Par un jugement n° 1600839 du 29 mai 2018, le tribunal administratif de Nice a rejeté cette demande.
Procédure devant la Cour :
Par une requête et des mémoires complémentaires, enregistrés le 2 juillet 2018, le 9 juillet 2018 et le 25 octobre 2018, Mme C..., représentée par Me B..., demande à la Cour :
1°) d'annuler ce jugement du 29 mai 2018 ;
2°) d'annuler la décision du 15 janvier 2016 de l'inspecteur du travail ;
3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 2 500 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que :
- la décision querellée a été prise au visa de textes qui ne sont pas applicables à sa situation ;
- les compléments d'information produits par l'employeur durant l'enquête contradictoire menée par l'inspecteur du travail ne lui ont pas été communiqués ;
- la réalité des difficultés économiques alléguées par la SAS Centipharm n'est pas établie ;
- la preuve de la suppression du poste qu'elle occupait n'est pas rapportée ;
- l'employeur n'a pas défini de catégories professionnelles, laissant présumer une discrimination syndicale, et l'ordre des licenciements n'a pas été respecté ;
- la SAS Centipharm n'a pas procédé à une recherche loyale, sérieuse et exhaustive de reclassement ;
- l'inspecteur du travail ne s'est pas assuré que la commission paritaire externe de l'emploi avait été saisie ;
- l'inspecteur du travail ne s'est pas prononcé sur l'impossibilité de maintenir le contrat de travail au regard des dispositions de l'article L. 1226-9 du code du travail ;
- le licenciement est en lien avec ses mandats ;
- la représentation plurielle des syndicats au sein de l'entreprise est désormais fortement menacée.
Par des mémoires en défense, enregistrés le 20 juillet 2018 et le 6 novembre 2018, la SAS Centipharm, représentée par Me A..., conclut au rejet de la requête et demande que soit mise à la charge de Mme C... la somme de 2 500 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle fait valoir qu'aucun des moyens de la requête n'est fondé.
Vu :
- le code du travail ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de M. Coutier, premier conseiller,
- les conclusions de M. Chanon, rapporteur public,
- et les observations de Me B..., représentant Mme C..., et de Me A..., représentant la société Centipharm.
Considérant ce qui suit :
1. Mme C... a été embauchée le 6 juillet 1998 par la société Orgasynth Industries, aux droits desquels vient la SAS Centipharm, en qualité d'assistante commerciale. Elle était détentrice des mandats de déléguée syndicale, de représentante syndicale au comité d'entreprise et de représentante syndicale au comité de groupe. Saisie par la SAS Centipharm, l'inspecteur du travail de l'unité territoriale des Alpes-Maritimes l'a, par décision du 15 janvier 2016, autorisée à procéder au licenciement de Mme C... pour motif économique. Cette dernière relève appel du jugement du 29 mai 2018 par lequel le tribunal administratif de Nice a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cette décision du 15 janvier 2016.
Sur la légalité externe de la décision attaquée :
2. Aux termes de l'article L. 2411-8 du code du travail : " Le licenciement (...) d'un représentant syndical au comité d'entreprise ne peut intervenir qu'après autorisation de l'inspecteur du travail (...) ". Aux termes de l'article R. 2421-10 du même code : " La demande d'autorisation de licenciement (...) énonce les motifs du licenciement envisagé (...) ". L'article R. 2421-12 du même code dispose que : " La décision de l'inspecteur du travail est motivée (...) ". L'article R. 2421-4 du même code, dans sa rédaction applicable au litige, dispose que " L'inspecteur du travail procède à une enquête contradictoire au cours de laquelle le salarié peut, sur sa demande, se faire assister d'un représentant de son syndicat ". Si le caractère contradictoire de l'enquête administrative prévue par les dispositions précitées implique de mettre à même le salarié de prendre connaissance, en temps utile, de l'ensemble des pièces produites par l'employeur à l'appui de sa demande d'autorisation de licenciement ainsi que des éléments déterminants qui ont pu être recueillis par l'inspecteur du travail au cours de l'instruction de cette demande, il n'impose pas à l'administration de lui communiquer, de sa propre initiative ou dans tous les cas, l'ensemble de ces pièces et éléments.
