Par un jugement n° 1703456 du 7 décembre 2017, le tribunal administratif de Nice a rejeté sa demande.
Procédure devant la Cour :
Par une requête enregistrée le 5 janvier 2018, MmeB..., représentée par MeC..., demande à la Cour :
1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Nice ;
2°) d'annuler l'arrêté du 26 juillet 2017 du préfet des Alpes-Maritimes ;
3°) d'enjoindre au préfet des Alpes-Maritimes de lui délivrer le titre de séjour sollicité sous astreinte de cent euros par jour de retard à compter de la notification de l'arrêt à intervenir ;
4°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 2 000 euros, à verser à son conseil, Me C..., laquelle renonce à percevoir l'aide juridictionnelle, au titre de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991.
Elle soutient que :
- le préfet a commis une erreur manifeste d'appréciation des conséquences de la décision sur sa vie privée et familiale en méconnaissance de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et du 7°) de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- l'arrêté viole les stipulations du paragraphe 1 de l'article 3 de la convention internationale des droits de l'enfant ;
- elle justifie d'un motif exceptionnel de délivrance d'un titre de séjour au titre de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile.
Mme B...a été admise à l'aide juridictionnelle totale par une décision du 25 mai 2018.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- la convention internationale des droits de l'enfant ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;
- le code de justice administrative.
La présidente de la Cour a désigné, par arrêté du 29 mars 2018, Mme D...Steinmetz-Schies, président assesseur, pour présider par intérim la 6ème chambre de la cour administrative d'appel de Marseille, à compter du 1er avril 2018.
Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Le rapport de Mme D...Steinmetz-Schies, président-rapporteur, a été entendu au cours de l'audience publique.
Des pièces complémentaires ont été produites le 17 avril 2018 pour Mme B...et n'ont pas été communiquées.
Considérant ce qui suit :
1. MmeB..., née le 24 août 1986, de nationalité philippine, a déclaré être entrée sur le territoire français en 2008. Le 24 novembre 2016, elle a sollicité la délivrance d'un titre de séjour avec autorisation de travailler. Par un arrêté du 26 juillet 2017, le préfet des Alpes-Maritimes a refusé de lui délivrer le titre de séjour sollicité, lui a fait obligation de quitter le territoire français et a fixé le pays de destination.
2. En premier lieu, aux termes de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " est délivrée de plein droit : (...) / 7° A l'étranger ne vivant pas en état de polygamie, qui n'entre pas dans les catégories précédentes ou dans celles qui ouvrent droit au regroupement familial, dont les liens personnels et familiaux en France, appréciés notamment au regard de leur intensité, de leur ancienneté et de leur stabilité, des conditions d'existence de l'intéressé, de son insertion dans la société française ainsi que de la nature de ses liens avec la famille restée dans le pays d'origine, sont tels que le refus d'autoriser son séjour porterait à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des motifs du refus, sans que la condition prévue à l'article L. 311-7 soit exigée. L'insertion de l'étranger dans la société française est évaluée en tenant compte notamment de sa connaissance des valeurs de la République (...). " Aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1° Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance ; / 2° Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale ou à la protection des droits et libertés d'autrui. " Pour l'application des stipulations précitées, l'étranger qui invoque la protection due à son droit au respect de sa vie privée et familiale en France doit apporter toute justification permettant d'apprécier la réalité et la stabilité de ses liens personnels et familiaux effectifs en France au regard de ceux qu'il a conservés dans son pays d'origine.
3. Mme B...fait valoir que ses attaches privées et familiales sont établies en France, dès lors qu'elle vit en concubinage depuis le 22 janvier 2010 avec MonsieurA..., et est mère de deux enfants nés en France en août 2013 et février 2015. Il ressort toutefois des pièces du dossier qu'elle ne justifie ni de sa présence effective en France au cours des années 2008 et 2009, ni de l'intensité de ses liens personnels et familiaux, et que son compagnon, de même nationalité qu'elle, est aussi en situation irrégulière. Dans ces conditions, l'arrêté contesté ne porte pas à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des motifs du refus du titre de séjour. Par suite, le moyen tiré de la violation des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et de l'article L. 313-11 7° du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile doit être écarté.
