Procédure devant la Cour :
Par une requête et un mémoire, enregistrés le 12 février 2018 et le 10 août 2018, la SARL MZ34BTP, représentée par Me D..., demande à la Cour :
1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Montpellier du 12 décembre 2017 ;
2°) d'annuler les décisions du 15 octobre 2015 et du 16 février 2016 du directeur de l'Office français de l'immigration et de l'intégration ;
3°) de mettre à la charge de l'Office français de l'immigration et de l'intégration la somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que :
- il appartient à l'OFII de justifier de la compétence des signataires des décisions en litige ;
- le contradictoire n'a pas été respecté ;
- elle était de bonne foi s'agissant de l'embauche de deux salariés se présentant comme de nationalité espagnole ;
- le troisième employé, titulaire d'un titre de séjour espagnol, était en situation régulière en France ;
- l'application des contributions en litige repose sur des circonstances de fait matériellement inexactes ;
- le montant de ces contributions est disproportionné et devrait donner lieu à une réduction.
- la contribution forfaitaire représentative des frais de réacheminement n'était pas due pour l'un des salariés en séjour régulier en France.
Par un mémoire en défense, enregistré le 10 juillet 2018, l'Office français de l'immigration et de l'intégration, représenté par Me H..., conclut au rejet de la requête et à ce qu'une somme de 2 000 euros soit mise à la charge de la SARL MZ34BTP sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Il soutient que les moyens soulevés par la SARL MZ34BTP ne sont pas fondés.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la convention d'application de l'accord Schengen du 14 juin 1985 ;
- le règlement (CE) n° 562/2006 du 15 mars 2006 ;
- la directive n° 2009/52/CE du Parlement européen et du Conseil du 18 juin 2009 prévoyant des normes minimales concernant les sanctions et les mesures à l'encontre des employeurs de ressortissants de pays tiers en séjour irrégulier ;
- le code du travail ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de M. Guidal,
- et les conclusions de M. Chanon, rapporteur public.
Considérant ce qui suit :
1. A la suite d'un contrôle routier effectué le 14 avril 2015, les services de police ont constaté la présence à bord d'un véhicule de trois travailleurs étrangers, démunis d'autorisation de travail, qui ont déclaré être employés par la SARL MZ34BTP. Informé de cette situation, le directeur général de l'Office français de l'immigration et de l'intégration (OFII) a, par une décision du 15 octobre 2015 confirmée sur recours gracieux le 16 février 2016, mis à la charge de cette société les sommes de 52 800 euros et 6 372 euros au titre, respectivement, de la contribution spéciale prévue à l'article L. 8253-1 du code du travail et de la contribution forfaitaire représentative des frais de réacheminement prévue à l'article L. 626-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Saisi par la SARL MZ34BTP, le tribunal administratif de Montpellier, par un jugement du 12 décembre 2017, a rejeté la demande de cette société tendant à l'annulation de la décision du 15 octobre 2015 du directeur général de l'Office français de l'immigration et de l'intégration ainsi que de la décision du 16 février 2016 rejetant son recours gracieux. La SARL MZ34BTP relève appel de ce jugement.
Sur les moyens tirés des vices de procédure et de forme dont seraient entachées les décisions en litige :
2. Par une décision du 17 juillet 2015, régulièrement publiée au bulletin officiel du ministère de l'intérieur du 15 août 2015, le directeur général de l'OFII a donné délégation à Mme B...N..., directrice adjointe de l'immigration, du retour et de la réinsertion des étrangers, à l'effet de signer notamment les décisions de mise en oeuvre de la contribution spéciale et de la contribution forfaitaire, en cas d'absence ou d'empêchement de M. L..., directeur de l'immigration, du retour et de la réinsertion des étrangers. Par suite, Mme B...N..., signataire de la décision du 15 octobre 2015, était régulièrement habilitée à mettre à la charge de la SARL MZ34BTP les contributions en litige. La circonstance que Mme F... aurait assuré au mois de septembre 2014 les fonctions de directrice par intérim de l'immigration, du retour et de la réinsertion des étrangers est étrangère à la régularité de l'habilitation conférée à Mme B... N...par la décision précitée du 17 juillet 2015 du directeur général de l'OFII. Par suite le moyen tiré de ce que l'OFII ne justifierait pas de la délégation donnée à Mme F... est inopérant à l'encontre de la décision contestée du 15 octobre 2015.
