Procédure devant la cour :
Par une requête enregistrée le 19 février 2019, M. E..., représenté par Me A..., demande à la cour :
1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Montpellier du 21 décembre 2018 ;
2°) d'annuler la " décision " du maire de Saleilles du 22 août 2016, ainsi que la décision implicite rejetant son recours gracieux ;
3°) de mettre à la charge de la commune de Saleilles la somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Il soutient que :
- le jugement attaqué est entaché d'illégalité dès lors que les décrets n° 2012-752 du 9 mai 2012 et n° 2013-651 du 19 juillet 2013 sont applicables aux fonctionnaires territoriaux en vertu du principe de parité résultant de l'article 88 de la loi du 26 janvier 1984 ;
- la décision litigieuse est illégale dès lors qu'elle est fondée sur une délibération du 21 juin 2016 prise en méconnaissance des dispositions de ces décrets, aucune délibération prise avant le 1er septembre 2015 n'ayant modifié sa situation.
Par un mémoire en défense enregistré le 14 février 2020, la commune de Saleilles, représentée par Me B..., conclut au rejet de la requête et à ce que la somme de 2 500 euros soit mise à la charge de M. E... au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que les moyens invoqués par M. E... ne sont pas fondés.
Les parties ont été informées, en application de l'article R. 6117 du code de justice administrative, de ce que la cour était susceptible de relever d'office l'irrecevabilité des conclusions dirigées contre l'acte du 22 août 2016 qui ne constitue pas une décision faisant grief susceptible de faire l'objet d'un recours pour excès de pouvoir.
Un mémoire, enregistré le 29 avril 2021, a été présenté pour M. E... en réponse à ce moyen relevé d'office.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- le code général de la propriété des personnes publiques ;
- la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 ;
- la loi n° 84-53 du 26 janvier 1984 ;
- la loi n° 90-1067 du 28 novembre 1990 ;
- le décret n° 2012-752 du 9 mai 2012 ;
- le décret n° 2013-651 du 19 juillet 2013 ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de M. C...,
- les conclusions de M. Roux, rapporteur public,
- et les observations de Me B..., représentant la commune de Saleilles.
Considérant ce qui suit :
1. M. E... a été nommé, à compter du 18 janvier 2013, dans le cadre d'emplois des adjoints techniques territoriaux en qualité d'adjoint technique de deuxième classe stagiaire. Par un arrêté du maire de Saleilles du 21 janvier suivant, il s'est vu attribuer un logement de fonction, par nécessité absolue de service, au titre de ses fonctions de gardien du complexe sportif José Arrieta. Par une délibération du 21 juin 2016, le conseil municipal de Saleilles a désigné plusieurs logements de fonction par nécessité absolue de service et précisé les frais, liés à l'occupation à titre gratuit de ces logements communaux, restant à la charge de leurs occupants. Par une lettre du 22 août 2016, le maire de Saleilles a notifié à M. E... cette délibération désignant notamment le logement communal qu'il occupe comme un logement concédé par nécessité absolue de service. Par un courrier du 29 août 2016, reçu le 31 août suivant en mairie, l'intéressé a demandé à cette autorité de retirer cette " décision " du 22 août 2016. M. E... relève appel du jugement du 21 décembre 2018 par lequel le tribunal administratif de Montpellier a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'acte du 22 août 2016, ainsi que de la décision implicite rejetant son recours gracieux.
Sur le bien-fondé du jugement attaqué :
En ce qui concerne la lettre du 22 août 2016 :
2. Il ressort des pièces du dossier que la lettre du 22 août 2016 par laquelle le maire de Saleilles a notifié à M. E... la délibération du 21 juin 2016 évoquée au point 1 ne constitue pas, eu égard aux termes dans lesquels elle est rédigée, une décision faisant grief susceptible de faire l'objet d'un recours pour excès de pouvoir. Il suit de là que les conclusions tendant à l'annulation de cette lettre doivent être rejetées comme irrecevables.
En ce qui concerne la délibération du 21 juin 2016 :
3. Eu égard à la teneur de son argumentation contentieuse, ainsi qu'aux termes de son recours gracieux dans lequel il fait notamment état du caractère partiellement illégal de la délibération du conseil municipal de Saleilles du 21 juin 2016, M. E... doit être regardé comme demandant l'annulation de cette délibération en tant qu'elle prévoit que les occupants des logements communaux concédés par nécessité absolue de service doivent supporter l'ensemble des réparations locatives et des charges locatives afférentes à leur logement de fonction.
4. Aux termes de l'article L. 2124-32 du code général de la propriété des personnes publiques : " Les conditions d'attribution d'un logement de fonction par les collectivités territoriales, leurs groupements et leurs établissements publics sont régies par les dispositions de l'article 21 de la loi n° 90-1067 du 28 novembre 1990 ". L'article 21 de la loi du 28 novembre 1990 dispose que : " Les organes délibérants des collectivités territoriales (...) fixent la liste des emplois pour lesquels un logement de fonction peut être attribué gratuitement ou moyennant une redevance par la collectivité (...), en raison notamment des contraintes liées à l'exercice de ces emplois. (...) / La délibération précise les avantages accessoires liés à l'usage du logement (...) ".
