Procédure devant la Cour :
Par une requête et un mémoire, enregistrés les 14 et 24 février 2020, sous le n° 20MA00734, M. E..., représenté par Me A..., demande à la Cour :
1°) d'annuler l'article 4 de ce jugement du 25 juin 2019 du tribunal administratif de Montpellier ;
2°) d'annuler l'arrêté du 11 février 2019 en tant qu'il a rejeté sa demande de délivrance d'un titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans le délai de trente jours et a fixé le pays de destination ;
3°) d'enjoindre au préfet de l'Hérault de lui délivrer un titre de séjour " mention vie privée et familiale " et, à défaut, de réexaminer sa situation, dans le délai d'un mois suivant la notification de l'arrêt à intervenir, au besoin sous astreinte ;
4°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 500 euros à verser à son conseil, Me A..., en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et des articles 37 et 75 de la loi du 10 juillet 1991.
Il soutient que :
- sa requête est recevable ;
- les premiers juges n'ont pas tiré toutes les conséquences du constat qu'il établissait des liens anciens et intenses sur le territoire français ;
- ils ont commis un défaut d'examen réel et complet concernant l'ancienneté de son séjour ;
- ils ont commis une erreur manifeste d'appréciation à propos de l'ancienneté et l'intensité de ses liens en France ;
s'agissant de la décision portant refus de titre de séjour :
- elle est insuffisamment motivée ;
- le préfet était tenu de saisir la commission de titre de séjour ;
- elle est entachée d'un défaut d'examen réel et complet de sa demande ;
- elle méconnaît les dispositions de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- elle viole les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, les dispositions du 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation ;
s'agissant de la décision portant obligation de quitter le territoire français :
- elle est illégale en raison de l'illégalité de la décision portant refus de titre de séjour ;
- elle est entachée une erreur manifeste d'appréciation ;
s'agissant de la décision fixant le pays de destination :
- elle est illégale en raison de l'illégalité de la décision portant obligation de quitter le territoire français ;
s'agissant de la décision portant interdiction de retour d'une durée d'un an :
- elle est insuffisamment motivée ;
- sa durée est disproportionnée ;
- elle est entachée une erreur manifeste d'appréciation.
M. E... a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 26 juin 2020.
La requête a été communiquée au préfet de l'Hérault qui n'a pas produit de mémoire.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;
- le décret n° 91-1266 du 19 décembre 1991 ;
- le code de justice administrative.
Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Le rapport de Mme D... a été entendu au cours de l'audience publique.
Considérant ce qui suit :
1. M. E..., né le 31 décembre 1975 et de nationalité congolaise, déclare être entré irrégulièrement en France en 2004. Il a présenté en dernier lieu, le 25 janvier 2019, une demande de titre de séjour portant la mention " vie privée et familiale ". M. E... relève appel de l'article 4 du jugement du 25 juin 2019 du tribunal administratif de Montpellier qui a rejeté le surplus des conclusions de sa demande dirigées contre l'arrêté du 11 février 2019 du préfet de l'Hérault en tant qu'il a rejeté sa demande de délivrance d'un titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans le délai de trente jours et a fixé le pays de destination.
Sur le bien-fondé du jugement attaqué :
2. Il ressort des pièces du dossier que M. E..., entré irrégulièrement en France en 2004, réside chez une ressortissante française avec qui il a noué des liens d'amitié dont l'état de santé et l'absence d'autonomie nécessitent l'assistance d'une tierce personne. Le requérant justifie apporter à Mme L. une aide quotidienne dans tous les actes de sa vie courante par la production de plusieurs attestations de valeur probante établies par l'Union départementale des associations familiales (UDAF) de l'Hérault nommée mandataire judiciaire de Mme L. depuis le 30 octobre 2018 à la place de sa fille en raison d'une relation très conflictuelle, de son kinésithérapeute, de son orthophoniste et de son médecin traitant ainsi que de la gestionnaire de cas de l'hôpital Saint-Eloi de Montpellier. Par suite, dans les circonstances très particulières de l'espèce, eu égard à la densité et à l'intensité des liens personnels qu'il a noués avec Mme L., le préfet de l'Hérault, en lui refusant la délivrance d'un titre de séjour, a entaché l'arrêté en litige d'une erreur manifeste d'appréciation des conséquences de sa décision sur la situation personnelle de l'intéressé.
3. Il résulte de tout ce qui précède sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens de la requête que M. E... est fondé à soutenir que c'est à tort que, par l'article 4 du jugement attaqué, le tribunal administratif de Montpellier a rejeté le surplus de ses conclusions.
Sur les conclusions aux fins d'injonction et d'astreinte :
4. Aux termes de l'article L. 911-1 du code de justice administrative : " Lorsque sa décision implique nécessairement qu'une personne morale de droit public ou un organisme de droit privé chargé de la gestion d'un service public prenne une mesure d'exécution dans un sens déterminé, la juridiction, saisie de conclusions en ce sens, prescrit, par la même décision, cette mesure assortie, le cas échéant, d'un délai d'exécution. / La juridiction peut également prescrire d'office cette mesure. ".
5. En raison du motif qui la fonde, l'annulation de l'arrêté du préfet de l'Hérault du 11 février 2019 implique nécessairement, compte tenu de l'absence de changements de circonstances de droit ou de fait y faisant obstacle, qu'une carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " soit délivrée à M. E.... Il y a lieu d'enjoindre au préfet de l'Hérault de lui délivrer ce document dans un délai qu'il y a lieu de fixer à deux mois, sans qu'il soit besoin d'assortir cette injonction d'une astreinte.
Sur les frais liés au litige :
6. M. E... a obtenu le bénéfice de l'aide juridictionnelle. Par suite, son avocat peut se prévaloir des dispositions des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, et sous réserve que Me A..., avocat de M. E..., renonce à percevoir la somme correspondant à la part contributive de l'État, de mettre à la charge de l'Etat le versement à Me A... de la somme de 1 500 euros.
D É C I D E :
Article 1er : L'article 4 du jugement du tribunal administratif de Montpellier du 25 juin 2019 et l'arrêté du préfet de l'Hérault du 11 février 2019 en tant qu'il a rejeté la demande de titre de séjour de M. E..., lui a fait obligation de quitter le territoire français dans le délai de trente jours et a fixé le pays de destination sont annulés.
Article 2 : Il est enjoint au préfet de l'Hérault de délivrer une carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " à M. E... dans le délai de deux mois à compter de la date de notification du présent arrêt.
Article 3 : L'Etat versera à Me A..., en application des dispositions combinées de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 la somme de 1 500 euros, sous réserve que cet avocat renonce au bénéfice de la part contributive de l'Etat à l'aide juridictionnelle.
Article 4 : Le surplus des conclusions de la requête de M. E... est rejeté.
Article 5 : Le présent arrêt sera notifié à M. B... E..., à Me A... et au ministre de l'intérieur.
Copie en sera adressée au préfet de l'Hérault et au procureur de la République près le tribunal judiciaire de Montpellier.
Délibéré après l'audience du 19 février 2021, où siégeaient :
- M. Pocheron, président de chambre,
- M. Guidal, président assesseur,
- Mme D..., première conseillère.
Rendu public par mise à disposition au greffe, le 5 mars 2021.
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N° 20MA00734
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