3. En premier lieu, il ressort des énonciations de la décision du 15 janvier 2016 que l'inspecteur du travail a fait mention des mandats effectivement détenus par l'intéressée, soit celui de déléguée syndicale, de représentante syndicale au comité d'entreprise et de représentante syndicale au comité de groupe. La circonstance que l'inspecteur du travail a visé les dispositions de l'article R. 2421-11 applicables aux salariés titulaires d'un mandat électif au lieu de celles de l'article R. 2421-4 précitées applicables aux délégués syndicaux ne saurait en tout état de cause entacher d'irrégularité la décision litigieuse dès lors qu'elles ont une portée identique.
4. En deuxième lieu, Mme C... a été destinataire d'une copie du courrier du 23 décembre 2015 que la SAS Centipharm a transmis à l'inspecteur du travail dont il n'est pas contesté qu'il était accompagné des pièces relatives à la situation économique et financière de la société que cette dernière s'était engagée à produire, lors de la réunion organisée deux jours plus tôt dans le cadre de l'enquête contradictoire, en accord avec le conseil de l'intéressée. Le courrier d'accompagnement précisant que lesdites pièces n'étaient pas jointes compte tenu de leur volume, il appartenait à Mme C..., si elle l'estimait utile, d'en solliciter la communication, soit auprès de la société, soit auprès de l'inspecteur du travail, lesquels n'étaient pas tenus de les lui communiquer spontanément. Il ne ressort pas des pièces du dossier que l'intéressée aurait procédé à de telles diligences avant l'édiction de la décision attaquée.
5. Il ressort des pièces du dossier, particulièrement des écritures présentées par la direction régionale des entreprises, de la concurrence, de la consommation, du travail et de l'emploi Provence-Alpes-Côte d'Azur devant le tribunal, que le complément d'instruction auquel a procédé l'inspecteur du travail dans les locaux de la SAS Centipharm a été accompli le 11 janvier 2016 et non pas, comme indiqué par erreur dans la décision contestée, le 16 janvier 2016, date qui au demeurant correspondait à un samedi, soit un jour non travaillé au sein de la société. Cette erreur matérielle manifeste n'est pas de nature à entacher d'irrégularité la décision en cause, datée du 15 janvier 2016.
6. Il ne ressort pas des pièces du dossier que cette visite du 11 janvier 2016, qui faisait suite aux observations transmises à l'inspecteur du travail par Mme C... par un courrier du 31 décembre 2015, aurait conduit à la constatation d'éléments nouveaux qu'il y aurait eu lieu de communiquer à l'intéressée. A cet égard, Mme C..., qui a été mise à même durant la procédure contradictoire d'accéder aux documents utiles, n'apporte aucune indication de nature à établir qu'elle aurait été privée de prendre connaissance d'un élément déterminant.
Sur la légalité interne de la décision attaquée :
7. Dans le cas où la demande de licenciement est fondée sur un motif de caractère économique, il appartient à l'inspecteur du travail de rechercher, sous le contrôle du juge de l'excès de pouvoir, si la situation de l'entreprise justifie le licenciement du salarié, en tenant compte notamment de la nécessité des réductions envisagées d'effectifs et de la possibilité d'assurer le reclassement du salarié dans l'entreprise ou au sein du groupe auquel appartient cette dernière. Ce licenciement ne doit, en outre, pas être en rapport avec les fonctions représentatives normalement exercées ou l'appartenance syndicale de l'intéressé.
En ce qui concerne la réalité du motif économique :
8. Il ressort des pièces transmises à l'inspecteur du travail par la SAS Centipharm dans le cadre de l'enquête contradictoire, notamment de la demande d'autorisation de licenciement et du rapport des commissaires aux comptes pour l'exercice 2014, que la société connaît depuis 2009 un chiffre d'affaires en régression et un résultat net chaque année déficitaire et que le groupe Axyntis auquel appartient cette société fait face à un endettement important depuis plusieurs années et a connu depuis 2007, à l'exception de l'exercice 2013, des résultats lourdement déficitaires.
