Par une requête enregistrée le 6 août 2015, M.C..., représenté par
Me A...E..., demande à la Cour :
1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Montpellier du 7 juillet 2015 ;
2°) d'annuler l'arrêté précité du 9 février 2015 ;
3°) d'enjoindre au préfet de l'Hérault, à titre principal, de lui délivrer un titre de séjour portant la mention " vie privée et familiale ", dans le délai de deux mois à compter de la notification de l'arrêt à intervenir avec, dans cette attente, délivrance, dans le délai de 8 jours, d'un récépissé l'autorisant à travailler, sous astreinte de 100 euros par jour de retard ou, à titre subsidiaire, de procéder à un réexamen de sa situation avec délivrance d'une autorisation provisoire de séjour ;
4°) de mettre à la charge de l'Etat le paiement de la somme de 1 500 euros qui sera versée à Me E...en cas d'admission à l'aide juridictionnelle, sous réserve de sa renonciation au bénéfice de l'indemnité d'aide juridictionnelle, ou, en l'absence d'admission à l'aide juridictionnelle, à M. C...en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Il soutient que :
- l'attaqué est insuffisamment motivé ;
- les stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ont été méconnues dès lors qu'il encourt des risques en cas de retour dans son pays d'origine ;
- il aurait dû, au moins, bénéficier, comme sa soeur, de la protection subsidiaire en application de l'article L. 313-13 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- les dispositions de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et de la circulaire NOR INTK1229185C ont été méconnues ;
- l'intérêt supérieur de ses enfants a été méconnu ;
- il entend invoquer, à l'appui de ses conclusions aux fins d'annulation de l'obligation de quitter le territoire français, l'exception d'illégalité du refus de titre de séjour ;
- les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ont été méconnues ;
Par un mémoire en défense enregistré le 26 novembre 2015, le préfet de l'Hérault conclut au rejet de la requête de M.C....
Il soutient que les moyens de la requête sont infondés.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- la convention internationale relative aux droits de l'enfant ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- le code de justice administrative.
Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
A été entendu au cours de l'audience publique :
- le rapport de Mme Vincent-Dominguez.
1. Considérant que M.C..., de nationalité géorgienne, serait entré irrégulièrement en France en juillet 2012 avec son épouse et leurs deux enfants ; qu'il a déposé, le 26 mars 2013, une demande d'asile ; que, par une décision du 24 janvier 2014, l'Office français de protection des réfugiés et apatrides a rejeté sa demande ; que cette décision a été confirmée par la Cour nationale du droit d'asile le 10 octobre 2014 ; qu'à la suite de ces décisions, le préfet de l'Hérault a, par un arrêté en date du 7 novembre 2014, refusé de faire droit à la demande de titre de séjour présentée par M. C...sur le fondement de l'asile, a assorti son refus d'une obligation de quitter le territoire français et a fixé le pays à destination duquel serait reconduit l'intéressé à défaut de se conformer à ladite obligation ; que, néanmoins, le 4 novembre 2014, M. C...a présenté une demande de réexamen au titre de l'asile ; que l'Office français de protection des réfugiés et apatrides, nouvellement saisi dans le cadre de la procédure prioritaire, a rejeté la demande de M. C...le 8 janvier 2015 ; que, par un arrêté du 9 février 2015, le préfet de l'Hérault a, dès lors, de nouveau refusé de faire droit à la demande de titre de séjour présentée par M. C...sur le fondement de l'asile, assorti son refus d'une obligation de quitter le territoire français et fixé le pays de destination ; que M. C...interjette appel du jugement du 7 juillet 2015 par lequel le tribunal administratif de Montpellier a rejeté ses conclusions aux fins d'annulation de ce deuxième arrêté ;
2. Considérant, en premier lieu, que la décision portant refus de titre de séjour précise, de façon suffisamment détaillée, les circonstances de droit et de fait sur lesquelles elle se fonde bien qu'elle n'apporte aucune précision quant à la scolarisation des enfants du requérant, auxquels il est néanmoins fait référence ;
3. Considérant, en deuxième lieu, qu'aux termes de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " Nul ne peut être soumis à la torture ni à des peines ou traitements inhumains ou dégradants " ; que si le requérant fait état de ce que, du fait de son appartenance à la communauté Yézide, lui-même, son épouse, son fils Davit et son père auraient fait l'objet de violences de la part des autorités de police géorgiennes et de ce que sa fille, Irina, aurait été assassinée à l'âge de 6 mois, et produit à cet égard, d'une part, des certificats médicaux attestant de l'existence de quelques cicatrices sur cet enfant ainsi que l'acte de son décès, il n'est cependant pas établi que lesdites cicatrices et le décès d'Irina seraient survenus dans les circonstances alléguées ; que, d'ailleurs, l'Office français de protection des réfugiés et apatrides, confirmé par la Cour nationale du droit d'asile, a relevé, dans ses décisions, que les déclarations du requérant, avaient totalement échoué à convaincre ne serait-ce que de la vraisemblance du moindre fait allégué, hormis l'appartenance à la communauté Yézide, et qu'elles étaient " revêtues d'un caractère profondément invraisemblable " ; que M. C...n'apporte, devant la Cour, aucun élément nouveau qui permettrait d'établir la réalité des craintes alléguées ; que, par suite, le moyen tiré de ce que le préfet de l'Hérault aurait commis une erreur manifeste d'appréciation de sa situation personnelle au regard des risques encourus en cas de retour dans son pays d'origine doit être écarté ;