3. Il est toujours loisible à la personne intéressée, sauf à ce que des dispositions spéciales en disposent autrement, de former à l'encontre d'une décision administrative un recours gracieux devant l'auteur de cet acte. L'exercice d'un tel recours n'ayant d'autre objet que d'inviter l'auteur de la décision à reconsidérer sa position, les vices propres qui entacheraient le rejet du recours gracieux ne peuvent être utilement contestés. Par suite le moyen tiré de ce que Mme K... signataire de la décision du 16 février 2016 rejetant le recours gracieux de la SARL MZ34BTP n'aurait pas disposé d'une délégation de signature régulière est, en tout état de cause, inopérant.
4. L'article L. 8271-17 du code du travail, dans sa rédaction applicable à la procédure d'édiction des sanctions litigieuses, dispose que : " Outre les inspecteurs et contrôleurs du travail, les agents et officiers de police judiciaire, les agents de la direction générale des douanes sont compétents pour rechercher et constater, au moyen de procès-verbaux transmis directement au procureur de la République, les infractions aux dispositions de l'article L. 8251-1 relatif à l'emploi d'un étranger sans titre de travail et de l'article L. 8251-2 interdisant le recours aux services d'un employeur d'un étranger sans titre. / Afin de permettre la liquidation de la contribution spéciale mentionnée à l'article L. 8253-1 du présent code et de la contribution forfaitaire mentionnée à l'article L. 626-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, le directeur général de l'Office français de l'immigration et de l'intégration reçoit des agents mentionnés au premier alinéa du présent article une copie des procès-verbaux relatifs à ces infractions ". Aux termes de l'article R. 8253-3 du même code : " Au vu des procès-verbaux qui lui sont transmis en application de l'article L. 8271-17, le directeur général de l'Office français de l'immigration et de l'intégration indique à l'employeur, par lettre recommandée avec avis de réception ou par tout autre moyen permettant de faire la preuve de sa date de réception par le destinataire, que les dispositions de l'article L. 8253-1 sont susceptibles de lui être appliquées et qu'il peut présenter ses observations dans un délai de quinze jours ". Aux termes de l'article R. 8253-4 de ce code : " A l'expiration du délai fixé, le directeur général de l'Office français de l'immigration et de l'intégration décide, au vu des observations éventuelles de l'employeur, de l'application de la contribution spéciale prévue à l'article L. 8253-1, la liquide et émet le titre de perception correspondant. (...) ". Enfin, l'article R. 262-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile dispose que : " I. - Au vu des procès-verbaux qui lui sont transmis en application de l'article L. 8271-17 du code du travail, le directeur général de l'Office français de l'immigration et de l'intégration indique à l'employeur, par lettre recommandée avec avis de réception ou par tout autre moyen permettant de faire la preuve de sa date de réception par le destinataire, que les dispositions de l'article L. 626-1 sont susceptibles de lui être appliquées et qu'il peut présenter ses observations dans un délai de quinze jours. / II. - A l'expiration du délai fixé, le directeur général décide, au vu des observations éventuelles de l'employeur, de l'application de la contribution forfaitaire prévue à l'article L. 626-1, la liquide et émet le titre de perception correspondant. (...) ".
5. S'agissant des mesures à caractère de sanction, le respect du principe général des droits de la défense, applicable même sans texte, suppose que la personne concernée soit informée, avec une précision suffisante et dans un délai raisonnable avant le prononcé de la sanction, des griefs formulés à son encontre et puisse avoir accès aux pièces au vu desquelles les manquements ont été retenus, à tout le moins lorsqu'elle en fait la demande. L'article L. 122-2 du code des relations entre le public et l'administration, entré en vigueur le 1er janvier 2016, précise d'ailleurs désormais que les sanctions " n'interviennent qu'après que la personne en cause a été informée des griefs formulés à son encontre et a été mise à même de demander la communication du dossier la concernant ".
