Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de M. E...,
- les conclusions de M. Pecchioli, rapporteur public,
- et les observations de Me B..., représentant M. D....
Une note en délibéré présentée par M. D..., représenté par Me B..., a été enregistrée le 15 septembre 2020.
Considérant ce qui suit :
1. M. D... demande l'annulation de l'arrêté de permis de construire valant autorisation d'exploitation commerciale, délivré sous le n° PC 034 301 18 70112, par le maire de la commune de Sète le 5 juin 2019, à la société SNC Lidl pour la construction d'un magasin de vente Lidl sur un terrain situé Salins de Villeroy pour une surface de plancher créée de 2 748 m².
2. Aux termes de l'article L. 600-1-2 du code de l'urbanisme : " Une personne autre que l'Etat, les collectivités territoriales ou leurs groupements ou une association n'est recevable à former un recours pour excès de pouvoir contre un permis de construire, de démolir ou d'aménager que si la construction, l'aménagement ou les travaux sont de nature à affecter directement les conditions d'occupation, d'utilisation ou de jouissance du bien qu'elle détient ou occupe régulièrement ou pour lequel elle bénéficie d'une promesse de vente, de bail, ou d'un contrat préliminaire mentionné à l'article L. 261-15 du code de la construction et de l'habitation ". Il résulte de ces dispositions qu'il appartient, en particulier, à tout requérant qui saisit le juge administratif d'un recours pour excès de pouvoir tendant à l'annulation d'un permis de construire, de démolir ou d'aménager, de préciser l'atteinte qu'il invoque pour justifier d'un intérêt lui donnant qualité pour agir, en faisant état de tous éléments suffisamment précis et étayés de nature à établir que cette atteinte est susceptible d'affecter directement les conditions d'occupation, d'utilisation ou de jouissance de son bien. Il appartient au défendeur, s'il entend contester l'intérêt à agir du requérant, d'apporter tous éléments de nature à établir que les atteintes alléguées sont dépourvues de réalité. Le juge de l'excès de pouvoir apprécie la recevabilité de la requête au vu des éléments ainsi versés au dossier par les parties, en écartant le cas échéant les allégations qu'il jugerait insuffisamment étayées mais sans pour autant exiger de l'auteur du recours qu'il apporte la preuve du caractère certain des atteintes qu'il invoque au soutien de la recevabilité de celui-ci. Eu égard à sa situation particulière, le voisin immédiat justifie, en principe, d'un intérêt à agir lorsqu'il fait état devant le juge, qui statue au vu de l'ensemble des pièces du dossier, d'éléments relatifs à la nature, à l'importance ou à la localisation du projet de construction.
3. Il ressort des pièces du dossier que la maison de M. D..., certes séparée de la parcelle d'assiette du projet par un canal, est très proche du projet en litige créant une surface de plancher de 2 748 m². Il n'est pas sérieusement contesté que M. D... disposera d'une vue sur le bâtiment envisagé, une fois construit et que le projet aura un impact significatif sur la desserte de M. D... et les voies d'accès à son habitation. Dès lors, compte tenu en particulier de l'importance du projet en cause, il justifie suffisamment d'une atteinte susceptible d'affecter directement les conditions d'occupation, d'utilisation ou de jouissance de son bien, et dispose par suite d'un intérêt lui donnant qualité pour agir contre la décision attaquée.
4. Le projet de la société Lidl doit être réalisé sur la parcelle BT 763 située sur le territoire de la commune de Sète. Elle est issue de la division de la parcelle BT 429, qui a été acquise par la société anonyme d'équipement du littoral de Thau (Elit), aménageur de la zone d'aménagement concertée comprenant ladite parcelle, laquelle a autorisé le projet présenté par la société Lidl. Le terrain auquel appartient cette parcelle a été déclassé par la délibération du 13 mai 2008. Le requérant n'est donc pas fondé à soutenir que la société Lidl ne disposerait pas de la maîtrise foncière du projet en raison de l'appartenance de la parcelle BT 763 au domaine public. Le moyen tiré de ce que le président de la société Elit ne disposerait pas d'une habilitation à autoriser la société Lidl à déposer un dossier n'est pas assorti des précisions permettant à la Cour d'y statuer. Cette autorisation doit, en tout état de cause, être regardée comme comportant celle de déposer une demande d'autorisation d'exploitation commerciale.
5. Aux termes de l'article R. 111-2 du code de l'urbanisme : " Le projet peut être refusé ou n'être accepté que sous réserve de l'observation de prescriptions spéciales s'il est de nature à porter atteinte à la salubrité ou à la sécurité publique du fait de sa situation, de ses caractéristiques, de son importance ou de son implantation à proximité d'autres installations. ". M. D... soutient que la " commune de Sète est soumise au risque inondation ", et que le terrain d'assiette se situe en zone UV du plan local d'urbanisme et sera de ce fait soumis à la réglementation du plan de prévention du risque inondation qui exigerait la réalisation d'études préalables. Toutefois, le projet se situe en zone UV4 du plan local d'urbanisme qui se borne à interdire les surfaces de plancher affectées au commerce ou à l'artisanat supérieure à 3 000 m2 seuil qui n'est pas dépassé par le projet, sans exiger d'étude pour les projets de surface inférieure. Le moyen ne peut qu'être écarté.
