Procédure devant la Cour :
Par une requête, enregistrée le 5 octobre 2016, Mme A..., représentée par Me D..., demande à la Cour :
1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Nice du 9 septembre 2016 ;
2°) d'annuler l'arrêté du préfet des Alpes-Maritimes du 12 avril 2016 ;
3°) d'enjoindre au préfet des Alpes-Maritimes, à titre principal, de lui délivrer une carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " à compter de la notification de l'arrêt à intervenir, à titre subsidiaire, d'ordonner le réexamen de sa demande de titre de séjour, et dans cette attente, de lui délivrer d'une autorisation provisoire de séjour dans un délai de un mois à compter de l'arrêt à intervenir ;
4°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 3 000 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que :
- le jugement est irrégulier ;
- l'arrêté contesté n'est pas suffisamment motivé ;
- elle justifie d'une entrée régulière en France ;
- le préfet a commis une erreur de droit ;
- l'arrêté méconnaît les dispositions de l'article L. 313-11 7° du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, et les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- l'arrêté méconnaît les stipulations de l'article 3-1 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant ;
- l'arrêté est entaché d'erreur manifeste d'appréciation.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- la convention internationale relative aux droits de l'enfant ;
- l'accord franco-tunisien du 17 mars 1988 modifié, concernant le séjour et le travail des ressortissants tunisiens en France ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- la loi n° 79-587 du 11 juillet 1979 ;
- le code de justice administrative.
Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Le rapport de Mme Steinmetz-Schies a été entendu au cours de l'audience publique.
1. Considérant que MmeA..., née le 14 décembre 1991, ressortissante tunisienne, est entrée en France en 2014 et s'y est maintenue irrégulièrement ; que, le 8 mars 2016, elle a demandé à bénéficier d'un titre de séjour au titre de la vie privée et familiale sur le fondement des articles L. 313-11 7° et L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; que Mme A... relève appel du jugement du 9 septembre 2016 qui a rejeté sa demande d'annulation de l'arrêté du 12 avril 2016 par lequel le préfet des Alpes-Maritimes a rejeté sa demande de titre de séjour, l'a obligée à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de destination ;
Sur la régularité du jugement :
2. Considérant que le jugement attaqué, contrairement à ce que soutient la requérante, a examiné le moyen tiré de l'insuffisante motivation de l'arrêté contesté, au regard de la convention internationale relative aux droits de l'enfant ainsi que de l'atteinte disproportionnée au droit au respect de la vie privée et familiale de la requérante ; que le jugement attaqué, qui est ainsi suffisamment motivé, n'est pas entaché d'irrégularité ;
Sur le bien-fondé du jugement :
3. Considérant, en premier lieu, que l'arrêté du 12 avril 2016 par lequel le préfet des Alpes-Maritimes lui a refusé un titre de séjour, l'a obligée à quitter le territoire français et a fixé le pays de destination, pris notamment au visa de l'article L. 511-1-I et suivants du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, de la convention internationale des droits de l'enfant, de l'accord franco tunisien du 17 mars 1988, rappelle notamment les conditions d'entrée et de séjour de Mme A..., ainsi que certains éléments de sa situation familiale, et est ainsi suffisamment motivé en fait et en droit ; que la motivation de cet arrêté, qui n'est pas stéréotypée, démontre que le préfet a procédé à un examen particulier de sa situation personnelle ; que, contrairement à ce que soutient la requérante, il ressort de l'arrêté contesté que le préfet, qui n'avait pas à rappeler l'ensemble de la situation de la requérante, s'est prononcé sur l'admission au séjour de l'intéressé au regard de l'article L. 313-14 et L. 313-11 7° invoqués, ainsi qu'au regard de la convention internationale des droits de l'enfant ; que, par suite, le moyen tiré de l'insuffisante motivation de l'arrêté manque en fait et doit être écarté ;
4. Considérant en deuxième lieu, que si l'arrêté contesté est entaché d'une erreur de fait dès lors que la requérante est entrée régulièrement en France, par Gênes et qu'elle bénéficiait d'un visa touristique valable du 16 août 2014 au 16 octobre 2014, cette circonstance, aussi regrettable soit-elle, est sans incidence sur la légalité de l'arrêté contesté ;
5. Considérant en troisième lieu, que, contrairement à ce que soutient Mme A..., le préfet des Alpes-Maritimes n'a pas fondé exclusivement son arrêté sur la possibilité pour l'intéressée de bénéficier du regroupement familial, mais a aussi examiné sa situation au regard des articles L. 313-14 et L. 313-11 7° du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
