Procédure devant la Cour :
Par une requête, enregistrée le 19 mars 2015 sous le n° 15MA01175, M.A..., représenté par MeB..., demande à la Cour :
1°) d'annuler le jugement du tribunal administratif de Montpellier ;
2°) d'annuler l'arrêté du préfet de l'Hérault du 25 juillet 2014 ;
3°) d'enjoindre au préfet de l'Hérault de lui délivrer un titre de séjour portant la mention " vie privée et familiale ", à défaut, d'enjoindre au préfet de réexaminer sa situation dans le délai d'un mois à compter de la notification du présent arrêt, au besoin sous astreinte ;
4°) d'ordonner au préfet la délivrance d'une autorisation provisoire de séjour ;
5°) de condamner l'État à verser la somme de 1 500 euros à Me B...au titre de la combinaison des articles 37 et 75 de la loi du 10 juillet 1991 et de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
M. A...soutient que :
- les premiers juges ont commis une erreur d'appréciation ;
- ils ont également commis une erreur d'appréciation de sa situation privée et familiale, violant en outre l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- la décision du préfet portant refus de titre de séjour est entachée d'un défaut de motivation ;
- cette décision est également entachée d'une erreur d'appréciation de sa vie privée et familiale méconnaissant ainsi l'article L. 313-11 4° du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ainsi que l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- cette décision méconnaît l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- la décision portant obligation de quitter le territoire français est dépourvue de base légale du fait de l'illégalité de la décision de refus de titre de séjour ;
- la décision portant obligation de quitter le territoire français est entachée d'une erreur d'appréciation de sa vie privée et familiale, méconnaissant ainsi l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.
Par un mémoire en défense, enregistré le 17 février 2016, le préfet de l'Hérault conclut au rejet de la requête. Il soutient que les moyens soulevés par le requérant ne sont pas fondés.
M. A...a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du du 3 février 2015;
Vu :
- les autres pièces du dossier.
Vu :
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- le code de justice administrative.
Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience ;
A été entendu au cours de l'audience publique :
- le rapport de M. Renouf.
1. Considérant que M.A..., de nationalité marocaine, est entré en France en 2009 et a épousé une ressortissante française le 21 décembre 2013 ; qu'il a sollicité le 22 juillet 2014 auprès des services de la préfecture de l'Hérault la délivrance d'un titre de séjour en qualité de conjoint de Français ; que, par un arrêté du 25 juillet 2014, le préfet de l'Hérault a refusé de le lui délivrer et lui a fait obligation de quitter le territoire français dans le délai de trente jours ; que M. A...a alors exercé un recours en annulation, le 23 septembre 2014, contre cet arrêté devant le tribunal administratif de Montpellier qui l'a rejeté par un jugement du 31 décembre 2014 ; que M. A...fait appel de ce jugement ;
Sur les conclusions à fin d'annulation de la décision portant refus de titre de séjour :
2. Considérant que M. A...soutient que le préfet a entaché sa décision d'un défaut de motivation en se bornant à indiquer que l'intéressé " ne remplit aucune condition d'ordre humanitaire ou exceptionnel pour se prévaloir des dispositions de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile " sans indiquer les faits qu'il retient ou écarte ; que, cependant, l'exigence de motivation des actes administratifs n'a pour objet ni pour effet d'imposer à l'autorité administrative de mentionner l'ensemble des faits de l'espèce mais seulement les faits sur lesquels elle compte se fonder ; qu'en l'espèce, le préfet avait énoncé dans des paragraphes précédents le caractère contradictoire déclarations de M. A...sur la date de son entrée en France, et sur le caractère récent du mariage dont il se prévaut ; que ces éléments qui sont le fondement de la décision attaquée permettent de caractériser une motivation suffisante en fait ;
3. Considérant, en premier lieu, qu'aux termes de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " est délivrée de plein droit : / (...) 4° A l'étranger ne vivant pas en état de polygamie, marié avec un ressortissant de nationalité française, à condition que la communauté de vie n'ait pas cessé depuis le mariage, que le conjoint ait conservé la nationalité française et, lorsque le mariage a été célébré à l'étranger, qu'il ait été transcrit préalablement sur les registres de l'état civil français (...) " ; qu'aux termes de l'article
L. 311-7 de ce code : " Sous réserve des engagements internationaux de la France et des exceptions prévues par les dispositions législatives du présent code, l'octroi de la carte de séjour temporaire et celui de la carte de séjour "compétences et talents" sont subordonnés à la production par l'étranger d'un visa pour un séjour d'une durée supérieure à trois mois " ; qu'aux termes du sixième alinéa de l'article L. 211-2-1 du même code : " Lorsque la demande de visa de long séjour émane d'un étranger entré régulièrement en France, marié en France avec un ressortissant de nationalité française et que le demandeur séjourne en France depuis plus de six mois avec son conjoint, la demande de visa de long séjour est présentée à l'autorité administrative compétente pour la délivrance d'un titre de séjour " ; que selon l'article
L. 311-5 dudit code, dans sa rédaction applicable au présent litige : " La délivrance d'une autorisation provisoire de séjour, d'un récépissé de demande de titre de séjour ou d'un récépissé de demande d'asile n'a pas pour effet de régulariser les conditions de l'entrée en France, sauf s'il s'agit d'un étranger qui s'est vu reconnaître la qualité de réfugié " ;