6. Si les dispositions législatives et réglementaires relatives à la contribution spéciale mentionnée à l'article L. 8253-1 du code du travail et à la contribution forfaitaire mentionnée à l'article L. 626-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ne prévoient pas expressément que le procès-verbal transmis au directeur général de l'OFII en application de l'article L. 8271-17 du code du travail, constatant l'infraction aux dispositions de l'article L. 8251-1 relatif à l'emploi d'un étranger non autorisé à exercer une activité salariée en France, soit communiqué au contrevenant, le silence de ces dispositions sur ce point ne saurait faire obstacle à cette communication, en particulier lorsque la personne visée en fait la demande, afin d'assurer le respect de la procédure contradictoire préalable à la liquidation de ces contributions, qui revêtent le caractère de sanctions administratives. Il appartient seulement à l'administration, le cas échéant, d'occulter ou de disjoindre, préalablement à la communication du procès-verbal, celles de ses mentions qui seraient étrangères à la constatation de l'infraction sanctionnée par la liquidation des contributions spéciale et forfaitaire et susceptibles de donner lieu à des poursuites pénales.
7. Il résulte de l'instruction que, par un courrier du 18 août 2015, dont la SARL MZ34BTP a accusé réception le 2 septembre 2015, le directeur général de l'OFII l'a informée qu'un procès-verbal établissait qu'elle avait employé trois travailleurs démunis de titre de séjour les autorisant à exercer une activité salariée, qu'elle était donc susceptible de se voir appliquer la contribution spéciale prévue par l'article L. 8253-1 du code du travail et la contribution forfaitaire représentative des frais de réacheminement prévue à l'article L. 626-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et qu'elle disposait d'un délai de quinze jours à compter de la réception de cette lettre pour faire valoir ses observations. Par suite, la SARL MZ34BTP a été mise à même de solliciter les procès-verbaux d'infractions fondant le versement de la contribution spéciale et de la contribution forfaitaire.
8. Le droit pour la personne concernée de demander à l'administration la copie des pièces au vu desquelles les manquements ont été retenus et dont sont issus des éléments qu'elle a effectivement utilisés pour mettre à la charge de cette personne la contribution spéciale mentionnée à l'article L. 8253-1 du code du travail et la contribution forfaitaire mentionnée à l'article L. 626-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, ne peut être mis en oeuvre qu'avant la liquidation de ces contributions, laquelle résulte de la décision prise par le directeur général de l'OFII, au vu des observations éventuelles de l'employeur.
9. En l'espèce, il résulte de l'instruction que la SARL MZ34BTP n'a pas sollicité la communication de ces pièces dans le délai de quinze jours qui lui était imparti pour présenter ses observations ni même préalablement à la liquidation de ces contributions par la décision du 15 octobre 2015 du directeur général de l'OFII. Si par lettre du 1er décembre 2015, la société a demandé à l'OFII " de lui adresser copie du dossier ayant abouti à la décision du 15 octobre 2015 " cette circonstance est postérieure à la décision contestée. Il résulte de ce qui a été dit au point précédent qu'elle est sans incidence sur la régularité de la procédure ayant conduit à son adoption et donc sur sa légalité.
10. La régularité de la procédure s'appréciant à la date à laquelle l'administration liquide les contributions et non à la date de la notification de sa décision à l'employeur, est également sans incidence la circonstance que le pli adressé à la SARL MZ34BTP contenant la décision du 15 octobre 2015 a été retourné à l'OFII revêtu de la mention " défaut d'accès ou d'adressage ", alors même que ce défaut de distribution serait imputable à une erreur de l'expéditeur qui a omis d'indiquer sur le pli l'adresse complète du siège de la société telle qu'elle ressortait des procès-verbaux de police et notamment d'y faire figurer la mention " Bat10/Le Turin " et que la SARL MZ34BTP n'a donc été informée de la liquidation des contributions que postérieurement à celle-ci lors de l'émission des titres de perception correspondants.
11. Il résulte ce qui précède que le moyen tiré de la méconnaissance des droits de la défense pour défaut de communication des pièces du dossier doit être écarté.
