Procédure devant la Cour :
Par une requête, enregistrée le 29 juillet 2016, la commune de Marseille, représenté par Me B..., demande à la Cour :
1°) d'annuler le jugement du tribunal administratif de Marseille du 8 juin 2016 ;
2°) de rejeter la requête des consorts G...;
3°) de mettre à la charge des consorts G...le versement de la somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que :
- le tribunal a procédé à une dénaturation des pièces du dossier pour soulever le moyen d'ordre public tiré de l'incompétence du signataire de l'arrêté de péril attaqué ;
- il a commis une erreur manifeste d'appréciation en considérant que l'arrêté de délégation habilitant M. E... était trop général ;
- le tribunal a omis de se prononcer sur le moyen, soulevé par les consortsG..., tiré de ce que l'arrêté du 20 décembre 2013 n'a pas été notifié au syndic de l'immeuble ;
- les moyens soulevés par les consortsG..., au soutien de leur demande d'annulation, ne sont pas fondés ;
Par un mémoire en défense, enregistré le 14 décembre 2017, M. H... G...et Mme A...G..., représentés par Me F..., concluent au rejet de la requête et à ce qu'il soit mis à la charge de la commune appelante la somme de 1 000 euros pour chacun au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Ils maintiennent leurs moyens d'annulation soulevés en première instance et soutiennent que :
- le jugement attaqué a annulé, à juste titre, l'arrêté en litige pour incompétence du signataire, en raison de l'imprécision du domaine de compétence délégué ;
- les moyens soulevés par la commune de Marseille ne sont pas fondés.
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu :
- le code général des collectivités territoriales ;
- le code de la construction et de l'habitation ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de M. Pecchioli,
- les conclusions de M. Revert, rapporteur public,
- et les observations de Me C..., substituant Me F..., représentant les consortsG....
1. Considérant que, par jugement du 8 juin 2016, le tribunal administratif de Marseille a annulé l'arrêté de péril n° 13/610/SPGR du 20 décembre 2013 par lequel le maire la commune de Marseille a interdit toute occupation et utilisation de l'immeuble sis 9 rue Plan Fourmiguier - 8 rue du Chantier à Marseille (13007) dont sont copropriétaires les consortsG..., motif pris de l'incompétence, relevée d'office, de son signataire ; que la commune de Marseille relève appel de ce jugement ;
Sur la régularité du jugement attaqué :
2. Considérant qu'un moyen d'ordre public tiré de l'incompétence de l'auteur d'un acte administratif ne peut être soulevé d'office que s'il ressort manifestement des pièces du dossier au vu duquel le juge statue ; qu'en l'espèce en soulevant d'office le moyen tiré de ce que le signataire de l'arrêté en litige était incompétent alors que cela ne ressortait d'aucune des pièces du dossier, les premiers juges ont commis une irrégularité ; que sans qu'il y ait lieu d'examiner les autres moyens soulevés tenant à la régularité, il y a lieu d'annuler ledit jugement et de statuer immédiatement, par voie d'évocation, sur la demande présentée par les consorts G...devant le tribunal administratif de Marseille ;
Sur la légalité de l'arrêté de péril du 20 décembre 2013 :
3. Considérant qu'aux termes de l'article L. 2122-18 du code général des collectivités territoriales : " Le maire est seul chargé de l'administration, mais il peut, sous sa surveillance et sa responsabilité, déléguer par arrêté une partie de ses fonctions à un ou plusieurs de ses adjoints et, en l'absence ou en cas d'empêchement des adjoints ou dès lors que ceux-ci sont tous titulaires d'une délégation à des membres du conseil municipal. (...) " ; qu'une délégation consentie sur ce fondement, pour être régulière, doit porter sur des attributions effectives et identifiées de façon suffisamment précise pour permettre d'en apprécier la consistance ;
4. Considérant que l'arrêté du 7 avril 2008 par lequel le maire de la commune de Marseille a donné compétence à M. E... pour se prononcer sur " la gestion des risques " a été produit en première instance le 18 mai 2016 en pièces jointes du mémoire en réponse au moyen d'ordre public communiqué le 9 mai 2016 ; que, contrairement à ce que soutient la commune de Marseille, son maire, compte tenu du caractère excessivement général de la notion usitée de " gestion des risques " au regard de son acception couramment admise, n'a pas défini avec une précision suffisante l'objet et l'étendue de la compétence ainsi déléguée ; que, par suite la délégation du 7 avril 2008 était illégale ; que, par voie de conséquence, l'arrêté de péril en litige pris en vertu de cet arrêté portant délégation est entaché d'incompétence ;
5. Considérant qu'il résulte de ce qui précède et pour ce seul motif, l'arrêté du 7 avril 2008 en litige doit être annulé ;
Sur les conclusions tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :
6. Considérant qu'aux termes de l'article L. 761-1 du code de justice administrative : " Dans toutes les instances, le juge condamne la partie tenue aux dépens ou, à défaut, la partie perdante, à payer à l'autre partie la somme qu'il détermine, au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. Le juge tient compte de l'équité ou de la situation économique de la partie condamnée. Il peut, même d'office, pour des raisons tirées des mêmes considérations, dire qu'il n'y a pas lieu à cette condamnation " ;
7. Considérant que les dispositions précitées de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que les consortsG..., qui ne sont pas la partie perdante dans la présente instance, soient condamnés à verser une quelconque somme à la commune de Marseille, au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens ;
8. Considérant que, dans les circonstances de l'espèce, il y a lieu de mettre à la charge de la commune de Marseille, partie perdante, la somme de 1 000 euros à verser, d'une part à M. H... G...et, d'autre part, à Mme A...G..., au titre des mêmes frais ;
D É C I D E :
Article 1er : Le jugement n° 1403759 du 8 juin 2016 du tribunal administratif de Marseille est annulé.
Article 2 : L'arrêté de péril n° 13/610/SPGR du 20 décembre 2013 du maire de la commune de Marseille est annulé.
Article 3 : La commune de Marseille versera la somme de 1 000 euros, d'une part, à M. H... G...et, d'autre part, à Mme A...G..., en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à la commune de Marseille, à M. H... G..., à Mme A... G...et à M. D...G....
Délibéré après l'audience du 9 avril 2018, où siégeaient :
- M. Bocquet, président,
- M. Marcovici, président assesseur,
- M. Pecchioli, premier conseiller.
Lu en audience publique, le 23 avril 2018.
2
N° 16MA03102