6. Considérant en quatrième lieu, qu'aux termes de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d' asile : " Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention "vie privée et familiale" est délivrée de plein droit : (...) 7°) A l'étranger ne vivant pas en état de polygamie, qui n'entre pas dans les catégories précédentes ou dans celles qui ouvrent droit au regroupement familial, dont les liens personnels et familiaux en France, appréciés notamment au regard de leur intensité, de leur ancienneté et de leur stabilité, des conditions d'existence de l'intéressé, de son insertion dans la société française ainsi que de la nature de ses liens avec la famille restée dans le pays d'origine, sont tels que le refus d'autoriser son séjour porterait à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des motifs du refus, sans que la condition prévue à l'article L. 311-7 soit exigée (...) " ; qu'aux termes de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " La carte de séjour temporaire mentionnée à l'article L. 313-11 ou la carte de séjour temporaire mentionnée au 1° de l'article L. 313-10 peut être délivrée, sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, à l'étranger ne vivant pas en état de polygamie dont l'admission au séjour répond à des considérations humanitaires ou se justifie au regard des motifs exceptionnels qu'il fait valoir, sans que soit opposable la condition prévue à l'article L. 311-7. L'autorité administrative est tenue de soumettre pour avis à la commission mentionnée à l'article L. 312-1 la demande d'admission exceptionnelle au séjour formée par l'étranger qui justifie par tout moyen résider en France habituellement depuis plus de dix ans. Un décret en Conseil d'Etat définit les modalités d'application du présent article. " ; que l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales prévoit enfin que : " 1- Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui " ;
7. Considérant que Mme A... fait valoir qu'elle a sa résidence habituelle en France depuis plus de deux ans, qu'elle a épousé en Tunisie, le 13 août 2013 un compatriote bénéficiant d'une carte de résident valable du 13 novembre 2010 au 12 novembre 2020, qu'un enfant est né de leur union, en France, le 3 avril 2015 et que la réalité de leur union est établie ; que toutefois, les moyens tirés de la méconnaissance des articles L. 313-11 7° et L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile sont inopérants dès lors que la requérante entre dans les catégories ouvrant droit au regroupement familial ; que par ailleurs, dans les circonstances de l'espèce, la requérante n'est pas fondée à soutenir qu'en lui refusant la délivrance d'un titre de séjour, le préfet a porté une atteinte disproportionnée à son droit au respect de la vie privée et familiale en méconnaissance des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
8. Considérant, en cinquième lieu, qu'aux termes du paragraphe 1 de l'article 3 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant : " Dans toutes les décisions qui concernent les enfants qu'elles soient le fait des institutions publiques ou privées de protection sociale, des tribunaux, des autorités administratives ou des organes législatifs, l'intérêt supérieur des enfants doit être une considération primordiale " ; qu'il résulte de ces stipulations, qui peuvent être utilement invoquées à l'appui d'un recours pour excès de pouvoir, que dans l'exercice de son pouvoir d'appréciation, l'autorité administrative doit accorder une attention primordiale à l'intérêt supérieur des enfants dans toutes les décisions les concernant ; qu'elles sont applicables non seulement aux décisions qui ont pour objet de régler la situation personnelle d'enfants mineurs mais aussi à celles qui ont pour effet d'affecter, de manière suffisamment directe et certaine, leur situation ;
9. Considérant, que si la requérante fait valoir que son éloignement vers la Tunisie, alors que son mari réside habituellement sur le territoire français depuis le 23 février 1987, qu'il est titulaire d'une carte de résident, aurait pour effet de la séparer de son enfant, il ne ressort pas des pièces du dossier que le préfet aurait, en refusant de délivrer un titre de séjour à Mme A..., laquelle appartient aux catégories d'étrangers susceptibles de bénéficier du regroupement familial, porté atteinte à l'intérêt supérieur de son fils mineur, dès lors que son éloignement n'a pour but que la régularisation de sa situation ; que, dès lors, le préfet n'a pas méconnu les stipulations précitées du paragraphe 1 de l'article 3 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant ;
10. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que Mme A... n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Nice a rejeté sa demande ; que ses conclusions à fin d'injonction et celles tendant à ce qu'une somme représentative des frais de procédure soit, en application des dispositions des articles L. 761-1 du code de justice administrative ou 37 de la loi du 10 juillet 1991, mise à la charge de l'Etat, qui n'est pas la partie perdante, ne peuvent, par voie de conséquence, qu'être rejetées ;
D É C I D E :
Article 1er : La requête de Mme A... est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à Mme C... B...épouseA..., à Me D... et au ministre de l'intérieur.
Copie en sera adressée au préfet des Alpes-Maritimes.
Délibéré après l'audience du 13 mars 2017, où siégeaient :
- M. Moussaron, président,
- Mme Steinmetz-Schies, président assesseur,
- Mme Héry, premier conseiller,
Lu en audience publique, le 27 mars 2017.
N°16MA03823 5