Procédure devant la Cour :
Par une requête, enregistrée le 9 avril 2018, M. C..., représenté par Me A..., demande à la Cour :
1°) d'annuler ce jugement du 21 novembre 2017 du tribunal administratif de Montpellier ;
2°) d'annuler l'arrêté préfectoral du 1er mars 2017 ;
3°) d'enjoindre au préfet de l'Hérault, à titre principal, de lui délivrer un titre de séjour " vie privée et familiale ", sous astreinte de 100 euros par jour de retard à compter de la décision à intervenir, ou, à titre subsidiaire, de réexaminer sa demande de titre de séjour dans un délai de deux mois, sous astreinte de 100 euros par jour de retard ;
4°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 500 euros à verser à Me A... en application des articles 37 et 75 de la loi du 10 juillet 1991 et la somme de 1 000 euros à verser à M. C... en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Il soutient que :
- la décision de refus de titre de séjour est insuffisamment motivée et n'a pas été précédée d'un examen réel et sérieux de sa situation ;
- la décision attaquée porte une atteinte disproportionnée au droit au respect de sa vie privée et familiale et méconnaît les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et les dispositions du 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- le préfet a entaché sa décision d'une erreur manifeste d'appréciation quant à ses conséquences sur sa situation personnelle ;
- elle porte atteinte à l'intérêt supérieur de l'enfant, en méconnaissance du paragraphe 1 de l'article 3 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant ;
- la décision de refus de séjour est également entachée d'une erreur manifeste d'appréciation dès lors qu'il justifie de circonstances justifiant une admission exceptionnelle au séjour au regard de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- enfin, le préfet a commis une erreur de droit en s'estimant lié par l'absence de visa de long séjour alors qu'il dispose d'un pouvoir de régularisation.
Par un mémoire en défense, enregistré le 5 novembre 2018, le préfet de l'Hérault conclut au rejet de la requête.
Il soutient que les moyens soulevés par M. C... ne sont pas fondés.
M. C... a été a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle partielle par une décision du 19 février 2018.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- la convention internationale relative aux droits de l'enfant ;
- l'accord franco-marocain du 9 octobre 1987 ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
La présidente de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.
Le rapport de Mme Carotenuto a été entendu au cours de l'audience publique.
Considérant ce qui suit :
1. M. C..., ressortissant marocain né en 1976, déclare être entré en France en 2009, alors qu'il résidait régulièrement en Espagne, et y avoir depuis établi sa résidence. Il a fait l'objet d'une mesure de reconduite à la frontière exécutée le 18 décembre 2014. Par un arrêté du 7 septembre 2015, le préfet de l'Hérault a refusé son admission au séjour en qualité de commerçant. Le 23 janvier 2017, M. C... a sollicité la délivrance d'un titre de séjour au titre de sa vie privée et familiale. Par un arrêté du 1er mars 2017, le préfet de l'Hérault a refusé de faire droit à sa demande et l'a obligé à quitter le territoire français. Puis, le préfet a délivré à l'intéressé une autorisation provisoire de séjour valable du 19 avril au 18 octobre 2017 qui a implicitement mais nécessairement abrogé cette obligation de quitter le territoire français, laquelle n'avait reçu aucune exécution. M. C... relève appel du jugement du tribunal administratif de Montpellier du 21 novembre 2017 qui a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 1er mars 2017 en tant que le préfet de l'Hérault a refusé de lui délivrer un titre de séjour.
2. En premier lieu, les moyens tirés de l'insuffisante motivation de la décision en litige et de ce que la situation de l'intéressé n'aurait pas fait l'objet de la part du préfet d'un examen réel et sérieux, doivent être écartés par adoption des motifs retenus à bon droit par le tribunal respectivement aux points 2 et 3 du jugement attaqué.
