Par un jugement n° 1305004 du 23 juin 2015, le tribunal administratif de Marseille a annulé ces décisions.
Procédure devant la Cour :
Par une requête enregistrée le 5 août 2015, la société High purity installation France, représentée par Me C...G..., demande à la Cour :
1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Marseille du 23 juin 2015 ;
2°) de rejeter la demande de M. F... ;
3°) de mettre à la charge de M. F..., la somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que les faits reprochés à M. F... étaient d'une gravité suffisante pour justifier son licenciement.
Par un mémoire en défense, enregistré le 2 octobre 2015, M. F... conclut au rejet de la requête et à ce qu'une somme de 4 000 euros soit mise à la charge de la société High purity installation France au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Il soutient que les moyens de la société ne sont pas fondés.
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu :
- le code du travail ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de Mme Anne Menasseyre, première conseillère,
- les conclusions de M. Frédéric Salvage, rapporteur public,
- et les observations de Me A..., représentant MeE..., mandataire liquidateur de la société High purity installation France, et de Me D..., représentant M.F....
1. Considérant que par un jugement du 23 juin 2015 le tribunal administratif de Marseille a annulé la décision de l'inspecteur du travail de la 19ème section d'inspection des Bouches-du-Rhône, prise le 10 janvier 2013, autorisant, sur demande de la société High purity installation France, le licenciement pour motif disciplinaire de M. F..., délégué du personnel suppléant, qui occupait les fonctions de chef de chantier depuis janvier 2005, ainsi que la décision du 8 juillet 2013 par laquelle le ministre du travail, de l'emploi, de la formation professionnelle et du dialogue social a confirmé cette autorisation ; que la société relève appel de ce jugement ;
Sur la légalité des décisions autorisant le licenciement :
2. Considérant, d'une part, qu'en vertu des dispositions du code du travail, les salariés légalement investis de fonctions représentatives bénéficient, dans l'intérêt de l'ensemble des salariés qu'ils représentent, d'une protection exceptionnelle ; que, lorsque le licenciement d'un de ces salariés est envisagé, ce licenciement ne doit pas être en rapport avec les fonctions représentatives normalement exercées ou l'appartenance syndicale de l'intéressé ; que, dans le cas où la demande de licenciement est motivée par un comportement fautif, il appartient à l'inspecteur du travail, et le cas échéant au ministre, de rechercher, sous le contrôle du juge de l'excès de pouvoir, si les faits reprochés au salarié sont d'une gravité suffisante pour justifier son licenciement, compte tenu de l'ensemble des règles applicables au contrat de travail de l'intéressé, au nombre desquelles figurent les règles sanctionnant le harcèlement, et des exigences propres à l'exécution normale du mandat dont il est investi ;
3. Considérant, d'autre part, qu'aux termes de l'article L. 1152-2 du code du travail : " Aucun salarié (...) ne peut être sanctionné, licencié (...) pour avoir subi ou refusé de subir des agissements répétés de harcèlement moral ou pour avoir témoigné de tels agissements ou les avoir relatés. " ; que le fait, pour un salarié, de relater des faits de harcèlement moral dont il estime être l'objet ne peut être considéré comme fautif que s'il est accompli de mauvaise foi et dans l'intention de nuire à celui à qui les faits sont imputés ou à l'employeur ;
4. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que M. F... a dénoncé à tort, dans un courrier adressé le 29 août 2012 au délégué du personnel de l'entreprise, d'une part, une prétendue interdiction faite par le gérant de la société qui l'emploie à tous les salariés de lui adresser la parole et, d'autre part, un comportement de l'épouse de ce dernier le harcelant et cherchant à l'humilier ; qu'il ressort des pièces du dossier que ces accusations sont fausses ; que, toutefois, la seule circonstance que les faits dénoncés soient inexacts ne suffit pas à démontrer que ces dénonciations ont été faites de mauvaise foi ;
5. Considérant que ces accusations ont été portées dans le contexte d'une relation extrêmement tendue entre M. F... et son employeur, caractérisée notamment, à la suite de faits survenus en 2011, par la condamnation définitive de ce dernier pour violences ayant entraîné une incapacité n'excédant pas huit jours, et par une précédente demande d'autorisation de licenciement refusée à son employeur, tant par l'inspecteur du travail que, sur recours hiérarchique, par le ministre ; que la demande d'annulation de ce refus a été rejetée par le tribunal administratif ; que la reprise du travail de M. F... a eu lieu en juillet 2012 ; qu'il ressort des pièces du dossier qu'à cette occasion, son employeur lui a, dans un premier temps, abusivement refusé l'accès à son établissement ; qu'il a notamment subordonné la possibilité pour M. F... de franchir l'enceinte de l'entreprise au paraphe de chacune des pages et à la signature d'une note de service restreignant sa circulation dans l'entreprise à l'atelier situé au rez de chaussée, au bungalow vestiaire et aux sanitaires, la circulation dans les autres lieux de l'entreprise étant subordonnée à l'accord préalable de la direction, alors qu'il n'est pas contesté que les bureaux de l'encadrement se trouvaient à l'étage ; que ces éléments de contexte ont pu affecter la perception par M. F...du comportement de son entourage professionnel, dont faisait partie l'épouse du gérant ; que, par courrier du 22 février 2013, certes postérieur à l'autorisation accordée le 10 janvier 2013 mais portant sur des faits antérieurs, l'inspecteur du travail a d'ailleurs indiqué à M. F...que les faits qui s'étaient produits entre le 16 juillet et le 7 août 2012 puis à compter du 8 août 2012 étaient susceptibles de constituer des faits de harcèlement moral tel que défini à l'article L. 1152 1 du code du travail et que ces infractions seraient relevées à l'encontre du gérant par voie de procès verbal ; que, dans de telles circonstances, les fautes commises par M. F..., en imputant faussement au gérant de l'entreprise et à son épouse des comportements qui n'avaient pas été les leurs, ne présentaient pas un caractère de gravité suffisant pour justifier son licenciement ;
6. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que la société High purity installation France n'est pas fondée à se plaindre de ce que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Marseille a annulé les décisions autorisant le licenciement de M. F... ;
Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :
7. Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que M. F... qui n'a pas, dans la présente instance, la qualité de partie perdante, verse à la société High purity installation France la somme qu'elle réclame au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens ; qu'il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de faire droit aux conclusions présentées par M. F... au même titre ;
D É C I D E :
Article 1er : La requête la société High purity installation France est rejetée.
Article 2 : Les conclusions de M. F... tendant au bénéfice des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.
Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à société High purity installation France, à Me E...et à M. B... F....
Copie en sera adressée au ministre du travail, de l'emploi, de la formation professionnelle et du dialogue social.
Délibéré après l'audience du 22 novembre 2016, où siégeaient :
- M. Lascar, président de chambre,
- M. Guidal, président assesseur,
- Mme H..., première conseillère.
Lu en audience publique, le 8 décembre 2016.
N° 15MA03282 2
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