Par un jugement n° 1709551 du 21 février 2018, le tribunal administratif de Marseille, a rejeté la demande de Mme C....
Procédure devant la Cour :
Par une requête, enregistrée le 3 avril 2018, Mme C..., représentée par Me B..., demande à la Cour :
1°) d'annuler le jugement du tribunal administratif de Marseille du 21 février 2018 ;
2°) d'annuler l'arrêté préfectoral du 19 octobre 2017 portant refus de délivrance d'un titre de séjour, obligation de quitter le territoire français dans le délai de trente jours et interdiction de retour sur le territoire français pour une durée de deux ans ;
3°) d'enjoindre au préfet des Bouches-du-Rhône, à titre principal, de lui délivrer un certificat de résidence portant la mention " vie privée et familiale " et, à titre subsidiaire, de procéder au réexamen de sa situation administrative dans le délai de quatre mois à compter de la notification de la décision à intervenir, et passé ce délai, sous astreinte de 150 euros par jour de retard, ladite astreinte courant pendant un délai de trois mois après lequel elle pourra être liquidée et une nouvelle astreinte fixée.
4°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 2 500 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que :
- l'arrêté litigieux est entaché d'un vice de procédure tenant à l'absence de saisine de la commission du titre de séjour ;
- les stipulations du 1° de l'article 6 de l'accord franco-algérien ont été méconnues, dès lors qu'elle réside en France depuis plus de dix ans ;
- les stipulations du 5° de l'article 6 de l'accord franco-algérien et celles de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ont été également méconnues ;
- le préfet des Bouches-du-Rhône a commis une erreur manifeste quant à l'appréciation de sa situation personnelle.
Par un mémoire en défense, enregistré le 26 juin 2018, le préfet des Bouches-du-Rhône conclut au rejet de la requête.
Il soutient que :
- la requête est forclose ;
- les moyens soulevés par l'appelante ne sont pas fondés.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- le code de justice administrative ;
Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Le rapport de M. Pecchioli a été entendu au cours de l'audience publique.
Considérant ce qui suit :
1. Par jugement du 21 février 2018, le tribunal administratif de Marseille a rejeté la demande de Mme C..., de nationalité algérienne, tendant à l'annulation de l'arrêté du 19 octobre 2017 par lequel le préfet des Bouches-du-Rhône a refusé de lui délivrer un titre de séjour, l'a obligée à quitter le territoire français dans le délai de trente jours et l'a interdite de retour sur le territoire français pour une durée de deux ans. Mme C... relève appel de ce jugement.
Sur le bien-fondé du jugement attaqué :
2. En premier lieu, aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui " ; Aux termes de l'article 6 de l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 : " Le certificat de résidence d'un an portant la mention vie privée et familiale est délivré de plein droit : (...) 5) Au ressortissant algérien qui n'entre pas dans les catégories précédentes ou dans celles qui ouvrent droit au regroupement familial dont les liens personnels et familiaux en France sont tels que le refus d'autoriser son séjour porterait à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des motifs du refus ".