9. Si, à la date à laquelle il a pris la décision querellée, l'inspecteur du travail ne disposait pas des comptes arrêtés du groupe Axyntis pour les exercices 2014 et 2015, il avait cependant en sa possession, outre les documents mentionnés au point précédent, un document présenté par la SAS Centipharm comme étant un " reporting " établi à fin novembre 2015 concernant l'ensemble du groupe. Ce document, qui est contemporain de la décision du 15 janvier 2016 et dont le contenu n'est pas sérieusement contesté par Mme C..., fait état d'une régression de près de 18 % du chiffre d'affaires global du groupe par rapport à l'exercice 2014, indication cohérente avec celle figurant dans le rapport des commissaires aux comptes pour l'exercice 2015, produit ultérieurement dans le cadre de l'instance contentieuse. Au vu de ces informations, l'inspecteur du travail a pu exercer pleinement son contrôle sur la réalité et l'actualité du motif économique invoqué par la SAS Centipharm pour justifier la demande de licenciement en cause.
10. Il ressort des pièces du dossier que si le résultat net global du groupe Axyntis en 2015 s'est avéré positif à hauteur d'environ 6 millions d'euros, le résultat global d'exploitation sur cet exercice était déficitaire à hauteur de - 4,658 millions d'euros, le bénéfice net dégagé pour le groupe résultant essentiellement de l'apport en trésorerie de 4,2 millions d'euros réalisé par un nouvel actionnaire et de l'apurement corrélatif de la dette par les créanciers du groupe à hauteur de 11 millions d'euros. Ces événements, ponctuels et dont il n'est pas contesté qu'ils n'ont pas résorbé totalement la dette supportée par le groupe, ne sont pas de nature à remettre en cause la réalité des difficultés économiques auxquelles celui-ci est confronté.
11. A supposer même que, pour évaluer la situation économique du groupe Axyntis, il y aurait lieu de ne pas prendre en compte la société Steiner dont l'activité est la fabrication de colorants alors que les autres sociétés du groupe relèvent du secteur d'activité de la chimie fine, cette société est bénéficiaire et son exclusion du périmètre d'analyse aboutirait, en tout état de cause, à retenir un montant de pertes financières plus élevé pour le groupe.
En ce qui concerne la réalité de la suppression de l'emploi occupé par Mme C... :
12. Il ressort des pièces du dossier, particulièrement du procès-verbal de la réunion extraordinaire du comité d'entreprise de la société Centipharm du 1er juin 2015, que le projet de réorganisation établi initialement par la direction prévoyait le transfert de deux contrats au sein de la société Orgapharm, trois modifications de contrat de travail et la suppression de sept postes de fonctions support, dont celui d'assistante commerciale qui était occupé par Mme C... et le poste d'assistante " supply-chain ". Dans sa version présentée lors de la réunion extraordinaire du comité d'entreprise du 9 septembre 2015, ce projet, amendé pour tenir compte des événements intervenus depuis, faisait état de la création d'un poste nouveau d'assistante de direction / " supply-chain " qui, eu égard à l'importante diminution d'activité enregistrée au sein de l'entreprise, regroupait les attributions dévolues au poste d'assistante commerciale et à celui d'assistante " supply-chain " auxquelles s'ajoutait des missions relevant de la gestion des ressources humaines, soit un périmètre fonctionnel sensiblement différent de celui du poste qu'occupait jusqu'alors l'appelante ainsi que de celui d'assistante " supply-chain ".
13. Il ressort également des pièces du dossier que ce poste nouveau d'assistante de direction / " supply-chain ", qui a été proposé dans le cadre de l'obligation de recherche de reclassement à laquelle était tenue la SAS Centipharm tant à Mme C... qu'à sa collègue qui occupait le poste d'assistante " supply-chain " dont la suppression était également prévue dans le projet de réorganisation, a été pourvu par cette dernière. Il ne ressort pas des pièces du dossier que le poste d'assistante commerciale anciennement occupé par la requérante ainsi que celui d'assistante " supply-chain ", dont la suppression a été conjointement annoncée par note de service du 28 novembre 2015, auraient ultérieurement donné lieu à recrutement. La suppression de ces deux postes doit dès lors être tenue pour établie.