4. En deuxième lieu, pour l'ensemble des motifs qui viennent d'être énoncés, le préfet des Alpes-Maritimes n'a pas commis d'erreur manifeste dans l'appréciation des conséquences de sa décision sur la situation personnelle et familiale de MmeB....
5. En troisième lieu, aux termes du paragraphe 1 de l'article 3 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant : " Dans toutes les décisions qui concernent les enfants qu'elles soient le fait des institutions publiques ou privées de protection sociale, des tribunaux, des autorités administratives ou des organes législatifs, l'intérêt supérieur des enfants doit être une considération primordiale ". Il résulte de ces stipulations, qui peuvent être utilement invoquées à l'appui d'un recours pour excès de pouvoir, que dans l'exercice de son pouvoir d'appréciation, l'autorité administrative doit accorder une attention primordiale à l'intérêt supérieur des enfants dans toutes les décisions les concernant. Elles sont applicables non seulement aux décisions qui ont pour objet de régler la situation personnelle d'enfants mineurs mais aussi à celles qui ont pour effet d'affecter, de manière suffisamment directe et certaine, leur situation.
6. La requérante fait valoir que l'arrêté contesté, d'une part, porte atteinte aux droits à l'entretien et à l'éducation de ses deux enfants mineurs, pour lesquels elle contribue, dès lors qu'elle bénéficie d'une promesse d'embauche, d'autre part, porte une atteinte disproportionnée à leur vie familiale, dès lors que les enfants, nés en France, ne connaissent pas le pays de leurs parents, et seraient séparés de leurs grands-parents maternels. Toutefois, rien ne fait obstacle à ce qu'elle reparte avec son compagnon et leurs enfants mineurs dans leur pays d'origine, où ces derniers pourront poursuivre leur scolarité. Dès lors, Mme B...n'est pas fondée à soutenir que l'intérêt supérieur de ses enfants n'aurait pas été suffisamment pris en compte par le préfet des Alpes-Maritimes.
7. En quatrième lieu, aux termes de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " La carte de séjour temporaire mentionnée à l'article L. 313-11 ou la carte de séjour temporaire mentionnée aux 1° et 2° de l'article L. 313-10 peut être délivrée, sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, à l'étranger ne vivant pas en état de polygamie dont l'admission au séjour répond à des considérations humanitaires ou se justifie au regard des motifs exceptionnels qu'il fait valoir, sans que soit opposable la condition prévue à l'article L. 313-2. (...) " .
8. Si Mme B...soutient bénéficier d'une promesse d'embauche, une telle circonstance ne relève pas de considérations humanitaires ou de motifs exceptionnels au sens des dispositions précitées. Par suite, le moyen tiré de la méconnaissance des dispositions de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile doit être écarté.
9. Il résulte de ce qui précède que Mme B...n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Nice a rejeté sa demande d'annulation de l'arrêté du 26 juillet 2017. Ses conclusions à fin d'injonction et celles tendant à ce qu'une somme soit mise à la charge de l'Etat en application des dispositions de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991, ne peuvent, par voie de conséquence, qu'être rejetées.
D É C I D E :
Article 1er : La requête présentée par Mme B... est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à Mme E...B..., à Me C...et au ministre de l'intérieur.
Copie en sera adressée au préfet des Alpes-Maritimes.
Délibéré après l'audience du 16 avril 2018, où siégeaient :
- Mme D...Steinmetz-Schies, président,
- M. Philippe Grimaud, premier conseiller,
- M. Allan Gautron, premier conseiller.
Lu en audience publique le 4 juin 2018.
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N° 18MA00159