Procédure devant la Cour :
Par une requête, enregistrée le 7 janvier 2017, M. B..., représenté par Me C..., demande à la Cour :
1°) d'annuler ce jugement du 6 décembre 2016 du tribunal administratif de Montpellier ;
2°) d'annuler l'arrêté du 27 septembre 2016 du préfet des Pyrénées-Orientales ;
3°) de mettre à la charge de l'État la somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et en application des articles 37 et 75 de la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique, à verser à son avocat ;
Il soutient que :
- l'arrêté est fondé sur une base légale erronée dès lors qu'il ne vise pas l'accord franco-algérien ;
- la décision attaquée méconnaît le 1° de l'article 6 de l'accord franco-algérien dès lors qu'il réside en France depuis plus de dix ans ;
- la décision porte atteinte à sa vie privée qui est aujourd'hui en France, en violation du 5° de l'article 6 de l'accord franco-algérien et de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- le préfet a commis une erreur manifeste quant à l'appréciation des conséquences de sa décision sur sa situation personnelle.
Par un mémoire en défense, enregistré le 4 avril 2017, le préfet de l'Hérault conclut au rejet de la requête.
Il soutient que les moyens de la requête de M. B... ne sont pas fondés.
M. A... B...a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du bureau d'aide juridictionnelle du 10 février 2017.
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu :
- Le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- L'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 modifié ;
- La loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique ;
- Le code des relations entre le public et l'administration ;
- Le code de justice administrative ;
La présidente de la Cour a désigné Mme Évelyne Paix, président assesseur, pour présider par intérim la 3ème chambre de la cour administrative d'appel de Marseille.
Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Le rapport de M. Sauveplane a été entendu au cours de l'audience publique.
1. Considérant que M. B..., ressortissant algérien né en 1972, a été contrôlé le 27 septembre 2016 démuni de tout papier l'autorisant à séjourner en France ; que, par un arrêté du 27 septembre 2016, le préfet des Pyrénées-Orientales l'a obligé à quitter le territoire français sans délai et a fixé le pays à destination duquel il serait reconduit d'office ;
2. Considérant que, pour obliger M. B... à quitter le territoire français sans délai, le préfet des Pyrénées-Orientales s'est fondé sur la circonstance que l'intéressé avait déjà fait l'objet d'un premier refus de séjour assorti d'une obligation de quitter le territoire français le 10 janvier 2012, dont la légalité avait été confirmée par la Cour, que M. B... n'avait pas exécuté cette mesure, et s'était maintenu illégalement sur le territoire français et, enfin, qu'étant célibataire sans enfant, sans travail et sans attache familiale ou personnelle avérée en France, le refus de séjour ne portait pas une atteinte disproportionnée à son droit au respect de sa vie privée et familiale ;
3. Considérant qu'aux termes de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " I. - L'autorité administrative peut obliger à quitter le territoire français un étranger non ressortissant d'un Etat membre de l'Union européenne, d'un autre Etat partie à l'accord sur l'Espace économique européen ou de la Confédération suisse (...) lorsqu'il se trouve dans l'un des cas suivants : / 1° Si l'étranger ne peut justifier être entré régulièrement sur le territoire français, à moins qu'il ne soit titulaire d'un titre de séjour en cours de validité ; (...) La décision énonçant l'obligation de quitter le territoire français est motivée... L'obligation de quitter le territoire français fixe le pays à destination duquel l'étranger est renvoyé en cas d'exécution d'office. / II. - Pour satisfaire à l'obligation qui lui a été faite de quitter le territoire français, l'étranger dispose d'un délai de trente jours à compter de sa notification (...). Toutefois, l'autorité administrative peut, par une décision motivée, décider que l'étranger est obligé de quitter sans délai le territoire français : (...) 3° S'il existe un risque que l'étranger se soustraie à cette obligation. Ce risque est regardé comme établi, sauf circonstance particulière, dans les cas suivants : (...) d) Si l'étranger s'est soustrait à l'exécution d'une précédente mesure d'éloignement (...) " ;