En ce qui concerne les critères d'ordre des licenciements :
14. Aux termes de l'article L. 1233-5 du code du travail, dans sa rédaction alors applicable : " Lorsque l'employeur procède à un licenciement collectif pour motif économique et en l'absence de convention ou accord collectif de travail applicable, il définit les critères retenus pour fixer l'ordre des licenciements, après consultation du comité d'entreprise ou, à défaut, des délégués du personnel. / Ces critères prennent notamment en compte : (...) 4° Les qualités professionnelles appréciées par catégorie ".
15. Il ne ressort pas des pièces du dossier et n'est d'ailleurs pas allégué par Mme C... qu'au sein de la SAS Centipharm un poste autre que ceux d'assistante commerciale et d'assistante " supply-chain " aurait pu relever de la même catégorie professionnelle, qui se définit comme regroupant les salariés qui exercent, au sein de l'entreprise, des fonctions de même nature supposant une formation professionnelle commune. Dès lors, et en en tout état de cause, l'intéressée ne peut utilement soutenir que l'employeur se serait illégalement abstenu de définir des catégories professionnelles permettant d'assurer le respect de l'ordre des licenciements selon les critères prévus par l'article L. 1233-5 du code du travail, ni qu'il aurait intentionnellement ciblé des personnes, particulièrement celles détentrices d'un mandat représentatif, et non des postes, ni encore qu'il aurait méconnu le respect de l'ordre des licenciements entre elle-même et sa collègue occupant le poste d'assistante " supply-chain " dans la mesure où ce poste était également concerné par une suppression.
En ce qui concerne la recherche de reclassement :
16. Aux termes de l'article L. 1233-4 du code du travail dans sa rédaction alors applicable : " Le licenciement pour motif économique d'un salarié ne peut intervenir que lorsque tous les efforts de formation et d'adaptation ont été réalisés et que le reclassement de l'intéressé ne peut être opéré dans l'entreprise ou dans les entreprises du groupe auquel l'entreprise appartient. / Le reclassement du salarié s'effectue sur un emploi relevant de la même catégorie que celui qu'il occupe ou sur un emploi équivalent assorti d'une rémunération équivalente. A défaut, et sous réserve de l'accord exprès du salarié, le reclassement s'effectue sur un emploi d'une catégorie inférieure. / Les offres de reclassement proposées au salarié sont écrites et précises ". Pour apprécier si l'employeur a satisfait à cette obligation, l'autorité administrative doit s'assurer, sous le contrôle du juge de l'excès de pouvoir, qu'il a procédé à une recherche sérieuse des possibilités de reclassement du salarié, tant au sein de l'entreprise que dans les entreprises du groupe auquel elle appartient, ce dernier étant entendu comme les entreprises dont l'organisation, les activités ou le lieu d'exploitation permettent, en raison des relations qui existent avec elles, d'y effectuer la permutation de tout ou partie de son personnel.
17. Il ressort des énonciations mêmes de la décision attaquée que l'inspecteur du travail a effectivement examiné, ainsi qu'il le devait, les recherches de reclassement opérées par la SAS Centipharm dans le périmètre du groupe Axyntis.
18. Au vu des pièces produites par la SAS Centipharm, le moyen tiré de ce que celle-ci ne justifierait pas des diligences qu'elle aurait réalisées auprès des sociétés composant ce groupe pour rechercher les possibilités de reclassement manque en fait. A cet égard, il ne ressort pas des pièces du dossier qu'un poste aurait été vacant spécifiquement au sein de la société Kyrapharm.
19. Il ressort des pièces du dossier que la SAS Centipharm a transmis personnellement à Mme C..., par lettre du 15 juillet 2015, la liste des postes vacants au sein du groupe, proposés dans le cadre de l'effort de reclassement, alors au nombre de quatorze. Mme C... a, par lettre du 15 juillet 2015, expressément fait acte de candidature sur le poste de responsable stockage et distribution proposé au sein de la société Centipharm. Compte tenu de l'évolution de la situation, la société a ultérieurement retiré ce poste et lui a substitué un poste nouveau d'assistante de direction / " supply-chain ", reprenant partiellement les attributions du poste de responsable stockage et distribution en y ajoutant des attributions en matière de ressources humaines, et a informé Mme C... de cette création par lettre du 10 septembre 2015. Si Mme C..., qui a fait acte de candidature sur ce poste et qui n'a pas été retenue, soutient que l'employeur a exigé dans le profil de ce poste la possession d'un brevet de technicien supérieur d'assistante de direction dans le seul but de l'évincer, il ressort des pièces du dossier, ainsi qu'il a été dit au point 13 ci-dessus, que ce poste a été pourvu par la collègue de Mme C... qui occupait le poste d'assistante " supply-chain " dont la suppression était également prévue dans le cadre du projet de réorganisation et il n'appartient pas au juge administratif d'apprécier l'opportunité du choix que l'employeur a opéré entre ces deux candidatures.
