;
3°) d'enjoindre au préfet de l'Hérault de lui délivrer un titre de séjour mention " étudiant " ou " vie privée et familiale ", sous astreinte de 100 euros par jour de retard à compter de la notification de l'arrêt à intervenir et subsidiairement, de procéder au réexamen de sa demande dans un délai de deux mois, sous les mêmes conditions d'astreinte ;
4°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 2 000 euros sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Il soutient que :
- l'arrêté en litige a été pris par une autorité incompétente ;
- le préfet n'a pas procédé à un examen complet et réel de sa situation ;
- la décision de refus de séjour est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation et méconnaît l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- la décision fixant le délai de départ volontaire est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation eu égard à sa situation personnelle.
Par un mémoire en défense, enregistré le 18 décembre 2017, le préfet de l'Hérault conclut au rejet de la requête.
Il soutient que les moyens soulevés ne sont pas fondés.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 modifié ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de Mme Carotenuto,
- et les observations de Me E... substituant Me C..., représentant M. F....
1. Considérant que M. F..., de nationalité algérienne, né le 26 février 1982, est entré en France le 14 mai 2016 sous couvert d'un visa Shengen ; qu'il a sollicité le 7 septembre 2016 un certificat de résidence en qualité d'étudiant ; qu'il relève appel du jugement du 18 mai 2017 par lequel le tribunal administratif de Montpellier a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 28 novembre 2016 par lequel le préfet de l'Hérault a refusé de lui délivrer un titre de séjour et l'a obligé à quitter le territoire français dans un délai de trente jours ;
Sur la décision de refus de séjour :
2. Considérant, en premier lieu, que par arrêté n° 2016-I-1143 du 3 novembre 2016, régulièrement publié au recueil des actes administratifs de la préfecture, le préfet de l'Hérault a donné délégation de signature à M. B... D..., sous-préfet, secrétaire général de la préfecture de l'Hérault, à l'effet de signer " tous actes, arrêtés, décisions et circulaires relevant des attributions de l'Etat dans le département de l'Hérault (...) " ; que cet arrêté mentionne que la délégation " comprend donc, notamment, la signature de tous les actes administratifs et correspondances relatifs au séjour et à la police des étrangers (...) " ; que cette délégation de signature, qui contrairement aux allégations de M. F... n'est pas générale et prévoyait une exception pour les réquisitions prises en application de la loi du 11 juillet 1938 et la réquisition des comptables publics régie par le décret n° 62-1587 du 29 décembre 1962, habilitait dès lors M. D... à signer la décision en litige ; que la circonstance que le décret n° 62-1587 a été abrogé reste sans incidence dès lors que des dispositions similaires sont prévues par le décret n° 2012-1246 du 7 novembre 2012 relatif à la gestion budgétaire et comptable publique ; qu'il suit de là que le moyen tiré de l'incompétence du signataire de la décision litigieuse doit être écarté ;
3. Considérant, en deuxième lieu, qu'aux termes de l'article 9 de l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 : " (...) Pour être admis à entrer et séjourner plus de trois mois sur le territoire français au titre (...) du titre III du protocole, les ressortissants algériens doivent présenter un passeport en cours de validité muni d'un visa de long séjour délivré par les autorités françaises. (...). " ; qu'aux termes du titre III du protocole annexé à l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 : " Les ressortissants algériens qui suivent un enseignement, un stage ou font des études en France et justifient de moyens d'existence suffisants (...) reçoivent, sur présentation, soit d'une attestation de pré-inscription ou d'inscription dans un établissement d'enseignement français, soit d'une attestation de stage, un certificat de résidence valable un an, renouvelable et portant la mention " étudiant " ou " stagiaire " " ; qu'il résulte de la combinaison des stipulations précitées que la délivrance aux ressortissants algériens d'un certificat de résidence portant la mention " étudiant " est subordonnée, notamment, à la présentation d'un visa de long séjour ;
4. Considérant qu'il est constant que M. F... était dépourvu de visa de long séjour ; que le préfet de l'Hérault a pu légalement, par l'arrêté attaqué, lui refuser le titre de séjour qu'il avait sollicité au motif qu'il n'avait pas présenté un visa d'une durée supérieure à trois mois ; que l'administration n'était pas tenue de rechercher si M. F... était susceptible de bénéficier d'une mesure de régularisation ; qu'eu égard au caractère récent de l'entrée sur le territoire français de M. F... et de son inscription à l'université, et alors même qu'il a été déclaré admis au niveau Master I en Consulting et Management des systèmes d'information à l'Institut Administration des Entreprises de l'université de Montpellier au titre de l'année 2016/2017, le préfet de l'Hérault n'a pas commis d'erreur manifeste d'appréciation de la situation de l'intéressé ;
5. Considérant, en troisième lieu, qu'en rappelant les conditions de l'entrée en France de M. F... ainsi que sa situation de famille, et en examinant sa situation notamment au regard de sa demande de délivrance de titre en qualité d'étudiant, des stipulations de l'article 9, mais aussi du 5° de l'article 6 de l'accord franco-algérien, et des articles 3 et 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, le préfet de l'Hérault a procédé à un examen réel et complet de la situation personnelle de M. F... ;
6. Considérant, en dernier lieu, qu'aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui " ;
7. Considérant qu'il ne ressort pas des pièces du dossier que M. F..., célibataire et sans charge de famille, a constitué en France le centre de ses intérêts privés et familiaux ; qu'il ne démontre pas être dépourvu de toute attache familiale dans son pays d'origine où il a vécu jusqu'à l'âge de trente-quatre ans ; qu'eu égard au caractère récent de son séjour en France, le préfet n'a pas porté au droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée aux buts en vue desquels il a pris l'arrêté contesté et n'a donc pas méconnu les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
Sur la décision portant obligation de quitter le territoire français :
8. Considérant que le moyen tiré de l'incompétence du signataire doit être écarté pour les mêmes motifs que ceux exposés au point 2 ;
Sur la décision fixant le délai de départ volontaire :
9. Considérant, d'une part, qu'aux termes du II de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, dans sa rédaction modifiée par la loi n° 2011-672 du 16 juin 2011 : " (...) II. - Pour satisfaire à l'obligation qui lui a été faite de quitter le territoire français, l'étranger dispose d'un délai de trente jours à compter de sa notification (...). Eu égard à la situation personnelle de l'étranger, l'autorité administrative peut accorder, à titre exceptionnel, un délai de départ volontaire supérieur à trente jours. (...) " ;
10. Considérant que, dans les circonstances exposées aux points 4 et 7, l'autorité administrative n'a pas entaché la mesure d'éloignement d'une erreur manifeste d'appréciation en n'accordant pas à M. F... un délai de départ volontaire supérieur à trente jours ;
11. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que M. F... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué le tribunal administratif de Montpellier a rejeté sa demande ; que par voie de conséquence, ses conclusions aux fins d'injonction et d'astreinte ainsi que celles présentées au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative doivent être rejetées ;
D É C I D E :
Article 1er : La requête de M. F... est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. A... F...et au ministre d'Etat, ministre de l'intérieur.
Copie en sera adressée au préfet de l'Hérault.
Délibéré après l'audience du 20 mars 2018, où siégeaient :
- M. Antonetti, président,
- Mme Chevalier-Aubert, président assesseur,
- Mme Carotenuto, premier conseiller,
Lu en audience publique, le 3 avril 2018.
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N° 17MA02589
mtr