Procédure devant la Cour :
Par une requête et un mémoire enregistrés le 2 juin 2014 et le 28 janvier 2016, la SARL SMPI, représentée par Me A..., demande à la Cour :
1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Nice du 3 avril 2014 en tant qu'il a rejeté le surplus de ses conclusions ;
2°) de prononcer la décharge des impositions demeurant... ;
3°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 5 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que :
- la procédure est irrégulière, dès lors que la proposition de rectification qui lui a été adressée le 21 juillet 2010 est insuffisamment motivée au regard des exigences de l'article L. 76 du livre des procédures fiscales ;
- le vérificateur n'a pas précisé dans la proposition de rectification tous les éléments de l'imposition aussi exactement que possible, contrairement aux recommandations de la doctrine référencée BOI-CF-IOR-50-20 n° 120 ;
- la méthode de reconstitution retenue, radicalement viciée et sommaire, conduit à une évaluation très approximative de son chiffre d'affaires ;
- l'administration n'a pas procédé à une évaluation aussi exacte que possible des éléments concourant à la détermination des bases d'imposition, contrairement aux recommandations de la doctrine référencée BOI-CF-IOR-50-20 n° 200 et 210 ;
- c'est à tort que l'administration a fait application de la majoration de 40 % prévue au 1 de l'article 1728 du code général des impôts en cas de défaut de dépôt de déclaration dans les trente jours suivant la réception d'une mise en demeure, dès lors qu'elle était convenue avec le vérificateur de différer le dépôt de ses déclarations ;
- l'existence de revenus distribués est contestée par voie de conséquence ;
- pour les mêmes raisons, l'administration ne pouvait faire application de l'article 117 du code général des impôts.
Par un mémoire en défense enregistré le 9 octobre 2014, le ministre des finances et des comptes publics conclut au rejet de la requête.
Il soutient que :
- le moyen tiré de l'inexistence de revenus distribués est inopérant ;
- les autres moyens soulevés par la SARL SMPI ne sont pas fondés.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de Mme Mastrantuono,
- et les conclusions de M. Ringeval, rapporteur public.
1. Considérant qu'il résulte de l'instruction que la SARL SMPI, qui exerce une activité de publication de revues techniques, a fait l'objet d'une vérification de comptabilité portant sur la période allant du 1er janvier 2007 au 31 décembre 2008 ; qu'à l'issue de ce contrôle, l'administration fiscale, après avoir constaté le défaut de présentation de la comptabilité, a procédé à la reconstitution de son chiffre d'affaires, et l'a subséquemment assujettie, selon la procédure de taxation d'office, à des rappels de taxe sur la valeur ajoutée au titre de la période du 1er janvier au 31 décembre 2007 et à une cotisation supplémentaire d'impôt sur les sociétés au titre de l'exercice clos en 2007, assortis de pénalités ; que la SARL SMPI relève appel du jugement du tribunal administratif de Nice en date du 3 avril 2014 en tant qu'il a partiellement rejeté sa demande tendant à la décharge, en droits et pénalités, des impositions qui lui sont ainsi réclamées ;
Sur la régularité de la procédure d'imposition :
2. Considérant, en premier lieu, qu'aux termes de l'article L. 76 du livre des procédures fiscales : " Les bases ou éléments servant au calcul des impositions d'office et leurs modalités de détermination sont portées à la connaissance du contribuable trente jours au moins avant la mise en recouvrement des impositions (...) " ;
3. Considérant qu'il résulte de l'instruction que la proposition de rectification adressée à la SARL SMPI le 21 juillet 2010 comporte la mention des impôts et de la période d'imposition concernés ; qu'elle précise le fondement légal des impositions, indique que le chiffre d'affaires correspond principalement au produit des encarts publicitaires sollicités par les annonceurs dans le magazine " Manumagazine ", qu'il est déterminé en fonction des encaissements constatés au crédit du compte bancaire ouvert au nom de la société dans les écritures de la banque CIC, et mentionne le détail de ces encaissements ; qu'il précise en outre, en ce qui concerne la taxe sur la valeur ajoutée, le montant du chiffre d'affaires regardé comme correspondant à des prestations fournies à des clients extra-territoriaux et, en ce qui concerne le résultat imposable à l'impôt sur les sociétés, le taux forfaitaire retenu au titre des charges d'exploitation ainsi que le montant correspondant ; que, par suite, la SARL SMPI n'est pas fondée à soutenir que cette proposition de rectification serait insuffisamment motivée au regard des dispositions de l'article L. 76 du livre des procédures fiscales ;
4. Considérant, en second lieu, qu'aux termes du premier alinéa de l'article L. 80 A du livre des procédures fiscales : " Il ne sera procédé à aucun rehaussement d'impositions antérieures si la cause du rehaussement poursuivi par l'administration est un différend sur l'interprétation par le redevable de bonne foi du texte fiscal et s'il est démontré que l'interprétation sur laquelle est fondée la première décision a été, à l'époque, formellement admise par l'administration " ; que les énonciations de la doctrine référencées BOI-CF-IOR-50-20 n° 120, qui sont relatives à la procédure d'imposition, ne peuvent être invoquées par la requérante sur le fondement des dispositions précitées de l'article L. 80 A du livre des procédures fiscales ;
Sur le bien-fondé des impositions :
5. Considérant, en premier lieu, qu'aux termes de l'article L. 192 du livre des procédures fiscales : " Lorsque l'une des commissions visées à l'article L. 59 est saisie d'un litige ou d'une rectification, l'administration supporte la charge de la preuve en cas de réclamation, quel que soit l'avis rendu par la commission. / Toutefois, la charge de la preuve incombe au contribuable lorsque la comptabilité comporte de graves irrégularités et que l'imposition a été établie conformément à l'avis de la commission (...). / Elle incombe également au contribuable à défaut de comptabilité ou de pièces en tenant lieu " ;
