Procédure devant la Cour :
Par une requête, enregistrée le 17 mars 2017, et un mémoire du 31 mai 2017, le préfet du Var demande à la Cour d'annuler ce jugement du 17 février 2017 du tribunal administratif de Toulon.
Il soutient que :
- M. A... n'aurait pas dû être considéré comme un mineur isolé et bénéficier d'un placement auprès du service de l'aide sociale à l'enfance dans la mesure où son père séjourne régulièrement en France depuis 1970 ;
- le caractère réel et sérieux de sa formation fait défaut, et les éléments retenus par les premiers juges sont postérieurs à son arrêté, de sorte qu'il n'y a pas d'atteinte disproportionnée à son droit au respect de sa vie privée et familiale.
Par un mémoire en défense, enregistré le 3 mai 2017, M. A..., représenté par Me C..., conclut au rejet de la requête du préfet et à la condamnation de l'Etat à lui verser la somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Il soutient que les moyens de la requête du préfet ne sont pas fondés.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- l'accord franco-tunisien du 17 mars 1988 modifié en matière de séjour et de travail ;
- le code des relations entre le public et l'administration ;
- le code de justice administrative.
La présidente de la Cour a désigné Mme Évelyne Paix, président assesseur, pour présider par intérim la 3ème chambre de la cour administrative de Marseille.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de M. Sauveplane,
- les conclusions de M. Ouillon, rapporteur public,
- et les observations de Me C... représentant M. A....
1. Considérant que le préfet du Var relève appel du jugement du 17 février 2017 par lequel le tribunal administratif de Toulon a fait droit à la demande de M A...et annulé l'arrêté du 31 octobre 2016, par lequel il avait refusé de l'admettre au séjour, l'avait l'obligé à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et fixé le pays de destination de la mesure d'éloignement ;
Sur les conclusions du préfet du Var :
2. Considérant que, pour annuler l'arrêté du préfet du Var, les premiers juges se sont fondés sur la circonstance que M. A... avait été pris en charge par les services de l'aide sociale à l'enfance à compter de septembre 2013, à l'âge de quatorze ans, puis avait été confié à son père qui réside en France de façon régulière ; qu'ils ont également relevé que, malgré un parcours chaotique, il avait intégré, durant l'année scolaire 2015/2016, une classe spéciale de préparation aux formations professionnelles et, depuis la rentrée scolaire 2016, une classe de certificat d'aptitude professionnelle en réparation de carrosserie ; que les premiers juges ont déduit de l'importance de l'année scolaire en cours et du sérieux avec lequel M. A... poursuivait ces études que le refus de séjour et l'obligation de quitter le territoire français avaient porté une atteinte disproportionnée à son droit au respect de sa vie privée et familiale en méconnaissance tant des dispositions du 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile que des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
3. Considérant que, pour demander l'annulation du jugement, le préfet du Var soutient, d'une part, qu'il n'aurait pas dû être considéré comme un mineur isolé et bénéficier d'un placement auprès du service de l'aide sociale à l'enfance dans la mesure où son père séjourne régulièrement en France depuis 1970 et, d'autre part, que le caractère réel et sérieux de sa formation fait défaut et que les éléments retenus par les premiers juges sont postérieurs à son arrêté ;
