Procédure devant la Cour :
Par une requête, enregistrée le 21 juillet 2016, le ministre des affaires sociales et de la santé demande à la Cour :
1°) d'annuler le jugement du tribunal administratif de Toulon du 4 février 2016 ;
2°) de rejeter la demande de la SCI Sharon.
Il soutient que :
- la requête est recevable ;
- la signataire de l'arrêté en litige était compétent ;
- l'administration a commis une erreur en adressant au pétitionnaire un exemplaire de l'arrêté ne comportant que la signature de l'auteur de l'acte ;
- cette erreur n'est pas de nature à entacher la décision d'illégalité ;
- il était fondé à mettre la SCI Sharon en demeure de mettre fin à la mise à disposition aux fins d'habitation du local litigieux, en application des dispositions de l'article L. 1331-22 du code de la santé publique ;
- la motivation de l'acte administratif est suffisante et sans équivoque ;
- le local en cause est impropre à l'habitation ;
- le moyen tiré de la conformité des locaux au décret du 30 janvier 2002 relatif aux caractéristiques d'un logement décent est inopérant ;
- le délai imparti d'un mois pour faire cesser la mise à disposition aux fins d'habitation était raisonnable ;
- en application des dispositions de l'article L. 1331-22 du code de la santé publique, les loyers n'étaient plus dus.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- le code de la santé publique ;
- la loi n° 2000-321 du 12 avril 2000 ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de M. Pecchioli,
- et les conclusions de M. Revert, rapporteur public.
Considérant ce qui suit :
1. La SCI Sharon est propriétaire d'un appartement situé au Muy qu'elle a mis en location. A la suite d'une visite sur place effectuée le 10 octobre 2013, par l'Agence régionale de santé de Provence-Alpes-Côte d'Azur qui a établi un rapport, le préfet du Var a pris un arrêté portant mise en demeure, relatif aux locaux impropres par nature à l'habitation, le 8 novembre 2013, par lequel il a enjoint à la SCI Sharon de faire cesser la mise à disposition des locaux aux fins d'habitation et d'assurer le relogement de son locataire. Saisie par la SCI aux fins d'annulation de l'arrêté, le tribunal administratif de Toulon a, suivant jugement du 4 février 2016, fait droit à cette demande au motif que la compétence de l'auteur de l'acte n'était pas établie. Le ministre des affaires sociales et de la santé relève appel de ce jugement.
Sur le bien-fondé du jugement attaqué :
2. Aux termes des dispositions de l'article L. 1331-22 du code la santé publique : " Les caves, sous-sols, combles, pièces dépourvues d'ouverture sur l'extérieur et autres locaux par nature impropres à l'habitation ne peuvent être mis à disposition aux fins d'habitation, à titre gratuit ou onéreux. Le représentant de l'Etat dans le département met en demeure la personne qui a mis les locaux à disposition de faire cesser cette situation dans un délai qu'il fixe. Il peut prescrire, le cas échéant, toutes mesures nécessaires pour empêcher l'accès ou l'usage des locaux aux fins d'habitation, au fur et à mesure de leur évacuation. Les mêmes mesures peuvent être décidées à tout moment par le maire au nom de l'Etat. Ces mesures peuvent faire l'objet d'une exécution d'office ". L'article L. 1331 -26 - 1 du code de la santé publique précise que : " Lorsque le rapport prévu par l'article L. 1331-26 fait apparaître un danger imminent pour la santé ou la sécurité des occupants lié à la situation d'insalubrité de l'immeuble, le représentant de l'Etat dans le département met en demeure le propriétaire, ou l'exploitant s'il s'agit de locaux d'hébergement, de prendre les mesures propres à faire cesser ce danger dans un délai qu'il fixe. Il peut prononcer une interdiction temporaire d'habiter. Dans ce cas, ou si l'exécution des mesures prescrites par cette mise en demeure rend les locaux temporairement inhabitables, les dispositions des articles L. 521-1 et suivants du code de la construction et de l'habitation sont applicables ". Il résulte de ces dispositions que législateur a organisé une police spéciale de la lutte contre l'habitat insalubre confiée à l'Etat habilitant notamment le préfet à prononcer une interdiction temporaire d'habiter dans le cas où l'exécution des mesures prescrites par mise en demeure rend les locaux temporairement inhabitables.
3. L'arrêté préfectoral du 8 novembre 2013 portant mise en demeure, relatif aux locaux impropres par nature à l'habitation en application de l'article L. 1331-22 du code de la santé publique, a été signé par délégation du préfet du Var par M.B..., sous-préfet chargé de mission. Il résulte également de l'instruction que l'arrêté préfectoral n° 2013/37SGPJI portant délégation de signature à M. A...B..., sous-préfet chargé de mission, a été signé par le préfet du Var le 14 juin 2013 et publié le même jour au recueil des actes administratifs de la préfecture du Var.
4. Or l'article 1er de l'arrêté n° 2013/37/SGPJI du 14 juin 2013 prescrit que " délégation est donnée à M. A...B..., sous-préfet chargé de mission auprès du préfet du Var, en toutes matières se rattachant à l'application départementale des décisions prises par l'Etat dans les domaines de la politique de la ville, du logement et de l'emploi ". Cet arrêté précise que " A cet effet, il assure la gestion et l'engagement des crédits correspondants et signe les arrêtés attributifs de subventions " et qu'il " est également chargé de l'animation et de la coordination des politiques départementales " concernant une série de matières qui ne concernent pas le logement excepté la mise en oeuvre de la loi du 5 mars 2007 relative au droit au logement opposable.
5. Ainsi rédigées ces dispositions ne permettent pas d'inclure dans le champ de la délégation de M. B...la police spéciale dévolue au représentant de l'Etat en matière de logement insalubre. En absence de toute référence expresse à la police de l'habitat insalubre, l'étendue de la délégation de signature ne peut être regardée comme indiquée de manière suffisamment précise.
6. Il résulte de tout ce qui précède, suite à la communication en cause d'appel de la délégation en litige, que le ministre des affaires sociales et de la santé n'est pas fondé à se plaindre que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Toulon a annulé l'arrêté en litige.
D E C I D E :
Article 1er : Le recours de la ministre des solidarités et de la santé est rejeté.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à la ministre des solidarités et de la santé et à la SCI Sharon.
Copie en sera adressée au préfet du Var.
Délibéré après l'audience du 17 décembre 2018, où siégeaient :
- M. Bocquet, président,
- M. Pecchioli, premier conseiller,
- MmeC..., première conseillère.
Lu en audience publique, le 7 janvier 2019.
2
N° 16MA02930