Sur le bien-fondé des sanctions infligées :
12. Aux termes du premier alinéa de l'article L. 8251-1 du code du travail : " Nul ne peut, directement ou indirectement, embaucher, conserver à son service ou employer pour quelque durée que ce soit un étranger non muni du titre l'autorisant à exercer une activité salariée en France ". L'article L. 5221-8 du même code dispose que : " L'employeur s'assure auprès des administrations territorialement compétentes de l'existence du titre autorisant l'étranger à exercer une activité salariée en France, sauf si cet étranger est inscrit sur la liste des demandeurs d'emploi tenue par l'institution mentionnée à l'article L. 5312-1 ". Aux termes de l'article L. 8253-1 de ce code, dans sa rédaction en vigueur à la date des manquements relevés à l'encontre de la SARL MZ34BTP : " Sans préjudice des poursuites judiciaires pouvant être intentées à son encontre, l'employeur qui a employé un travailleur étranger en méconnaissance des dispositions du premier alinéa de l'article L. 8251-1 acquitte, pour chaque travailleur étranger sans titre de travail, une contribution spéciale. Le montant de cette contribution spéciale est déterminé dans des conditions fixées par décret en Conseil d'Etat. Il est, au plus, égal à 5 000 fois le taux horaire du minimum garanti prévu à l'article L. 3231-12. Ce montant peut être minoré en cas de non-cumul d'infractions ou en cas de paiement spontané par l'employeur des salaires et indemnités dus au salarié étranger sans titre mentionné à l'article R. 8252-6. Il est alors, au plus, égal à 2 000 fois ce même taux (...) / L'Office français de l'immigration et de l'intégration est chargé de constater et de liquider cette contribution ". Enfin, aux termes du premier alinéa de l'article L. 626-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Sans préjudice des poursuites judiciaires qui pourront être engagées à son encontre et de la contribution spéciale prévue à l'article L. 8253-1 du code du travail, l'employeur qui aura occupé un travailleur étranger en situation de séjour irrégulier acquittera une contribution forfaitaire représentative des frais de réacheminement de l'étranger dans son pays d'origine ".
13. Il résulte des dispositions précitées de l'article L. 8253-1 du code du travail et de l'article L. 626-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile que les contributions qu'ils prévoient ont pour objet de sanctionner les faits d'emploi d'un travailleur étranger séjournant irrégulièrement sur le territoire français ou démuni de titre l'autorisant à exercer une activité salariée, sans qu'un élément intentionnel soit nécessaire à la caractérisation du manquement. Toutefois, un employeur ne saurait être sanctionné sur le fondement de ces dispositions, qui assurent la transposition des articles 3, 4 et 5 de la directive n° 2009/52/CE du Parlement européen et du Conseil du 18 juin 2009 prévoyant des normes minimales concernant les sanctions et les mesures à l'encontre des employeurs de ressortissants de pays tiers en séjour irrégulier, lorsque tout à la fois, d'une part, il s'est acquitté des obligations qui lui incombent en vertu de l'article L. 5221-8 du code du travail et, d'autre part, il n'était pas en mesure de savoir que les documents qui lui étaient présentés revêtaient un caractère frauduleux ou procédaient d'une usurpation d'identité. En outre, lorsqu'un salarié s'est prévalu lors de son embauche de la nationalité française ou de sa qualité de ressortissant d'un Etat pour lequel une autorisation de travail n'est pas exigée, l'employeur ne peut être sanctionné s'il s'est assuré que ce salarié disposait d'un document d'identité de nature à en justifier et s'il n'était pas en mesure de savoir que ce document revêtait un caractère frauduleux ou procédait d'une usurpation d'identité.
14. Il résulte de l'instruction que deux des ressortissants étrangers employés par la SARL MZ34BTP se sont présentés à elle comme de nationalité espagnole, qualité d'un Etat pour lequel aucune autorisation de travail n'est exigée. Si les intéressés ont produit lors de leur embauche une carte d'identité espagnole, il ressort des propres déclarations du gérant de la société MZ34BTP lors de son audition par les services de police que ni lui ni son frère n'ont pris le soin de vérifier les photos portées sur ces documents. Le gérant a, au demeurant, reconnu qu'un tel comportement était fautif. Cette simple vérification l'aurait pourtant mis en mesure de savoir que ces documents procédaient d'une usurpation d'identité. Faute d'y avoir procédé, la SARL MZ34BTP ne saurait se prévaloir de sa bonne foi.
15. L'article L. 5221-5 du code du travail dispose qu' " un étranger autorisé à séjourner en France ne peut exercer une activité professionnelle salariée en France sans avoir obtenu au préalable l'autorisation de travail mentionnées au 2° de l'article L. 5221-2 ", c'est-à-dire " un contrat de travail visé par l'autorité administrative ou une autorisation de travail ". Cette règle s'applique aux ressortissants de pays tiers, en situation régulière dans un Etat membre de l'Union européenne, même dans le cas où ils séjournent en France pour une période inférieure à trois mois à compter de leur entrée en France.
