Par un jugement n° 1503886 du 1er juin 2017, le tribunal administratif de Nîmes a annulé l'arrêté du 15 octobre 2015.
Procédure devant la cour :
Par une requête, enregistrée le 31 juillet 2017, la commune de La Roque-sur-Cèze, représentée par Me B..., demande à la cour :
1°) d'annuler le jugement du 1er juin 2017 du tribunal administratif de Nîmes ;
2°) de rejeter la demande présentée par Mme A... devant le tribunal administratif de Nîmes ;
3°) de mettre à la charge de Mme A... la somme de 3 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que :
- le tribunal administratif a omis de statuer sur la fin de non-recevoir tirée de l'absence de qualité pour agir de Mme A... au nom du domaine Bel Air ;
- il a retenu un moyen qui n'avait pas été soulevé par Mme A... et qui n'est pas d'ordre public ;
- il a omis de tenir compte des pièces produites en défense ;
- Mme A... ne justifie pas d'un intérêt à agir contre l'arrêté contesté ;
- les moyens soulevés par Mme A... en première instance ne sont pas fondés.
Par des mémoires en défense, enregistrés le 7 février, le 30 juillet, le 17 septembre et le 13 novembre 2019, Mme A..., représentée par Me D..., demande à la cour :
1°) à titre principal, de rejeter la requête présentée par la commune de La Roque-sur-Cèze ;
2°) à titre subsidiaire, d'annuler le précédent arrêté du 4 juin 2015 ;
3°) de mettre à la charge de la commune de La Roque-sur-Cèze la somme de 2 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que :
- la commune ne justifie pas de la qualité du maire pour agir au nom de la commune ;
- elle ne produit pas de décision du maire nommant un conseil pour la représenter ;
- l'arrêté contesté est entaché d'incompétence ;
- la mesure de police n'est ni justifiée, ni proportionnée.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- le code général des collectivités territoriales ;
- le code de la voirie routière ;
- le code de justice administrative.
Après avoir entendu en audience publique :
- le rapport de M. C...,
- les conclusions de M. Pecchioli, rapporteur public.
Considérant ce qui suit :
1. Par un arrêté du 15 octobre 2015, le maire de La Roque-sur-Cèze a interdit la circulation des véhicules à moteur sur le chemin des Combes, à l'exception des riverains et des habitants de la commune, des livreurs, des clients des commerces, des artisans, des personnes à mobilité réduite, des véhicules de secours, médicaux et postaux, et des services techniques. La commune de La Roque-sur-Cèze fait appel du jugement du 1er juin 2017 par lequel le tribunal administratif de Nîmes a annulé cet arrêté à la demande de Mme A....
Sur la régularité du jugement attaqué :
2. Contrairement à ce que soutient la commune de La Roque-sur-Cèze, le tribunal administratif a retenu un des moyens invoqués par Mme A... pour annuler l'arrêté contesté, et non soulevé un moyen d'office.
3. Mme A... avait présenté un recours en son nom propre, de sorte que la contestation par la commune de sa qualité pour agir au nom de son exploitation viticole était sans objet. Le tribunal administratif n'avait pas à répondre à cette argumentation invoquée en défense.
4. Il résulte de ce qui précède que la commune de La Roque-sur-Cèze n'est pas fondée à soutenir que le jugement attaqué serait entaché d'irrégularité.
Sur l'intérêt pour agir de Mme A... :
5. Mme A..., propriétaire d'un domaine viticole accessible par le chemin visé par l'interdiction de circulation édictée par l'arrêté du 15 octobre 2015, justifie par des éléments nouveaux en appel être affectée par cet arrêté, alors même que l'article 2 de cet arrêté prévoit une exception à cette interdiction pour les riverains et les clients des commerces, dont ceux de l'exploitation de Mme A.... La fin de non-recevoir opposée par la commune doit en conséquence être écartée.
Sur le fond :
6. D'une part, l'article L. 2212-2 du code général des collectivités territoriales prévoit que " La police municipale a pour objet d'assurer le bon ordre, la sûreté, la sécurité et la salubrité publiques ", et comprend notamment " Tout ce qui intéresse la sûreté et la commodité du passage dans les rues, quais, places et voies publiques ". D'autre part, l'article L. 2213-4 du même code prévoit que : " Le maire peut, par arrêté motivé, interdire l'accès de certaines voies ou de certaines portions de voies ou de certains secteurs de la commune aux véhicules dont la circulation sur ces voies ou dans ces secteurs est de nature à compromettre soit la tranquillité publique, soit la qualité de l'air, soit la protection des espèces animales ou végétales, soit la protection des espaces naturels, des paysages ou des sites ou leur mise en valeur à des fins esthétiques, écologiques, agricoles, forestières ou touristiques. ".
7. L'arrêté contesté a été pris sur l'unique fondement des pouvoirs de police générale du maire, résultant de l'article L. 2212-2 cité ci-dessus, en vue de prévenir un risque d'atteinte à la sécurité publique. Pour contester le bien-fondé du motif d'annulation retenu par le tribunal administratif, la commune se borne à renvoyer à une photo du chemin des Combes et aux motifs de l'arrêté lui-même, qui ne font pas ressortir de façon circonstanciée l'existence d'un risque réel d'atteinte à la sécurité publique pouvant justifier une interdiction de circuler sur ce chemin. Le tribunal administratif a en conséquence annulé à bon droit l'arrêté contesté au motif que les atteintes à la sécurité publique invoquées par la commune ne pouvaient être regardés comme établies.
8. L'article L. 2213-4 permet également au maire d'interdire la circulation sur certaines voies en vue notamment de la mise en valeur d'un site à des fins touristiques. Le maire ne peut cependant prononcer une telle interdiction que par un arrêté motivé, alors qu'un acte réglementaire pris sur le fondement de l'article L. 2212-2 n'est pas soumis à une telle obligation de motivation. La substitution de cette base légale à celle retenue par la commune aurait pour effet de priver les intéressés d'une des garanties dont elle est assortie, et ne peut être envisagée pour cette raison.
9. Il résulte de ce qui précède que la commune de La Roque-sur-Cèze n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Nîmes a annulé l'arrêté du 15 octobre 2015. Il n'est dès lors pas nécessaire d'examiner les fins de non-recevoir opposées par Mme A... en appel.
Sur les frais liés au litige :
10. Il y a lieu, en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, de mettre à la charge de la commune de La Roque-sur-Cèze le versement de la somme de 2 000 euros à Mme A... au titre des frais non compris dans les dépens qu'elle a exposés. Les dispositions de cet article font en revanche obstacle à ce qu'il soit fait droit aux conclusions présentées par la commune de La Roque-sur-Cèze sur le même fondement.
D É C I D E :
Article 1er : La requête de la commune de La Roque-sur-Cèze est rejetée.
Article 2 : La commune de La Roque-sur-Cèze versera à Mme A... la somme de 2 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à la commune de La Roque-sur-Cèze et à Mme E... A... née F....
Délibéré après l'audience du 18 novembre 2019, où siégeaient :
- M. Bocquet, président,
- Mme G..., première conseillère,
- M. C..., premier conseiller.
Lu en audience publique le 2 décembre 2019.
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N° 17MA03436