6. Aux termes de l'article R. 431-16 du code de l'urbanisme : " Le dossier joint à la demande de permis de construire comprend en outre, selon les cas : / a) l'étude d'impact ou la décision de l'autorité environnementale dispensant le projet d'évaluation environnementale lorsque le projet relève du tableau annexé à l'article R. 122-2 du code de l'environnement (...) " et aux termes du I de cet article : " Les projets relevant d'une ou plusieurs rubriques énumérées dans le tableau annexé au présent article font l'objet d'une évaluation environnementale, de façon systématique ou après un examen au cas par cas ( ...) en fonction des critères et des seuils fixés dans ce tableau ". La rubrique 41 du tableau annexé à l'article R. 122-2 du code de l'environnement, dans sa rédaction applicable au litige, prévoit que " les aires de stationnement ouvertes au public de 50 unités et plus " sont soumises à la procédure d'examen au " cas par cas ". Ces dispositions doivent être interprétées à la lumière de celles de la directive du Parlement européen et du Conseil du 13 décembre 2011 concernant l'évaluation des incidences de certains projets publics et privés sur l'environnement, dont elles assurent la transposition, qui visent à subordonner l'autorisation des projets publics et privés susceptibles d'avoir des incidences notables sur l'environnement à une évaluation de ces incidences et définissent la notion de projet, pour leur application, comme " la réalisation de travaux de construction ou d'autres installations ou ouvrages " ou " d'autres interventions dans le milieu naturel ou le paysage, y compris celles destinées à l'exploitation des ressources du sol ". La circonstance que les places de stationnement extérieures qui sont prévues sur le terrain d'assiette de l'opération font partie d'une opération plus vaste et que le magasin projeté, du fait de sa superficie, ne relevait d'aucune des rubriques du tableau annexé à l'article R. 122-2 du code de l'environnement n'est pas de nature à faire échapper leur réalisation à l'obligation d'évaluation environnementale, dès lors qu'elles entraient dans l'une des rubriques de ce tableau. Par suite, le projet, comportant cent-dix places, devait être soumis à une étude d'impact dont il est constant qu'elle n'a pas été réalisée et qu'aucun des éléments figurant au dossier ne permet de pallier.
7. En vertu des dispositions de l'article L. 600-5-1 du code de l'urbanisme : " Sans préjudice de la mise en oeuvre de l'article L. 600-5, le juge administratif qui, saisi de conclusions dirigées contre un permis de construire, de démolir ou d'aménager ou contre une décision de non-opposition à déclaration préalable estime, après avoir constaté que les autres moyens ne sont pas fondés, qu'un vice entraînant l'illégalité de cet acte est susceptible d'être régularisé, sursoit à statuer, après avoir invité les parties à présenter leurs observations, jusqu'à l'expiration du délai qu'il fixe pour cette régularisation, même après l'achèvement des travaux. Si une mesure de régularisation est notifiée dans ce délai au juge, celui-ci statue après avoir invité les parties à présenter leurs observations. Le refus par le juge de faire droit à une demande de sursis à statuer est motivé. "
8. Le vice, résultant de la méconnaissance des dispositions de l'article R. 431-16 du code de l'urbanisme, dont le permis de construire en litige est entaché, est susceptible d'être régularisé par la réalisation d'une étude d'impact. Il y a donc lieu, pour l'application des dispositions précitées de l'article L. 600-5-1 du code de l'urbanisme, d'inviter les parties à présenter leurs observations sur l'éventualité d'une telle régularisation, dans le délai d'un mois à compter de la notification du présent arrêt.
D É C I D E :
Article 1er : Il est ordonné, avant dire droit, un supplément d'instruction à l'effet d'inviter les parties à produire, dans un délai d'un mois à compter de la notification du présent arrêt, leurs observations sur la possibilité de régulariser, par la réalisation d'une étude d'impact, le vice tiré de la méconnaissance des dispositions de l'article R. 431-16 du code de l'urbanisme.
Article 2 : En application de l'article R. 613-1-1 du code de justice administrative, l'instruction n'est rouverte qu'à la seule fin définie à l'article 1er.
Article 3 : Tous droits et moyens des parties sur lesquels il n'est pas expressément statué par le présent arrêt sont réservés jusqu'en fin d'instance.
Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à M. A... D..., à la SNC Lidl et la commune de Sète.
Copie en sera délivrée à la Commission nationale d'aménagement commercial et au préfet de l'Hérault.
Délibéré après l'audience du 14 septembre 2020, où siégeaient :
- M. Bocquet, président,
- M. E..., président assesseur,
- Mme C..., première conseillère.
Lu en audience publique, le 28 septembre 2020.
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N° 19MA03697