20. Outre l'information qui lui était donnée sur la création du poste d'assistante de direction / " supply-chain ", la lettre du 10 septembre 2015 actualisait la liste des postes proposés et comportait notamment un poste " d'assistante ADV " au sein de la société Synthexim, dont les attributions étaient comparables à celles du poste qu'occupait l'intéressée au sein de la société Centipharm et précisait qu'une réponse était attendue dans le délai de dix jours. Or il ressort des pièces du dossier que ce délai n'a pas été respecté par Mme C....
21. Enfin, il ne ressort pas des pièces du dossier que l'appelante, qui a également fait acte de candidature sur le poste d'assistante comptable et administratif au sein de la société Steiner mais n'a pu honorer le rendez-vous qui lui avait été fixé le 15 janvier 2015 par le responsable de cette société, aurait procédé aux diligences utiles pour confirmer son intérêt pour ce poste.
22. Si Mme C... fait état de ce que plusieurs recrutements seraient intervenus dans les sociétés composant le groupe entre le mois de mai 2015 et janvier 2016, il ressort des pièces du dossier que ces entrées ont concerné, outre un stagiaire, un technicien contrôle qualité, un opérateur chimie, deux opérateurs de production, un technicien contrôle qualité, une comptable et une commerciale, emplois pour lesquels il ne ressort pas des pièces du dossier que l'intéressée aurait justifié des qualifications requises et qui pour certains lui ont, au demeurant, été proposés dans le cadre de l'effort de reclassement.
23. Eu égard aux différentes propositions de postes formulées par la SAS Centipharm dans les conditions mentionnées aux points 18 à 22 ci-dessus, et dès lors qu'il ne ressort pas des pièces du dossier que la société ou le groupe auquel elle appartient aurait entendu soustraire intentionnellement un poste susceptible d'être proposé au reclassement, la circonstance selon laquelle un recrutement en contrat unique d'insertion d'une standardiste au sein de la société Orgapharm a été formalisé le 3 juillet 2015, soit antérieurement à la réunion du 1er juin 2015 au cours de laquelle le comité d'entreprise de la société Centipharm a été informé du contenu du plan de réorganisation préparé par la direction, qui constitue de manière certaine la date à laquelle le licenciement de Mme C... a été envisagé, n'est pas de nature, dans les circonstances de l'espèce, à faire regarder la société comme n'ayant pas satisfait à l'effort de reclassement qui lui incombait, pas davantage le fait que des recrutements seraient intervenus postérieurement au licenciement de l'intéressée, celle-ci n'alléguant pas même qu'ils correspondraient au poste qu'elle occupait.
24. Mme C... ne peut utilement invoquer, pour soutenir que cet effort de reclassement était insuffisant, que l'employeur n'aurait pas cherché à lui proposer de passer à temps partiel, qu'elle aurait été évincée du plan de formation 2016 et n'aurait pas bénéficié du bilan de compétences prévu par la convention collective des industries chimiques. Il en est de même du grief selon lequel l'employeur ne respecterait pas les dispositions de l'accord d'entreprise relatif au " contrat de génération " signé le 13 mars 2014 qui prévoit notamment un engagement de la société de maintenir un pourcentage de 25 % de salariés actifs âgés.
25. Il n'appartient pas à l'autorité administrative, saisie d'une demande de licenciement pour motif économique, de vérifier le respect par l'employeur de ses obligations de reclassement externe. La requérante ne peut donc utilement se prévaloir de ce que l'inspecteur du travail n'aurait pas vérifié que la société a respecté ses obligations conventionnelles s'agissant de l'effort de reclassement auprès des entreprises du secteur.