16. Il en résulte que si la société requérante fait valoir que M. G..., ressortissant marocain, titulaire d'un titre de séjour espagnol en cours de validité, séjournait régulièrement en France depuis moins de trois mois à la date de son interpellation, cette circonstance ne la dispensait pas lors de l'embauche l'intéressé de s'assurer qu'il était muni d'une autorisation de travail pour exercer une activité professionnelle salariée en France.
17. Il appartient au juge administratif, saisi d'un recours contre une décision mettant à la charge d'un employeur la contribution spéciale prévue par les dispositions de l'article L. 8253-1 du code du travail, pour avoir méconnu celles de l'article L. 8251-1 du même code, de vérifier la matérialité des faits reprochés à l'employeur et leur qualification juridique au regard de ces dispositions. Il lui appartient également de décider, après avoir exercé son plein contrôle sur les faits invoqués et la qualification retenue par l'administration, soit de maintenir la sanction prononcée, soit d'en diminuer le montant jusqu'au minimum prévu par les dispositions applicables au litige, soit d'en décharger l'employeur.
18. Il résulte de l'instruction, et notamment du procès-verbal établi à la suite du contrôle routier effectué le 14 avril 2015, dont les énonciations font foi jusqu'à preuve du contraire, que les services de police ont constaté, lors de ce contrôle, la présence dans le véhicule conduit par M. J... C..., frère du gérant de la SARL MZ34BTP qui réalise des installations électriques, la présence de plusieurs ressortissants marocains en tenue de travail, dont M. G..., dépourvus de titres les autorisant à séjourner et à travailler en France. Etaient également relevés dans ce véhicule la présence d'outils et d'équipements pour exécuter les chantiers d'électricité et sept sacs contenant des repas et pour certains d'entre eux des outils. Les énonciations du procès-verbal font ressortir, d'une part, que M. C... a reconnu que les passagers de ce véhicule allaient tous travailler sur le chantier de l'hôpital de Serre Cavalier à Nîmes. L'un d'eux, M. M..., a indiqué lors de son audition que M. G... travaillait sur ce chantier avant son arrivée en tant que manoeuvre et qu'il " venait habituellement " avec M. I... et M. A... " dans le fourgon pour travailler sur le chantier ". Si la SARL MZ34BTP soutient que M. G... se rendait en réalité à Nîmes pour " une autre cause " et qu'il était conduit gratuitement en tant qu'ami de la famille, elle n'apporte pas d'éléments probants de nature à infirmer les constats opposés. Par suite, le moyen tiré de l'inexactitude matérielle des faits doit être écarté.
19. Les dispositions susmentionnées n'habilitent ni l'Office français de l'immigration et de l'intégration ni le juge administratif à moduler le taux de la contribution spéciale en dehors des cas pour lesquels une minoration est envisagée par les textes applicables au litige. La société requérante n'établit pas, ni même ne soutient, qu'elle remplirait les conditions fixées aux II et III de l'article R. 8253-2 du code du travail pour bénéficier d'une réduction de la contribution spéciale mise à sa charge. En outre, la contribution spéciale étant due dès lors que l'infraction est matériellement constatée, la société intéressée ne peut utilement se prévaloir de ce que le contrôle n'a eu lieu que seulement quinze jours après l'embauche effective de deux employés et que M. G... réside régulièrement en Espagne.
20. D'une part, aux termes de l'article 21 de la convention d'application de l'accord Schengen : " 1. Les étrangers titulaires d'un titre de séjour délivré par un des Etats membres peuvent, sous le couvert de ce titre ainsi que d'un document de voyage, ces documents étant en cours de validité, circuler librement pour une durée n'excédant pas trois mois sur toute période de six mois sur le territoire des autres Etats membres, pour autant qu'ils remplissent les conditions d'entrée visées à l'article 5, paragraphe 1, points a), c) et e), et du règlement (CE) n° 562/2006 du Parlement européen et du Conseil du 15 mars 2006 établissant un code communautaire relatif au régime de franchissement des frontières par les personnes (code frontières Schengen) et qu'ils ne figurent pas sur la liste de signalement nationale de l'Etat membre concerné ". Aux termes de l'article 5 du règlement (CE) n° 562/2006 du 15 mars 2006 : " 1. Pour un séjour n'excédant pas trois mois, l'entrée sur les territoires des Parties contractantes peut être accordée à l'étranger qui remplit les conditions ci-après : / a) Posséder un document ou des documents valables permettant le franchissement de la frontière, déterminés par le Comité exécutif ; / (...) / c) Présenter, le cas échéant, les documents justifiant de l'objet et des conditions du séjour envisagé et disposer des moyens de subsistance suffisants, tant pour la durée du séjour envisagé que pour le retour dans le pays de provenance ou le transit vers un Etat tiers dans lequel son admission est garantie, ou être en mesure d'acquérir légalement ces moyens (...) ".