4. Considérant que M. B... n'a pu justifier d'une entrée régulière sur le territoire français et n'est pas titulaire d'un titre l'autorisant à séjourner en France ; qu'il a fait l'objet le 10 janvier 2012, d'une première mesure d'éloignement prise par le préfet des Pyrénées-Orientales et qu'il n'a pas exécutée ; qu'ainsi il entrait ainsi dans le champ d'application des dispositions précitées de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, autorisant le préfet à prendre à son encontre une mesure d'éloignement sans délai ;
5. Considérant, en premier lieu, que la circonstance que l'arrêté du 27 septembre 2016 ne vise pas l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 est sans incidence sur sa légalité dès lors que l'arrêté en question ne statue pas sur le droit au séjour de M. B... mais se borne à l'obliger à quitter le territoire français sur le seul fondement du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; que le préfet doit être regardé comme ayant implicitement mais nécessairement vérifié que l'intéressé ne pouvait pas se voir délivrer de plein droit un titre de séjour sur le fondement de l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 modifié, avant de prononcer à son encontre une obligation de quitter le territoire français ;
6. Considérant, en second lieu, qu'aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1° Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance (...) " ; qu'à ceux de l'article 6 de l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 modifié : " Le certificat de résidence d'un an portant la mention " vie privée et familiale " est délivré de plein droit : 1) au ressortissant algérien, qui justifie par tout moyen résider en France depuis plus de dix ans ou plus de quinze ans si, au cours de cette période, il a séjourné en qualité d'étudiant ; 5) au ressortissant algérien, qui n'entre pas dans les catégories précédentes ou dans celles qui ouvrent droit au regroupement familial, dont les liens personnels et familiaux en France sont tels que le refus d'autoriser son séjour porterait à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des motifs du refus... " ;
7. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que M. B... ne peut justifier être entré régulièrement en France en 2001 comme il le prétend ; qu'il est célibataire sans enfant et sans liens familiaux proches sur le territoire français ; qu'il est sans résidence fixe et sans activité professionnelle ; qu'il a vécu l'essentiel de sa vie d'adulte en Algérie où vit encore sa mère ; que les pièces produites par lui, consistant essentiellement en des ordonnances, certificats médicaux et attestations, datées pour la plupart de 2016, au contenu imprécis et établies pour les besoins de la cause, n'établissent pas qu'il réside en France depuis plus de dix ans et qu'il ne produit, notamment, aucune pièce de nature à établir sa présence en France au cours de l'année 2013 ; que, dans ces conditions, alors même que son père aurait combattu pour la France, l'arrêté attaqué n'a pas porté au droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée aux buts en vue desquels il a été pris ; qu'il n'a, par suite, pas méconnu les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ; qu'eu égard à l'absence de preuve d'une durée de dix années de présence en France, circonstance relevée par les premiers juges, M. B... ne pouvait pas davantage prétendre à se voir délivrer de plein droit un certificat de résidence sur le fondement du 1 ) des stipulations de l'article 6 de l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 modifié ; que, pour les mêmes motifs, le préfet n'a pas commis d'erreur manifeste d'appréciation des conséquences de sa décision sur la situation personnelle du requérant ;
8. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que M. A... B...n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que le tribunal administratif de Montpellier, par le jugement attaqué, a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 27 septembre 2016 du préfet des Pyrénées-Orientales ; qu'il y a lieu de rejeter, par voie de conséquence, les conclusions de son avocat tendant à l'application combinée de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et des articles 37 et 75 de la loi du 10 juillet 1991 ;
D É C I D E :
Article 1er : La requête de M. B... est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. A... B..., à Me C... et au ministre d'Etat, ministre de l'intérieur.
Copie en sera adressée au préfet des Pyrénées-Orientales.
Délibéré après l'audience du 5 avril 2018, où siégeaient :
- Mme Paix, président assesseur, président de la formation de jugement par intérim
- M. Haïli, premier-conseiller,
- M. Sauveplane, premier-conseiller ;
Lu en audience publique, le 19 avril 2018.
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N° 17MA00074