Procédure devant la Cour :
Par une requête, enregistrée le 3 octobre 2016, MmeA..., représentée par MeB..., demande à la Cour :
1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Nîmes du 30 août 2016 ;
2°) d'annuler l'arrêté du préfet du Gard du 10 février 2016 ;
3°) d'enjoindre au préfet du Gard, à titre principal, de lui délivrer un titre de séjour portant la mention " vie privée et familiale " sous astreinte de 100 euros par jour de retard à compter de la notification de l'arrêt à intervenir, à titre subsidiaire, d'ordonner le réexamen de sa demande de titre de séjour, et dans cette attente, de lui délivrer une autorisation provisoire de séjour dans un délai de un mois à compter de l'arrêt à intervenir sous astreinte de cent euros par jour de retard ;
4°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 1 200 euros à verser à son conseil, lequel renonce à percevoir l'aide juridictionnelle en application des dispositions combinées de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique.
Elle soutient que :
- l'arrêté contesté n'est pas suffisamment motivé et le préfet s'est mépris sur le fondement de sa demande ;
- l'arrêté méconnaît les dispositions de l'article L. 313-11 7°, de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, la circulaire du 28 novembre 2012 et les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- l'arrêté méconnaît les stipulations de l'article 3-1 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant ;
- l'arrêté est entaché d'erreur manifeste d'appréciation ;
- l'arrêté, en tant qu'il porte obligation de quitter le territoire français, est, par voie d'exception, entaché d'illégalité et méconnaît les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- la convention internationale relative aux droits de l'enfant ;
- la convention entre le gouvernement de la République française et le gouvernement de la République du Congo relative à la circulation et au séjour des personnes du 31 juillet 1993 ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- la loi n° 79-587 du 11 juillet 1979 ;
- le code de justice administrative.
Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Le rapport de Mme Steinmetz-Schies été entendu au cours de l'audience publique.
1. Considérant que MmeA..., née le 5 mai 1976, ressortissante congolaise, est entrée en France le 28 février 2008, munie d'un visa de court séjour ; que, le 2 mars 2010, une autorisation provisoire de séjour lui a été délivrée au regard de son état de santé ; que le 30 novembre 2011, elle a donné naissance à des jumelles, dont l'une souffre de difficultés neuro-orthopédique ; que, le 21 avril 2011, une carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " lui a été délivrée ; que, le 28 février 2012, Mme A...a demandé à bénéficier d'un titre de séjour au titre de l'article L. 311-12 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile en raison de l'état de santé de sa fille Marie-Fleur ; qu'ainsi, une autorisation provisoire de séjour lui a été délivrée et a été renouvelée jusqu'au 29 février 2016 ; que, le 12 août 2015, Mme A...a demandé la délivrance d'un titre de séjour sur le fondement des articles L. 311-12 et L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; que Mme A...relève appel du jugement du 30 août 2016 qui a rejeté sa demande d'annulation de l'arrêté du 10 février 2016 par lequel le préfet du Gard a rejeté sa demande de titre de séjour, l'a obligée à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de destination ;
Sur le refus de titre de séjour :
2. Considérant en premier lieu, que l'arrêté du 10 février 2016 par lequel le préfet du Gard lui a refusé un titre de séjour, l'a obligée à quitter le territoire français et a fixé le pays de destination, pris au visa de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, rappelle notamment les conditions d'entrée et de séjour de Mme A..., ainsi que certains éléments de sa situation familiale, et est ainsi suffisamment motivé en fait et en droit ; que la motivation de cet arrêté, qui n'est pas stéréotypée, démontre que le préfet a procédé à un examen particulier de sa situation personnelle ; que, contrairement à ce que soutient la requérante, il ressort de l'arrêté contesté que le préfet, qui n'avait pas à rappeler l'ensemble de la situation de la requérante, s'est prononcé sur l'admission au séjour de l'intéressé au regard de l'article L. 313-14 invoqué ; que, par suite, le moyen tiré de l'insuffisante motivation de l'arrêté manque en fait et doit être écarté ;
3. Considérant en deuxième lieu, qu'aux termes de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d' asile : " Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention "vie privée et familiale" est délivrée de plein droit : (...) 7°) A l'étranger ne vivant pas en état de polygamie, qui n'entre pas dans les catégories précédentes ou dans celles qui ouvrent droit au regroupement familial, dont les liens personnels et familiaux en France, appréciés notamment au regard de leur intensité, de leur ancienneté et de leur stabilité, des conditions d'existence de l'intéressé, de son insertion dans la société française ainsi que de la nature de ses liens avec la famille restée dans le pays d'origine, sont tels que le refus d'autoriser son séjour porterait à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des motifs du refus, sans que la condition prévue à l'article L. 311-7 soit exigée (...) " ; qu'aux termes de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " La carte de séjour temporaire mentionnée à l'article L. 313-11 ou la carte de séjour temporaire mentionnée au 1° de l'article L. 313-10 peut être délivrée, sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, à l'étranger ne vivant pas en état de polygamie dont l'admission au séjour répond à des considérations humanitaires ou se justifie au regard des motifs exceptionnels qu'il fait valoir, sans que soit opposable la condition prévue à l'article L. 311-7. L'autorité administrative est tenue de soumettre pour avis à la commission mentionnée à l'article L. 312-1 la demande d'admission exceptionnelle au séjour formée par l'étranger qui justifie par tout moyen résider en France habituellement depuis plus de dix ans. Un décret en Conseil d'Etat définit les modalités d'application du présent article. " ; que l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales prévoit enfin que : " 1- Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui " ;