26. En tout état de cause, conformément à l'accord national sur l'emploi du 15 janvier 1991 selon lequel l'employeur relevant de la convention collective des industries chimiques est tenu, lorsqu'il envisage un licenciement collectif pour motif économique, de saisir la commission paritaire de branche pour avoir connaissance des éventuelles possibilités de reclassement parmi les adhérents, la SAS Centipharm a informé par lettre du 27 mai 2015 la commission paritaire nationale de l'emploi de ce qu'elle engageait une procédure de licenciement pour motif économique, lui a demandé de communiquer cette information aux instances territoriales compétentes et de la tenir informée des postes disponibles dans la profession aux fins de reclassement. A défaut de réponse, la société a renouvelé sa demande par lettre du 6 juillet 2015.
En ce qui concerne la protection tenant à l'état de santé :
27. Selon l'article L. 1226-9 du code du travail : " Au cours des périodes de suspension du contrat de travail, l'employeur ne peut rompre ce dernier que s'il justifie soit d'une faute grave de l'intéressé, soit de son impossibilité de maintenir ce contrat pour un motif étranger à l'accident ou à la maladie. ".
28. L'autorité administrative, saisie d'une demande d'autorisation de licenciement fondée sur un motif économique, a seulement l'obligation de vérifier que le motif allégué par l'employeur à l'appui de sa demande constitue un motif économique pouvant servir de base au licenciement envisagé. Par suite, le moyen tiré de ce que le salarié aurait été licencié en violation des dispositions précitées de l'article L. 1226-9 du code du travail ne peut être utilement invoqué à l'encontre de la décision d'autorisation de licenciement. Dès lors, il y a lieu d'écarter le moyen tiré de ce que l'inspecteur du travail ne s'est pas prononcé sur l'impossibilité de maintenir le contrat de travail au regard de ces dispositions.
En ce qui concerne le lien avec les mandats :
29. Si Mme C... invoque une situation passée conflictuelle avec la direction, il ressort des pièces du dossier que, par jugement du 27 juin 2014 devenu définitif, le conseil de prud'hommes de Grasse a débouté l'intéressée de sa demande de condamnation de la SAS Centipharm pour discrimination syndicale et harcèlement moral à son encontre. L'appelante n'apporte dans l'instance aucun élément de nature à remettre en cause ce jugement.
30. Il ne ressort pas des pièces du dossier que le fait que Mme C... n'a pas été retenue sur le poste d'assistante de direction / " supply-chain " serait en lien avec l'exercice des mandats syndicaux qu'elle détient.
31. Si Mme C... soutient que le licenciement de deux représentants syndicaux constitue une menace sur la représentation plurielle syndicale, elle n'établit, ni même n'allègue, que ces licenciements auraient pour effet de priver les salariés de la société Centipharm de toute représentation syndicale.
32. Il résulte de tout ce qui précède que Mme C... n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Nice a rejeté sa demande.
Sur les frais liés au litige :
33. Aux termes de l'article L. 761-1 du code de justice administrative : " Dans toutes les instances, le juge condamne la partie tenue aux dépens ou, à défaut, la partie perdante, à payer à l'autre partie la somme qu'il détermine, au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. Le juge tient compte de l'équité ou de la situation économique de la partie condamnée. Il peut, même d'office, pour des raisons tirées des mêmes considérations, dire qu'il n'y a pas lieu à cette condamnation. ".
34. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de la SAS Centipharm, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, la somme que Mme C... demande au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. Il y a lieu, en revanche, de faire application de ces dispositions et de mettre à la charge de Mme C... une somme de 2 000 euros au titre des frais exposés par la SAS Centipharm et non compris dans les dépens.
D É C I D E :
Article 1er : La requête de Mme C... est rejetée.
Article 2 : Mme C... versera à la SAS Centipharm une somme de 2 000 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à Mme D... C..., à la ministre du travail et à la SAS Centipharm.
Copie en sera adressée à la direction régionale des entreprises, de la concurrence, de la consommation, du travail et de l'emploi Provence-Alpes-Côte d'Azur.
Délibéré après l'audience du 3 juin 2019, à laquelle siégeaient :
- Mme Helmlinger, présidente de la Cour,
- M. Guidal, président-assesseur,
- M. Coutier, premier conseiller.
Lu en audience publique le 17 juin 2019.
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N° 18MA03081
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