Procédure devant la cour :
Par une requête, enregistrée le 22 mai 2015, Mme C..., représentée par Me D..., demande à la cour :
1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Nice du 23 avril 2015 ;
2°) d'annuler l'arrêté du 26 novembre 2014 du préfet des Alpes-Maritimes ;
3°) d'enjoindre au préfet des Alpes-Maritimes de lui délivrer une carte de séjour temporaire sous astreinte de 100 euros par mois de retard ;
4°) de mettre la somme de 1 500 euros à la charge de l'Etat au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que :
- la décision portant fixation du délai de départ volontaire est insuffisamment motivée ;
- le refus de séjour méconnaît les stipulations de l'article 3-1 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant ainsi que celles de l'article 2 du protocole additionnel n° 1 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- le préfet des Alpes-Maritimes a commis une erreur manifeste dans l'appréciation des conséquences de la décision contestée sur sa situation personnelle, familiale et celle de ses enfants .
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la convention internationale des droits de l'enfant signée à New York le 26 janvier 1990 ;
- l'accord du 17 mars 1988 entre le Gouvernement de la République française et le Gouvernement de la République de Tunisie en matière de séjour et de travail ;
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- le code de justice administrative.
Le président de la cour a désigné M. Laurent Marcovici, président assesseur, pour présider les formations de jugement en cas d'absence ou d'empêchement de M. Moussaron, président de la 6e chambre en application de l'article R. 222-26 du code de justice administrative.
Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
A été entendu au cours de l'audience publique le rapport de Mme Héry.
1. Considérant que Mme B... épouseC..., ressortissante tunisienne née en 1988, a sollicité le 28 février 2014 la délivrance d'une carte de séjour temporaire " vie privée et familiale " ; que, par arrêté du 26 novembre 2014, le préfet des Alpes-Maritimes a refusé de lui délivrer un titre de séjour, l'a obligée à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de destination de la mesure d'éloignement ; que Mme C... relève appel du jugement du 23 avril 2015 par lequel le tribunal administratif de Nice a rejeté sa demande tendant à titre principal à l'annulation de cet arrêté ;
Sur le bien-fondé du jugement :
En ce qui concerne la décision de refus de séjour :
2. Considérant qu'aux termes de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, dans sa rédaction applicable : " Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " est délivrée de plein droit:/ (...) 7° A l'étranger ne vivant pas en état de polygamie, qui n'entre pas dans les catégories précédentes ou dans celles qui ouvrent droit au regroupement familial, dont les liens personnels et familiaux en France, appréciés notamment au regard de leur intensité, de leur ancienneté et de leur stabilité, des conditions d'existence de l'intéressé, de son insertion dans la société française ainsi que de la nature de ses liens avec la famille restée dans le pays d'origine, sont tels que le refus d'autoriser son séjour porterait à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des motifs du refus, sans que la condition prévue à l'article L. 311-7 soit exigée (...) " ;
3. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que Mme C... est entrée en France selon ses déclarations en février 2010 avec son époux, de nationalité tunisienne également, et leur fille née en juin 2008 ; qu'ils ont eu une deuxième fille, née en France en octobre 2011 ; que la demande d'asile formée par Mme C... a été rejetée par décision de l'office français de protection des réfugiés et apatrides du 29 avril 2011, confirmée par la Cour nationale du droit d'asile le 20 mars 2012 ; que son époux est en situation irrégulière et a également fait l'objet d'une décision de refus de séjour ; que Mme C... ne fait état d'aucune crainte en cas de retour en Tunisie et n'établit pas ne pas pouvoir y mener une vie familiale normale avec ses deux enfants et son époux ; que, par suite, en refusant de lui délivrer le titre de séjour sollicité, le préfet des Alpes-Maritimes n'a pas porté une atteinte disproportionnée au respect de sa vie privée et familiale ;
4. Considérant qu'aux termes du 1 de l'article 3 de la convention internationale des droits de l'enfant du 26 janvier 1990 : " Dans toutes les décisions qui concernent les enfants, qu'elles soient le fait des institutions publiques ou privées de protection sociale, des tribunaux, des autorités administratives ou des organes législatifs, l'intérêt supérieur de l'enfant doit être une considération primordiale " ; qu'il résulte de ces stipulations, qui peuvent être utilement invoquées à l'appui d'un recours pour excès de pouvoir, que, dans l'exercice de son pouvoir d'appréciation, l'autorité administrative doit accorder une attention primordiale à l'intérêt supérieur des enfants dans toutes les décisions les concernant ;
5. Considérant que la décision attaquée n'a ni pour objet ni pour effet de séparer Mme C... de ses enfants et n'implique pas par elle-même davantage une rupture de la cellule familiale ; que la circonstance que ses enfants soient scolarisées n'est pas de nature à établir que leur intérêt supérieur aurait été méconnu ;
6. Considérant qu'aux termes de l'article 2 du protocole additionnel de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " Nul ne peut se voir refuser le droit à l'instruction (...) " ; que la décision querellée n'a pas pour objet de restreindre le droit à l'instruction des deux jeunes enfants de Mme C... ; qu'en tout état de cause, l'intéressée n'allègue ni n'établit que ses enfants ne pourraient bénéficier d'une instruction en Tunisie ;
7. Considérant qu'il résulte de ce qui a été dit aux points 3, 5 et 6 que le préfet des Alpes-Maritimes n'a pas commis d'erreur manifeste dans l'appréciation des conséquences de sa décision sur la situation personnelle et familiale de Mme C... ;
En ce qui concerne la décision fixant le délai de départ volontaire :
8. Considérant qu'aux termes de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " (...) II. - Pour satisfaire à l'obligation qui lui a été faite de quitter le territoire français, l'étranger dispose d'un délai de trente jours à compter de sa notification et peut solliciter, à cet effet, un dispositif d'aide au retour dans son pays d'origine. (...) Eu égard à la situation personnelle de l'étranger, l'autorité administrative peut accorder, à titre exceptionnel, un délai de départ volontaire supérieur à trente jours (...) " ;
9. Considérant que le délai d'un mois accordé à un étranger pour exécuter une obligation de quitter le territoire français constitue le délai de droit commun le plus long susceptible d'être accordé ; qu'il ne ressort pas des pièces du dossier et qu'il n'est pas allégué par Mme C... qu'elle aurait demandé au préfet à bénéficier d'une prolongation du délai accordé pour exécuter volontairement l'obligation de quitter le territoire français ; que, par suite, le moyen tiré de l'insuffisance de motivation de cette décision doit, en tout état de cause, être écarté ;
10. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que Mme C... n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Nice a rejeté sa demande ;
Sur les conclusions à fin d'injonction :
11. Considérant que le présent arrêt, qui rejette les conclusions à fin d'annulation présentées par Mme C..., n'implique aucune mesure d'exécution ; que par suite, il n'y a pas lieu de faire application des dispositions de l'article L. 911-1 du code de justice administrative ;
Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :
12. Considérant que ces dispositions font obstacle à ce que soit mise à la charge de l'Etat, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, la somme demandée par Mme C... au titre des frais exposés et non compris dans les dépens ;
D É C I D E :
Article 1er : La requête de Mme B... épouse C...est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à Mme A... B...épouse C...et au ministre de l'intérieur.
Copie en sera adressée au préfet des Alpes-Maritimes.
Délibéré après l'audience du 25 janvier 2016, où siégeaient :
- M. Marcovici, président,
- Mme Héry, premier conseiller,
- M. Ouillon, premier conseiller,
Lu en audience publique, le 15 février 2016.
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N° 15MA02087