4. Considérant que le jugement du 7 mai 2015 du juge des enfants du tribunal de grande instance de Toulon levant la mesure d'assistance éducative dont bénéficiait M. A... depuis le mois de septembre 2013 a relevé un manque de respect du cadre de la structure éducative, des fugues régulières, et que M. A... ne souhaitait pas profiter des cours de soutien scolaire journalier qui lui étaient proposés ; que si, s'agissant de la période du 7 mai 2015 au 31 octobre 2016, date de l'arrêté attaqué, M. A... a intégré une classe spéciale de préparation aux formations professionnelles au cours de laquelle il a effectué plusieurs stages en entreprise notamment dans le secteur du bâtiment, aucun élément ne permet d'apprécier le caractère sérieux de cette formation ; que, s'agissant de l'année scolaire 2016/2017, M. A... a préparé un certificat d'aptitude professionnel en " réparation des carrosseries " à compter du 3 novembre 2016, soit à une date postérieure à l'arrêté attaqué du 31 octobre 2016 et qui, dès lors, ne peut être pris en compte ; que l'attestation du proviseur établie le 25 novembre 2016, soit environ vingt jours après l'inscription de l'intéressé à cette formation, est également postérieure à l'arrêté attaqué ; que M. A... ne résidait en France que depuis trois ans à la date de la décision de refus de séjour et qu'il n'est pas isolé en Tunisie où résident sa mère et les autres membres de sa fratrie ; que les pièces au dossier ne font pas état d'une marque particulière d'intégration dans la société française ; que, dès lors, le refus de séjour et l'obligation de quitter le territoire français n'ont pas porté une atteinte disproportionnée à son droit au respect de sa vie privée et familiale, en méconnaissance des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
5. Considérant qu'il y a lieu pour la Cour, saisie par l'effet dévolutif de l'appel, de statuer sur les autres moyens soulevés par M. A... ;
6. Considérant qu'aux termes de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " est délivrée de plein droit: 2° bis A l'étranger dans l'année qui suit son dix-huitième anniversaire ou entrant dans les prévisions de l'article L. 311-3, qui a été confié, depuis qu'il a atteint au plus l'âge de seize ans, au service de l'aide sociale à l'enfance et sous réserve du caractère réel et sérieux du suivi de la formation, de la nature de ses liens avec la famille restée dans le pays d'origine et de l'avis de la structure d'accueil sur l'insertion de cet étranger dans la société française. La condition prévue à l'article L. 311-7 n'est pas exigée. " ;
7. Considérant que si M. A... a été confié aux services de l'aide sociale à l'enfance à l'âge de quinze ans, son placement auprès de cette structure a cessé le 7 mai 2015, alors qu'il était âgé de dix sept ans ; que sa formation, ainsi qu'il a été au point 4, ne peut être regardée comme sérieuse et qu'il conserve dans son pays d'origine sa mère et les autres membres de sa famille ; que le défaut d'avis de la structure d'insertion n'a pas entaché d'illégalité le refus de séjour opposé par le préfet dès lors qu'il est fondé principalement sur le manque de sérieux des études de M. A..., et que celui-ci ne vivait plus dans cette structure depuis plus d'un an et demi à la date de l'arrêté attaqué ; que, dès lors, le préfet du Var n'a pas méconnu le 2 bis de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
8. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que le préfet du Var est fondé à soutenir que c'est à tort que le tribunal administratif de Toulon, par le jugement attaqué, a annulé son arrêté du 31 octobre 2016 ;
Sur les conclusions de M. A... tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :
9. Considérant qu'aux termes de l'article L. 761-1 du code de justice administrative : " Dans toutes les instances, le juge condamne la partie tenue aux dépens ou, à défaut, la partie perdante, à payer à l'autre partie la somme qu'il détermine, au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. " ; que l'Etat n'étant pas partie perdante dans l'instance, les conclusions de M. A... ne peuvent qu'être rejetées.
D É C I D E :
Article 1er : Le jugement n° 1603572 du 17 février 2017 du tribunal administratif de Toulon est annulé.
Article 2 : La demande et les conclusions d'appel de M. A... sont rejetées.
Article 3 : Le présent arrêt sera notifié au ministre d'Etat, ministre de l'intérieur et à M. B... A....
Copie en sera adressée au préfet du Var.
Délibéré après l'audience du 5 avril 2018, où siégeaient :
- Mme Paix, président assesseur, président de la formation de jugement par interim,
- M. Haïli, premier conseiller,
- M. Sauveplane, premier conseiller.
Lu en audience publique, le 19 avril 2018.
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N° 17MA1132