Les parties ont été informées, en application des dispositions de l'article R. 611-7 du code de justice administrative, de ce que la cour était susceptible de prononcer un non-lieu à statuer sur les conclusions à fin d'annulation de la décision de transfert, celle-ci n'étant plus susceptible d'être exécutée, dès lors que le délai de six mois prévu à l'article 29 du règlement (UE) n° 604/2013 du Parlement européen et du Conseil du 26 juin 2013, est expiré et que la France est devenue l'Etat membre responsable de l'examen de la demande de protection internationale présentée par MmeVissaitova.
La requête a été communiquée à Mme B..., qui n'a pas présenté de mémoire en défense.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la Constitution ;
- le règlement (UE) n° 604/2013 Parlement européen et du Conseil du 26 juin 2013 ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.
Le rapport de M. Dietenhoeffer, premier conseiller a été entendu au cours de l'audience publique.
Considérant ce qui suit :
1. Mme B... épouse A..., ressortissante russe, née en 1958, est entrée en France, selon ses déclarations, en février 2018, et a présenté une demande d'asile le 9 mars 2018. Par deux arrêtés du 22 mars 2018, le préfet du Bas-Rhin a décidé, d'une part, de remettre Mme B... aux autorités polonaises et, d'autre part, de l'assigner à résidence pour une durée de quarante-cinq jours. Par un jugement du 9 mai 2018, le magistrat désigné par la présidente du tribunal administratif de Strasbourg a annulé ces deux arrêtés et a enjoint au préfet du Bas-Rhin de délivrer à Mme B... un dossier de demande d'asile dans un délai de quinze jours à compter de la notification du jugement.
2. En premier lieu, aux termes du premier alinéa de l'article L. 742-3 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Sous réserve du second alinéa de l'article L. 742-1, l'étranger dont l'examen de la demande d'asile relève de la responsabilité d'un autre Etat peut faire l'objet d'un transfert vers l'Etat responsable de cet examen ". Aux termes du I de l'article L. 742-4 de ce code : " L'étranger qui a fait l'objet d'une décision de transfert mentionnée à l'article L. 742-3 peut, dans le délai de quinze jours à compter de la notification de cette décision, en demander l'annulation au président du tribunal administratif. / Le président ou le magistrat qu'il désigne à cette fin (...) statue dans un délai de quinze jours à compter de sa saisine (...) ". Aux termes du second alinéa de l'article L. 742-5 du même code : " La décision de transfert ne peut faire l'objet d'une exécution d'office ni avant l'expiration d'un délai de quinze jours ou, si une décision de placement en rétention prise en application de l'article L. 551-1 ou d'assignation à résidence prise en application de l'article L. 561-2 a été notifiée avec la décision de transfert, avant l'expiration d'un délai de quarante-huit heures, ni avant que le tribunal administratif ait statué, s'il a été saisi ". L'article L. 742-6 du même code prévoit enfin que : " Si la décision de transfert est annulée, il est immédiatement mis fin aux mesures de surveillance prévues au livre V. L'autorité administrative statue à nouveau sur le cas de l'intéressé ".
3. Il résulte de la combinaison de ces dispositions que l'introduction d'un recours devant le tribunal administratif contre la décision de transfert a pour effet d'interrompre le délai de six mois fixé à l'article 29 du règlement (UE) n° 604/2013, qui courait à compter de l'acceptation du transfert par l'Etat requis, délai qui recommence à courir intégralement à compter de la date à laquelle le jugement du tribunal administratif statuant au principal sur cette demande est notifié, quel que soit le sens de sa décision. Ni un appel ni le sursis à exécution du jugement accordé par le juge d'appel sur une demande présentée en application de l'article R. 811-15 du code de justice administrative n'ont pour effet d'interrompre ce nouveau délai. Son expiration a pour conséquence qu'en application des dispositions du paragraphe 2 de l'article 29 du règlement précité, l'Etat requérant devient responsable de l'examen de la demande de protection internationale.
4. Il ressort des pièces du dossier que l'arrêté du 22 mars 2018 par lequel le préfet du Bas-Rhin a ordonné le transfert de Mme B... vers la Pologne est intervenu moins de six mois après la décision par laquelle les autorités polonaises ont donné leur accord implicite pour sa reprise en charge, dans le délai d'exécution du transfert fixé par l'article 29 du règlement du 26 juin 2013. Ce délai a toutefois été interrompu par l'introduction, par Mme B..., de son recours présenté contre cette décision sur le fondement de l'article L. 742-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Un nouveau délai de six mois a commencé à courir à compter de la notification du jugement du tribunal administratif de Strasbourg du 9 mai 2018 qui a annulé la décision de transfert. Par ailleurs, il ne ressort d'aucune des pièces des dossiers que ce délai aurait été prolongé, en application des dispositions précitées du paragraphe 2 de l'article 29 du règlement du 26 juin 2013. Par suite, à la date du 10 novembre 2018, la France est devenue, de plein droit, responsable de l'examen de la demande de protection internationale de Mme B.... Il s'ensuit qu'à compter de cette date, le préfet du Bas-Rhin ne pouvait plus, en toute hypothèse, légalement se fonder sur l'arrêté contesté pour transférer Mme B... auprès des autorités polonaises. Par suite, les conclusions du préfet du Bas-Rhin tendant à l'annulation du jugement du 9 mai 2018 en tant qu'il annule la décision de transfert de Mme B... et enjoint de lui délivrer un dossier de demande d'asile sont devenues sans objet. Il n'y a, dès lors, pas lieu d'y statuer.
5. En deuxième lieu, si le préfet du Bas-Rhin demande l'annulation du jugement du 9 mai 2018 en tant qu'il annule l'arrêté portant assignation à résidence de Mme A..., il n'assortit ces conclusions d'aucun moyen. Celles-ci doivent, par suite, être rejetées.
6. En troisième lieu, Mme A... n'était pas partie perdante à l'instance devant le tribunal administratif de Strasbourg et par suite, les conclusions du préfet du Bas-Rhin tendant à l'annulation du jugement du 9 mai 2018 en tant qu'il a mis à la charge de l'Etat le versement à l'avocate de Mme A... d'une somme de 1 000 euros sur le fondement des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991, doivent être rejetées.
DECIDE :
Article 1er : Il n'y a pas lieu de statuer sur les conclusions de la requête du préfet du Bas-Rhin tendant à l'annulation du jugement du 9 mai 2018 en tant qu'il a annulé son arrêté de transfert du 22 mars 2018 et lui a enjoint de délivrer à Mme A... un dossier de demande d'asile.
Article 2 : Le surplus de la requête du préfet du Bas-Rhin est rejeté.
Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à Mme C... A... née B... et au ministre de l'intérieur.
Copie en sera adressée au préfet du Bas-Rhin.
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N° 18NC01666