6. Considérant que le vérificateur a reconstitué le chiffre d'affaires de la SARL SMPI au titre de l'année 2007 en retenant au titre des recettes les sommes portées au crédit du compte bancaire ouvert au nom de la société dans les écritures de la banque CIC, en excluant, en ce qui concerne la taxe sur la valeur ajoutée, les encaissements regardés comme correspondant à des prestations fournies à des clients extra-territoriaux, évalués à 20 % du total des crédits, soit une proportion équivalente à celle constatée au titre de l'année 2008 à l'issue de la vérification de la SARL Mcmag, à laquelle l'exploitation du magazine " Manumagazine " a été concédée à compter du 1er janvier 2008 et en retenant, en ce qui concerne le résultat imposable à l'impôt sur les sociétés, des charges d'exploitations évaluées forfaitairement à 79,5 % du chiffre d'affaires, soit le ratio constaté au titre de l'année 2008 à l'issue de la même vérification de la SARL Mcmag ; qu'eu égard au défaut de présentation de la comptabilité, et alors qu'il n'est pas soutenu que le libellé des sommes portées au crédit du compte bancaire de la société aurait permis d'exclure leur caractère de recette, ni que les conditions d'exploitation du titre " Manumagazine " par la SARL Mcmag au titre de l'année 2008 auraient été différentes, cette méthode ne saurait être regardée comme radicalement viciée ou sommaire ; que, par ailleurs, si la société requérante relève que la reconstitution devait, en principe, être effectuée selon les règles de la comptabilité d'engagement, elle n'est pas fondée à soutenir que l'administration ne pouvait valablement retenir les versements effectués sur son compte bancaire et aurait dû tenir compte des dépenses engagées, dès lors qu'elle n'a pu présenter une comptabilité permettant de justifier les recettes et les dépenses selon ces règles ;
7. Considérant, en deuxième lieu, que la société requérante ne peut se prévaloir des énonciations de la doctrine référencées BOI-CF-IOR-50-20 n° 200 et 210, au demeurant postérieures aux impositions en litige, dès lors qu'elles se bornent à formuler des recommandations à l'attention des services de l'administration fiscale ;
8. Considérant, en troisième lieu, que la SARL SMPI n'étant pas le redevable légal des impositions assises sur les revenus réputés distribués, elle ne saurait utilement contester l'existence de tels revenus ;
Sur les pénalités :
9. Considérant en premier lieu qu'aux termes du 1 de l'article 1728 du code général des impôts : " Le défaut de production dans les délais prescrits d'une déclaration ou d'un acte comportant l'indication d'éléments à retenir pour l'assiette ou la liquidation de l'impôt entraîne l'application, sur le montant des droits mis à la charge du contribuable ou résultant de la déclaration ou de l'acte déposé tardivement, d'une majoration de : / (...) b. 40 % lorsque la déclaration ou l'acte n'a pas été déposé dans les trente jours suivant la réception d'une mise en demeure, notifiée par pli recommandé, d'avoir à le produire dans ce délai (...) " ;
10. Considérant que la SARL SMPI demande la décharge de la majoration de 40 % prévue par les dispositions précitées du 1 de l'article 1728 du code général des impôts au motif qu'elle serait convenue avec le vérificateur de différer le dépôt de ses déclarations de résultats et de taxe sur la valeur ajoutée ; que, toutefois, la requérante, qui ne conteste pas ne pas avoir déposé ces déclarations malgré l'envoi de mises en demeure, ne critique pas utilement l'application de la majoration en se bornant à alléguer, sans en justifier, un accord du vérificateur quant à un dépôt différé des documents en cause et en faisant valoir que la production de ces documents serait devenue sans objet du fait de l'établissement d'un procès-verbal constatant le défaut de présentation de la comptabilité ;
11. Considérant, en second lieu, qu'aux termes de l'article 117 du code général des impôts : " Au cas où la masse des revenus distribués excède le montant total des distributions tel qu'il résulte des déclarations de la personne morale visées à l'article 116, celle-ci est invitée à fournir à l'administration, dans un délai de trente jours, toutes indications complémentaires sur les bénéficiaires de l'excédent de distribution. En cas de refus ou à défaut de réponse dans ce délai, les sommes correspondantes donnent lieu à l'application de la pénalité prévue à l'article 1759 " ; qu'en l'absence d'application de cette pénalité à la SARL SMPI, cette dernière ne peut utilement soutenir, en tout état de cause, que l'administration ne pouvait faire application de la procédure visée à l'article 117 du code général des impôts ;
12. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que la SARL SMPI n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Nice a rejeté les conclusions de sa demande tendant à la décharge, en droit et pénalités, des rappels de taxe sur la valeur ajoutée qui lui ont été réclamés au titre de la période du 1er janvier au 31 décembre 2007, et le surplus des conclusions tendant à la décharge de la cotisation supplémentaire d'impôt sur les sociétés à laquelle elle a été assujettie au titre de l'exercice clos en 2007, ainsi que des pénalités correspondantes ; qu'elle ne peut ainsi prétendre au bénéfice des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;
D É C I D E :
Article 1er : La requête de la SARL SMPI est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à la SARL SMPI et au ministre des finances et des comptes publics.
Copie en sera adressée à la direction de contrôle fiscal sud-est.
Délibéré après l'audience du 2 février 2016, où siégeaient :
- M. Cherrier, président de chambre,
- M. Martin, président-assesseur,
- Mme Mastrantuono, premier conseiller.
Lu en audience publique, le 26 février 2016.
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N° 14MA02391
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