21. D'autre part, il résulte du premier alinéa de l'article L. 531-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile que : " Par dérogation aux articles L. 213-2 et L. 213-3, L. 511-1 à L. 511-3, L. 512-1, L. 512-3, L. 512-4, L. 513-1 et L. 531-3, l'étranger non ressortissant d'un Etat membre de l'Union européenne qui a pénétré ou séjourné en France sans se conformer aux dispositions des articles L. 211-1, L. 211-2, L. 311-1 et L. 311-2 peut être remis aux autorités compétentes de l'Etat membre qui l'a admis à entrer ou à séjourner sur son territoire, ou dont il provient directement, en application des dispositions des conventions internationales conclues à cet effet avec les Etats membres de l'Union européenne. (...) ". Aux termes du premier alinéa de l'article L. 531-2 du même code : " L'article L. 531-1 est applicable à l'étranger qui, en provenance du territoire d'un Etat partie à la convention signée à Schengen le 19 juin 1990, est entré ou a séjourné sur le territoire métropolitain sans se conformer aux dispositions des articles 19, paragraphe 1 ou 2, 20, paragraphe 1, ou 21, paragraphe 1 ou 2, de cette convention ou sans souscrire, au moment de l'entrée sur ce territoire, la déclaration obligatoire prévue par l'article 22 de la même convention, alors qu'il était astreint à cette formalité " ;
22. Enfin, aux termes de l'article L. 626-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Sans préjudice des poursuites judiciaires qui pourront être engagées à son encontre et de la contribution spéciale prévue à l'article L. 8253-1 du code du travail, l'employeur qui aura occupé un travailleur étranger en situation de séjour irrégulier acquittera une contribution forfaitaire représentative des frais de réacheminement de l'étranger dans son pays d'origine. (...).
23. Si M. G... justifie être titulaire d'un titre de séjour délivré par les autorités espagnoles, il ne résulte pas de l'instruction qu'il aurait disposé des moyens de subsistance suffisants, tant pour la durée de son séjour envisagé en France que pour le retour dans son pays d'origine ou en Espagne, pays dans lequel son admission est garantie, ou qu'il aurait été en mesure d'acquérir légalement ces moyens. Il était, dès lors, en situation de séjour irrégulier en France au regard des stipulations et dispositions précitées. Au demeurant, l'OFII fait valoir qu'il a été réadmis en Espagne le 17 avril 2015 selon les dispositions de l'arrêté préfectoral pris à son encontre. Par suite, la SARL MZ34BTP n'est pas fondée à soutenir que M. G... résidait régulièrement sur le territoire français à la date des manquements relevés à son encontre pour demander à être déchargée de la contribution forfaitaire représentative des frais de réacheminement à raison de l'embauche de l'intéressé.
24. Il résulte de ce qui précède que la SARL MZ34BTP n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Montpellier a rejeté sa demande.
Sur les frais liés au litige :
25. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que l'OFII, qui n'a pas la qualité de partie perdante dans la présente instance, verse une somme à la SARL MZ34BTP au titre des frais liés au litige. Il y a lieu, en revanche, de mettre à la charge de cette dernière la somme de 2 000 euros à verser à l'OFII sur le fondement de ces mêmes dispositions.
D É C I D E :
Article 1er : La requête de la SARL MZ34BTP est rejetée.
Article 2 : La SARL MZ34BTP versera à l'OFII une somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à la SARL MZ34BTP et à l'Office français de l'immigration et de l'intégration.
Délibéré après l'audience du 15 mars 2019, où siégeaient :
- M. Pocheron, président de chambre,
- M. Guidal, président assesseur,
- Mme E..., première conseillère.
Lu en audience publique, le 29 mars 2019.
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N° 18MA00649
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