3. MmeC..., née le 17 août 1961, est entrée en France pour la dernière fois selon ses déclarations en 2005 alors qu'elle était âgée de 44 ans. Si elle soutient résider habituellement en France depuis, les pièces produites n'établissent qu'une présence ponctuelle de l'intéressée à partir de cette date. Comme l'a relevé à juste titre le tribunal, l'ensemble des pièces produites, en dépit de leur nombre, n'est pas de nature par lui-même à caractériser une résidence habituelle en France depuis plus de dix ans alors même que Mme C..., qui ne produit aucun contrat de bail, a été et est hébergée chez un tiers qui pouvait réceptionner son courrier. Mme C..., qui a divorcé de son époux le 1er septembre 2011, est actuellement célibataire, sans charge de famille et ne justifie d'aucune attache personnelle et familiale en France. Elle ne démontre pas non plus être dépourvue d'attaches personnelles et familiales en Algérie où se trouve notamment sa fratrie. Mme C..., qui ne se prévaut d'aucune insertion professionnelle sur le territoire national, ne peut donc être regardée comme ayant transféré en France le centre de ses intérêts privés et familiaux sur le territoire national. Par ailleurs, comme l'ont relevé également les premiers juges Mme C... a déjà fait l'objet de plusieurs refus de séjour assortis chacun d'obligation de quitter le territoire français, le 18 décembre 2017, le 15 juin 2009 et le 1er février 2011. La légalité de ce dernier arrêté a notamment été confirmée par un jugement du tribunal administratif de Marseille du 14 avril 2011 et par un arrêt de la cour administrative d'appel de Marseille du 15 octobre 2012. Elle a fait également l'objet d'un arrêté de refus de titre de séjour assorti d'une mesure d'éloignement et d'une interdiction de retour sur le territoire national pour une durée de deux ans, dont la légalité a été confirmée par un jugement du tribunal administratif de Marseille du 7 juillet 2016 et par un arrêt de la cour administrative d'appel de Marseille du 12 mai 2017. Il convient de souligner que l'intéressée s'est toujours soustraite à l'exécution des mesures d'éloignement prises à son encontre. Il résulte de tout cela que l'arrêté en litige n'a pas porté au droit au respect de la vie privée et familiale de Mme C...une atteinte disproportionnée aux buts en vue desquels il a été pris et n'a, par suite, méconnu ni les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ni les stipulations de l'article 6-5 de l'accord franco-algérien. Il n'est pas davantage entaché d'une erreur manifeste dans l'appréciation de ses conséquences sur la situation personnelle de Mme C....
4. En second lieu, les autres moyens de la requête de Mme C..., à l'encontre de la décision portant refus de titre assorti d'une obligation de quitter le territoire français et d'une interdiction du territoire, qui ne comportent aucun développement nouveau, à savoir la méconnaissance des stipulations du 1° de l'article 6 de l'accord franco-algérien et de l'absence de saisine de la commission du titre de séjour doivent être écartés pour les motifs retenus par les premiers juges qu'il y a lieu d'adopter.
5. Il résulte de tout ce qui précède, et sans qu'il soit besoin de se prononcer sur la fin de non-recevoir soulevé en défense, que Mme C... n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Marseille a rejeté sa demande.
Sur les conclusions à fin d'injonction sous astreinte :
6. Le présent arrêt, qui rejette les conclusions tendant à l'annulation de la décision litigieuse, n'implique aucune mesure particulière d'exécution. Par suite, les conclusions aux fins d'injonction et d'astreinte présentées par Mme C... ne peuvent être accueillies.
Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :
7. Aux termes de l'article L. 761-1 du code de justice administrative : " Dans toutes les instances, le juge condamne la partie tenue aux dépens ou, à défaut, la partie perdante, à payer à l'autre partie la somme qu'il détermine, au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. Le juge tient compte de l'équité ou de la situation économique de la partie condamnée. Il peut, même d'office, pour des raisons tirées des mêmes considérations, dire qu'il n'y a pas lieu à cette condamnation. " .
8. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mis à la charge de l'Etat, qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante, le versement d'une quelconque somme au titre des frais exposés et non compris dans les dépens ; Il s'ensuit que les conclusions présentées par Mme C... au titre des articles L. 761-1 du code de justice administrative ne peuvent dès lors qu'être rejetées.
D E C I D E :
Article 1er : La requête de Mme C... est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à Mme A...C...et au ministre d'Etat, ministre de l'intérieur.
Copie en sera adressée au préfet des Bouches-du-Rhône.
Délibéré après l'audience du 17 septembre 2018, où siégeaient :
- M. Bocquet, président de chambre,
- M. Marcovici, président assesseur,
- M. Pecchioli, premier conseiller.
Lu en audience publique, le 1er octobre 2018.
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N° 18MA01482