3. En deuxième lieu, en relevant que M. C... était démuni du visa long séjour exigé par la réglementation, le préfet s'est borné à constater qu'une condition réglementaire pour l'octroi du titre de séjour en qualité de commerçant faisait défaut en l'espèce. Il ne s'est pas néanmoins cru, à tort, en situation de compétence liée pour rejeter la demande de titre de séjour dont il était saisi et n'a pas méconnu son pouvoir de régularisation[0], dès lors qu'il y fait explicitement référence.
4. En troisième lieu, aux termes des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. 2. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui " et aux termes des dispositions de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention "vie privée et familiale" est délivrée de plein droit (...) 7° A l'étranger ne vivant pas en état de polygamie, qui n'entre pas dans les catégories précédentes ou dans celles qui ouvrent droit au regroupement familial, dont les liens personnels et familiaux en France, appréciés notamment au regard de leur intensité, de leur ancienneté et de leur stabilité, des conditions d'existence de l'intéressé, de son insertion dans la société française ainsi que de la nature de ses liens avec la famille restée dans le pays d'origine, sont tels que le refus d'autoriser son séjour porterait à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des motifs du refus, sans que la condition prévue à l'article L. 311-7 soit exigée. L'insertion de l'étranger dans la société française est évaluée en tenant compte notamment de sa connaissance des valeurs de la République ".
5. M. C... est marié depuis le 25 avril 2008 avec une ressortissante marocaine disposant d'un titre de séjour espagnol, également en situation irrégulière sur le territoire français, avec laquelle il a eu trois enfants nés respectivement le 28 avril 2010 en Espagne, le 21 février 2013 et le 13 avril 2017 en France. Si M. C... fait valoir qu'il réside habituellement en France depuis 2009, les pièces éparses produites, constituées essentiellement de documents médicaux, n'établissent pas une présence habituelle sur le territoire français depuis cette date. En outre, M. C... n'invoque aucune circonstance de nature à faire obstacle à ce que la vie de sa famille se poursuive hors de France, et notamment en Espagne, où il a déjà vécu avec sa famille, ou au Maroc, pays dont son épouse est également originaire. Par ailleurs, M. C... a fait l'objet, le 20 novembre 2014, d'un arrêté de reconduite à la frontière, qui a été exécuté le 18 décembre 2014 et il a également fait l'objet, le 7 septembre 2015, d'un refus de titre de séjour assorti d'une réadmission en Espagne. Si le requérant a créé en 2014, en France, une société de construction, dont il est l'unique associé, cette création était récente à la date de la décision attaquée. Dans ces conditions, eu égard au jeune âge de ses enfants et à la durée de leur scolarité en France et alors même que sa soeur et ses neveux et nièces résident régulièrement en France, M. C... n'est pas fondé à soutenir que l'arrêté contesté a porté une atteinte disproportionnée à son droit au respect de sa vie privée et familiale au regard des buts en vue desquels il a été pris, au sens de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et des dispositions du 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. M. C... n'est pas davantage fondé à soutenir que le préfet aurait commis une erreur manifeste dans l'appréciation de sa situation personnelle.
6. Enfin, les moyens tirés de la méconnaissance des stipulations du paragraphe 1 de l'article 3 de la convention internationale des droits de l'enfant et de l'erreur manifeste d'appréciation que le préfet aurait commise au regard des dispositions de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile doivent également être écartés par adoption des motifs retenus à bon droit par le tribunal respectivement aux points 6 et 7 du jugement attaqué.
7. Il résulte de tout ce qui précède que M. C... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Montpellier a rejeté sa demande. Par voie de conséquence, ses conclusions aux fins d'injonction sous astreinte et celles présentées au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et des articles 37 et 75 de la loi du 10 juillet 1991 doivent être rejetées.
D É C I D E :
Article 1er : La requête de M. C... est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. B... C..., à Me A... et au ministre de l'intérieur.
Copie en sera adressée au préfet de l'Hérault.
Délibéré après l'audience du 11 décembre 2018, où siégeaient :
- Mme Helmlinger, présidente de la Cour,
- M. Barthez, président assesseur,
- Mme Carotenuto, premier conseiller.
Lu en audience publique, le 21 décembre 2018.
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N° 18MA01649
nc