4. Considérant que Mme A...est entrée en France le 28 février 2008, afin de pouvoir bénéficier d'une fécondation in vitro ; qu'après trois tentatives, elle a donné naissance le 30 janvier 2011 à des jumelles, nées prématurément, dont l'une bénéficie d'un suivi médical en raison de difficultés neuro-orthopédiques ; qu'elle a bénéficié de titres de séjour en qualité de parent d'étranger malade, et a demandé à bénéficier, en août 2015, d'un titre de séjour pour raisons humanitaires ou exceptionnelles ; que Mme A...fait valoir qu'elle est divorcée depuis le 10 mai 2013 du père de ses enfants qui réside au Congo, qu'elle a suivi des formations professionnelles afin d'exercer une activité professionnelle en vue de subvenir aux besoins de sa famille, qu'elle participe à de nombreuses activités bénévoles, que ses deux filles sont scolarisées en école maternelle, que l'enfant prénommée Marie-Fleur, qui a des difficultés neuro-orthopédiques, est suivie en France pour réévaluation psychomotrice et que le centre de ses intérêts personnels et familiaux se situe en France ; que toutefois, la requérante ne justifie pas ainsi de façon suffisamment probante de considérations humanitaires ou de motifs exceptionnels au sens des dispositions de l'article L. 313-14 précité ; que, par ailleurs, la requérante n'est pas fondée à soutenir qu'en lui refusant la délivrance d'un titre de séjour, le préfet a porté une atteinte disproportionnée à son droit au respect de la vie privée et familiale en méconnaissance des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et de l'article 313-11 7° de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
5. Considérant, en troisième lieu, que Mme A...ne peut utilement se prévaloir de la circulaire du ministre de l'intérieur du 28 novembre 2012 relative aux conditions d'examen des demandes d'admission au séjour déposées par des ressortissants étrangers en situation irrégulière, dont les orientations générales ne constituent pas des lignes directrices ;
6. Considérant, en quatrième lieu, qu'aux termes du paragraphe 1 de l'article 3 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant : " Dans toutes les décisions qui concernent les enfants qu'elles soient le fait des institutions publiques ou privées de protection sociale, des tribunaux, des autorités administratives ou des organes législatifs, l'intérêt supérieur des enfants doit être une considération primordiale " ; qu'il résulte de ces stipulations, qui peuvent être utilement invoquées à l'appui d'un recours pour excès de pouvoir, que dans l'exercice de son pouvoir d'appréciation, l'autorité administrative doit accorder une attention primordiale à l'intérêt supérieur des enfants dans toutes les décisions les concernant ; qu'elles sont applicables non seulement aux décisions qui ont pour objet de régler la situation personnelle d'enfants mineurs mais aussi à celles qui ont pour effet d'affecter, de manière suffisamment directe et certaine, leur situation ;
7. Considérant, que si la requérante fait valoir que ses deux enfants, nées en France ne connaissent pas le Congo et que l'intérêt supérieur de ses deux enfants n'a pas été pris en compte par le préfet lors de l'examen du titre de séjour, il ne ressort d'aucune pièce du dossier que le préfet n'aurait pas tenu compte de la présence des enfants pour examiner le droit au séjour de Mme A... ; que, par ailleurs, il ne ressort pas des pièces du dossier que le préfet aurait, en refusant de délivrer un titre de séjour à MmeA..., porté atteinte à l'intérêt supérieur de ses deux filles mineures, dès lors que le 8 octobre 2015, le médecin de l'agence régionale de santé a estimé que si l'état de santé de Marie-Fleur nécessite une prise en charge, son défaut ne devrait pas entraîner de conséquences d'une exceptionnelle gravité, et qu'elle peut voyager sans risque ; que les enfants peuvent ainsi partir avec leur mère dans son pays d'origine où réside le père des enfants ; que, dès lors, le préfet n'a pas méconnu les stipulations précitées du paragraphe 1 de l'article 3 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant ;
8. Considérant en cinquième lieu, qu'il ne résulte pas de l'instruction que l'arrêté contesté soit entaché d'erreur manifeste d'appréciation ;
Sur l'obligation de quitter le territoire français :
9. Considérant qu'il résulte de ce qui a été dit ci-dessus que Mme A...n'est pas fondée à soutenir que la décision portant obligation de quitter le territoire français est illégale par voie de conséquence de l'illégalité du refus de titre de séjour ;
10. Considérant que pour les mêmes motifs que ceux exposés au point 4, l'arrêté en tant qu'il porte obligation de quitter le territoire français, ne méconnaît pas les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
11. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que Mme A...n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Nîmes a rejeté sa demande ; que ses conclusions à fin d'injonction et celles tendant à ce qu'une somme représentative des frais de procédure soit, en application des dispositions des articles L. 761-1 du code de justice administrative ou 37 de la loi du 10 juillet 1991, mise à la charge de l'Etat, qui n'est pas la partie perdante, ne peuvent, par voie de conséquence, qu'être rejetées.
D É C I D E :
Article 1er : La requête de MmeA... est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à Mme C...A..., à Me B... et au ministre de l'intérieur.
Copie en sera adressée au préfet du Gard.
Délibéré après l'audience du 13 mars 2017, où siégeaient :
- M. Moussaron, président,
- Mme Steinmetz-Schies, président assesseur,
- M. Gautron, conseiller,
Lu en audience publique, le 27 mars 2017.
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N° 16MA03820