5. Dans l'exercice de la compétence qui leur est reconnue par les dispositions citées ci-dessus de l'article 21 de la loi du 28 novembre 1990, les collectivités territoriales doivent se conformer au principe de parité entre les agents relevant des diverses fonctions publiques dont s'inspire l'article 88 de la loi du 26 janvier 1984 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique territoriale. Elles ne peuvent par suite légalement attribuer à leurs agents des prestations, venant en supplément de leur rémunération, qui excèderaient celles auxquelles peuvent prétendre des agents de l'Etat occupant des emplois soumis aux mêmes contraintes. Il leur appartient notamment, en ce qui concerne les avantages accessoires liés au logement, d'en arrêter la liste sans procurer aux agents, à ce titre, une prestation plus favorable que celle dont bénéficierait un fonctionnaire de l'Etat placé dans la même situation.
6. D'une part, aux termes de l'article R. 2124-65 du code général de la propriété des personnes publiques, applicable aux concessions de logement dans les immeubles appartenant à l'Etat, modifié par le décret du 9 mai 2012 portant réforme du régime des concessions de logement : " Une concession de logement peut être accordée par nécessité absolue de service lorsque l'agent ne peut accomplir normalement son service, notamment pour des raisons de sûreté, de sécurité ou de responsabilité, sans être logé sur son lieu de travail ou à proximité immédiate (...) ". Selon l'article R. 2124-67 du même code : " La concession de logement accordée par nécessité absolue de service comporte la gratuité de la prestation du logement nu (...) ". Aux termes de l'article R. 2124-71 de ce code : " Le bénéficiaire d'une concession de logement par nécessité absolue de service (...) supporte l'ensemble des réparations locatives et des charges locatives afférentes au logement qu'il occupe, déterminées conformément à la législation relative aux loyers des locaux à usage d'habitation, ainsi que les impôts ou taxes qui sont liés à l'occupation des locaux. Il souscrit une assurance contre les risques dont il doit répondre en qualité d'occupant ".
7. D'autre part, le premier alinéa de l'article 9 du décret du 9 mai 2012 portant réforme du régime des concessions de logement prévoit, dans sa rédaction modifiée par l'article 1er du décret du 19 juillet 2013, qu'en l'absence de changement dans la situation ayant justifié leur attribution, les agents civils ou militaires auxquels il a été accordé une concession de logement antérieurement à la date d'entrée en vigueur du décret du 9 mai 2012 en conservent le bénéfice jusqu'à l'entrée en vigueur des arrêtés prévus aux articles R. 2124-65 et R. 2124-68 du code général de la propriété des personnes publiques et, au plus tard, le 1er septembre 2015. Ces dispositions n'ont pas pour objet et ne sauraient avoir pour effet de faire obstacle à ce que l'organe délibérant d'une collectivité territoriale modifie, par une délibération adoptée postérieurement au 1er septembre 2015, le régime applicable aux logements concédés par nécessité absolue de service.
8. Il ressort des pièces du dossier que la délibération du conseil municipal de Saleilles du 21 juin 2016 prévoit, s'agissant des frais demeurant à la charge des occupants des logements communaux concédés par nécessité absolue de service, des règles analogues à celles fixées par les dispositions du code général de la propriété des personnes publiques citées au point 6. Dans ces conditions, M. E... n'est pas fondé à soutenir que cette délibération, qui pouvait être adoptée postérieurement au 1er septembre 2015 ainsi qu'il vient d'être dit, aurait été prise en méconnaissance du principe de parité dont s'inspire l'article 88 de la loi du 26 janvier 1984.
En ce qui concerne la décision implicite de rejet du recours gracieux :
9. Eu égard à ce qui a été dit précédemment, les conclusions de M. E... tendant à l'annulation de la décision implicite rejetant son recours gracieux ne peuvent qu'être rejetées.
10. Il résulte de tout ce qui précède que M. E... n'est pas fondé à se plaindre de ce que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Montpellier a rejeté sa demande.
Sur les frais liés au litige :
11. Les dispositions de l'article L. 7611 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de la commune de Saleilles, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, la somme que demande M. E... au titre des frais exposés par lui et non compris dans les dépens. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de M. E... le versement d'une somme de 1 000 euros à la commune de Saleilles à ce titre.
D É C I D E :
Article 1er : La requête de M. E... est rejetée.
Article 2 : M. E... versera une somme de 1 000 euros à la commune de Saleilles au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à M. F... E... et à la commune de Saleilles.
Délibéré après l'audience du 4 mai 2021, à laquelle siégeaient :
- M. Chazan, président,
- Mme D..., première conseillère,
- M. C..., premier conseiller.
Rendu public par mise à disposition au greffe le 18 mai 2021.
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N° 19MA00762