Procédure devant la Cour :
Par une requête, enregistrée le 6 avril 2017, M. B..., représenté par Me D..., demande à la Cour :
1°) d'annuler ce jugement du 19 janvier 2017 du tribunal administratif de Nice ;
2°) d'annuler l'arrêté du 6 octobre 2016 du préfet des Alpes-Maritimes ;
3°) d'enjoindre au préfet des Alpes-Maritimes de lui délivrer un titre de séjour portant la mention " vie privée et familiale " dans un délai de deux mois à compter de la notification de l'arrêt ;
4°) de mettre à la charge de l'État la somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et en application des articles 37 et 75 de la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique à verser à son avocat.
Il soutient que :
- ils sont mariés depuis 2007, élèvent ensemble leurs trois enfants et son épouse, en situation régulière, est sans ressources professionnelles de sorte qu'elle ne peut en aucune façon solliciter le regroupement familial et est en droit de prétendre à un titre de séjour sur le fondement du 7° de l'article L. 313-11 et de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- la décision a méconnu son droit au respect de sa vie privée et familiale, prévu par les dispositions précitées, ainsi que les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- elle a également violé les stipulations de l'article 3 de la convention internationale signée à New-York le 26 janvier 1990 relative aux droits de l'enfant.
La requête a été communiquée au préfet des Alpes-Maritimes, qui n'a pas produit de mémoire en défense.
M. B... été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du bureau d'aide juridictionnelle du 20 mars 2017.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- l'accord franco-tunisien du 17 mars 1988 modifié en matière de séjour et de travail ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique ;
- le code des relations entre le public et l'administration ;
- le code de justice administrative.
La présidente de la Cour a désigné Mme Évelyne Paix, président assesseur, pour présider par intérim la 3ème chambre de la cour administrative d'appel de Marseille.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique,
- le rapport de M. Sauveplane,
- et les conclusions de M. Ouillon, rapporteur public.
1. Considérant que M. B..., ressortissant tunisien, relève appel du jugement du 19 janvier 2017 par lequel le tribunal administratif de Nice a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 6 octobre 2016 par lequel le préfet des Alpes-Maritimes a refusé de l'admettre au séjour et l'a invité à quitter le territoire français dans un délai de trente jours en fixant le pays de destination ;
Sur la légalité du refus de titre de séjour :
2. Considérant, en premier lieu, que M. B... entre dans l'une des catégories d'étrangers susceptibles d'être admis au séjour au titre du regroupement familial en sa qualité de conjoint d'un ressortissant étranger séjournant régulièrement au moins depuis dix-huit mois en France ; que, dès lors, il ne saurait utilement se prévaloir des dispositions du 7° de l'article L. 313-11 7° du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
3. Considérant, en second lieu, qu'aux termes des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale (...). / 2. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui. " ;
4. Considérant qu'en application de ces stipulations, il appartient à l'autorité administrative qui envisage de refuser un titre de séjour et de procéder à l'éloignement d'un ressortissant étranger en situation irrégulière d'apprécier si, eu égard notamment à la durée et aux conditions de son séjour en France, ainsi qu'à la nature et à l'ancienneté de ses liens familiaux sur le territoire français, l'atteinte que ces mesures porteraient à sa vie familiale serait disproportionnée au regard des buts en vue desquels cette décision serait prise ; que la circonstance que l'étranger relèverait, à la date de cet examen, des catégories ouvrant droit au regroupement familial ne saurait, par elle-même, intervenir dans l'appréciation portée par l'administration sur la gravité de l'atteinte à la situation de l'intéressé ; que cette dernière peut en revanche tenir compte le cas échéant, au titre des buts poursuivis par la mesure d'éloignement, de ce que le ressortissant étranger en cause ne pouvait légalement entrer en France pour y séjourner qu'au seul bénéfice du regroupement familial et qu'il n'a pas respecté cette procédure ;
5. Considérant qu'à l'appui de sa demande d'annulation de l'arrêté lui refusant un titre de séjour, M. B... fait valoir qu'il est arrivé en France en juillet 2011 afin d'y rejoindre son épouse, Mme A...C..., avec laquelle il s'est marié le 1er septembre 2005 et déclare depuis lors résider habituellement en France avec celle-ci qui bénéficie d'une carte de résident valable dix ans ; qu'ils ont eu deux enfants nés respectivement en 2010 et 2014 à Nice ; que, toutefois, M. B... n'établit pas, contrairement à ce qu'il soutient, résider habituellement en France depuis juillet 2011 ; que, dès lors, le refus de titre de séjour et l'obligation de quitter le territoire français n'ont pas porté à son droit au respect de sa vie familiale une atteinte disproportionnée aux buts en vue desquels ils ont été pris ;
6. Considérant, en dernier lieu, que le refus de séjour opposé à M. B... n'a ni pour objet ni pour effet de séparer les enfants B...de leur père, ou d'interrompre leur scolarité ; que, dès lors, le moyen tiré de la méconnaissance des stipulations de l'article 3 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant ne peut être utilement invoqué ;
Sur la légalité de l'obligation de quitter le territoire français :
7. Considérant, en premier lieu, que les moyens tirés la méconnaissance du 7° de l'article L. 313-11 7° du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales doivent être écartés pour les mêmes motifs que ceux énoncés aux points 2 et 5 ;
8. Considérant, en second lieu, qu'aux termes de l'article 3-1 de la convention internationale des droits de l'enfant du 26 janvier 1990, publiée par décret du 8 octobre 1990 : " Dans toutes les décisions qui concernent les enfants, qu'elles soient le fait d'institutions publiques ou privées de protection sociale, des tribunaux, des autorités administratives ou des organes législatifs, l'intérêt supérieur de l'enfant doit être une considération primordiale " ; qu'il résulte de ces stipulations, qui peuvent être utilement invoquées à l'appui d'un recours pour excès de pouvoir, que, dans l'exercice de son pouvoir d'appréciation, l'autorité administrative doit accorder une attention primordiale à l'intérêt supérieur des enfants dans toutes les décisions les concernant ;
9. Considérant, toutefois, qu'il ne ressort pas des pièces du dossier, à supposer que Mme B... ne puisse rejoindre son époux en Tunisie, que la séparation temporaire entre l'intéressé et ses enfants, dans l'attente d'un regroupement familial, serait de nature à méconnaître les stipulations précitées ; qu'en tout état de cause, la vie familiale et la scolarité des enfants peuvent se poursuivre en Tunisie, pays où M. et Mme B... sont tous les deux admissibles ;
10. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que M. B... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que le tribunal administratif de Nice, par le jugement attaqué, a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 6 octobre 2016 du préfet des Alpes-Maritimes lui refusant de l'admettre au séjour et l'obligeant à quitter le territoire français ; qu'il y a donc lieu de rejeter, par voie de conséquence, les conclusions à fin d'injonction et celles tendant à l'application combinée de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et des articles 37 et 75 de la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;
D É C I D E :
Article 1er : La requête de M. B... est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. E... B..., à Me D... et au ministre d'Etat, ministre de l'intérieur.
Copie en sera adressée au préfet des Alpes-Maritimes.
Délibéré après l'audience du 5 avril 2018, où siégeaient :
- Mme Paix, président assesseur, président de la formation de jugement par intérim,
- M. Haïli, premier conseiller,
- M. Sauveplane, premier conseiller.
Lu en audience publique, le 19 avril 2018.
2
N° 17MA01483