Procédure devant la Cour :
Par une requête et un mémoire, enregistrés le 31 mai 2017 et le 22 octobre 2018, la société anonyme AXA France I.A.R.D. et M.C..., représentés par Me B...et Me D..., demandent à la Cour :
1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Toulon du 7 avril 2017 ;
2°) de condamner l'Etat à verser la somme de 58 584,65 euros à la société AXA et la somme de 12 338,59 euros à M. C...en réparation des préjudices subis ;
3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 3 000 euros à verser à la société AXA France I.A.RD au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Ils soutiennent que :
- le préfet maritime, dont les services avaient connaissance du danger, a failli dans l'exercice de ses pouvoirs de police générale en ne mettant pas en place une signalisation et en n'informant pas les navigateurs ;
- il existe un lien de causalité direct et certain entre l'absence de signalisation et le dommage ;
- aucune faute n'a été commise par le navigateur ;
- aucun fait du tiers ne peut exonérer l'Etat de sa responsabilité ;
- AXA France I.A.RD a droit à être remboursée des sommes versées à son assuré pour un montant de 52 305,41 euros et de la somme de 6 279,24 euros au titre des frais d'expertise ;
- M. C...a droit à ce que l'Etat lui verse la somme de 12 338,59 euros restée à sa charge.
Par un mémoire en défense, enregistré le 25 juillet 2017, le ministre de la transition écologique et solidaire conclut au rejet de la requête.
Il fait valoir que :
- en ayant diffusé l'information relative à la présence du banc de sable en moins de quatre heures à compter de sa connaissance du danger, l'Etat n'a commis aucune faute ;
- ce sont les manoeuvres de navigation inadaptées qui sont à l'origine des dommages ;
- il convient dans l'évaluation des dommages de tenir compte de la vétusté du navire ;
- les preuves du paiement effectif des sommes demandées ne sont pas apportées.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- le décret n° 2004-112 du 6 février 2004 relatif à l'organisation de l'action de l'Etat en mer ;
- le code de justice administrative.
La présidente de la Cour a désigné M. Laurent Marcovici, président assesseur de la 5ème chambre, pour présider, en application de l'article R. 222-26 du code de justice administrative, la formation de jugement.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de Mme Duran-Gottschalk, rapporteure,
- les conclusions de M. Revert, rapporteur public.
Considérant ce qui suit :
1. Alors qu'il était convoyé du chantier nautique O.M.V. de Grimaud jusqu'au port de Saint-Tropez, le navire de plaisance de M. C...a été endommagé le 22 novembre 2011 à l'embouchure de La Giscle après avoir heurté un banc de sable, qui s'était formé à la suite d'intempéries survenues entre le 4 et le 10 novembre 2011. La société anonyme AXA France I.A.R.D. et son assuré M. C...relèvent appel du jugement du 7 avril 2017 par lequel le tribunal administratif de Toulon a rejeté leur demande de condamnation de l'Etat à réparer les préjudices subis.
Sur le bien-fondé du jugement :
2. Aux termes de l'article 1er du décret du 6 février 2004 relatif à l'organisation de l'action de l'Etat en mer : " Le représentant de l'Etat en mer est le préfet maritime. (...) Le préfet maritime veille à l'exécution des lois, des règlements et des décisions gouvernementales. Investi du pouvoir de police générale, il a autorité dans tous les domaines où s'exerce l'action de l'Etat en mer, notamment en ce qui concerne la défense des droits souverains et des intérêts de la Nation, le maintien de l'ordre public, la sauvegarde des personnes et des biens, la protection de l'environnement et la coordination de la lutte contre les activités illicites ". En vertu de ces dispositions, il incombe au préfet maritime d'assurer la sécurité des navigateurs, notamment en signalant les dangers qui excèdent ceux contre lesquels les intéressés doivent normalement se prémunir.
3. Il résulte de l'instruction que les services de l'Etat ont transmis moins de quatre heures après l'échouement du navire de M. C...un avis urgent aux navigateurs signalant la présence du banc de sable. Les requérants, qui soutiennent que les services du préfet auraient eu connaissance du danger avant l'échouement du bateau, et que d'autres navires auraient été endommagés avant le 22 novembre par ce même banc de sable, se prévalent du rapport du 20 juin 2012 de l'expert que la société AXA France IARD a mandaté, dans lequel ce dernier indique qu'" il nous est confirmé par les différents intervenants que depuis les intempéries plusieurs bateaux se sont échoués ", et d'un courrier de la direction départementale des territoires et de la mer du 18 mars 2013 mentionnant que " la commune avait posé un balisage d'urgence autour de ce banc de sable préalablement à l'échouement ", et que le balisage avait été renforcé en décembre 2011. Cependant, aucune pièce du dossier ne vient étayer ces affirmations. Par des courriers électroniques des 14 février 2014 et 23 mai 2014, le centre régional opérationnel de surveillance et de sauvetage de Méditerranée indique au contraire ne pas avoir trace dans ses archives d'autres sinistres dans la même zone et sur la même période, tandis qu'il ressort de l'avis urgent aux navigateurs adressé le 22 novembre 2011 et réitéré en décembre 2011 qu'aucun balisage n'avait été mis en place à ces dates. Dans ces conditions, le préfet maritime, dont il ne résulte pas de l'instruction qu'il aurait eu connaissance du danger avant le sinistre et qui a signalé la présence de l'obstacle dans un bref délai, n'a pas failli dans l'exercice de ses pouvoirs de police.
4. Il résulte de tout ce qui précède que la société anonyme AXA France I.A.R.D. et M. C... ne sont pas fondés à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Toulon a rejeté leur demande de condamnation de l'Etat à réparer les préjudices subis.
Sur les frais liés au litige :
5. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de l'Etat, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, la somme que demande la société AXA au titre des frais non compris dans les dépens qu'elle a exposés.
DÉCIDE :
Article 1er : La requête de la société anonyme AXA France I.A.R.D. et de M. C...est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à la société anonyme AXA France I.A.R.D., à M. A...C...et au ministre d'Etat, ministre de la transition écologique et solidaire.
Délibéré après l'audience du 5 novembre 2018, où siégeaient :
- M. Marcovici, président,
- M. Pecchioli, premier conseiller,
- Mme Duran-Gottschalk, première conseillère.
Lu en audience publique, le 19 novembre 2018.
2
N° 17MA02231