4. Considérant, en troisième lieu, que la circonstance que la soeur du requérant ait obtenu le bénéfice de la protection subsidiaire en France ne confère aucun droit au requérant d'en bénéficier lui-même ;
5. Considérant, en quatrième lieu, que les énonciations de la circulaire du ministre de l'intérieur du 28 novembre 2012 relative aux conditions d'examen des demandes d'admission au séjour déposées par des ressortissants étrangers en situation irrégulière dans le cadre des dispositions du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ne constituent pas des lignes directrices dont les intéressés pourraient se prévaloir mais seulement des orientations générales que le ministre de l'intérieur a pu adresser aux préfets pour les éclairer dans la mise en oeuvre de leur pouvoir de régularisation et qui ne peuvent être utilement invoquées devant le juge ; que, dès lors, le moyen tiré de la méconnaissance des dispositions de ladite circulaire doit être écarté ;
6. Considérant, en cinquième lieu, qu'aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1° Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance ; 2° Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale ou à la protection des droits et libertés d'autrui " ;
7. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que M. C...ne se prévaut, hormis sa soeur, de la présence d'aucun autre membre de sa famille en situation régulière en France ; que son épouse, Mme B...D..., également de nationalité géorgienne, a fait l'objet, le même jour, d'un refus de titre de séjour assorti d'une obligation de quitter le territoire français ; que, par ailleurs, il est constant que M.C..., arrivé en France à l'âge de 23 ans après avoir passé la majeure partie de sa vie dans son pays d'origine, n'y est pas dépourvu de famille puisqu'y résident ses parents ainsi que deux autres de ses soeurs ; que, par suite, et alors même que ses deux enfants sont scolarisés en France depuis octobre 2014, soit moins de quatre mois avant l'arrêté attaqué, le moyen tiré de la méconnaissance des stipulations précitées doit être écarté ;
8. Considérant, en sixième lieu, qu'aux termes du paragraphe 1 de l'article 3 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant du 26 janvier 1990 : " Dans toutes les décisions qui concernent les enfants, qu'elles soient le fait des institutions publiques ou privées de protection sociale, des tribunaux, des autorités administratives ou des organes législatifs, l'intérêt supérieur de l'enfant doit être une considération primordiale. " ; qu'il résulte de ces stipulations, qui peuvent être utilement invoquées à l'appui d'un recours pour excès de pouvoir, que, dans l'exercice de son pouvoir d'appréciation, l'autorité administrative doit accorder une attention primordiale à l'intérêt supérieur des enfants dans toutes les décisions les concernant ; que, cependant, rien ne fait obstacle, eu égard au jeune âge des enfants à la date de l'arrêté attaqué et à l'absence, ainsi qu'il a été dit précédemment d'établissement de la réalité des craintes alléguées en cas de retour en Géorgie, à ce que la cellule familiale se reconstitue dans ce pays et à ce que les enfants y soient scolarisés ; que, par suite, le moyen tiré de la méconnaissance des stipulations précitées doit être écarté ;
9. Considérant, en septième lieu, que, pour les motifs susmentionnés, le moyen tiré de l'exception d'illégalité du refus de titre de séjour, soulevé à l'appui des conclusions aux fins d'annulation de l'obligation de quitter le territoire français, doit être écarté ;
10. Considérant, en huitième lieu, qu'aux termes de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, dans sa rédaction applicable à la date de la décision contestée : "I. (...)- L'autorité administrative peut obliger à quitter le territoire français un étranger non ressortissant d'un Etat membre de l'Union européenne, d'un autre Etat partie à l'accord sur l'Espace économique européen ou de la Confédération suisse et qui n'est pas membre de la famille d'un tel ressortissant au sens des 4° et 5° de l'article L. 121-1, lorsqu'il se trouve dans l'un des cas suivants : (...) 3° Si la délivrance ou le renouvellement d'un titre de séjour a été refusé à l'étranger ou si le titre de séjour qui lui avait été délivré lui a été retiré ; / La décision énonçant l'obligation de quitter le territoire français est motivée. Elle n'a pas à faire l'objet d'une motivation distincte de celle de la décision relative au séjour dans les cas prévus aux 3° et 5° du présent I, sans préjudice, le cas échéant, de l'indication des motifs pour lesquels il est fait application des II et III (...)" ;
11. Considérant que, lorsqu'une obligation de quitter le territoire français assortit un refus de séjour, la motivation de cette mesure se confond avec celle du refus de titre de séjour dont elle découle nécessairement et n'implique pas, par conséquent, dès lors que ce refus est
lui-même motivé, de mention spécifique ; qu'en l'espèce, le refus de séjour satisfait à l'obligation de motivation tant en droit qu'en fait, ainsi qu'il a été dit précédemment ;
12. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que M. C...n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Montpellier a rejeté ses conclusions aux fins d'annulation de l'arrêté en date du 9 février 2015 ; que, par voie de conséquence, doivent être rejetées tant ses conclusions aux fins d'injonction et d'astreinte que celles présentées sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;
D E C I D E
Article 1er : La requête de M. C...est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. F...C...et au ministre de l'intérieur.
Copie en sera adressée au préfet de l'Hérault.
Délibéré après l'audience du 23 février 2016, où siégeaient :
- M. Gonzales, président,
- M. Renouf, président assesseur,
- Mme Vincent-Dominguez, premier conseiller.
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N° 15MA03313 2