Procédure devant la Cour :
Par une requête, enregistrée le 4 mai 2018, M.D..., représenté par la SELARL Grimaldi Molina et Associés, demande à la Cour :
1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Marseille du 27 mars 2018 ;
2°) d'annuler les décisions du 21 mars 2018 ;
3°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 2 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 à verser à son conseil qui renonce dans ce cas à percevoir la part contributive de l'Etat due au titre de l'aide juridictionnelle.
Il soutient que :
- l'article 3 du règlement (UE) n° 604/2013 du Parlement européen et du Conseil du 26 juin 2013 a été méconnu en raison des défaillances systémiques de la procédure d'asile en Italie ;
- le préfet a commis une erreur manifeste d'appréciation en décidant sa remise aux autorités de ce pays et méconnu l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.
La requête a été communiquée au préfet des Bouches-du-Rhône qui n'a pas produit de mémoire.
Les parties ont été informées, en application des dispositions de l'article R. 611-7 du code de justice administrative, de ce que l'arrêt était susceptible d'être fondé sur un moyen relevé d'office, tiré du non lieu à statuer sur la requête en raison de la caducité de la décision de remise.
Par un mémoire, enregistré le 22 février 2019, M. D...a présenté ses observations en réponse au moyen d'ordre public lesquelles ont été communiquées.
M. D...a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 20 juin 2018.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- le traité sur l'Union européenne ;
- le règlement n° 604/ 2013 du Parlement européen et du Conseil du 26 juin 2013 ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 et le décret n° 91-1266 du 19 décembre 1991 ;
- le code de justice administrative.
Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de Mme Simon,
- et les observations de MeB..., représentant M.D....
Considérant ce qui suit :
1. M.D..., ressortissant soudanais, entré sur le sol français le 10 septembre 2017 en provenance de l'Italie, a sollicité le 26 octobre suivant la reconnaissance du statut de réfugié auprès du préfet des Bouches-du-Rhône qui a saisi, le 6 novembre 2017, les autorités italiennes d'une demande de prise en charge en application de l'article 13.1 du règlement n°604/2013. Une décision implicite d'acceptation est intervenue le 7 janvier 2018 en application de l'article 22.7 du même règlement. Par deux arrêtés du 21 mars 2018, le préfet des Bouches-du-Rhône a, d'une part, prononcé le transfert de M. D...aux autorités italiennes responsables de sa demande d'asile et, d'autre part, décidé de l'assigner à résidence pour une durée de 45 jours et jusqu'à son départ devant intervenir au plus tard le 5 mai 2018. M. D... fait appel du jugement du 27 mars 2018 par lequel le tribunal administratif de Marseille a rejeté sa demande tendant à l'annulation de ces deux arrêtés.
Sur la légalité des arrêtés du 21 mars 2018 :
2. D'une part, aux termes de l'article 3 du règlement (UE) n° 604/2013 du 26 juin 2013 : " (...) 2. Lorsqu'aucun État membre responsable ne peut être désigné sur la base des critères énumérés dans le présent règlement, le premier État membre auprès duquel la demande de protection internationale a été introduite est responsable de l'examen. / Lorsqu'il est impossible de transférer un demandeur vers l'État membre initialement désigné comme responsable parce qu'il y a de sérieuses raisons de croire qu'il existe dans cet État membre des défaillances systémiques dans la procédure d'asile et les conditions d'accueil des demandeurs, qui entraînent un risque de traitement inhumain ou dégradant au sens de l'article 4 de la charte des droits fondamentaux de l'Union européenne, l'État membre procédant à la détermination de l'État membre responsable poursuit l'examen des critères énoncés au chapitre III afin d'établir si un autre État membre peut être désigné comme responsable. / Lorsqu'il est impossible de transférer le demandeur en vertu du présent paragraphe vers un État membre désigné sur la base des critères énoncés au chapitre III ou vers le premier État membre auprès duquel la demande a été introduite, l'État membre procédant à la détermination de l'État membre responsable devient l'État membre responsable ". D'autre part, aux termes de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " Nul ne peut être soumis à la torture ni à des peines ou des traitements inhumains ou dégradants ".
3. M. D... soutient que les autorités italiennes, débordées par l'afflux de migrants, ne sont pas en mesure d'accorder aux demandeurs d'asile des conditions d'accueil satisfaisantes. Toutefois, il ne ressort pas des pièces du dossier que les autorités italiennes ne seraient pas en mesure de traiter sa demande d'asile dans des conditions conformes à l'ensemble des garanties exigées par le respect du droit d'asile et de lui proposer une prise en charge adaptée, notamment de l'affection tuberculeuse dont il est atteint, en l'absence d'existence avérée de défaillances systémiques dans la procédure d'asile et les conditions d'accueil des demandeurs d'asile dans ce pays, qui est Etat membre de l'Union européenne et partie tant à la convention de Genève du 28 juillet 1951 sur le statut des réfugiés, complétée par le protocole de New York, qu'à la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales. Par suite, les moyens tirés de la violation des dispositions de l'article 3 du règlement du 26 juin 2013, de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et de l'erreur manifeste d'appréciation qui aurait été commise par le préfet doivent être écartés.
4. Par ailleurs, si le requérant soutient être en danger dans son pays d'origine, cette circonstance est inopérante dès lors que le Soudan n'est pas le pays de destination de la mesure de transfert.
5. Il résulte de ce qui précède que M. D... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Marseille a rejeté sa demande tendant à l'annulation des arrêtés du 21 mars 2018. Doivent être rejetées, par voie de conséquence, ses conclusions à fin d'injonction ainsi que celles tendant au bénéfice des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991.
D É C I D E :
Article 1er : La requête de M. D...est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. A...D..., au ministre de l'intérieur et à Me Callens.
Copie en sera adressée pour information au préfet des Bouches-du-Rhône.
Délibéré après l'audience du 26 février 2019, où siégeaient :
- Mme Buccafurri, présidente,
- Mme Simon, président-assesseur,
- Mme Lopa-Dufrenot, premier conseiller.
Lu en audience publique, le 12 mars 2019.
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N° 18MA02118