4. Considérant qu'il résulte de la combinaison de ces dispositions que la production d'un visa de long séjour, délivré, le cas échéant, selon les modalités fixées au sixième alinéa de l'article L. 211-2-1, est au nombre des conditions auxquelles est subordonnée la délivrance d'une carte de séjour temporaire sur le fondement du 4° de l'article L. 313-11 ; que, si ces dispositions impliquent que l'autorité préfectorale, saisie d'une demande de titre de séjour sur le fondement du 4° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, procède à l'instruction de la demande implicite de délivrance d'un visa de long séjour en application des dispositions de l'article L. 211-2-1 du même code, il résulte de ces dispositions que le préfet n'est compétent pour délivrer un visa de long séjour que lorsque toutes les conditions qu'elles prévoient sont remplies, notamment celle d'une entrée régulière en France du demandeur ;
5. Considérant que, pour refuser à M. A... la délivrance de la carte de séjour temporaire prévue par les dispositions du 4° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, le préfet de l'Hérault s'est fondé, d'une part, sur la circonstance que l'intéressé ne pouvait justifier être en possession du visa de long séjour prévu par les dispositions de l'article L. 311-7 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et, d'autre part, sur la circonstance qu'étant entré irrégulièrement en France, il ne pouvait prétendre à la délivrance d'un visa de long séjour selon les modalités fixées au sixième alinéa de l'article L. 211-2-1 du même code ; qu'il ressort des pièces du dossier que M. A...disposait d'un visa long séjour " salarié " valable pour une entrée unique en Italie ; qu'ainsi M. A...ne justifie ni remplir la condition d'obtention d'un visa de long séjour en France ni celle d'une entrée régulière sur le territoire français ; que le préfet de l'Hérault a ainsi fait une exacte application des dispositions du 4° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, combinées avec celles des articles L. 311-7 et L. 211-2-1 du même code ; que, par conséquent, M. A...n'est pas fondé à soutenir que le tribunal administratif a entaché son jugement d'une erreur d'appréciation en considérant que le préfet ne s'était pas cru en situation de compétence liée pour refuser de délivrer le titre demandé ;
6. Considérant qu'au titre de l'article L. 313-14 : " La carte de séjour temporaire mentionnée à l'article L. 313-11 ou la carte de séjour temporaire mentionnée au 1° de l'article L. 313-10 peut être délivrée, sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, à l'étranger ne vivant pas en état de polygamie dont l'admission au séjour répond à des considérations humanitaires ou se justifie au regard des motifs exceptionnels qu'il fait valoir, sans que soit opposable la condition prévue à l'article L. 311-7. " ;
7. Considérant que M. A...se prévaut de son entrée en France en 2009 et de son mariage le 21 décembre 2013 avec une personne de nationalité française pour justifier de circonstances exceptionnelles ; que, toutefois, à supposer même que l'intéressé établisse une présence habituelle en France depuis cette date, cela ne correspond qu'à une présence de
trois ans à compter de la décision attaquée qui ne constitue pas une circonstance exceptionnelle au sens de l'article précité ; que, de même, son mariage avec une Française conclu seulement six mois avant la date de la décision attaquée, ne peut être regardé, compte tenu de son caractère récent, comme une circonstance exceptionnelle ; qu'ainsi la décision attaquée n'a pas méconnu ledit article ;
8. Considérant qu'au titre de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance 2. I1 ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui. " ;
9. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que le mariage de M. A... avec une ressortissante française, célébré le 21 décembre 2013, était encore très récent à la date de l'arrêté contesté, et que l'existence d'une communauté de vie avec son épouse n'est pas établie avant le mois de mars 2014 ; qu'il est par ailleurs constant que l'intéressé a fait le choix de se maintenir irrégulièrement sur le territoire français nonobstant la notification d'une précédente mesure d'éloignement prise à son encontre le 7 mars 2011 ; qu'il n'est pas dépourvu d'attaches familiales dans son pays d'origine où il a vécu jusqu'à l'âge de 26 ans et où réside toujours son père ; qu'ainsi l'arrêté attaqué n'a pas porté au droit de l'intéressé au respect de sa vie familiale une atteinte disproportionnée aux buts en vue desquels il a été édicté ; qu'ainsi il n'a pas méconnu les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
Sur les conclusions à fin d'annulation de la décision portant obligation de quitter le territoire français :
10. Considérant que, dès lors que le refus de séjour opposé à M. A... n'est pas illégal, l'intéressé n'est pas fondé à demander l'annulation de la décision lui faisant obligation de quitter le territoire français en excipant de l'illégalité de ce refus de titre de séjour ;
11. Considérant que pour les mêmes motifs que ceux mentionnés au point 9, l'obligation de quitter le territoire français n'a pas porté une atteinte disproportionnée à son droit au respect de sa vie privée et familiale et n'a donc pas méconnu les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
12. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que les conclusions de M. A... à fin d'annulation de l'arrêté du 25 juillet 2014 par lequel le préfet de l'Hérault a refusé de lui délivrer un titre de séjour et l'a obligé à quitter le territoire français dans le délai de trente jours doivent être rejetées ; qu'il y a lieu, par voie de conséquence, de rejeter ses conclusions aux fins d'injonction et d'astreinte, ainsi que celles tendant à l'application des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 et 75 de la loi du 10 juillet 1991 combinés ;
D E C I D E :
Article 1er : La requête de M. A...est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. C...A..., et au ministre de l'intérieur.
Copie en sera adressée au préfet de l'Hérault.
Délibéré après l'audience du 23 février 2016, où siégeaient :
- M. Gonzales, président,
- M. Renouf, président assesseur,
- Mme Pena, premier conseiller.
Lu en audience publique, le 15 mars 2016.
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N° 15MA011755